Rouler sur l’autoroute A6 en direction du sud avec une voiture électrique est un parcours du combattant. Mais Electra et Tesla vont vous permettre de rejoindre la côte sans encombre avec de nouvelles bornes de recharge.

Les discours officiels et les publicités se veulent rassurants : la voiture électrique permet désormais d’envisager des longs trajets. Bien sûr, certains modèles ne sont toujours pas adaptés à l’exercice, alors que la plupart des références occupent un segment où les besoins sont quasi uniques. Si l’autonomie inquiète encore quelques utilisateurs, elle n’est plus vraiment un problème avec le développement rapide du réseau de bornes de recharge en France. À vrai dire, c’est davantage la fréquence des arrêts et les puissances de recharge qui sont à prendre en considération pour qui veut tenter de reproduire des temps de voyage similaires à ceux d’une voiture thermique. Mais le spectre de la panne sèche n’a pas totalement disparu.

Une zone sans bornes de recharge rapide

Car si le réseau se densifie comme le précise le baromètre de l’AVERE, la répartition des bornes avec des puissances de recharge cohérentes est encore perfectible. Preuve en est, et non des moindres, avec le trajet reliant Paris à Lyon par l’autoroute A6 : sur ce tronçon particulièrement fréquenté, il existait jusqu’alors un fossé de 251 km entre deux stations de recharge dignes de ce nom pour les grosses transhumances estivales. C’est-à-dire des sites suffisamment grands pour pouvoir alimenter plusieurs voitures en même temps, avec des puissances de recharge permettant à chacune d’atteindre leurs performances maximales en la matière.

Seule solution pour ceux qui souhaitent s’aventurer dans le Morvan donc : une borne SDEY de 160 kW DC, installée à la sortie 22 près de Sauvigny-le-bois. Mais celle-ci se montre aussi souvent en panne qu’une Rover SD1. Il suffit pour s’en assurer de lire les très nombreux commentaires négatifs sur ChargeMap, qui font état d’un matériel défectueux et de recharges infructueuses. Une malheureuse situation que nous avons rencontrée lors de notre Supertest de la Renault Megane e-Tech.

 

280 km d’autonomie, le minimum vital

Dès lors, il fallait soit prendre l’autoroute dans l’autre sens pour aller sur une station Ionity (une perte de temps et d’argent), faire un détour par Dijon sur les A38 et A31, ou s’échouer sur des bornes locales avec, au mieux, une puissance DC de 50 kW, au pire, une puissance AC dans les limites du chargeur embarqué de la voiture. S’il faut encore accepter de faire des concessions pour voyager en voiture électrique, ces dernières sont inacceptables à nos yeux pour un trajet autoroutier : on ne devrait pas se retrouver à charger sur la place du Presbytère du coin alors que nous sommes lancés à 130 km/h sur la voie rapide. D’autant plus sur une autoroute payante au prix de 35,80 €, tout de même, entre les péages de Fleury-en Bière et de Villefranche-Limas.

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Bref, pour pouvoir franchir le Morvan et cette zone blanche sans encombre, il faut disposer d’une électrique disposant d’une autonomie autoroutière supérieure à 280 km. Et il s’agit souvent de modèles haut de gamme à l’image du duo coréen Kia EV6/Hyundai Ioniq 5 ou du duo allemand Audi e-Tron GT/Porsche Taycan. C’est un minimum pour disposer suffisamment d’énergie sur 250 km de 100 % à 10 % de batterie. Mais il faudra pour cela effectuer une recharge complète à l’aire de la Réserve sur une borne Ionity, ce qui peut s’avérer au pire coûteux en fonction de la vitesse de recharge de la voiture concernée, au mieux peu rentable. De quoi refroidir plus d’un conducteur d’emprunter cet axe pour rejoindre le sud de la France.

