V2L sur Kia EV6

Jusqu’à présent, Raynald utilise un groupe électrogène pour son activité. Le jugeant polluant, bruyant et coûteux, il réfléchit depuis des années afin de trouver une alternative. Le V2L du Kia EV6 semble lui apporter une réponse convaincante.

Si le Wooden Pizza installé sur le parking du Carrefour Market de Tourgéville (14) porte ce nom, c’est tout simplement pour bien signifier que Raynald cuit ses Marguerita, Regina, Orientale, Campionne au Boursin, Biquette, Groenland, Alsacienne, Galinias, etc. avec un four à bois. Alors à quoi sert le groupe électrogène caché au mieux dans une remorque un peu à l’écart ? « À alimenter une guirlande à LED 300 W qui éclaire l’intérieur et l’extérieur du camion, le pétrin électrique pour préparer la pâte à pizza, les différents frigos, la caisse enregistreuse… et, surtout, la machine à café professionnelle qui est équipée d’une puissante résistance pour obtenir en quelques dizaines de secondes du café très chaud », nous répond Laurent Méheut.

Ce dernier n’est pas un inconnu pour nous. Nous l’avions déjà interviewé il y a un peu plus d’un an au sujet de ses 40 ans d’implication dans la mobilité électrique.

V2Camion pizza

À l’époque, cet ami de Raynald voulait déjà décliner le principe de l’architecture V2H (Vehicle to Home, du véhicule à la maison) en un « V2Camion pizza » en modifiant une Citroën C-Zero. Il est bien parvenu à effectuer la transformation sur la puce électrique. Comme il est possible de le vérifier sur cette vidéo qu’il vient de télécharger pour nous sur sa chaîne YouTube. Et ce, afin de mieux documenter la présente interview.

Tout le système ajouté par Laurent Méheut prend la place du petit coffre dans la citadine branchée. Un panneau supporte un onduleur 3 kW, un switch, un disjoncteur différentiel, et une prise domestique E/F.

« C’était fonctionnel. J’alimentais les batteries de la C-Zero en journée grâce à des panneaux solaires installés sur le toit de la maison et les dépendances. Le courant arrivait jusqu’à l’onduleur en DC à plus de 300 V, et ressortait et 220 V 50 Hz. Toutefois, ça ne fonctionnait pas exactement comme je le voulais, alors j’ai abandonné cette piste », commente-t-il.

V2L

« Pour Raynald, alimenter son camion à pizzas avec une voiture électrique a du sens. Avec l’augmentation des prix des carburants, son groupe électrogène engloutit en moyenne pour 1 000 euros de SP95 par mois. À la pleine saison, il fonctionne pendant 12 heures par jour », justifie Laurent Méheut. « Quand Kia a annoncé la présence du système V2L pour recharger une autre voiture ou alimenter des consommateurs électriques extérieurs, j’ai tout de suite pensé qu’on pouvait trouver là un moyen de répondre aux besoins de Raynald », poursuit-il.

« J’avais déjà pensé à la Honda e et au MG Marvel R. Mais ces 2 voitures électriques proposent une puissance respective insuffisante de 2,5 et 1,5 kW. En outre, leurs systèmes apparaissent trop légers pour une utilisation intensive et quotidienne », juge-t-il.

Le Kia EV6 transformé en groupe électrogène

« La puissance maximale qu’il est possible d’obtenir du V2L disponible sur le Kia EV6 est de 3,6 kW. Le système de branchement a été beaucoup plus travaillé que sur les Honda e et MG Marvel R. Il donne confiance. C’est du bon travail », estime Laurent Méheut.

« La concession Kia de Hérouville-Saint-Clair m’a prêté un modèle de démonstration pour réaliser mon expérience il y a quelques semaines sur le camion à pizzas. J’avais pour ma part passé commande d’un Kia EV6 livré ce mardi 7 décembre 2021. Il va remplacer mes Citroën C-Zero et Hyundai Kona électrique », remercie-t-il.

