A la concession BYD de Rennes

La marque chinoise BYD m’interpelle depuis la création de son usine d’autobus électriques tout près de Beauvais en 2018. Je souhaitais découvrir ses modèles de voitures branchées et savoir pourquoi un groupe automobile a choisi de représenter cette gamme en Bretagne. Pour me recevoir, Antoine Bourdy, responsable des ventes chez Electrik Automobile du groupe Bodemer, et lecteur d’Automobile Propre.

Rappel historique

L’arrivée en France et ailleurs en Europe des constructeurs chinois inquiète bon nombre de nos lecteurs, d’automobilistes et de citoyens. Tentant une percée assez tôt, BYD se distingue par sa stratégie d’implantation qui comprend depuis le départ la création d’emplois ainsi qu’une participation à la vie locale et à celle du pays.

Par exemple en offrant 150 000 masques contre le Covid à Ile-de-France Mobilité en mai 2020. Les cartons avaient été acheminés sur place par un autobus électrique construit à Beauvais, dans l’Oise. Autre point à savoir : BYD avait accepté l’idée de ne percevoir les subventions de l’agglomération pour la création d’emplois qu’en parvenant à réunir un effectif d’au minimum cent salariés. Un seuil jamais atteint en raison de commandes trop rares.

Jouant le jeu, l’industriel asiatique espérait simplement placer un volume important de ses bus, notamment auprès de la RATP. Sans suites satisfaisantes. Autre camouflet, c’est le concurrent Yutong qui a été choisi pour le premier Flixbus électrique dont le trajet entre Paris et Amiens le faisait passer tout à proximité de l’usine française de BYD.

Hongrie

De guerre lasse, la marque a déménagé à Komárom, en Hongrie, son activité pour l’Europe. Il ne fallait donc pas espérer que l’usine de voitures électriques soit localisée dans notre pays. C’est également la Hongrie qui va bénéficier de la nouvelle unité. Elle sera lancée à Szeged, à environ 250 km de la première en passant par Budapest. « Cette implantation est parfaite pour pouvoir acheminer les voitures électriques dans toute l’Europe par le rail et la route », commente Antoine Bourdy.

A noter qu’aux Etats-Unis, BYD a aussi ouvert une usine d’autobus qui livre des modèles très convaincants pour le transport scolaire, dotés de la technologie V2G.

En 2015, le constructeur chinois avait essayé d’introduire en France son best-seller de l’époque, l’e6, dans la lignée d’une tentative outre-Manche pour placer ce SUV électrique comme taxi. Seulement quelques unités avaient été immatriculées dans l’Hexagone. Désormais, c’est toute une gamme qui est disponible en France depuis quelques mois : « C’est étonnant pour un constructeur qui se lance sur un marché de proposer déjà six modèles différents ».

Electrik Automobile

En arrivant à la concession de Rennes, très visible rue Eugène Pottier par les clients du magasin Leclerc de Cleunay, nous attendaient les BYD Han, Seal, Atto 3, Dolphin et l’utilitaire ETP3 : « Il ne manque que le SUV 7 places Tang. Nous avons déjà vendu tous les exemplaires que nous avions et allons en recevoir de nouveaux d’ici quelques jours ».

Le nom de la concession « Electrik Automobile » affiche d’entrée de jeu l’énergie qui anime tous ces modèles. Elle dépend du groupe familial Bodemer, très connu en Bretagne après un peu plus de cent ans d’existence. Antoine Bourdy participe à son aventure depuis déjà quelques années : « J’y suis depuis huit ans. J’étais auparavant responsable du marketing pour le groupe très implanté dans les quatre départements bretons ainsi qu’en Normandie dans l’Orne, la Manche et la Calvados. Il distribue les marques Renault, Nissan, Dacia et Alpine ».

En représentant désormais la marque chinoise, le groupe Bodemer va étendre son influence en Loire-Atlantique et dans le Maine-et-Loire : « Il est déjà présent à Angers et Nantes à travers ses agences de location BLC Automotive ».

