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Appréciant les efforts de la France pour déployer un réseau de recharge satisfaisant pour véhicules électriques, Fastned sort des autoroutes pour ouvrir de nouvelles stations dans les villes. Entretien avec Pierre Courgeon et David Germany, respectivement responsable de la branche française et des affaires publiques France/Belgique pour l’opérateur néerlandais.
S’il y a un réseau de recharge que l’on repère de loin, c’est bien Fastned avec ses ombrières photovoltaïques bordées de jaune. Il est actuellement composé de 280 établissements ouverts dans six pays. « Notre design sert trois objectifs : la performance économique des stations, la capacité à s’agrandir grâce à la modularité des structures, et l’expérience utilisateur. C’est ce que nos architectes maison ont en tête en concevant les nouveaux sites », explique Pierre Courgeon.
Ce n’est pas sans raison que l’opérateur privilégie les stations traversantes : « Les clients n’ont ainsi pas besoin de manœuvrer. Ils rentrent et ils repartent ensuite directement en marche avant. C’est beaucoup plus fluide. Ce qui permet de servir davantage de véhicules dans la même durée. Le gain est de 30 % en période d’affluence ».
Même l’espace entre les bornes est calculé : « La configuration tient compte de tous les emplacements possibles de la trappe de recharge, à l’avant ou à l’arrière, à gauche comme à droite. Aux Pays-Bas, le caravaning avec des voitures électriques est déjà courant. C’est pourquoi la distance entre les chargeurs doit permettre de ne pas en bloquer un quand une voiture attelée d’une caravane arrive en station ».
L’agencement des stations est également idéal pour les utilitaires : « Ils se développent énormément pour la logistique du dernier kilomètre dans les zones urbaines et périurbaines. Les concernant, la pause du déjeuner est un bon moment pour effectuer une recharge. La hauteur de la canopée permet aussi d’accueillir des poids lourds qu’on ne voit pas encore en France ».
La puissance de recharge est toutefois plus que suffisante pour recevoir tous ces véhicules : « Nous l’anticipons en fonction de l’arrivée des nouveaux modèles de VE afin qu’elle soit toujours un peu supérieure à ce qu’ils peuvent soutenir. Actuellement, nous déployons des bornes 400 kW. Dans nos stations, la durée moyenne de recharge est de 20 minutes, avec une tendance à la baisse. Nous devrions un jour n’être qu’à une dizaine de minutes, et peut-être à pas plus de temps que pour effectuer un plein en carburant ».
Le réseau se déploie dans une démarche de réduction de son empreinte environnementale : « La production des panneaux solaires sur les canopées alimentent les chargeurs, le reste étant injecté sur le réseau national. Le bois utilisé pour construire les stations provient de forêts durables. Déjà aux Pays-Bas, nous employons des engins électriques pour les travaux ».
À lire aussiCharge rapide : comment Fastned compte conquérir le marché françaisLes stations Fastned sont construites de façon bien identifiable : « Nous avons développé une image de marque. Avec elle, les clients savent où ils doivent aller. Nous ne voulions pas de situations accidentogènes comme c’est le cas lorsqu’il faut chercher une borne au fond d’un parking entre des poubelles. Sur Google, nous obtenons 4,4 étoiles sur un maximum de 5. Nos stations sont aussi très bien notées sur Chargemap ».
L’opérateur bénéficie d’une image de qualité : « La disponibilité atteint plus de 99 % dans nos stations. Pour la transparence, ce serait bien que tous les opérateurs affichent leurs performances. Nous avons travaillé l’accessibilité afin de faciliter l’usage à tous, y compris les personnes à mobilité réduite. Dans ce sens, nous avons un système de communication par WhatsApp avec de l’écrit pour les malentendants. Grâce aux caméras de vidéosurveillance, nos sites sont perçus comme rassurants ».
Pierre Courgeon se souvient d’une anecdote à l’ouverture de la toute première station Fastned en France : « C’était un samedi soir, une cliente avait un problème de câble qui ne voulait pas se retirer du connecteur. Elle devait aller chercher sa fille. L’opératrice du service client parlant français était absente. L’assistance a basculé l’appel vers moi. Nous nous sommes débrouillés pour envoyer quelqu’un sur place. C’est ça le niveau de service que nous voulons développer, où le Country Manager peut aussi être dérangé pour résoudre un problème ».
Pour l’amélioration globale du service et de son image, Fastned apporte régulièrement de nouvelles petites améliorations « pour un moment de vie plein de sens ». C’est par exemple de petits îlots végétalisés ou des espaces sportifs. Et puis il y a le projet Gentbrugge en Belgique. « C’est entre Gand et Bruges. C’est là que nous allons ouvrir en 2024 notre première station avec une expérience utilisateur complète. Il y aura une aire de jeux pour les enfants et un petit magasin à côté qui permettra de prendre un café le temps de la recharge », révèle David Germany.