« J’utiliserai mon exemplaire pas seulement pour rouler. Aussi pour alimenter ma maison. J’ai imaginé un système de délesteur à 3 voies qui me permettra de prioriser l’alimentation de mes consommateurs domestiques », précise-t-il.

« Je dois encore monter ma centrale solaire sur ma nouvelle maison. J’ai 60 panneaux 330 W qui sont prêts à être installés, avec l’onduleur et 16 éléments 310 A lithium-fer-phosphate. Le pack disposera ainsi d’une capacité énergétique de 16 kWh, c’est-à-dire l’équivalent des premières Citroën C-Zero », schématise-t-il.

L’essai sur le camion à pizzas

« Pour sécuriser le système et obtenir des informations en temps réel, j’ai réalisé un boîtier à intercaler entre l’EV6 et le camion à pizzas. Le montage comprend un petit compteur de consommation, un disjoncteur différentiel, et un fusible de 15 A. Ainsi, la puissance maximale est limitée à 3,4 kW, soit un peu en dessous des 3,6 kW de la voiture », détaille notre interlocuteur.

« Lorsque la machine à café est arrêtée, la puissance du courant délivré oscille entre 1 et 1,3 kW. Avec la cafetière, elle grimpe à 2,9 kW, mais sur seulement quelques minutes. Ce qui reste bien en dessous de la limite des 3,6 kW du Kia EV6 », chiffre-t-il. « Au bout d’environ 80 minutes, nous avons relevé une consommation de 1,4 kWh. La capacité de la batterie est seulement descendue de 71 à 69 %. À noter qu’il est possible d’indiquer un pourcentage en dessous duquel ne plus alimenter une source externe. J’ai vérifié : le câble est resté froid. Le Kia EV6 se révèle être un super groupe électrogène », se réjouit-il.

Une solution d’alimentation curieusement très intéressante

« Pour Raynald, utiliser un Kia EV6 à la place d’un groupe électrogène a beaucoup de sens. En plus d’utiliser pour se déplacer une voiture électrique, il va rendre l’exploitation de son commerce plus écologique et plus économique », assure Laurent Méheut.

« Il pourrait bénéficier d’une LLD à environ 300 euros par mois. Pour sa société, le poids réel de l’opération s’élèverait à 100 euros hors électricité. L’option V2L est facturée une fois pour toutes 391 euros », met-il en avant.

« Nous avons en outre appris qu’une borne rapide allait prochainement être installée à 500 mètres de son camion. Batterie pleine, l’EV6 peut assurer 2, 3 ou 4 jours l’alimentation du camion. En conclusion, j’ai envie de dire que le V2L sur cette voiture électrique est vraiment un très bon dispositif. Je sais que Renault travaille sur un système similaire. Ce serait le bon moment pour le proposer », réfléchit-il.

L’avis d’un concessionnaire Kia

Nous avons tenté de joindre la concession qui a prêté l’EV6 à Laurent Méheut pour effectuer l’essai. Sans retour, nous avons donc décidé d’interroger le responsable de Kia Iffiniac, près de Saint-Brieuc, afin de recueillir son avis.

« Je trouve cette démarche très intéressante. C’est tout à fait dans la philosophie de Kia d’offrir une borne mobile pour des applications multiples de plus en plus nombreuses. Dans les Alpes, une concession a proposé une raclette derrière l’établissement. Nous-mêmes avons prévu une journée crêpes après Noël, pour démontrer tout l’intérêt du V2L », commente Stéphane Linossier. « Nos clients nous interrogent beaucoup sur cette fonctionnalité. Ils pensent recharger la voiture la journée avec des panneaux solaires, puis redistribuer l’énergie dans la maison à d’autres moments. L’un d’eux a prévu d’effectuer un montage avec un lave-linge et un sèche-linge », rapporte-t-il.

« L’expérience normande est très intéressante car, si Raynald poursuit son projet, l’achat de son EV6 va supprimer du circuit une voiture thermique et un groupe électrogène en une seule opération », encourage-t-il.

Automobile Propre et moi-même remercions beaucoup Laurent Méheut pour son témoignage très intéressant. Un grand merci également à Stéphane Linossier qui a bien voulu apporter son commentaire.