Alors que Renault vient d’annoncer l’arrêt de la production de sa citadine électrique emblématique, Revolte veut que les moyens soient enfin donnés à la filière de la réparation pour faire durer les exemplaires en circulation. Et pas seulement pour la Zoé.
Freins administratifs et commerciaux
Pour Revolte, les freins qui empêchent aujourd’hui de bien réparer et faire évoluer les Renault Zoé et d’autres modèles de voitures électriques sont « purement administratifs et commerciaux ». Cette situation est néfaste au développement de la mobilité branchée qui doit encore faire ses preuves auprès d’un grand nombre d’automobilistes toujours dubitatifs sur sa pérennité et ses vertus.
Après la vision de centaines de Bolloré Bluecar s’entassant sur un terrain et diffusée en particulier sur le Net, il manquerait plus que les Zoé remplissent les casses au prétexte qu’il ne serait pas possible ou intéressant de les réparer. Actuellement, en cas de gros problème sur un organe électrique ou électronique vital, les devis présentés par le réseau du Losange présentent encore trop souvent des montants prohibitifs.
Ils sont de plus en plus susceptibles de dépasser la valeur d’occasion des premiers modèles commercialisés. Et ce, en raison du remplacement d’un système complet, alors que dans bien des cas il suffirait de changer un simple composant ne valant que quelques dizaines ou centaines d’euros.
Une situation lourde de conséquences
Le manque de réparabilité des voitures électriques pose des problèmes majeurs qui ne sont pas sans conséquences sur le façonnage du parc roulant électrique dans l’Hexagone. Signifiant quasiment l’abandon de véhicules pourtant en parfait état globalement à l’exception de l’organe touché, la situation impose aux électromobilistes concernés de trouver un autre modèle neuf.
Et c’est actuellement dans un contexte où l’offre chinoise qui se développe ne trouve pas encore en France suffisamment de concurrence à ses tarifs. D’où un poids du mauvais côté sur la balance commerciale de notre pays. Ce qui est accentué par le fait que ces anciennes Zoé ou autres voitures électriques qui approchent ou ont dépassé les dix ans formeraient un marché de l’occasion accessible à davantage d’automobilistes qui vont par défaut continuer à rouler à l’essence ou au gazole.
De quoi retarder la mutation de la voiture individuelle vers la mobilité durable et l’atteinte des objectifs carbone. Double inconvénient également du côté des zones à faibles émissions (ZFE). Des automobilistes vont s’en retrouver exclus sur le papier, mais pas forcément sur le terrain, au détriment de la santé des personnes qui vivent dans ces territoires.
Verrous sur les pièces détachées
Qu’est-ce qui empêche aujourd’hui Revolte et potentiellement nombre de garagistes indépendants à réparer les voitures électriques ? Tout simplement la disponibilité des pièces détachées auprès des constructeurs. Souvent, il serait possible d’en utiliser d’autres mais « le réparateur n’est pas libre de trouver une pièce lui-même de qualité équivalente ».
S’il le faisait quand même, « le véhicule serait alors considéré comme modifié et perdrait son homologation ». Rien que pour la Renault Zoé, l’enjeu est d’importance puisque ce modèle a été produit à près de 420 000 exemplaires depuis sont arrivée en 2013 sur les routes françaises.
Son architecture comprend moins de pièces, justifiant une maintenance allégée. Ce qui plaide normalement pour la durabilité de cette citadine : « Chez Revolte, nous considérons que cette simplicité est un immense atout pour que ces véhicules continuent à circuler des dizaines d’années, à condition de s’en donner les moyens ».
Réparer… et améliorer
En un peu plus de dix ans, des progrès importants ont été réalisés sur les diverses technologies embarquées dans les véhicules électriques. Ce sont eux en grande partie qui complexifient la réparation. Ainsi avec la batterie. Avec l’épuisement des stocks, les Zoé à pack 22 kWh sorties de la garantie ne pourront plus très longtemps être maintenues. C’est déjà là qu’il faut principalement trouver la raison de la disparition de la Renault Fluence ZE.
Le combat que Revolte entend mener avec la complicité d’associations d’usagers comme la Ffauve et le e-France Café comprend la possibilité d’améliorer les anciennes voitures électriques en profitant de ce qui est aujourd’hui disponible.
Par exemple, une Citroën C-Zero pourrait retrouver de l’intérêt et de la valeur en étant dotée d’une autonomie de 250 ou 300 km à la place de 135 ou 150. Il serait possible également d’imaginer un upgrade des chargeurs avec une courbe de puissance améliorée et conforme tout en étant compatible avec le pack lithium-ion embarqué.
