La voiture électrique approche de ses 200 ans d’existence avec une histoire fascinante rythmée par les innovations, les succès, mais aussi les échecs ! Automobile Propre vous propose de revenir sur les grands moments de son existence à travers une série d’articles et de vidéos.

Le débat entre véhicules thermiques et électriques est plus que présent actuellement dans notre société. Les premiers ont longtemps régné en maître sur le secteur de l’automobile, mais aujourd’hui les seconds se placent comme une nouvelle technologie pour la détrôner. 

Enfin “nouvelle technologie” pas vraiment, la voiture électrique existe en fait depuis plus longtemps que la voiture thermique. Les deux se sont longtemps côtoyées et l’électrique a même dominé le thermique durant une certaine période. On verra, dans cette série de vidéos, que cette technologie a longtemps été appelée “éternellement émergente”. Nous n’allons pas seulement nous contenter de retracer les différentes avancées technologiques de la voiture électrique, mais nous allons aussi nous intéresser aux acteurs sociaux qui ont aidé ou freiné l’avancée de la VE dans l’industrie automobile. Et pour cela, nous avons fait appel à Axel Villareal, professeur d’histoire géographie en lycée général et technologique ainsi qu’auteur de la thèse “L’industrie automobile à l’épreuve des voitures électriques : entre changement et continuité” sur la construction sociale du marché du véhicule électrique.

La genèse de la voiture électrique (1830-1910)

La voiture électrique est apparue autour de 1830. Comme toutes les inventions, difficile de savoir qui a réellement inventé ce type de motorisation. Mais on peut citer la carriole électrique de Robert Anderson qui fonctionnait à l’époque à l’aide de huit électroaimants alimentés par des piles non rechargeables. Bien loin des énormes batteries qui équipent maintenant nos voitures électriques.

Le premier moteur électrique utilisable industriellement aurait été inventé par Thomas Davenport en 1834. S’ensuivent d’autres prototypes jusqu’à l’arrivée de la batterie rechargeable en 1859. Aujourd’hui, il faut charger nos batteries, mais dites-vous qu’au tout début, on était obligé de les remplacer complètement ! 

En effet, Gaston Planté invente une batterie à base de plomb et d’acide pouvant se recharger. Et c’est à ce moment que le premier moteur à explosion est inventé, avec donc 30 petites années de retard. Dans tous les cas, à cette époque, la voiture en général reste très peu répandue et demeure au stade de prototype.

L’ingénieur Werner Von Siemens invente ainsi en 1866 le principe de la dynamo électrique qui permet de créer un alternateur à courant alternatif en 1881.

La même année, Camille Alphonse Faure améliore la technologie de batterie et augmente sa capacité. C’est cette évolution qui va permettre à la voiture électrique de véritablement émerger et de commencer à être commercialisée, avec la Tilbury, considérée comme l’une des premières voitures électriques.

À partir de ce moment-là, le développement des voitures électriques et thermiques s’est fait parallèlement. Pourtant, il n’y avait pas réellement de compétition pour savoir quelle technologie était la meilleure. Les technologies des deux côtés avancent très vite et les ingénieurs ne sont intéressés que par le progrès technique. 

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Et Axel Villareal nous explique pourquoi il n’y avait pas encore de concurrence à cette époque. “Au XIXᵉ siècle, il n’y a pas de concurrence au sens où on l’entend aujourd’hui entre l’électrique, la vapeur ou le thermique. C’est-à-dire qu’il faut se replacer dans le contexte de l’époque. À cette période, l’automobile est une technologie de pointe, destinée à un marché de niche et qui a vocation à remplacer le carrosse de l’époque. Donc c’est un marché qui est destiné principalement à une clientèle extrêmement aisée et qui est plutôt un marché vitrine. Ce n’est pas pour rien d’ailleurs que les premiers constructeurs automobiles sont d’abord des carrossiers, puis des constructeurs de cycle et enfin ça deviendra, avec Ford notamment, des motoristes. Donc, au XIXᵉ siècle, la voiture n’existe pas tel qu’on l’entend aujourd’hui : c’est un mode de traction alternative à l’hippomobilité, avec comme objectif de remplacer le cheval par un moteur. Ce moteur, s’il est à vapeur, électrique ou à essence, peu importe, ce qui est important, c’est seulement de faire avancer des véhicules différemment de la traction équine. Donc parler de concurrence à l’époque, ce n’est pas forcément encore très pertinent.”

Si les deux technologies cohabitent, l’électrique avait tout de même quelques avantages, se montrant plus simple à utiliser, spécialement au démarrage face aux véhicules thermiques qu’il fallait actionner à l’aide d’une manivelle. L’absence de vibration, de bruit et d’odeur était également un grand point fort à l’époque. L’autonomie n’était pas vraiment un débat puisque les déplacements étaient principalement urbains et ne couvraient pas de grandes distances.

Tout semble bien se présenter pour l’électrique qui connaît un grand succès à la fin du XIXᵉ siècle, pour citer quelques exemples : 

  • En 1896, la Riker électrique de Andrew Riker remporte une course automobile.
  • En 1897, on peut apercevoir les premiers taxis électriques dans les rues de New York.
  • Dès 1900, plus du tiers des voitures en circulation sont électriques.

Pour vous donner une idée des performances d’une voiture électrique au début du XXᵉ siècle, en 1902, la Phaeton de Wood pouvait rouler jusqu’à 29 kilomètres à une vitesse de 22,5 km/h et coûtait 2 000 dollars.

Cependant, entre temps, une compétition s’était finalement mise en place entre les trois types de motorisation : le moteur à essence, le moteur à vapeur et le moteur électrique. Un des événements qui a engendré cette rivalité est la mésaventure de Charles Jeantaud à la course Bordeaux-Paris-Bordeaux. Il concourrait avec une voiture électrique et remplaçait régulièrement sa batterie. Toutefois, une fois arrivée à mi-parcours, il jeta l’éponge, ayant utilisé toutes les batteries en sa possession. Cet abandon a été considéré comme un “échec technologique” de la voiture électrique et cet événement a fait naître l’idée qu’une technologie pouvait en surpasser une autre. Et on va voir qu’en effet une technologie a bien surpassé l’autre. 

Ceci n’est que le tout début de l’histoire de la voiture en règle générale. Dans le prochain épisode, nous verrons comment et pourquoi une technologie s’est imposée au XXᵉ siècle.

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