La volonté d’ajouter une nouvelle marque

Avec BYD, « le groupe Bodemer voulait s’occuper d’une nouvelle marque. La direction du groupe a eu l’opportunité d’échanger avec celle du constructeur. Elle a constaté son potentiel et sa volonté de se développer de façon pérenne en France et en Europe. La prochaine ouverture de l’usine en Hongrie et la commande de bateaux pour transporter ses voitures le prouvent. C’est le plus gros constructeur de véhicules électriques au niveau mondial, et le quatrième toutes énergies confondues en venant de dépasser Ford ».

Auparavant, il fallait passer par l’unique point de vente ByMyCar à Paris pour commander et recevoir une BYD : « Puis il y a eu Strasbourg tout juste avant nous. A Rennes, l’inauguration a eu lieu le jeudi 5 octobre 2023. A date, en France, il y vingt points de vente BYD. Bodemer a ajouté Brest le 12 décembre suivant. A Nantes, l’ouverture approche et l’équipe est déjà en place. Un peu plus tard cette année 2024, le groupe va lancer les sites de Saint-Brieuc, Lorient et Angers ».

Les premières ventes

A Rennes, les ventes sont déjà bien parties : « Depuis l’ouverture, nous avons vendu environ 75 véhicules à des particuliers, et autant auprès de professionnels. Concernant ces derniers, c’est pour électrifier leurs parcs. Souvent en commençant par les véhicules de direction avec les modèles Han et Seal qui emportent aussi la préférence des taxis. Les loueurs, en revanche, en contrat avec le constructeur, prennent principalement le SUV Atto 3. Avec la ZFE de Nantes et bientôt celle de Rennes, l’utilitaire ETP3 d’un volume de 3,5 m3 est choisi pour les entreprises de nettoiement, du BTP et de la livraison du dernier kilomètre ».

Antoine Bourdy a déjà constaté un changement d’intérêt de la part des clients concernant les modèles : « Au début, la préférence allait au petit SUV Atto 3. C’est un peu normal puisque c’est le premier que nous avons lancé. Maintenant, c’est la berline Seal qui est la plus vendue ».

Comment positionner la marque BYD ? « Elle est un peu à cheval entre deux mondes du fait de sa gamme assez vaste pour répondre à tous les besoins. C’est peut-être un peu curieux de le dire comme cela, mais je la vois comme une marque généraliste premium, avec en entrée de gamme la Dolphin et l’Atto 3 à moins de 40 000 euros et, à l’autre bout, le SUV 7 places Tang à 70 800 euros. Les BYD ne sont ni les moins ni les plus chères des voitures électriques. Elles apportent un niveau d’équipement premium pour des prix de marques généralistes ».

Le confort et la technologie pour différences

Pour faire la différence avec la concurrence, Antoine Bourdy met déjà en avant les choix technologiques originaux : « Par exemple les batteries LFP [NDLR : Lithium, phosphate de fer] à lames moins encombrantes et dont les cellules peuvent être percées sans exploser ni s’enflammer. Elles ont déjà été choisies par Tesla pour les Model Y et par Mercedes pour ses prochains modèles ».

Il y a aussi la nouvelle plateforme : « C’est la E-Platform 3.0 sur laquelle s’appuient l’Atto 3 et la Seal. Avant, on mettait les éléments de la batterie où l’on pouvait. Avec cette base, les voitures sont dessinées autour de l’emplacement du pack. Ce qui est bénéfique au dynamisme et à la sécurité ».

Le confort, j’ai pu l’expérimenter moi-même en roulant dans la Seal. Sa suspension filtre très bien les aspérités de la route : « Lors d’un événement où nous étions avec Tesla, nous nous sommes fait mutuellement découvrir nos voitures. Nous avons reconnu la supériorité des performances de leurs modèles, et eux le confort des nôtres. Au bout de 600 km, on arrivera certainement plus frais à destination avec une Han qu’avec une Model S ».

Vrai ou faux ?

En me rendant à la concession de Rennes, je voulais vérifier le très bon perçu de la qualité des modèles BYD par le journaliste Maxime Fontanier dont j’ai retranscrit par écrit plusieurs vidéos d’essai. Son avis est déjà partagé par quelques-uns de nos lecteurs, dont Olivier qui a abandonné Mercedes pour une Seal et Claude qui a choisi un Tang pour succéder à quatre Audi A4. Assis au volant des Han, Seal et Atto 3, je voulais constater ce que l’on peut ressentir à bord de ces modèles.

