Electra - A droite, Aurélien de Meaux

Pour l’opérateur français Electra en recharges rapides des véhicules électriques, l’année 2022 a été celle qui lui a permis de se faire une place sur un terrain que commençaient à bien occuper des entreprises venues d’autres pays d’Europe comme Allego, Fastned ou Ionity. Il va aussi sortir des frontières tout en continuant son développement dans l’Hexagone. Cofondateur et à la direction d’Electra, Aurélien de Meaux explique, et répond aux questions que vous vous posez.

Forte accélération du réseau

« Notre actualité du moment, c’est que nous bénéficions d’une forte accélération sur notre réseau en France, mais aussi en Belgique et au Luxembourg grâce à un partenariat avec l’enseigne de supermarchés Delhaize. Ce sont 250 sites qui seront équipés de nos bornes dans ces 2 pays », lance Aurélien de Meaux.

Au total, 1 800 points de recharge devraient être progressivement accessibles sur les parkings de ces magasins. « Nous souhaitons développer un réseau qui soit le plus large possible, à l’échelle européenne. Ce qui est bénéfique pour amortir les coûts en matière de technologie et de supervision. Notre objectif est de compter à horizon 2030 entre 1 500 et 2 000 stations ».

De nouveaux pays vont accueillir Electra : « Nous sommes en train de nous lancer en Italie où les véhicules électriques sont de plus en plus nombreux, alors que le réseau de recharge n’y est pas satisfaisant. Nous avançons déjà à Milan. Nous nous intéressons aussi à l’Espagne, à la Suisse et à l’Autriche ».

45 stations en France

« Nous avons ouvert 45 stations en France. Nous passons les marches les unes après les autres. Puisque des opérateurs comme Allego et Fastned viennent en France, nous n’allons pas nous priver de nous étendre à l’international où nous comptons mettre en service les deux tiers de nos établissements. À ce jour, nous recensons 250 points de charge actifs. Pour réussir notre programme d’extension, nous avons déjà sécurisé énormément de sites où nous allons nous implanter », révèle Aurélien de Meaux.

Le réseau s’étend au fur et à mesure des nouveaux marchés remportés : « Nous avons fortement mis l’accent sur l’expérience utilisateur, en particulier sur la partie technique. En interne, une trentaine de personnes travaillent au développement des logiciels, dont certains pour répondre aux besoins des flottes. Nous savons nous adapter aux demandes auxquelles nous pouvons répondre rapidement. Ce qui a séduit les porteurs de projets, nous permettant de remporter pas mal de sites ».

Quatrième réseau en PDC rapides

Le nombre de réseaux s’incrémente chaque année. Comment se situe Electra en France ? « Nous sommes le quatrième en nombre de points de recharge de plus de 100 kW. Nous ajoutons à notre maillage entre 2 et 4 nouvelles stations par semaine. L’investissement à consacrer à chacune est de 400 000 à 500 000 euros, avec une rentabilisation qui intervient au bout de 6 à 10 ans ».

Le temps de construction reste variable pour construire un nouvel établissement : « Un chantier dure en général entre 4 et 8 mois, et ce, en raison de certaines contraintes. Par exemple le temps de raccordement au réseau par Enedis. Il sera supérieur pour un branchement à effectuer à 200 mètres par rapport à un accès à 20 m ».

Station de recharge Electra

Electra se distingue en ouvrant avec Indigo des stations de recharge rapide dans les villes. « C’est dans notre ADN d’ouvrir l’accès à la recharge rapide dans les zones urbaines. Nous comptons 16 ou 17 stations en Ile-de-France. Electra est d’ailleurs le premier à avoir ouvert une station de recharge à haute puissance intramuros, porte d’Italie ».

D’autres ouvertures sont-elles programmées en 2023 ? « Nous en avons prévu 6 ou 7 cette année, dont 3 ou 4 à Paris et dans la première couronne, une à Bordeaux et une autre à Lille. Un chantier pour la recharge rapide en souterrain est très normatif, pour des raisons de sécurité. Les projets sont donc plus longs à mener ».

Expérience utilisateur

Face aux autres maillages, Electra cherche à se démarquer par une expérience utilisateur différente. « Nous souhaitons enthousiasmer les gens au sujet des véhicules électriques, et créer de l’adoption de masse. Le parcours utilisateur doit être facilité, avec une tarification très lisible, la possibilité de régler par carte bancaire, mais aussi d’effectuer des réservations ».

« Cette dernière fonctionnalité est très utilisée par les taxis, VTC, les entreprises de la logistique et de la location de véhicules. Très majoritairement, ces réservations sont suivies d’une opération de recharge. Il arrive exceptionnellement que ce ne soit pas le cas. Le point de charge est alors libéré 10 minutes après l’horaire réservé », complète Aurélien de Meaux.

Si l’opérateur n’a pas prévu de stations traversantes qui faciliteraient la recharge des véhicules électriques tractant une caravane ou une remorque, il compte bien développer des abris au-dessus de ses bornes. Electra annoncera dans quelques jours la fonctionnalité Autocharge qui permet de lancer le ravitaillement en énergie sans avoir à s’identifier au moyen d’un badge ou d’une application.

Une équipe qui s’agrandit

Avec le développement de l’activité, l’effectif d’Electra ne cesse d’augmenter : « Nous comptons au total une centaine de personnes, en fédérant les meilleurs talents du marché. Une quarantaine d’entre eux s’activent à l’excellence industrielle et opérationnelle ».

Aujourd’hui, les profils recherchés sont très diversifiés : « Nous sommes en pleine période de recrutement. Nous recherchons par exemple des chefs de projets, des architectes, des assistants à la maîtrise d’ouvrage, des techniciens électriciens, des spécialistes du marketing et des relations humaines. Actuellement, nous proposons une vingtaine de postes sur le site WelcomeToTherJungle.com ».