Laissons parler un peu notre imagination
Ne figurant pas explicitement dans le communiqué de presse émis par Revolte en date du 28 mars 2024, la liste des améliorations est potentiellement longue et franchement enthousiasmante : Moteur plus silencieux et accumulateurs moins contraignants dans les Citroën e-Méhari et les Bolloré dont elle dérive, ajout du V2L, pack mieux refroidi dans la Nissan Leaf de deuxième génération, redémarrage et fiabilisation des Mia, etc.
Tout cela au bénéfice de l’empreinte carbone et sans poser de problèmes de sécurité. Notre pays « dispose des solutions technologiques, du savoir-faire et d’une ambition gouvernementale affichée sur la décarbonation de notre flotte nationale », plaide Revolte qui compte avec lui près de 200 garages prêts à opérer à organes ouverts dans les véhicules électriques.
« La France a su être leader sur le véhicule électrique neuf, elle doit continuer à l’être et en même temps devenir experte sur le maintien à un haut niveau de performance de son parc de voitures électriques », poursuit l’entreprise.
Revolte est bien décidé à engager le dialogue avec les autorités publiques pour lever les freins administratifs et commerciaux qui bloquent la durabilité des VE.
Il est clair que de donner les coudées franches à Revolte, à son réseau et aux structures similaires concernant la réparation et l’amélioration des voitures électriques crédibiliserait nettement la filière électromobile.
Alors que ce n’est pas le cas pour les trottinettes, les vélos et les scooters, les VE continuent de susciter auprès de automobilistes une certaine crainte au sujet de la pérennité des véhicules.
Les études montrent que l’impact carbone des voitures électriques peut être améliorée en suivant plusieurs pistes : seconde vie des batteries, matériaux moins sensibles, origine de l’électricité à la construction et à l’utilisation, etc. La durabilité et la réparabilité sont souvent sous-entendues comme acquises sur le papier. Les remontés du terrain sont autres.
En outre, nos lecteurs sont encore trop nombreux à témoigner pour certaines marques des difficultés, voire de l’incompétence des réseaux classiques à détecter certaines pannes. Et encore davantage à présenter un devis correct garanti. Les constructeurs auraient tout intérêt à ce que les garages spécialisés indépendants se développent, les libérant d’une source importante de mécontentements.
Deux remarques sur cet article:
– « De quoi retarder la mutation de la voiture individuelle vers la mobilité durable »: cette phrase est soit maladroite soit issue d’une méconnaissance totale de ce qu’est la mobilité durable.
– c’est drôle qu’on ne parle pas ici des Tesla dont les batteries sont irréparables et très difficilement recyclables.
Renault a réussi à démocratiser le véhicule électrique avec une Zoé 52 kWh qui offre un bon compromis autonomie, confort et fiabilité. Mais le dépannage est une vraie catastrophe avec une majorité de concessions qui ne veulent ou ne savent pas faire, et des prix de pièces stratosphériques pour la partie électrique qui incitent à jeter le véhicule plutôt que le réparer. L’état qui a largement subventionné ce véhicule devrait être informé de cette situation.
Article sur du réel et dans l’intérêt direct du lecteur, c’est bienvenu !
L’exemple de la Zoé est judicieux. C’est le premier véhicule électrique de grande diffusion (les triplettes Peugeot/Citroën/Mitsu annonçaient la couleur, c’était un choix d’achat clair que l’électrique, alors que la Zoé était pour tout le monde). Donc pas mal de monde va venir auprès de son garagiste en demandant que sa Zoé soit réparable comme l’état sa Clio ou sa 206.
Pour les batteries, vu la facilité avec laquelle on peut les changer sur Zoé, ça serait bien que l’administration permette le changement pour une batterie moderne de plus grande capacité (du moment qu’elle fait le même poids).
Par contre avec les voitures électriques et même les autres, va venir un élément d’obsolescence qui va être difficile à maîtriser pour les garagistes et les possesseurs de véhicules anciens: la mise à jour du système embarqué.
Ça va faire comme les ordinateurs et les téléphones: il va y avoir des failles de sécurité (ex: si le mécanisme de clé sur téléphone des Tesla est piraté et que Tesla ne met pas à jour les plus anciennes Model S ou X, les assureurs vont vouloir différencier les véhicules) et les constructeurs ne vont évidemment pas partager le code source pour permettre à des tiers de boucher les failles de sécurité. Donc les voitures pourront être non-assurables si elles ne possèdent pas un OS à jour.
Ou pire, les constructeurs vont bien mettre à jour les OS pour les véhicules jusqu’à dix ans d’ancienneté, mais sans optimiser quoi que ce soit: ce qui fera que les interactions sur l’écran tactiles seront lentes au point que l’écran sera inutilisable.
