Audi e-Tron GT

L’Audi e-Tron GT vit dans l’ombre de la Porsche Taycan, sa fausse jumelle. Summum de la technologie électrique, on a décidé de se pencher sur son cas.

Si les technologies électriques évoluent vite, l’Audi e-Tron GT demeure toujours parmi les voitures sans émission les plus exclusives et sophistiquées. Et pour cause : la berline est la fausse jumelle de la Porsche Taycan. Un modèle pour lequel la marque de Zuffenhausen ne s’est autorisé aucun compromis, et qui profite désormais à l’Audi. Deux versions cohabitent au catalogue, avec une déclinaison Quattro « conventionnelle », et la plus puissante RS e-Tron GT concoctée par la branche Audi Sport. Malgré l’écart de puissance, ces deux modèles présentent un écart d’autonomie WLTP d’une dizaine de kilomètres seulement. Tant qu’à disposer d’un véhicule voué aux performances, nous avons porté notre choix sur l’Audi RS e-Tron GT.

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Présentation de l’Audi RS e-Tron GT

L’Audi e-Tron GT ne fait pas que reprendre la plateforme J1 inaugurée par la Porsche Taycan. Elle adopte également l’intégralité de la caisse de sa cousine, en atteste la découpe des vitres latérales ou les emboutissages parfaitement identiques. On y retrouve donc les mêmes dimensions, même si le coup de crayon de l’Audi la fait passer pour plus large et plus longue que la Taycan : d’une longueur de 4,99 m (pour un empattement inchangé de 2,90 m), la berline d’Ingolstadt se place dans les eaux des Tesla Model S et Lucid Air.

L’e-Tron GT embarque une batterie de 93,4 kWh, dont 83,7 kWh de capacité utile. Les 396 cellules poches sont fournies par LG Chem (modèle E66a) et réparties en 33 modules. Le principe de raccordement 198s2p permet à cette unité de 630 kg de fonctionner sous une tension 800 V, ou plus précisément sous une tension nominale de 724 V. Comme la Taycan, elle a été la première à disposer d’une telle tension de fonctionnement. Un coup d’avance qu’elles doivent à l’entreprise croate Rimac, avec laquelle le groupe allemand a noué un partenariat.

Cette batterie de pointe alimente deux machines électriques identiques, là encore, à celles de la Taycan. Question de hiérarchie et de philosophie, elle se montre moins puissante avec un total de 598 ch pour 830 Nm de couple. Avec le mode Dynamic enclenché et une procédure de départ spécifique, la berline peut aller chercher furtivement les 646 ch. Elle se situe entre les Porsche Taycan 4S et Turbo. Comme avec ces dernières, c’est l’onduleur avant qui bride l’intensité. A l’arrière on y retrouve l’innovante boîte à deux rapports, qui sert davantage les performances et les beaux chiffres que l’efficience.

Entre autres avantages techniques qui nous séduisent tout autant, la plateforme 800 V permet de viser des puissances de recharges rapides records. L’Audi e-Tron GT figure là aussi tout en haut de la hiérarchie avec un pic annoncé de 270 kW sur les bornes de recharge rapide suffisamment puissantes, permettant de faire le 5-80 % en 22,5 minutes selon le constructeur. La recharge AC est confiée à un chargeur 11 kW, ou un système de 22 kW en option.

Données complémentaires

  • Puissance en pic : 440 kW – 598 ch (475 kW – 646 ch avec le boost)
  • Puissance nette (case P.2) : 142 kW – 193 ch (-68 %)
  • Poids en service (case G.1) : 2 345 kg
  • Rapport poids/puissance (PVOM) : 4,07 kg/ch
  • Pneumatiques : GoodYear Eagle F1 Asymmetric 5 Electric Drive – 265/35 R21 (avt) / 305/30 R21 (arr) – B, A, 72 dB