Avec un maillage qui désormais dépasse le cadre de l’Hexagone, des postes sont à pourvoir dans d’autres pays européens : « Nous avons des bureaux à Bruxelles et Milan. De nouvelles ouvertures sont à venir ».

Des voitures moins chères…

« Les véhicules électriques progressent en France. Environ 220 000 ont été nouvellement immatriculés en 2022. Soit 15 % des ventes environ, contre 10,5 % l’année précédente. On pourrait se féliciter pour cette croissance. Mais aussi se dire qu’environ 85 % des acquéreurs ont préféré opter pour des modèles thermiques ou hybrides. Nous ne sommes pas encore sur une adoption de masse des véhicules électriques », prévient Aurélien de Meaux.

Une certaine philosophie emporte les collaborateurs d’Electra : « Nous souhaiterions que les Français de ne se posent plus de questions et choisissent spontanément des voitures électriques comme ils prennent encore des modèles thermiques. Nous avons 2 convictions pour favoriser cela. La première, c’est que les voitures électriques doivent être moins chères. Pour en diminuer le prix, il faut des batteries plus petites, de pas plus de 40-50 kWh de capacité énergétique, et non des packs de 90 kWh. Ce qui améliorera aussi le bilan environnemental des VE ».

… Et un maillage plus efficace

La deuxième conviction d’Electra porte sur une dédramatisation de l’autonomie : « Aujourd’hui, avec un véhicule thermique, on ne se pose pas la question de l’autonomie, parce que l’on sait que partout en France le plein du réservoir peut être effectué en 3 minutes environ. Il faut répliquer ce modèle aux électriques pour lesquels les publicités mentionnent ce rayon d’action ».

Comment y parvenir ? « Il faut des stations partout. Toutefois, ce n’est pas le nombre de bornes qui compte, mais combien de voitures on peut recharger avec chacune. C’est pourquoi il vaut mieux des bornes rapides qu’un très grand nombre de lentes partout ».

Station Electra

La fiabilité des opérations est aussi une véritable préoccupation chez Electra : « Nous bénéficions d’un taux de succès de 98 % sur nos recharges. C’est 10 points de plus que la moyenne communiquée par l’Afirev. Pour arriver à cela, nous avons développé nous-mêmes la supervision de nos bornes. Avant que le flux électrique se déclenche, il y a bien 80 étapes qui doivent être passées avec succès. Si une seule ne l’est pas, la connexion ne peut pas être établie. Nous avons énormément travaillé là-dessus ».

0,54 euros du kilowattheure

Le prix du kilowattheure a récemment augmenté chez Electra : « Nous sommes passés à 0,54 euro l’unité sur des bornes 300 kW. Ce qui reste raisonnable pour cette puissance. Nous avons dû répercuter l’augmentation du prix de l’énergie, mais de manière raisonnable ».

Qu’espérer concernant les tarifs à l’avenir ? « Le prix de l’électricité est très lié à celui du gaz. En août 2022, nous étions autour des 1 000 euros le mégawattheure. Aujourd’hui, c’est redescendu à 150 euros. C’est davantage un problème conjoncturel que structurel. Les contrats d’approvisionnement en électricité sont signés sur plusieurs mois. La situation devrait s’améliorer prochainement », conclut notre interlocuteur.

Automobile Propre et moi-même remercions Aurélien de Meaux pour le temps accordé à répondre à nos questions.

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Avis de l'auteur

Le développement d’un réseau fiable pour la recharge rapide des véhicules électriques est très appréciable. D’autant plus lorsque l’opérateur est français et qu’il sait prendre en compte des besoins jusque-là plutôt négligés, comme la présence de bornes à haute puissance au cœur des grandes villes.

S’il n’est pas nécessaire qu’elle soit aussi portée par Electra, la recharge en courant alternatif ne doit cependant pas être négligée ni minimisée. Et ce, pour plusieurs raisons importantes.

Aujourd’hui, la part des électromobilistes qui ne peuvent pas recharger une voiture électrique chez eux ou sur leurs lieux de travail est encore faible. Elle sera cependant bien plus importante dans une dizaine d’années, si l’interdiction des ventes de voitures essence et diesel neuves est maintenue et que les zones à faibles émissions se généralisent.

Vivre l’électrique, c’est vivre différemment. Ceux qui peuvent recharger chez eux le savent bien : c’est un grand confort de ne pas avoir à passer systématiquement par une station pour faire le plein en énergie. Cette facilité est à reproduire aussi au bénéfice des automobilistes qui vivent en habitat collectif. Ne serait-ce que, comme à Londres, en proposant de simples prises sur des lampadaires pour les riverains.

Il y a aussi une raison technologique. Dans une station rapide, pour une bonne rotation aux bornes, il est à juste titre demandé de ne pas recharger la batterie à son maximum. Toutefois, un plein à 100 % est nécessaire de temps en temps pour le bon équilibrage des cellules lithium-ion. Ceux qui n’ont pour cela pas accès à une prise depuis chez eux ni sur leur lieu de travail devront se tourner vers les bornes AC disponibles dans l’espace public. Ils seront de plus en plus nombreux à connaître ce besoin à l’avenir.

Il n’y a pas de concurrence à voir entre la recharge rapide et les bornes AC. Les 2 répondent à de véritables besoins, dont certains se chevauchent, et d’autres diffèrent. C’est pourquoi l’action d’Electra pour le développement de la recharge rapide fait partie des incontournables de la mobilité branchée. Tout comme l’effort réalisé par les opérateurs qui s’évertuent à faire vivre le 22 kW AC, dont les syndicats départementaux de l’énergie.