« Mobilité durable » : Derrière ces mots, l’idée de déplacements moins agressifs pour l’environnement et la santé publique. Mais la balle est aussi dans le camp des pouvoirs publics et collectivités qui vont devoir repenser l’aménagement des rues et des routes en conséquence.

Accidents et pollutions

Dangereux, inutiles, facteurs de pollutions et d’énervements, etc. : La liste est longue des qualificatifs que l’on peut trouver pour évoquer certains agencements sur les routes qui semblent d’un autre âge, car tellement inadaptés ou contre-productifs. Et pourtant les ralentisseurs illégaux, l’attribution de semblants d’espaces cyclables, des panneaux lumineux mal réglés, des passages pour les piétons disposés en dépit du bon sens, etc. continuent d’exister, et même de se développer.

L’idée d’une mobilité durable doit aussi prendre en compte la pollution (gaz toxiques, particules fines, CO2) et la dangerosité potentielles générées par les aménagements des voies de circulation. Voici une dizaine d’exemples de ce que l’on ne devrait plus voir, et que nos lecteurs sont appelés à compléter par leurs propres expériences.

1 – Les dangereux passages pour piétons

Lorsque l’on évoque des passages dangereux pour piétons, on imagine de suite que ce sont uniquement ces usagers qui risquent leur vie en les empruntant. Quelques images de situations arrivent à l’esprit : dans la rocade d’un rond-point pour accéder à un petit parc central ; juste avant l’accès à un autre rond-point alors que les automobilistes ont tendance à regarder les voitures qui viennent à gauche pour s’engager ou non ; implanté à la sortie d’un virage sans visibilité, au sommet d’une côte, en bas d’une descente, etc. Mais un passage pour les piétons peut aussi représenter un danger pour les automobilistes. Ainsi celui sur notre première photo, emprunté en particulier par des collégiens et lycéens, et situé en sortie d’un passage à niveau à 3 voies séparées entre elles par un terre-plein central. A peine en train de chevaucher les rails, des conducteurs sont régulièrement surpris par des piétons. Résultat : les véhicules doivent s’immobiliser entre les 2 barrières, avec le risque de voir ces dernières s’abaisser. Et si ce sont plusieurs engins qui sont bloqués, le cédez-le-passage qui suit ne va pas toujours leur permettre de dégager rapidement des voies.

2 – La piste cyclable qui n’en est pas une

Que penser de la signalisation au sol que l’on peut observer sur notre deuxième photo ? En ville, la distance réglementaire pour dépasser un cycliste est de 1 mètre. On peut supposer que la municipalité responsable de cet aménagement cherche à s’attribuer le mérite de développer des voies cyclables. Mais dessiner au sol des vélos ne change pas grand chose dans une rue où la largeur n’est pas suffisante pour qu’une voiture et un deux-roues puissent évoluer côte à côte.

Dans cette voie, il aurait été possible, afin de délimiter un véritable espace protégé pour les cyclistes, d’interdire le stationnement et surtout de ne pas provoquer un étranglement artificiel à l’arrivée du carrefour. Afficher une politique favorable à la pratique du vélo n’est pas qu’une vue de l’esprit. Il s’agit d’un véritable engagement à faire en sorte que ses usagers puissent véritablement se déplacer en toute sécurité.

3 – Des aménagements bloquants

Sur cette troisième photo, l’on ne voit qu’un rond-point. A proximité se trouvent plusieurs établissements scolaires. D’anciens et récents aménagements, – dont une chicane dans un virage et des barres verticales métalliques -, qui empêchent les cars scolaires d’évoluer correctement sur ce site. Au mieux, les chauffeurs manœuvrent dans le giratoire puis font reculer leur véhicule dans une rue à sens unique, en barrant l’accès au parking des deux-roues quand ils attendent les élèves, parfois plusieurs dizaines de minutes. Au pire, quand les enfants doivent descendre, les conducteurs positionnent en travers le car pour bloquer quelques minutes le rond-point, le temps que tous le monde soit sorti.

