Lancée au début des années 2000 sur un marché de la voiture électrique qui connaissait ses balbutiements, la marque Tesla a réussi à prendre un avantage non négligeable sur la concurrence pendant des années. Face à des rivaux de plus en plus nombreux, elle va toutefois devoir réussir à conserver son avance.

Le développement initial de Tesla a été la pierre angulaire de l’avantage que la firme conserve encore. La concurrence, quant à elle, embrassait timidement l’électrique en se tournant d’abord vers l’hybride. Laissant ainsi la voie libre au constructeur, seul à proposer une gamme 100 % électrique de voitures.

Selon la philosophie de la marque, et après avoir lancé le roadster dans un très faible nombre d’exemplaires, Tesla a ensuite conçu son premier modèle de série. Il fallait une voiture électrique pouvant fixer de nouveaux standards. Mais aussi un véhicule capable d’attirer du public, tout en étant sur des tarifs supérieurs au premium, en jouant davantage sur la carte du luxe.

L’industrialisation de Tesla a eu lieu dès 2012

C’est ainsi qu’est née la Tesla Model S, une berline offrant dès sa commercialisation une autonomie très nettement supérieure à la concurrence, et des performances alors hors du commun. Affichée sous les 100 000 euros dans sa version initiale, elle a rapidement évolué dans différentes versions.

Grâce aux progrès rapides de Tesla sur sa technologie de batteries et aux mises à jour à distance, la Model S a su se faire une place. Par la même occasion, elle a ancré la position de la firme sur le marché.

Ensuite, le constructeur américain a exploité sa plateforme pour un autre modèle, un SUV électrique. C’était sa volonté de se placer sur un deuxième segment, donnant naissance au Model X.

Une Model 3 porteuse de tous les espoirs

Malgré ces deux modèles et un public conquis plus large, il manquait encore à Tesla la possibilité de toucher de potentiels clients cherchant une voiture électrique abordable. C’est ainsi qu’en 2019 la Model 3 a fait son entrée sur le marché.

Son constructeur voulait l’afficher à un prix avoisinant les 35 000 dollars. Il y est parvenu aux Etats-Unis. En France, elle a débuté à un tarif plus élevé, avant de baisser progressivement. Peu importe : Tesla avait sorti sa voiture électrique abordable.

En moins de dix ans, l’automobile selon Tesla était devenue réalité, et la firme abordait le virage de la transition vers l’électrique avec un sérieux coup d’avance sur la concurrence. Pour poursuivre sa domination sur l’ensemble des segments, la marque commercialisait un peu plus tard le Model Y, un SUV électrique dérivé de la Model 3.

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Une domination qui passe aussi par les infrastructures

Près de dix ans après la sortie de la Model S, Tesla surfe toujours sur ses avantages et ses acquis. Le constructeur américain domine pour le moment le marché mondial de la voiture électrique. Il est en effet le seul à avoir une gamme branchée aussi diversifiée.

C’est ce qu’avait prévu Elon Musk dans son fameux Master Plan, dont la première partie se terminait en 2016. Le milliardaire souhaitait ainsi industrialiser sa marque avant que les concurrents ne reviennent grâce à leur puissance industrielle.

C’est ce qu’il a fait avec les Gigafactories dans lesquelles sont fabriquées à la fois les voitures et les batteries. Après un rachat d’usine à General Motors pour constituer sa première base, la firme a développé ses propres unités de production.

Deux de ces sites monumentaux ont vu le jour aux Etats-Unis, dans le Nevada et l’Etat de New York. Les Gigafactories construites en dehors du territoire américain sont celles de Shanghai et à proximité de Berlin.

Le tout permet à Tesla, qui élève une cinquième usine au Texas, d’industrialiser son concept de voiture électrique dans le monde entier. Et ainsi de moins dépendre des différentes lourdeurs logistiques de l’exportation vers l’Asie et l’Europe.

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Les Superchargeurs, carburant du leadership de Tesla

Compte tenu des investissements et de la recherche nécessaires à l’électrification, les autres constructeurs ont mis du temps à rattraper Tesla, en dépit des moyens colossaux alignés.

Mais cette tendance arrive enfin, puisque de nombreux constructeurs historiques, à l’image de Ford, Volkswagen ou plus récemment Renault, ont prévu de construire des Gigafactories et de lancer de nombreux modèles de véhicules électriques. C’est également le cas de Stellantis, qui croit en l’électrification au-delà du scepticisme de son dirigeant Carlos Tavares.

Forcément, les atouts de Tesla ne sont plus tous aussi avantageux qu’ils l’étaient par le passé, la concurrence travaillant d’arrache-pied pour combler son retard. Mais certains restent évidemment des pièces maîtresses dans l’échiquier d’Elon Musk.

C’est le cas des Superchargeurs, les bornes de recharge rapide conçues en interne pour les clients. Depuis leur mise en service en 2012, les stations de la marque ne cessent de se développer dans le monde.