Le plus long Superchargeur du monde, ouvert à tous

Mais depuis peu, Tesla et Electra peuvent les voyages possibles : les deux opérateurs ont décidé de s’implanter à Beaune, juste à côté de l’autoroute, à la confluence des A6, A31 et A36. À eux deux, ce sont pas moins de 36 points de recharge Combo-CCS en courant continu qui sont disponibles. Et la majorité des troupes se trouve du côté du Superchargeur avec 28 bornes installées le long d’un supermarché E.Leclerc. Accessibles depuis la sortie 24, elles forment le plus long SuC Tesla au monde ! Et ces bornes font partie du programme pilote qui vise à ouvrir les Superchargeurs à toutes les voitures compatibles.

Il faudrait donc s’attendre à trouver beaucoup de Tesla sur cette station, mais aussi à des puissances de recharge plus faibles pour les « non-Tesla ». C’est en tout cas ce que nous avons remarqué à plusieurs reprises sur le Superchargeur de Vélizy 2, près de Paris. Aussi, il semblerait que le problème de comptabilité entre les Superchargeurs et les électriques coréennes basées sur la plateforme e-GMP ne soit toujours pas résolu : notre Hyundai Ioniq 5 d’essai branchée ce jour-là lors de notre Supertest n’a jamais commencé la charge malgré nos différentes tentatives.

Electra casse les prix

Ce qu’elle ne rechigne pas à faire sur les bornes Electra. Après un premier essai à Aubervilliers avec une station urbaine, l’opérateur français ouvre sa seconde station sur le parking du Greet Hotel Beaune, accessible en moins de deux minutes depuis la sortie 24.1. Se trouvent ici quatre bornes avec un total de huit prises Combo-CCS d’une puissance maximale de 225 kW, mais également une prise CHAdeMO et une Type 2 en courant alternatif. Un nombre de points de recharge acceptable et à des puissances à l’avenant pour un trajet autoroutier.

Mais Electra prend le large par rapport à l’opérateur américain avec une tarification agressive : les bornes affichent un prix unique de 0,44 €/kWh, contre 0,68 €/kWh chez Tesla. Y charger une Renault Megane de 10 à 80 % représenterait, selon nos données issues de notre Supertest, un coût de 20 € chez Electra, contre 31 € chez Tesla.

Ces bornes de recharge futures victimes de leur succès ?

En tout état de cause, du fait de leur position, ces deux sites promettent déjà aux voyageurs empruntant l’autoroute A6 pour les vacances de se recharger facilement et sans inquiétude. Cela limite désormais cette zone « blanche » depuis l’aire de la Réserve à seulement 180 km contre, rappelons-le, 250 km auparavant. Une distance que peuvent parcourir haut la main de nombreux modèles populaires sur autoroute, tels que la Renault Megane e-Tech ou la Volkswagen ID.3, entre autres, tout en sortant de la Réserve avec 80 % de charge dans leur batterie. Même l’Aiways U5, véritable pompe à kWh, peut y arriver avec une batterie chargée à un peu plus de 90 % par mesure de sécurité.

Mais, revers de la médaille, ces bornes pourraient potentiellement être prises d’assaut, puisque situées à un endroit où beaucoup de jauges se retrouveraient dans le rouge. Ça serait le cas des voitures qui dévalent l’A6, mais aussi de celles qui arrivent depuis l’A31 : si une station Fastned a été ouverte en périphérie de Dijon 28 km avant, elle ne propose que quatre ports de recharge. De quoi peut-être passer son tour un jour de grand départ. Côté A36, la station Ionity de Glanon est un peu mieux fournie avec six connecteurs CCS 350 kW.

En outre, compte tenu des politiques tarifaires pratiquées, les propriétaires de Tesla pourraient ne pas retrouver de nombreuses voitures d’autres marques sur ce Superchargeur. Ces dernières (comme les Tesla, d’ailleurs) préféreraient sans doute faire des économies en se rechargeant à pleine puissance sur les bornes Electra. Mais l’insatisfaction pourrait être au rendez-vous devant les bornes de couleur turquoise : car dans l’optique de faciliter le parcours de la recharge, l’opérateur propose un système de réservation de bornes sans limite de durée ou presque. Certains utilisateurs pourraient donc retrouver des bornes réservées et inutilisables.

Voilà qui pourrait s’avérer très compliqué lors des chassés-croisés. Réponse cet été, où nous ne manquerons pas de faire un tour à Beaune pour recueillir des retours d’expérience.