Tesla Model 3 : l’installation d’un volant Yoke est-elle légale ?

Presque un an en arrière, Tesla présentait un rafraîchissement de ses Model S et Model X. Les photos de l’habitacle surprenaient par la présence d’un volant baptisé « Yoke ». De quoi déchaîner les passions et amener des propriétaires de Model 3 à monter cet équipement proposé par différents accessoiristes plus ou moins sérieux.

Sur le roadster en 2017

C’est sur les visuels de présentation du futur Tesla roadster révélé en 2017, et dont la sortie a été plusieurs fois repoussée, qu’un volant à la forme torturée a été vu pour la première fois. Sur un engin à l’état de concept : rien de très étonnant. En revanche, penser inclure cet équipement au rafraîchissement de début 2021 des Model S et Model X, plus familiales par nature, a davantage secoué les esprits.

Surtout quand ce volant rectangulaire, dépourvu de sa jante dans la partie supérieure, recevait le soutien de la RDW (Rijksdienst voor het Wegverkeer), l’autorité en charge de l’homologation et de l’immatriculation des véhicules aux Pays-Bas. Si cet instrument de commande, à la forme empruntée à l’univers de l’aviation et à celui des jeux vidéo, est donc homologué pour être utilisé sur des Model S neuves en configuration d’origine, ce n’est pas le cas pour les Model 3.

Une démarche de prévention

Peut-on légalement en France rouler avec une Model 3 équipée d’un volant Yoke ? C’est à cette question qu’un de nos lecteurs, également membre très actif du Tesla Owners Club France, a cherché à répondre. Avec sans doute une idée précise des difficultés qu’il rencontrerait et de l’issue de sa démarche. Qu’importe s’il n’est pas lui-même intéressé par cette transformation !

Ce travail précieux a surtout valeur de mise en garde pour tous ceux qui, dans l’Hexagone, conduisent avec un tel équipement. D’autant plus s’ils réalisent des vidéos qu’ils postent ensuite sur YouTube.

« J’ai investigué personnellement sur la légalité de cette modification, auprès de la Dreal et de Tesla », a écrit Bertrand Moreau dans un courrier qu’il nous a adressé.

Acte 1 : La Dreal renvoie vers le constructeur

La demande formulée par notre lecteur était très explicite, visuels à l’appui. Elle commençait ainsi pour la Dreal et Tesla : « Je possède une Tesla Model 3. Ce véhicule est homologué de série avec le volant figurant sur la photo du haut. Des accessoiristes proposent de le remplacer par le volant (« Yoke ») de la photo du bas ».

À l’attention de la direction régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement, subdivision véhicules, Bertrand Moreau a ainsi poursuivi : « Pouvez-vous me dire SVP si cette modification est considérée comme notable par la Dreal (donc nécessitant une réception à titre isolé) ? ».

L’organisme a répondu : « Cette modification peut remettre en cause le domaine réglementé de la direction. Par conséquent je vous invite à demander l’autorisation des services techniques du constructeur préalablement à cette modification ».

Acte 2 : Tesla ne cautionne pas la transformation

À la suite de la réponse de la Dreal, Bertrand Moreau a donc contacté le siège de Tesla à Chambourcy, service Registration/Conformité. Après la présentation commune avec visuels de la situation, il a ainsi formulé sa demande : « Pouvez-vous me dire SVP si cette modification est homologuée par Tesla ? Peut être effectuée par Tesla ? Si non effectuée par Tesla, compromet-elle la garantie ? ».

En retour, le service du constructeur américain a précisé que la pose d’un volant Yoke sur une Model 3 « n’est pas possible en France » et, que toute transformation hors Tesla entraînerait bien la perte de la garantie.

Acte 3 : La démarche à réaliser

Bertrand Moreau a communiqué la position de Tesla à la Dreal. La direction régionale n’a pas totalement fermé la porte à la transformation. Mais sa deuxième réponse laisse clairement entrevoir le parcours du combattant que devrait suivre un électromobiliste qui voudrait en toute légalité rouler avec une Model 3 équipée d’un volant Yoke.

« En l’absence de la validation des services techniques du constructeur, il va vous falloir justifier la conformité des domaines réglementés impactés par la réalisation d’essais à votre charge. Cela peut concerner la direction, l’antivol, le comportement du dispositif de conduite en cas de choc, l’identification des commandes, la sécurité électrique et l’antivol. Le seul laboratoire habilité en France est l’Utac à Montlhéry », a détaillé l’organisme.

Que rappelle la démarche réalisée par Bertrand Moreau ? Tout d’abord que ceux qui conduisent sur la voie publique avec le volant Yoke enfreignent la réglementation française. Pourtant, il n’est pas illégal de vendre ou d’acheter cet équipement en France. Ni même de le monter sur sa voiture… dès lors qu’elle n’est pas utilisée ainsi sur les routes ouvertes.

Pour pouvoir circuler légalement sur ces dernières, il faudra obtenir un PV de réception à titre isolé (RTI) après avoir fait effectuer à ses propres frais les essais imposés. Ce qui ne dispense pas d’informer son assureur de la transformation.

En bref, un tel projet sera complexe et coûteux à dérouler. Comme le dit si bien notre lecteur dans son courrier, les chances d’obtenir satisfaction au bout de la démarche sont « plus qu’incertaines ».

Jusqu’à 750 € d’amende

Concrètement, les automobilistes français qui déposent sur YouTube des vidéos où il est possible de les identifier avec leur Model 3 illégalement transformée risquent « jusqu’à 750 euros d’amende ». En outre, en cas d’accident, « l’assureur est en droit de refuser l’indemnisation, car le véhicule n’est plus conforme à sa configuration homologuée à la suite de cette modification notable », souligne Bertrand Moreau.

Sans compter la perte de la garantie du constructeur, et l’échec du passage au contrôle technique qu’un retour à la configuration d’origine permettrait toutefois d’éviter.

L’homologation d’un équipement sur une voiture neuve n’est pas valable d’office pour un montage a posteriori sur un autre modèle. C’est le principal enseignement à retenir de la démarche constructive menée par notre lecteur qui souhaite casser l’effet d’entraînement amorcé pas quelques hardis Youtubeurs.