Des incertitudes planent sur le marché de la voiture électrique. La forte progression des ventes pourrait être stoppée l’année prochaine.

Ebranlé par le Covid et ses conséquences, dont la pénurie de semi-conducteurs, le marché automobile européen reste convalescent. Certes, les ventes sont orientées à la hausse. Sur les dix premiers mois de l’année, 8,8 millions de véhicules neufs ont été immatriculés dans l’Union européenne, une progression de 16,7 % par rapport à 2022. Mais on reste encore loin du niveau d’avant Covid.

Et l’industrie automobile s’attend déjà à une année 2024 assez moyenne. Selon l’ACEA, le marché devrait rester faible en 2024. L’association des constructeurs l’estime à 10,7 millions d’unités, soit une hausse d’environ 2,5 % par rapport à 2023. En 2019, on était à 15 millions de véhicules !

Si le marché global va faire du surplace, toujours selon l’ACEA, cela ne devrait pas être le cas du secteur de la voiture électrique, déjà en pleine explosion, que ce soit en volumes ou en part de marché. Côté volumes, de janvier à octobre, plus de 1,2 million de voitures électriques ont été immatriculées dans l’Union, soit une progression de 53 % en un an. La part de marché est passée de 10,7 à 14 %. L’ACEA estime que cette part frôlera les 20 % en 2024.

En clair, dès l’année prochaine, une voiture sur cinq vendue en Europe sera déjà électrique. Il y a toutefois des disparités entre les pays, certains étant largement en avance (on pense évidemment aux pays nordiques), d’autres encore à la traine. La progression globale des volumes en 2024 doit notamment passer par ces pays en retard.

Car dans les pays plus avancés, la perspective d’une stabilisation voire d’un ralentissement des ventes est évoquée. D’ailleurs, en France, les marques sont déjà confrontées à un tassement des commandes. Celui-ci s’explique par l’inflation qui pèse sur le budget des ménages et n’aide pas à vendre des voitures, quel que soit le moteur sous le capot.

Il y a aussi le grand flou qui règne sur de nombreuses réglementations. Depuis plusieurs mois, le gouvernement évoque par exemple un renforcement du bonus pour une partie des Français, de quoi inciter à attendre. Les conducteurs sont aussi perdus face aux ZFE, d’autant que l’exécutif a fini par lâcher du lest mi-2023, ce qui a permis à des métropoles de revoir leur calendrier de mise en place des restrictions. Des conducteurs reportent donc leur achat avant d’y voir plus clair.

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Et cette période brumeuse peut finalement s’éterniser. 2024 s’annonce en effet comme une année de transition, pour plusieurs raisons. La première est politique. Carlos Tavares, le patron de Stellantis, a attiré l’attention sur le fait que des élections importantes vont avoir lieu en 2024, avec le renouvellement du parlement européen en juin, puis la présidentielle américaine en novembre.

Il estime que ces échéances électorales peuvent entrainer une baisse des ventes de voitures électriques. D’abord, avec l’attente des résultats des votes, puis peut-être avec l’arrivée au pouvoir de personnes ou groupes politiques moins favorables à une électrification rapide des marchés. On pense par exemple au retour possible de Donald Trump, qui a récemment fait de la voiture électrique une nouvelle cible à abattre.

La transition 2024 porte également sur l’offre de véhicules. Des clients guettent l’arrivée de modèles moins chers, promis depuis des années. On pense par exemple au lancement de citadines bien moins onéreuses, comme les Citroën ë-C3, Fiat Panda et Renault R5, qui commenceront à moins de 25.000 € hors bonus. La guerre des prix va aussi s’intensifier dans les segments supérieurs. Renault a par exemple promis que le Scénic débutera à moins de 40.000 €, ce qui va donc mener à un recul des prix de la Megane.

Mais tous ces modèles et baisses de prix ne seront pas concrétisés dès janvier, ils arriveront au fur et à mesure de l’année 2024 ! De quoi donc ajouter à cet effet d’attentisme qui plane sur le marché de la voiture électrique, et renforcer l’idée qu’un ralentissement des ventes d’électriques peut avoir lieu, avant un nouveau décollage en 2025, celui qui mènera vers le tout électrique.

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