Renault Espace

Fort d’une histoire qui remonte à 1984, le Renault Espace est de retour. Mais les choses ont bien changé pour celui qui n’a plus honte de répondre aux codes modernes.

Les monospaces ont écrit des pages entières dans les livres d’histoires automobiles. Des véhicules ludiques qui ont réussi à séduire des millions de familles. Mais voilà, malgré leurs aspects pratiques imbattables, ces véhicules, hérités de ce qu’il se faisait alors aux Etats-Unis, ont été poussé aux oubliettes par les SUV : voulus moins ringards avec tous leurs gimmicks à la mode (on regrette encore le Toyota Previa cependant), les “surélevés” ont réussi à chiper la place aux monospaces.

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Le Renault Espace, le plus emblématique des monospaces, n’y fait pas exception. S’il a su conserver son apparence jusqu’en 2014, la cinquième génération a le séant entre deux sièges. Mi-monospace, mi-SUV, elle préférait le titre fourre-tout de crossover. Et la nouvelle et sixième génération s’inquiète encore moins de son identité, quitte à choquer les puristes : Espace est désormais le nom donné à la version allongée du Renault Austral, le SUV compact de la marque. Il succède donc au Renault Koleos pour venir dans le segment particulièrement occupé des SUV à 7 places. Avec une longueur de 4,72 m, il vient jouer des coudes, à quelques centimètres près, avec les Nissan X-Trail, Skoda Kodiaq ou Volkswagen Tiguan Allspace.

Une sensation d’Espace, mais une modularité de SUV

Cessons d’emblée l’analogie entre ce nouvel opus et ses prédécesseurs. Car s’ils ont le même nom, ils n’ont plus la même passion. Ainsi, le poste de conduite est bel et bien celui d’un SUV, en l’occurrence celui particulièrement réussi de l’Austral. On y retrouve le tableau de bord numérique OpenR Link hérité de la Megane e-Tech, une réussite tant en termes de présentation, d’ergonomie et de technologie. Ce dernier volet étant incroyablement détaillé par notre confrère David Nogueira lors de son essai de l’Austral e-Tech.

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Les différences commencent à apparaître au second rang, où les passagers peuvent profiter d’une vitre panoramique de 1,11 m2 au dessus de leur tête (toit non ouvrant) et d’un espace aux genoux généreux dans la configuration la plus reculée. De quoi augmenter à l’intérieur la sensation…d’espace. En revanche, si la banquette coulissante sur 22 cm en deux parties a de quoi séduire sur l’Austral, elle n’apparaît que comme un minimum syndical à bord de l’Espace, qui ne propose pas de mise en tablette du siège passager, ni sièges indépendants à la deuxième rangée. Bref, tout est dans les sensations, et les volumes dignes des monospaces appartiennent au passé.

Tout au fond, la place est comptée et les sièges sont à réserver aux plus petits gabarits : genoux surélevés, petits dossiers pas vraiment confortables, tête qui rase le ciel de toit, … les adultes tiendront difficilement. Rien de nouveau à ce chapitre, un Nissan X-Trail ne faisant pas beaucoup mieux. En revanche, l’accès à l’arrière est autrement plus compliqué avec l’Espace, et ce même si la banquette peut avancer sur 26 cm lors de l’opération : l’angle d’ouverture basique de la porte arrière (jusqu’à 85° sur le Nissan par exemple) ne facilite guère les manipulations ou la sortie. Côté coffre, le Renault Espace propose entre 477 et 677 l selon l’avancement de la banquette centrale. Une fois à plat, celle ci permet de libérer jusqu’à 1 714 l, alors qu’il faudra composer avec seulement 159 l avec la dernière rangée en place.

