Les assemblées générales de Shell et TotalEnergies ont connu des perturbations, à Londres et Paris. Les militants écologistes ont tenté de mettre les actionnaires récalcitrants devant leurs responsabilités.

La situation était étonnamment similaire entre les capitales française et anglaise cette semaine. L’assemblée de Shell, mardi à Londres, et celle de TotalEnergies, mercredi à Paris, ont subi les perturbations d’associations écologistes. Mais ce n’était pas le seul point commun, avec un vent de révolte soufflant au sein des assemblées.

Un vent de rébellion au sein de TotalEnergies

À Paris, c’est à la Salle Pleyel que TotalEnergies tenait son assemblée générale annuelle. Peu d’actionnaires étaient présents, et la firme avait interdit aux journalistes d’apporter leur ordinateur.

C’est la correspondante des Échos, présente pour l’AG, qui a noté ce détail qui n’en est pas franchement un. Il semble en effet que l’entreprise pétrolière française ait fait le nécessaire pour tenir cette réunion le plus discrètement possible.

La raison à cela est très simple, puisque TotalEnergies craignait que certains de ses actionnaires ne s’emparent du sujet environnemental. La firme a en effet instauré un « say on climate », c’est-à-dire un vote consultatif sur divers sujets concernant l’écologie.

À lire aussi Voiture électrique : quels modèles « made in France » en 2021 ?

Les investisseurs sont désormais libres de refuser certains projets ou certaines décisions, et de plus en plus comptent l’utiliser. Ce vent de rébellion vient justement du non-respect des Accords de Paris, qui inquiète et agace certains actionnaires.

La résolution climat de TotalEnergies en 2021, qui ne respecte aucunement les Accords de Paris, avait obtenu 91,88 % de suffrages positifs. Cette année, nombre d’entre eux souhaitent refuser les plans que met la société en place, jugés insuffisants pour faire face à la menace climatique.

En interne, il apparaît que des investisseurs ont déposé deux résolutions alternatives. La première vise à obliger TotalEnergies à aligner ses objectifs environnementaux sur les Accords de Paris. La seconde demande une consultation annuelle concernant la stratégie climatique de l’entreprise.

Shell doit interrompre son assemblée générale

Shell votait de son côté pour demander à ses actionnaires de soutenir sa stratégie climatique. Un groupe environnemental souhaitait la faire modifier, la jugeant insuffisante.

Comme TotalEnergies et six autres compagnies pétrolières, Shell a en effet été épinglé pour son non-respect des Accords de Paris. Parmi les actionnaires, ils sont toujours 80 % à soutenir la stratégie de la marque. C’est toutefois moins que l’année dernière, quand ils étaient 89 % à la juger pertinente et suffisante.

Si la fronde était moindre par rapport à celle de TotalEnergies, il y a aussi eu du rififi au sein de Shell. Une consultante a démissionné la veille de l’AG.

« Le manque total d’intérêt de Shell pour le risque causé par le changement climatique signifie qu’ils échouent complètement dans leur ambition de transition vers la neutralité carbone », a-t-elle déclaré. « Shell est pleinement conscient que ses projets continus d’extraction de pétrole et gaz et d’expansion causent des dégâts extrêmes à notre climat, notre environnement, à la nature et aux gens. »

Et le lendemain, Shell a également connu une assemblée générale houleuse. C’est à l’extérieur que se jouait la mobilisation, émanant d’activistes écologistes.

Les slogans « honte sur Shell » et « coupable d’écocide » ont notamment pu être lus ou entendus. La majorité des 70 militants provenaient de Money Rebellion, une association en lien avec la célèbre Extinction Rebellion.

Devant cette pression, Shell n’a pas eu d’autre choix que de suspendre son assemblée générale. C’est le président du conseil d’administration, Andrew Mackenzie, qui l’a décidé après une demi-heure.

Actionnaires et militants de TotalEnergies s’affrontent

TotalEnergies a tenu son assemblée générale malgré tout, mais des heurts ont éclaté entre les actionnaires et les militants. Visiblement peu sensibles à la cause écologique, ils ont préféré tourner en dérision les inquiétudes de Greenpeace.

Agacés de ne pas pouvoir circuler, ces actionnaires ont pris à partie des militantes. « Tout le monde vous déteste », peut-on spécifiquement entendre de leur part, avant que l’échange ne devienne encore plus nauséabond.

À l’opposé des investisseurs ayant envie de faire évoluer TotalEnergies sur la question climatique, ces actionnaires ont de quoi inquiéter. Outre des propos inacceptables, c’est leur absence de prise de conscience qui choque.

Il faut espérer que les actionnaires inquiets pour l’écologie parviendront à faire évoluer les choses. Cela permettrait au moins à ces entreprises de proposer des programmes ambitieux pour respecter les Accords de Paris.