Oui, il faut faire bouger les choses. Les nouvelles directives UE obligent tous les fabricants à la réparabilité de leurs produits. Appliquées au monde automobile et pour des raisons de sécurité (du moins en France), il faut que cela puisse aussi se faire par des garages spécialisés et dûment agréés par l’Etat. Il faut aussi que ces garages puissent avoir accès aux pièces (dites de seconde monte) et leur documentation technique associée, directement auprès des fournisseurs du constructeur. On souscrit donc à la demande de Revolte.
Pour éviter d’avoir des VE jetables, on pourrait imaginer un marché de la batterie homologué avec de future densités plus importantes en énergie et pouvoir remplacer sa vielle batterie en plus des dépannages.
Il y a tellement à faire et ca pourrait pérenniser l’emplois des électromécaniciens après formation des mécaniciens.
Hormis Revolte, on ne vois pas beaucoup le gouvernement et les constructeurs aller dans ce sens et après ça parle d’écologie.
Je pense qu’une pétition sur le sujet pourrait aider à faire bouger les choses.
M’ouais, c’est pas gagné !
Les constructeurs sont souvent très prompts à demander aides, à faire du chantage à l’emploi, à vouloir des primes à l’achat mais dès lors qu’il s’agit de toucher à l’obsolescence de leur véhicules, ils ont tendance à vite monter sur leurs grands chevaux.
Déjà qu’ils ont mis des clauses intolérables au rétrofit de leurs productions antérieures, leur demander de pouvoir réparer ou prolonger la vie de véhicules récents… il ne faut pas trop se faire de films.
La loi est mal faite et protège plus le constructeur que le consommateur.
Dès lors que la péremption de garantie est consommée, le consommateur devrait avoir sans aucune réserve, le droit d’intervenir sur son véhicule comme bon lui semble.
L’obsolescence programmée, le chantage à l’emploi, c’est bon ! Ce n’est pas rendre service à nos constructeurs que de les autoriser à user de prérogatives abusives.
Les chouchouter ça les affaiblit face aux menaces à venir.
Est ce qu’il y aurait une pétition quelque part à signer ?
existe t il une lettre type à envoyer à son député ? à son sénateur ?
Oui, la Renaulution, c’est pour l’instant davantage un concept marketing qu’une vraie ambition de durabilité.
Mon pov’ Monsieur, les bougies de préchauffage de vot’ moteur diesel sont foutues, il va falloir remplacer tout le moteur! C’est un peu à ce niveau de compétence qu’en est la réparation des VE. Sauf chez Revolte évidemment.
https://www.automobile-propre.com/renault-accelere-dans-le-reconditionnement-de-pieces-pour-les-voitures-electriques/
ya plus ka ;)
Revolte ! Votre démarche est vraiment top. 👍. Je viens d’acquérir un VE d’occasion (ioniq 28, 5ans et 45000km), j’espère vraiment la faire durer (au moins 10-15 ans), et clairement l’existence de Révolte garage et leur slogan disant vouloir faire durer les VE 100ans 😊 est rentrer dans les arguments pour me faire basculer vers l’électrique.
C’est un sujet important, la durée de vie d’un Ve doit absolument atteindre et dépasser les 20 ans. Si l’Europe pouvait imposer qlq règles aux constructeurs pour aller dans ce sens j’en serais satisfait. On peut toujours rêver !
28 mars?
Merci Philippe pour cet article.
Souhaitons effectivement que les autorités entendent le message et que l’on cesse d’envoyer à la casse des véhicules techniquement réparables.
J’ai constaté sur ma Peugeot Ion que même l’échange standard de pièces est bloqué par le constructeur, pour privilégier son réseau, qui n’est malheureusement ni formé ni intéressé à ces réparations.
Comme le soulignait un article précédent, les assureurs eux même sont confrontés au problème des véhicules irréparables du fait de contraintes excessives, et disons-le intéressées (constructeurs qui préfèrent vendre du neuf plutôt que de réparer).
Malheureusement, se battre contre le lobby des constructeurs couplé à l’éternel immobilisme de l’ex service des mines devenu Drire puis Dreal (vous savez, ceux qui ont interdit pendant des années les doubles vitrages ( en polycarbonate) sur les camping car …français, et idem pour le gaz , avec une réglementation débile bien franchouillarde…) , c’ est un combat digne de David contre Golliath !
En plus arriver à faire admettre à tout ce beau monde, de pouvoir upgrader une batterie, sans que cela change FONDAMENTALEMENT les caractéristiques du VE, j’y crois pas, car ils vont inévitablement nous imposer des ” règles de droit” …, pour l’interdire ;
C’est comme l’électrification des thermiques, où, au lieu de copier la législation hollandaise (modif à titre isolé avec une certaine tolérance de poids), on a VOLONTAIREMENT fait une usine à gaz, obligeant à passer par des sociétés ” spécialisées”…moyennant finances , ces mêmes sociétes ayant … ” participé” (ou plutôt dicté?) la rédaction de la règlementation (…) ..