Toutes nos mesures de consommation de l’Audi RS e-Tron GT

Autonomie mixte : 402 km

Sur notre boucle mixte, la berline Allemande n’a pas présenté d’écarts véritablement significatifs d’un terrain à l’autre, avec notamment une moyenne de 19,9 kWh/100 km sur route et de 19,1 kWh/100 km en ville. C’est les résultats d’un poids particulièrement pénalisant lors des remises en vitesse, très nombreuses en ville, alors que ses pneus larges ont une incidence directe sur la résistance au roulement. Profilée comme une sportive (Cx de 0,24 / SCx de 0,564), l’Audi RS e-Tron GT a tout de même atteint la barre des 23,5 kWh/100 km sur voie rapide. Au terme de ce parcours mixte de 100 km, la berline a présenté une moyenne finale de 20,8 kWh/100 km. Ce qui se traduit ici par une autonomie totale théorique de 402 km. Son niveau de consommation est assez semblable à ce qu’on a pu mesurer avec une BMW i7 xDrive60 ou un Ford Mustang Mach-E.

Autonomie mixte – 18 °C ext.
Route Voie rapide Ville Total
Conso. moyenne A/R (kWh/100 km) 19,9 23,5 19,1 20,8
Autonomie totale théorique (km) 421 356 438 402

Longue distance sur autoroute : 333 km

D’après Porsche, à l’origine du développement de la boîte à vitesse, cette dernière est censée favoriser les consommations sur autoroute. En fait, le second rapport est exclusivement utilisé en mode Comfort (sélectionné tout au long de notre essai). Alors que la première vitesse dispose d’un rapport de démultiplication de 15,6:1 pour servir les performances, l’autre présente un ratio de 8,05:1 identique au réducteur de la machine électrique avant. Autrement dit, la machine arrière tourne donc comme n’importe quelle unité électrique dans ce cas et aucun tour de magie mécanique ne permet de réduire les consommations. Il faudra pour cela activer le mode Efficiency, qui désactive complètement le module arrière et transforme la sportive en traction, jusqu’à 140 km/h maximum.

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Il n’y a donc pas de surprise au moment de prendre l’autoroute A6 entre Lyon et Paris aux vitesses réglementaires. Au terme de ce trajet de 500 km, la berline a présenté une valeur finale de 25,1 kWh/100km, soit une autonomie moyenne de 333 km. Le niveau de consommation est semblable à ce que l’on note à bord des SUV familiaux, mais aussi avec les quelques berlines haut de gamme qu’il nous a été donné d’essayer à l’image de la BMW i7 xDrive60 ou la Mercedes EQE 350+.

Consommations instantanées de l’Audi RS e-Tron GT

A une vitesse fixe de 110 km/h (mesure A/R), l’e-Tron GT peut afficher une moyenne de 22,4 kWh/100 km, soit 374 km d’autonomie totale théorique. A 130 km/h, nous avons constaté un appétit de 27,3 kWh/100 km, soit 307 km. Dans tous les cas, la berline reste au dessus de la barre des 300 km sur autoroute, ce qui permet d’envisager des voyages sereinement.

Consommations instantanées
110 km/h 130 km/h
Conso. moyenne (kWh/100 km) 22,4 27,3
Autonomie totale théorique (km) 374  307

L’éco-conduite : 554 km

Habituellement, nous faisons un comparatif entre le meilleur et le pire des scénarios avec une voiture électrique. Les mesures réalisées sur autoroute se sont finalement révélées répétitives. Nous avons donc décidé de ne retenir que l’exercice d’éco conduite, en activant ici le mode le plus économique et en usant au maximum de tous les artifices (mode B) pour raser le sol. En raison de tous les facteurs qui peuvent influer sur l’éco-conduite, le chiffre de conso’ présenté ici n’a qu’une valeur informative et ne se compare pas aux autres modèles essayés.

Pour parvenir à optimiser au mieux l’autonomie, l’Audi RS e-Tron GT dispose du mode Efficiency (désactivation de la machine arrière) et de plusieurs modes de freinage régénératif. Si l’on peut moduler l’intensité via l’écran central, elle dispose aussi de palettes derrière le volant pour renforcer la décélération sur deux niveaux. Utile pour traverser les communes, alors qu’en dehors on lui préférera nettement son mode roue-libre. Au terme de ce parcours uniquement réalisé sur route secondaire, nous avons relevé un appétit de 15,1 kWh/100 km, soit 554 km d’autonomie.