La magie a opéré de suite. On a vraiment l’impression d’être dans des voitures très abouties et très bien finies. Dans toutes, en reposant le bras sur l’accoudoir, le sélecteur de marche tombe automatiquement et parfaitement au creux de la main. Olivier et Claude ont tous les deux spontanément évoqué la douceur des matériaux, en particulier sur le tableau de bord.

Au bout de plusieurs centaines d’interviews pour plusieurs médias, c’était la première fois que je recevais un tel témoignage. Et de plus à quelques jours d’intervalle. C’est ce revêtement que j’ai pu découvrir et qui fait penser à de l’alcantara. « C’est du cuir végétal, avec un aspect au toucher entre le cuir et le velours », m’explique Antoine Bourdy.

Style : Tesla face à BYD

Face au style des Tesla Model S et Model 3, les lignes et la présentation intérieure des BYD Han et Seal qu’on peut leur opposer sont-elles convaincantes ? Oui, clairement oui, au point de susciter l’envie de découvrir ensuite leur comportement sur route. Assis à bord de ces deux voitures, à aucun moment je ne me suis dit que j’étais dans un modèle chinois, ne me correspondant pas, ou mal réalisé. Au contraire, comme les automobilistes qui ont déjà signé pour ces modèles, j’ai perçu une immédiate sensation de confort, de qualité et d’être dans un univers que je comprends.

Déjà dans la Han, mais bien davantage encore dans la Seal où l’on a un vrai afficheur pour l’instrumentation et un commodo très intuitif pour les clignotants. Ce qui joue très positivement sur le sentiment de sécurité. « On voit qu’elle est conçue pour l’Europe », me fait remarquer Antoine Bourdy. Pas plus de hayon pour la BYD Seal qu’avec la Tesla Model 3, mais une trappe à skis.

Les passagers sont en outre très bien traités dans ces voitures : « Les sièges électriques sont enveloppants, chauffants et ventilés. Le confort est également ressenti par ceux assis à l’arrière ». Dans la Han, ils auront un espace fabuleux. Constatant l’insonorisation en roulant dans la Seal, je remarque que les informations sur l’écran central rotatif sont bien en français. Claude se plaignait qu’elles soient en anglais sur son Tang : « Oui, c’est encore le cas sur ce gros SUV, mais plus pour longtemps. En revanche, pour tous les autres modèles, c’est déjà en français ».

Atto 3 et Dolphin

Impression également très positive dans l’Atto 3 où j’ai découvert des peintures extérieures et une qualité de matériaux à bord qu’on ne s’imagine pas forcément sur photos et en visionnant les vidéos d’essai.

Ce loquet qui ouvre de l’intérieur la porte et me fait penser en mieux à celui des Citroën Ami 8 des seventies, ce décor en forme de guitare pour la grille de haut-parleur et le vide-poche, ces poignées chromées qui ressemblent à de grosses clés plates de mécanicien, ce tableau de bord en vague, le petit afficheur d’instrumentation, le sélecteur de marche façon avion de ligne : ça matche finalement mieux en réel.

J’ai moins été séduit par l’intérieur de la compacte Dolphin qu’on croirait au format d’une Renault Zoé alors qu’elle dépasse de presque dix centimètres la longueur d’une Megane E-Tech. Les goûts et les couleurs… : « C’est le modèle le mieux placé dans la gamme. Avec une autonomie de 427 km, son prix est de 33 990 euros en finition Confort et 35 990 euros en Design ».

Autres exemples de tarifs

Seulement 2 000 euros d’écart entre les deux finitions de Dolphin ? « Oui, car dès l’entrée de gamme les BYD sont très bien équipées, avec, selon les modèles, le V2L et la pompe à chaleur de série. Sur la Dolphin, la version Design apporte en plus le chargeur à induction, le toit panoramique et la peinture biton ». Elle est aussi disponible en LLD via un partenariat avec CGI Finance, filiale de la Société Générale : « A partir de 199 euros de loyer mensuel sur 49 mois, pour 10 000 km par an, et un premier versement de 3 000 euros ».

