Milence, une société néerlandaise spécialisée dans les stations de recharge pour camions électriques, a choisi la France pour sa seconde implantation. Automobile Propre était présent à l’inauguration de cette station à Heudebouville, au sud de Rouen. L’occasion de décortiquer la stratégie de cet acteur qui entend bien compter dans la décarbonation de la mobilité au cours des années à venir.
Milence inaugure sa première station en France, près de Rouen
Cette station de recharge pour camions électriques ne ressemble pas à l’idée que l’on peut se faire d’un tel endroit. Le design a été placé au cœur de la réflexion. Les grandes arches en bois sont visibles de loin et elles sont particulièrement esthétiques. À Heudebouville, la station se trouve à environ 4 km de l’autoroute, au sein d’un centre logistique important, l’Ecoparc. Cet emplacement n’a évidemment pas été choisi par hasard. Le sud de Rouen, en Normandie, est un carrefour stratégique.
La station se trouve entre Paris et l’ouest de la France et permet également aux poids lourds électriques qui descendent du Havre, second plus grand port de France, d’y faire un arrêt pour se recharger. Bernard Leroy, président de l’Agglomération Seine-Eure, présent pour l’inauguration, estime de son côté qu’il s’agit de la première étape d’une décarbonation globale du territoire : « l’arrivée de Milence est un symbole de notre stratégie, comme un coup d’envoi officiel ».
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Mais y a-t-il suffisamment de camions électriques pour justifier l’ouverture d’un tel lieu ? Telle est la question et on imagine bien les anti-électriques s’en emparer pour critiquer ce nouvel investissement. Aujourd’hui, il n’y a que 2 500 camions électriques en Europe. C’est peu, mais ils seront 1 million sur nos routes d’ici à 2033. Et une infrastructure digne de ce nom est essentielle pour permettre leur développement. C’est ce que nous explique Aymeric de Lencquesaing, responsable France chez Milence.
Selon lui, le maillage européen est indispensable. « Sans cela, un transporteur ne peut pas se permettre de passer sa flotte à l’électrique », précise-t-il. Avec l’axe Rhin-Rhône, la France est une véritable colonne vertébrale pour le transport. « L’électrification ne doit pas se limiter pas aux voitures particulières ». Il rappelle que les poids lourds représentent 5,5 % des émissions de CO2 en Europe, « ce qui représente une véritable opportunité de décarbonation ».
1 700 points de charge d’ici à 5 ans pour Milence
L’ambition de Milence est de déployer 1 700 points de charge en Europe d’ici à cinq ans. La société néerlandaise a bien conscience qu’elle ne sera pas la seule sur ce créneau. 11 000 bornes de recharge pour les camions électriques sont attendues d’ici à 2030 en Europe. Mais elle veut tenir le rôle de catalyseur en impulsant une dynamique. Il faut dire que les équipes de Milence sont particulièrement efficaces. Pour faire sortir de terre cette station à Heudebouville, il ne leur aura fallu que six mois.
La recette miracle pour Aymeric de Lencquesaing est la suivante : une implantation à proximité des grands axes et des grands hubs (ports, aéroports, centres logistiques) et des bornes ouvertes, fiables (c’est la garantie d’une efficacité pour les transporteurs) et durables (avec des matériaux respectueux de l’environnement et une énergie décarbonée). J’ai également eu l’occasion de poser quelques questions à Anja van Niersen, PDG de Milence.
Sur les ambitions du groupe, elle m’explique que la société a un « certain nombre de centres sous contrat et en cours de développement dans 8 pays européens, qui seront progressivement ouverts d’ici à la fin de 2024 et au-delà ». Des prochains centres en France seront communiqués dans les prochaines semaines et leurs ouvertures sont prévues pour cet été. L’aventure va donc s’accélérer pour Milence.
Sur le nombre de camions attendus à la station d’Heudebouville, la PDG de la société dit être convaincue que, « comme le premier centre que nous avons ouvert à Venlo, aux Pays-Bas, celui qui se trouve près de Rouen aura une belle fréquentation ». Selon elle, de nombreuses entreprises de logistique ont prévu de l’intégrer dans leurs opérations. À la suite d’une question posée par un lecteur d’Automobile Propre, elle me précise que « les voitures ne peuvent pas utiliser les stations Milence ».
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Lorsque je lui demande si le marché européen est prêt à faire cette transition vers les poids lourds électriques, Anja van Niersen affirme que « l’électrification est là pour durer ». Elle est convaincue qu’il s’agit de la « solution la plus rapide pour un transport routier durable ». Milence a prévu d’installer la recharge MCS d’ici à la fin de l’année. Une technologie qui va permettre d’offrir de meilleures performances de charge aux camions et bus électriques à l’avenir.
Pourtant, force est de constater que le marché de l’électrique subit un ralentissement en ce début d’année 2024. La PDG de Milence en a conscience et me précise à ce sujet que « la transition vers l’électrification est encore confrontée à certains défis, mais ceux-ci peuvent être surmontés grâce à des stratégies et des politiques adéquates ».
Elle estime que l’un des plus importants est de « préparer les réseaux électriques pour répondre à la demande accrue de véhicules électriques à venir ». Ce sujet, ainsi que « la complexité du partage des données entre les différents systèmes » et « la garantie d’une interopérabilité totale, sont des éléments clés du nouvel écosystème qui doit être conçu », me précise-t-elle.
Sinon quelques infos techniques genre nombre de bornes, puissance maxi, mode d’alimentation (réseau direct, powerpack intermédiaire etc) ne serait pas superflu
1700 bornes en Europe délivrant disons 500kW (en crête 1MW) pendant 16h par jour (je neutralise la nuit), 300 jours ouvrés par an (je neutralise les dimanche et fêtes, en négligeant les SR frigo) avec un rendement de conversion 70% (car ce n’est pas près des “hubs” commerciaux qu’il faudrait les construire mais en pied de sous-station RTE ou leur équivalent chez nos voisins). Cela représente un appel de courant de 4.1TWh (un PWR de 900MW produit environ 6TWh par an sur 330 jours productifs par an). Et 1700 bornes pour PL c’est très peu si on rapproche ce chiffre des 450 000 bornes pour VL qui existent en Europe. Donc :
1-si en 2030 on a construit et raccordé aux réseaux européens 11 000 bornes pour PL comment se fera le partage productif entre pays des 26TWh/an (1.56G Euro au PRU actuel de 60Euro du MWh) nécessaires alors que les réseaux ouest-européens sont au bord du point de rupture en terme de soutenance des pics de consommation (18-20h) ?
2-Combien faudrait il de bornes PL pour alimenter disons 200 000 camions électriques en Europe en 2030 (source cabinet Roland BERGER)?
Si des “entrepreneurs” ont qq conscience du confort (bonheur) collectif qu’ils investissent dans de la R&D sur des STEP ou autres moyens de stocker puis restituer de l’énergie: c’est l’angle mort des ENR : la faible capacité de pilotage de la production pour équilibrer offre et demande courant.
C est un excellent debut il faut enfoncer le clous.
“Impulser une dynamique” c’est bien mais 1700 points de recharges, c’est pas un peut ambitieux ?
Pour les arches en bois, c’est beau mais je trouve que c’est du gaspillage de ressource car elles n’ont aucune autre utilités.