Un cadeau à la concurrence pour faire avancer la voiture électrique

Ainsi, on compte 3 000 stations badgées Tesla sur la planète, réunissant environ 27 000 points de charge. Les Superchargeurs proposant une recharge rapide, Elon Musk n’a jamais voulu les ouvrir à la concurrence. Ce qui en fait un de ses atouts essentiels.

Leur exclusivité pour les clients de la marque va cependant disparaître. Le boss a confirmé qu’il souhaitait les démocratiser dès la fin d’année 2021. Sa firme était en effet sous la pression des gouvernements et des autorités qui l’appelaient à ouvrir ses bornes à la concurrence afin d’aider à développer les réseaux.

Globalement, les infrastructures de recharge sont trop faibles dans l’ensemble des pays d’Europe et du monde. Et le coup d’avance dont dispose Tesla à ce sujet n’est pas passé inaperçu. Aussi, il a souvent été demandé au constructeur de participer à l’effort d’électrification mondiale en ajoutant ses Superchargeurs sur la carte de tous les utilisateurs de voitures électriques. Ce scénario va devenir une réalité, et des défis nouveaux vont se présenter au constructeur à ce sujet.

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L’offre globale de Tesla remise en cause ?

La perte de l’exclusivité d’exploitation pourrait-elle être la chute du premier bastion de Tesla sur le marché de la voiture électrique ? Il y a évidemment de quoi le craindre, puisque c’est ce qui formait la pierre angulaire du concept de la marque.

Musk a toujours souhaité fonctionner de manière unique pour ses clients, en proposant des voitures électriques et le service les accompagnant. Evidemment, perdre cet avantage pourrait avoir comme fâcheuse conséquence de rendre les Tesla moins attractives à l’avenir.

Elles seraient en effet au même niveau que la concurrence sur le plan de la recharge. Cela compliquerait la donne pour les propriétaires de Model S, Model X, Model 3 et Model Y. Néanmoins, les contours d’une telle opération restent encore à définir.

Tesla a des solutions pour conserver son avantage

En se positionnant comme allié du marché global de l’automobile électrique, Tesla aurait certainement voix au chapitre concernant l’exploitation des Superchargeurs. Ce qui permettrait peut-être à la firme de conserver des avantages.

On peut notamment penser que les propriétaires des voitures électriques de la marque bénéficieraient d’un accès prioritaire aux bornes en les réservant à l’avance. Ou, comme pour la recharge à destination, le constructeur négocierait l’ouverture d’une partie seulement de ses stations à la concurrence.

Enfin, le prix constituerait aussi un curseur que la marque d’Elon Musk aurait intérêt à activer. En cas de libération de ses bornes au profit de tous les automobilistes, l’entreprise pourrait décider de faire payer plus cher les utilisateurs des modèles produits par la concurrence.

Musk peut-il miser sur l’Autopilot ?

Pour conserver sa supériorité sur le marché, Tesla pourrait également actionner d’autres leviers encore. En effet, la marque affirme être bien placée dans la course à la voiture autonome.

Malgré les doutes de certains directeurs de la maison, qui craignent un travail plus important que prévu, Elon Musk assure que l’entreprise se dirige rapidement vers un autopilotage de niveau 5.

En se plaçant devant la concurrence sur les technologies dédiées, Tesla pourrait regagner au fil de la décennie son avantage lorsque les différentes autorités autoriseront la circulation sur les routes des voitures entièrement autonomes.

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Cybertruck et Semi : une offre plus variée que la concurrence

Un autre atout pour Tesla afin de briller sur le marché global des véhicules électriques est la diversité de ses modèles à venir. Outre les deux berlines et les deux SUV, il planche sur trois autres engins cruciaux pour son futur.

Le Cybertruck a défrayé la chronique lors de sa présentation, et le public s’impatiente d’en découvrir la version finale. En plus de son design unique, le pickup embarquera les nouvelles cellules de batteries 4680 maison. Celles-ci le doteront d’une autonomie allant jusqu’à 800 kilomètres.

Des cellules qui formeront aussi un des principaux composants du Tesla Semi. Le tracteur routier est déjà en phase de tests depuis plusieurs mois, apportant de belles perspectives à la firme. Il lui ouvrira en effet une place de choix sur le marché des entreprises.

Le Tesla Roadster sera lui aussi important pour le constructeur qui reviendra à ses origines avec un modèle produit en faible série. Le petit coupé électrique sera en effet un modèle élitiste, destiné à une clientèle moins nombreuse.

La firme connaît aujourd’hui sa période la plus faste, avec un record de ventes début 2021. Néanmoins, les prochaines années pourraient constituer un défi de taille, face à l’arrivée de tous les grands groupes sur le marché de l’électrique.

Le constructeur possède cependant plusieurs cartes dans sa main, qu’il pourrait abattre au fil des prochains exercices. En faisant cela, il profiterait des pions qu’il a placés depuis dix ans pour rester un pionnier de l’automobile du XXIe siècle.