4 – Des panneaux lumineux qui aveuglent

Ce que l’on ne voit pas sur cette photo, c’est que ce panneau lumineux très puissant est installé sur un tronçon long d’environ 80 mètres pris en sandwich entre deux virages à 90 degrés. Avant d’arriver sur lui, les usagers de cette rue sortent d’une zone de circulation à 30 km/h et retrouvent la liberté d’accélérer jusque 50 km/h, ce qui n’est faisable en réalité qu’avec une conduite de pilote de rallye.

Le panneau lumineux restitue la vitesse du véhicule qui se présente : en vert jusqu’à 50 km/h, et en rouge au-delà. De jour, pas de problème ! Mais lorsqu’il fait nuit, le vert est si puissant et son affichage si furtif, – répété 3 fois avec plusieurs secondes secondes d’intervalle -, que ceux qui n’ont pas l’habitude de fréquenter ce site pense avoir été flashés pour excès de vitesse et cherche à repérer le radar. Les autres cachent préventivement leurs yeux avec une main pour ne pas être aveuglés. Dans les 2 cas, l’attention des conducteurs est détournée d’une rue à droite et du passage pour piétons situés juste ensuite. Cet afficheur, à cet endroit, est inutile et crée un véritable danger. Pourquoi sa luminosité n’est-elle pas fonction de celle de son environnement ?

5 – Un carrefour rendu dangereux

La photo ne rend pas bien compte de la situation. Des travaux d’aménagement ont été réalisés ici pour faire réduite la vitesse des véhicules et en particulier des poids lourds. Dans ce carrefour en T, la route de gauche, non prioritaire, est en monté. Lorsqu’on s’arrête à son stop, impossible de voir les véhicules qui viennent de gauche ou de droite sans s’avancer au-delà de la ligne blanche. Le problème est que la municipalité du bourg concerné a ici pris la décision de réduire ce passage au niveau de la voie principale en faisant ramener les véhicules vers le centre de la route, et ce : des 2 côtés. Nous sommes dans un virage sans visibilité.

L’aménagement, avec des angles saillants, n’est pas signalé. Quand on monte la rue principale en voiture et qu’un camion descend en sens inverse, l’impression est que le poids lourds qui ne peut faire autrement que de mordre généreusement la ligne blanche va vous percuter. Quand ce sont 2 camions qui se croisent, la situation est particulièrement délicate. Ceux qui ne connaissent pas ce carrefour se retrouvent donc déportés sur la gauche sans trop s’en rendre compte, et, surtout, sans savoir que ceux qui arrivent en face vont devoir en faire autant. La vitesse qui aurait pu mériter d’être réduite à 30 km/h est classiquement laissée à une limite de 50 km/h.

6 – Descente devenue dangereuse et diversement problématique

Nous sommes ici dans une rue fortement en pente. En haut : la campagne ; en bas, un lotissement. Un bras de ce dernier se trouve au-dessus de cet aménagement en chicane. Les débords particulièrement menaçants ont eu dernièrement pour effet de dissuader certains riverains de sortir de chez eux à cause de la neige et du verglas. Le risque est trop grand, alors qu’il faut modifier par 2 fois sévèrement la trajectoire, de fracasser son véhicule s’il commence à glisser.

Par ailleurs, cette rue est empruntée par d’imposants engins agricoles parfois équipés de remorque. Désormais, pour eux, emprunter ce passage les oblige à mordre sur les trottoirs en roulant au pas pour ensuite accélérer brutalement. Les riverains profitent généreusement des gaz d’échappement produits par cette situation !