N’attendez pas la dépanneuse, achetez une version 7 places

A noter que le Renault Espace est aussi proposé en version 5 places, au même tarif que le 7 places. Dans ce cas, le volume du coffre propose 100 l de plus quelle que soit la configuration intérieure. De plus, de nombreux compartiments dans un bac amovible sont présents sous le plancher pour y placer des affaires supplémentaires. Utile. Cependant, cet espace est condamné sur la version 7 places en raison des fixations des sièges. Pour ne pas perdre inutilement l’espace, Renault a donc décidé d’y caser une roue de secours galette, qu’on ne retrouve pas sur l’Espace 5 places, qui préfère un kit anticrevaison pas toujours salvateur.

Un châssis ultra-affûté

Le Renault Espace reprend sans surprise la plateforme CMF-CD, que l’on retrouve aussi sous le Nissan X-Trail. Entièrement revue, elle donne des ailes aux SUV de la marque au Losange, et l’Espace n’y fait pas exception. Surtout s’il est équipé de la direction intégrale 4Control. Les réglages sont ici identiques à l’Austral, ce qui permet d’offrir au grand SUV une agilité sans commune mesure dans le segment. C’en est à se demander si le comportement n’est est pas trop incisif, voir agressif, pour un véhicule voué à transporter le maximum de personnes.

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Avec une démultiplication directe (un rapport de 13:1) et un amortissement assez ferme (quoique annoncé comme plus doux que sur l’Austral), la moindre injonction au volant se traduit par une vive réaction du châssis. Les sensations visent clairement celles du Peugeot 3008, qui fait figure de référence en matière de comportement. Utile sur les petites routes, même si le conducteur devra revoir ses habitudes pour ne pas mettre plus d’angle qu’il n’en faut. D’autant que comme la plupart de ces systèmes, les réactions ne sont pas linéaires d’une courbe à l’autre en fonction de la vitesse et de l’angle au volant.

Ceux qui veulent aller plus loin pourront même choisir parmi les 13 niveaux de réglage différents, qui influent sur les angles et temps de réponse. Utile sur une sportive, peut-être, mais sans doute de trop dans un SUV de ce type. A basse vitesse, l’effet est aussi bienvenu que perturbant : cela permet à l’Espace d’afficher un rayon de braquage équivalent à un Renault Captur, mais les manœuvres ou changements de directions (aux intersections glissées par exemple) secouent les passagers tant que l’on à pas trouvé le coup de main.

Une transmission hésitante

A l’instar du Nissan X-Trail e-Power, le nouvel Espace fait le choix d’une unique motorisation hybride. Mais point de technologie e-Power pour le SUV de Renault, qui conserve la chaîne de traction e-Tech de nouvelle génération. Ce complexe ensemble mécanique se compose d’un nouveau 3 cylindres 1,2 l turbo à cycle Miller (code HR12DDV), d’une machine électrique de traction de 70 ch et d’un alterno-démarreur de 25 ch. Les blocs électriques sont alimentés par une nouvelle batterie de 2 kWh, et la transmission s’effectue toujours avec la boîte à crabots, à la gestion électronique revue. Au total, il annonce 200 ch pour 305 Nm de couple.

A l’usage, tout du moins dans certaines limites, l’agrément de conduite n’a plus rien à voir avec les configurations précédentes du système e-Tech. Dans la plupart des cas, le SUV profite d’une bonne dose de couple à la remise des gaz. En ville c’est le moteur électrique qui prend le relais, alors qu’en dehors, le tandem hybride fonctionne de concert. Aussi piloté par les palettes derrière le volant, le système de récupération d’énergie apparaît redoutable pour recharger l’accumulateur. De quoi permettre de rouler près de la moitié du temps sans brûler une goutte d’essence sur un parcours mixte, voire bien plus en ville.

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En revanche, la quiétude est vite mise à mal par la gestion de la boîte. Si le ballet de cette transmission multi-modes, aussi simple techniquement que complexe à comprendre, est généralement imperceptible à basse vitesse, les complications apparaissent en dehors des cités : hésitations, à-coup, claquements, temps de réponse, … Elle souffre de la critique selon les situations. Lors des reprises, le temps de réponse de près de plus de 1,5 s apparaît comme une éternité derrière le volant. Avec la boîte plus en alerte, les choses s’améliorent en Sport avec un temps de 5,8 s contre 6,5 s en mode Confort.