Performances de l’Audi RS e-Tron GT

Si la version RS représente le summum de la gamme, elle n’est pas aussi puissante que son équivalent chez Porsche, la Taycan Turbo S. Cependant, la répartition et la disponibilité de la puissance est la même. Avec la fonction boost activée, disponible sur un départ arrêté donc, la berline peut viser un maximum de 646 ch/475 kW, qui s’obtient par un pic d’intensité pendant 2,5 s. En temps normal, le pic de puissance grimpe à 598 ch/440 kW sur une durée de 10 s. C’est cette valeur que nous retenons pour le rapport poids/puissance en ordre de marche de 4,07 kg/ch. Oui, malgré sa puissance somme toute élevée, la berline présente un ratio qui se situe dans la tranche d’un BMW iX xDrive60 ou d’un Tesla Model Y Performance.

Performances départ arrêté – mode de conduite Normal – batterie à 80 %
0-100 km/h 80-120 km/h 400 m Accel. longi. max
3,55 s 2,07 s 11,6 s 1,300 G

En mode Comfort intermédiaire et à 80 % de batterie, l’Audi RS e-Tron GT a présenté un 0-100 km/h en 3,55 s, un 80-120 km/h lancé en 2,07 et un 400 m D.A. en 11,60 s. Voilà qui la place déjà tout en haut de notre liste en matière de performance. Avec l’overboost activé en mode Dynamic, les chiffres sont encore plus impressionnants : nous avons mesuré un 0-100 km/h en 3,32 s, un 80-120 km/h en 1,82 s et un 400 m D.A. en 11,25 s. Notons que nous n’avons pas réussi à passer sous la barre des 11 s au 400 m D.A. Il faudra pour cela contrôler avec précision les paramètres thermiques de la batterie et des pneumatiques, et disposer d’un revêtement digne de la compétition.

Reprises KD – 80-120 km/h
SoC à 80 % SoC à 50 % SoC à 20 % SoC à 10 %
2,58 s 2,70 s 3,07 s 3,77 s

Toujours dans le cadre d’une utilisation normale, nous avons mesuré un 80-120 km/h en reprise pure en 2,58 s avec le mode Comfort (2,3 s en mode Dynamique) avec 80 % de charge restante. Dès 25 % de charge, la puissance disponible est réduite. Mais elle est suffisante pour assurer des reprises en 3,07 s à 20 % de charge. En dessous de ce seuil, le mode Sport ne change rien aux résultats. La perte absolue de 0,49 s est inférieure à la moyenne, mais l’écart relatif de 19 % est plus élevé (on enregistre une moyenne de -13 %). Rappelons ici que nous avons mesuré une reprise similaire en 2,20 s avec la Tesla Model S Grande Autonomie (680 ch pour 3,04 kg/ch) en mode Insane. La Lucid Air Grand Touring (827 ch pour 2,85 kg/ch) catapulte l’exercice en 1,88 s avec le mode Sprint.

En cas d’utilisation intensive, le premier rapport de boîte est engagé et le passage de rapport est imperceptible (autour de 80 km/h). En temps normal, c’est la seconde vitesse qui est utilisée. C’est donc sur ce rapport que l’e-Tron GT évolue sur les petites routes, où elle réclame la même dextérité qu’à bord une GT digne de ce nom : les mises en vitesse impressionnantes, le gabarit de l’auto et le museau très proche du sol invitent à la finesse. Mais c’est surtout le comportement dynamique qui rappellera à l’ordre les plus téméraires. Car si l’agilité conférée par les roues arrière directrices ne souffre d’aucune critique, l’amortissement du système pneumatique (Pack Dynamique en option à 5 400 € sur la Quattro) ne maintient pas aussi bien la caisse qu’une Taycan sait le faire. Le comportement général est typé sous-vireur, et la colonne de direction avare en informations ne permet pas de cerner les limites d’adhérence. Paradoxalement, on est agréablement surpris par son toucher de route à des rythmes plus calmes, qui permettent de sentir la rugosité de la route. Enfin, le freinage en carbone-céramique apparaît comme bien trop spécifique dans une voiture avant tout développée comme une Grand Tourisme.