7 – Ralentisseur en chicane en sommet de côte

Les conducteurs ne voient quasiment qu’au dernier moment les voitures qui arrivent en face, les obligeant à freiner brutalement lorsque c’est le cas. Pas d’école, pas de commerce, pas d’affluence qui nécessite vraiment de favoriser la rue que l’on devine à droite. Sur à peine 1 kilomètre, cette voie est barrée par 5 ralentisseurs de présentation différente. Comme cette chicane en sommet de côte qui en fait partie, ils n’ont qu’un objectif : faire ralentir ! Mais c’est souvent le contraire qui se produit. Sachant qu’ils risquent d’être bloqués par une file de voitures venant en sens inverse, les conducteurs abordent ce passage largement en excès de vitesse en espérant passer sans avoir à s’arrêter.

Quand une colonne doit céder le passage, on imagine très bien la pollution artificiellement générée par les freinages brutaux et les redémarrages musclés, et subie par les riverains. En outre, avec la neige et le verglas, aborder cet endroit est très délicat. La première voiture qui se met en travers en tentant de repartir, – le lieu étant devenu particulièrement glissant du fait des redémarrages successifs des véhicules précédents -, bloque la circulation dans les 2 sens.

8 – Ralentisseur en bas d’une descente

Selon le sens de circulation, ce ralentisseur succède ou précède la chicane que nous venons de voir. La photo ne reproduit pas bien la situation. Cet aménagement est niché tout au creux d’une cuvette dont les bords sont matérialisés par des tronçons de route en forte pente. De ce fait, les véhicules arrivent déjà bien lestés de l’avant, et doivent encore freiner.

Passer à cet endroit à 30 km/h, comme l’autorise au maximum la signalisation n’est possible que pour de rares engins. Pour qui ne connaît pas ce lieu, le risque est d’abîmer méchamment sa voiture, notamment si le conducteur compte sur le fait que la limitation de vitesse est réaliste par rapport à la possibilité de franchir ce passage. Les amortisseurs et la jupe avant sont les pièces qui souffrent le plus de ce ralentisseur. Le quadricycle présent sur cette photo a dû l’aborder quasiment au pas.

9 – Ralentisseur trop haut

Bien qu’il existe un cadre à respecter par les collectivités pour construire des ralentisseurs, force est de constater qu’ils sont souvent trop élevés lorsqu’ils sont goudronnés. Il suffit de repérer les marques de friction qui témoignent que des soubassements ont souffert sur nombre de ces ouvrages. Ce type de ralentisseurs ne place d’ailleurs pas tous les conducteurs au même niveau. Un quadricycle léger, qui ne serait certainement pas en excès de vitesse ici, va devoir ralentir encore et bien plus qu’un conducteur de gros SUV qui pourra se moquer d’une limitation à 30 km/h. Il se crée donc une situation de différence qui privilégie la possession d’engins dont les caractéristiques devraient les réserver à la route et non aux rues.

En règle générale, dénoncer un ralentisseur illégal ne sera pas suivi d’effets. Essayer de se faire rembourser la casse sur sa voiture à cause d’un tel équipement est un parcours du combattant qui mène le plus souvent à rien. Toutefois, le conducteur d’une Ferrari a obtenu gain de cause en novembre 2017 face à la commune de Roquebrune-sur-Argens, dans le Var, qui devra payer la facture des réparations, pour quelque 2.000 euros !

10 – Fin de 30 km/h avant un stop

Quel intérêt de placer une fin de limitation de vitesse à 30 km/h quand on arrive sur un panneau stop, ici placé dans une descente assez accentuée ? « Il y a des règles à respecter sur la longueur des zones à 30 km/h selon la configuration des lieux », répond un élu municipal en charge de la voirie.

Voilà, c’est tout bête, c’est administratif ! Sauf que l’on peut lire cette situation comme un encouragement à accélérer puis à piler devant la ligne blanche. Ce qui est parfaitement contraire à la notion de mobilité durable ! Cet exemple illustre parfaitement les incohérences que l’administration va devoir gommer pour réellement pouvoir revendiquer la favoriser et la mettre en œuvre.