Mais ce n’est pas tout. A basse vitesse, la boîte délivre quelques à-coups, parfois violents. A un rythme plus élevé, les hésitations sont plus régulières et donnent lieu à des trous à l’accélération qui ne permettent pas de profiter totalement de l’agrément de conduite. A la consistance de la pédale de frein qui évolue en fonction du niveau de régénération s’ajoutent aussi des à-coups en provenance de la boîte. Bref, la conduite n’est pas aussi souvent apaisée et apaisante comme le voudrait cette motorisation e-Tech. De quoi être davantage séduit par l’excellente transmission à train épicycloïdal d’une hybride Toyota, ou par la redoutable fluidité de la transmission électrique du système e-Power japonais.

Plus sobre et abordable que ses concurrents

Les multiples évolutions à la seule force du moteur électrique permettent de limiter drastiquement les consommations. Sur les banc d’homologation WLTP, le SUV annonce entre 4,6 et 4,9 l/100 km, soit à peine plus que l’Austral dont il dérive à finition équivalente (+ 0,1 l/100 km). Au terme de notre essai sur un parcours relativement exigeant, mais avec peu d’autoroute, nous avons relevé une moyenne finale de 6,6 l/100 km. Voilà qui le place en très bonne position face à ses concurrents hybrides : il faudra compter 1 l de plus avec le Nissan X-trail et près de 2 l de plus avec un Hyundai Sante Fe. Le Toyota Highlander est aussi devancé, mais il convient de souligner ses dimensions et son poids plus importants.

Malgré son nom évocateur chez nous, le nouveau Renault Espace n’est pas un monospace et n’est pas à mettre en face de ces derniers. De toute manière, il souffrirait de la comparaison en raison de ses aspects pratiques plus limités : coffre dans la moyenne, places arrière de secours, modularité basique, … C’est un grand SUV qui se place au milieu de la mêlé, sans plus. Il se montre plus singulier en matière de motorisation, puisqu’il est l’un des rares à ne proposer qu’un moteur hybride. Si la consommation est très correcte pour le segment, la gestion ne permet pas de profiter de l’agrément cependant. La douceur sera principalement au rendez-vous pour les taxis ou VTC qui utiliseront ce SUV en ville, mais moins pour les familles qui envisageraient de revivre les aventures qu’elles ont pu connaître à bord des monospaces de la marque.

Le Renault Grand Austral, pardon, Espace, a dans le viseur le Peugeot 5008 vieillissant, qui ne propose pour l’instant aucune forme d’électrification, tout comme le Skoda Kodiaq. Pourtant, ce n’est pas les technologies hybrides rechargeables qui manquent chez l’un ou l’autre. Ni même chez Renault d’ailleurs (en tout cas avec l’ancienne mouture du système e-Tech), qui ne se dit pas encore prêt à l’installer sous les capots des Austral et Espace en raison de la faible demande. Bref, il devrait donc conserver son unique moteur hybride, le mettant dans la ligne de mire de ses concurrents japonais et coréens.

Trois niveaux de finition sont proposés à partir de Techno, le cœur de gamme de l’Austral. Le catalogue s’ouvre ici à 44 500 €, soit 3 000 € de plus que l’Austral équivalent. En version Iconic haut de gamme présenté sur cet essai, le tarif monte à 49 500 €. Avec des niveaux de CO2 allant de 104 à 108 g/km (+2 g/km en 7 places, avec un maximum de 109 g en Iconic) l’Espace évite le malus écologique, alors que son poids de 1 773 kg lui évite la taxe sur la masse en ordre de marche. Autant de coups de massue administratifs que ne peuvent pas éviter ses concurrents hybrides suscités, aussi plus chers à l’achat.

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