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Confort de l’Audi RS e-Tron GT

On se surprend vite à préférer le mode Comfort qui permet de mieux sentir les mouvements de caisse et donc d’anticiper les réactions. Et l’on se surprend aussi à rapidement calmer le jeu pour adopter un rythme rapide plutôt que véritablement sportif. Et encore. Car derrière sa silhouette se cache un cocon confortable. La présentation à bord est impeccable et fidèle aux autres produits le marque. Mais les plus geeks regretteront sans doute l’absence d’un véritable effet whaou qui se mesure au nombre et à la taille des écrans : à l’instrumentation numérique personnalisable s’ajoutent un affichage tête-haute et un combiné tactile au centre de 10,1 pouces, alors que l’écran passager de la Taycan disparaît.

 

La position de conduite appartient sans surprise au monde des sportives, avec une assise basse, une planche de bord surélevée et enveloppante, ainsi qu’un manque d’espace pour les jambes une fois au volant. Les passagers arrière sont confinés mais ils disposent d’une assise confortable grâce à l’agencement des modules de la batterie qui permet de libérer la cave à pied. Pensée comme une GT, cette e-Tron GT n’est donc pas celle avec laquelle nous nous attarderons sur les aspects pratiques. Surtout que son coffre arrière de 350 l, secondé par un rangement de 85 l sous le capot, n’est pas à la hauteur de son gabarit.

Sur la route en revanche, on s’imagine à bord des meilleures berlines. La suspension encaisse avec brio toutes les irrégularités de la route malgré des jantes surdimensionnées. L’aérodynamique maîtrise les bruits d’air, mais les pneus larges rehaussent le niveau sonore à bord. Et si l’on aurait parié moins, nous avons enregistré à bord des niveaux équivalents à ceux d’un SUV à 130 km/h ! Enfin, notons ici qu’Audi cultive la sensation jusqu’au bout : avec une sonorité artificielle bien travaillée et des remontées de la transmission dans le bas du dos, on pourrait se croire à bord d’une sportive thermique aphone, à l’image d’une Nissan GT-R.

Supertest Audi RS e-Tron GT : le bilan conso

La filiation avec la Porsche Taycan est logiquement inévitable pour cette Audi RS e-Tron GT. Et pour cause, elle en reprend la structure et les organes mécaniques, avec seulement quelques paramétrages pour mieux marquer sa différence. Plus GT que véritablement sportive, elle présente des valeurs de consommations aussi élevées que son niveau d’exclusivité. Son poids, certes imperceptible au volant mais bien présent aux yeux de la physique, et ses gros pneus ne sont pas étrangers à ces résultats. Reste que la batterie à la capacité généreuse lui permet d’envisager des longs parcours sans arrière pensée. Surtout que sa courbe de recharge rapide écourte les ravitaillements de manière significative. Suffisant pour prendre la tête de notre classement ? C’est ce qu’on verra la semaine prochaine.

Même si les Tesla Model S Grande Autonomie et la Lucid Air Grand Touring, déjà passées entre nos mains, ne semblent lui laisser aucune chance, l’Audi RS e-Tron GT est sans conteste l’une des meilleures voitures électriques : son ratio autonomie/performance et ses technologies mécaniques sont en haut du tableau . Bien sûr, cela a un prix : comptez à partir de 148 840 €, ou de 161 340 € en version S Extended, hors nombreuses et coûteuses options. Gageons qu’une déclinaison Quattro à peine plus sobre (492 km WLTP contre 473 km sans options), de « seulement » 530 ch (0-100 km/h en 4,1 s au lieu de 3,3 s) et affichée à partir de 107 420 € devrait se montrer déjà bien suffisante.