Il y a en revanche 3 000 euros d’écart entre les deux versions de Seal : « Pour 46 990 euros, on a le modèle Propulsion de 313 ch et 570 km d’autonomie. Sur la même durée et avec le même kilométrage annuel, elle est en LLD à partir de 499 euros de loyer mensuel et un premier versement de 4 000 euros. Avec la version Excellence, le conducteur gagne la motricité intégrale et une puissance de 500 ch. L’autonomie baisse toutefois à 530 km ».

Les voitures électriques BYD ne sont pas éligibles au bonus gouvernemental 2024 : « S’il existe encore dans quelques années, ça pourrait changer avec la fabrication en Hongrie. En attendant, nous effectuons des remises pour compenser ».

Clientèle

La clientèle d’Electrik Automobile est très diversifiée : « Les clients ont eu connaissance de l’ouverture de la concession par une communication dans la presse locale au lancement, les réseaux sociaux, notre site Internet et la bonne visibilité sur la concession depuis une route très fréquentée. Ils sont en général très bien informés des modèles BYD, roulent déjà en voiture électrique où souhaitent le faire ».

Antoine Bourdy sait se mettre à la place du client, même celui qui n’a pas de moyen pour recharger chez lui : « C’est d’ailleurs mon cas. Ce qui ne m’empêche par de parcourir tous les mois environ 3 800 km. Avant tout, nous cherchons à comprendre le besoin du client avant de lui vendre une voiture. Ce qui passe justement par ses possibilités de recharge et la longueur des trajets du quotidien. Nous le rassurons en envisageant des solutions ».

Notre interlocuteur est déjà satisfait des premiers chiffres : « Sur Rennes, nous avons un taux de commandes de 8 à 9 % sur l’ensemble des contacts qui ont été pris à la concession, via notre site Internet et celui du constructeur. Ce qui montre que les clients sont conquis par les produits ».

Les choses se mettent en place

Nouvelle concession, nouvelle marque en France, ça ne se bouscule pas aujourd’hui pour venir à l’atelier : « Chaque concession aura son espace dédié. Ici, nous avons déjà l’outillage nécessaire. Dans un premier temps, deux techniciens volants tournent sur les départements où nous sommes implantés ».

Le responsable des ventes chez Electrik Automobile a identifié des actions à entreprendre : « Par rapport à une autre marque, nous avons encore tout un travail de notoriété à réaliser pour faire davantage connaître BYD sur le territoire. A destination de ceux qui achèteront une voiture électrique chez nous, nous sommes en train de finaliser une offre d’installation de borne au domicile. Actuellement, nous les dirigeons vers des partenaires locaux et préconisons le badge Chargemap pour les longs déplacements ».

Développement de la gamme

Avant de venir à la concession, les clients potentiels sont déjà bien informés des prochains modèles qui arriveront : « Déjà, le Tang va être renouvelé et la berline Seal va être réinterprétée en Seal U. Le premier est un SUV 7 places qui était déjà sur le marché et qui va bénéficier d’un renouvellement complet. Le second sera un SUV 5 places inspiré de l’actuelle berline Seal orienté confort et technologie ».

Des utilitaires aussi sont à venir : « Pas de GPS, une vitesse de pointe de 110 km/h, une autonomie de 233 km : l’ETP3, un peu plus petit que le Nissan e-NV200, est encore un peu limité. Mais son prix avec notre remise est de 23 990 euros hors taxe. Sont prévus dans quelques années des modèles de 5-6 et 13-17 m3 correspondant respectivement à des Renault Trafic et Master ».

Ce n’est pas tout : « Le constructeur a de grandes ambitions pour la France et l’Europe. Il va introduire dans quelques années deux autres marques : Denza pour des modèles typés sport, et Yangwang pour des voitures luxueuses ».

Automobile Propre et moi-même remercions beaucoup Antoine Bourdy pour son accueil, sa confiance et le temps passé à nous présenter le réseau BYD en cours de création dans l’ouest.