Dans les prochaines ouvertures, en France, il y a la station urbaine de Quimper, dans le Finistère. Comme celles mises en service sur l’autoroute, elle va adopter un agencement modulaire. « Quand on sécurise un espace, c’est pour les 10 ou 20 ans à venir. Ce qui permet d’ajouter progressivement, en fonction des besoins, des modules supplémentaires avec chacun sa propre canopée », détaille Pierre Courgeon.
La nouvelle station bretonne devrait être inaugurée en décembre : « Elle sera localisée près de la rocade, à une minute de la bretelle d’accès. C’est un lieu de passage important, avec de nombreux trajets pendulaires. Ce sera une vraie station, avec un ensemble de services tout à proximité pour bien faire sa pause. Nous travaillons avec la mairie et le député du territoire ».
« Concernant la recharge des véhicules électriques, les Pays-Bas et la Norvège sont en avance. En ayant rattrapé son retard de façon spectaculaire, la France est aussi un pays modèle. L’Europe ambitionne de devenir le premier continent neutre en carbone. La mobilité est le secteur sur lequel on peut le plus agir. Ces dernières années, ses émissions ont continué à augmenter », indique David Germany.
Pierre Courgeon confirme les efforts effectués dans notre pays : « La France est aujourd’hui sur la deuxième marche du podium en Europe concernant la recharge. En deux ans, 100 000 points publics ont été déployés sur ses autoroutes. Son parc compte 650 000 véhicules électriques. On en attend six millions en 2030. À l’échelle de l’Europe, ils devraient être 40 millions, avec 500 000 points de recharge ».
Un constat : « Si le réseau concédé a pu se mettre à niveau rapidement, ce n’est pas le cas sur ce que l’État français a en propre. Les bornes en voirie prennent de l’espace public et suppriment des places de stationnement, en particulier pour les véhicules thermiques. C’est un système brinquebalant avec un modèle économique qui n’est pas stable. S’il n’y a pas d’investissement, ça ne marche pas ».
Les stations de recharge pourrait-elle servir le développement économique des territoires ? La réponse est positive pour Fastned. Pierre Courgeon cite en exemple le village des peintres impressionnistes : « Les stations peuvent dynamiser des zones moins visibles. Je pense à Barbizon où Tesla a ouvert une station à proximité. C’est l’occasion pour les utilisateurs de véhicules électriques de faire une pause dans ce village. La recharge donne une visibilité sur les commerces locaux, et en particulier sur les restaurants ».
En plus d’agir sur le levier économique, la recharge rapide soutient les actions législatives qui visent à améliorer la situation environnementale. Tous les territoires ne sont pas conscients de l’importance de déployer des bornes.
David Germany cite en exemple la Wallonie, en Belgique : « Nous peinons ici à faire comprendre qu’il n’y aura pas de véhicules électriques s’il n’y a pas de moyens pour les recharger. Pour se rendre de Bruxelles à Marseille, une fois la frontière franchie, il y a des aires de service un peu partout qui proposent la recharge. Le règlement européen Afir sur le déploiement des infrastructures de ravitaillement en carburants alternatifs a ça de bien d’imposer des stations de recharge tous les 60 km au minimum sur les grands axes ».
À lire aussiTémoignage vidéo – « J’ai acheté mon Tesla Model Y avant la baisse des prix mais ça ne m’embête pas plus que ça »Le responsable des affaires publiques pense aussi aux « 13 millions de Français qui résident dans l’habitat collectif, avec un accès difficile à la recharge ». Il rappelle que « le gouvernement veut aller plus loin que les directives européennes, par exemple avec le bonus écologique et le leasing social à 100 euros par mois pour avoir une voiture électrique ». Cette démarche pousse au développement de la recharge rapide dans les villes.
Pour Pierre Courgeon, elle doit être proposée dans de vraies stations : « À l’image des stations-service classiques. Nous travaillons beaucoup sur le terrain avec des boulangeries. Ainsi, le samedi ou le dimanche matin, l’automobiliste qui ira chercher son pain pourra en profiter pour recharger la batterie de son véhicule électrique, comme il fait aujourd’hui le plein en carburant. La recharge rapide dans une ville rend visibles les actions des mairies pour la transition énergétique/écologique ».
Fastned internalise tous les métiers nécessaires à son activité. « Nous avons des chefs de chantier, des équipes pour la maintenance et le service client. En France, nous avons par exemple quatre architectes, et nous allons encore en recruter deux ou trois », souligne David Germany.
Automobile Propre et moi-même remercions Pierre Courgeon et David Germany pour leur disponibilité. Un grand merci également à Eugénie Daly, en charge de la communication, qui nous a organisé l’entretien.
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