Les engins de chantier consomment une grande quantité de carburant et sont responsables d’émissions astronomiques de CO2. Leur conversion à l’électricité est un défi technologique de taille. Le « rétrofit » d’un dumper géant doté d’une batterie de 700 kWh ouvre la voie. C’est actuellement le plus gros véhicule électrique (sur pneus) au monde et il pourra produire jusqu’à 200 kWh d’électricité par jour ! Qui dit mieux ?
Un « dumper » (appelé parfois tombereau en français) est un engin utilisé sur les chantiers, les carrières et les mines à ciel ouvert pour transporter des matériaux en vrac comme des terres, des roches, des minerais, etc. Ces machines peuvent consommer entre 50.000 et 100.000 litres de gasoil par an, ce qui correspond à des émissions de 130 à 260 tonnes de CO2.
Un consortium suisse composé des entreprises Lithium Storage GMBH et Kuhn Schweich AG avec le soutien de l’Office fédéral de l’énergie (OFEN) a récemment réussi à convertir un dumper géant Komatsu 605-7 HD de 45 tonnes (à vide) en le dotant d’une motorisation électrique et d’une batterie de 700 kWh (l’équivalent de 8 batteries de Tesla Modèle S). Il s’agit là d’un record mondial en la matière, le précédent était détenu par des bus électriques chinois de marque BYD dotés d’un pack de batterie de 547 kWh.
Le moteur synchrone de cet e- dumper développe une puissance en continu de 590 kW (800 ch) et génère un couple de 9.500 Nm. En langage imagé, on dirait : une « bête ». Il remplace le moteur d’origine de 6 cylindres turbo diesel et 751 ch. Le pack de batterie fourni par le fabricant chinois Shenzen Westart pèse 4,5 tonnes et est composée de 1440 cellules du type NMC (nickel manganèse cobalt). Par rapport à d‘autres types de batterie Li-ion cette technologie constitue un bon compromis entre les propriétés de densité énergétique, de coût et de nombre de cycles charge-décharge (> 1000).
L’intérêt d’électrifier ces dumpers géants utilisés principalement dans les carrières et les mines à ciel ouvert est qu’ils montent et descendent chaque jour à de nombreuses reprises des pentes souvent raides pour transporter leurs charges de minerais ou gravats. Alors qu’un dumper diesel consomme également du carburant lors de la descente, un e-dumper peut recharger ses batteries grâce au freinage régénératif.
Le prototype qui a bénéficié de cette électrification est utilisé par la société Ciments Vigier SA dans le Jura suisse. L’engin transporte 20 fois par jour sur des pentes de 12 à 13 % une cargaison de 65 tonnes depuis une carrière située dans le massif de Chasseral vers la cimenterie située en contrebas. Il s’agit d’un scénario particulièrement favorable puisque le Laboratoire fédéral suisse d’essai des matériaux et de recherche (EMPA selon l’acronyme allemand) estime que le prototype est capable de générer 40 kWh à chaque descente dans la carrière, ce qu’il fait 20 fois par jour. Soit 800 kWh de production journalière d’électricité, alors que les remontées à vide ne consomment que … 600 kWH. Le surplus de 200 kWh sera dès lors injecté dans le réseau.
Le coût de l’opération, en ce compris les frais de recherche et développement sont estimés à quelque 3 millions de francs suisses (2.6 millions d’euros). Après une série de tests et d’essais qui seront effectués cet automne, le premier prototype d’e-dumper sera livré à Vigier SA au printemps 2018. L’engin débutera alors une nouvelle carrière au cours de laquelle il transportera chaque année 300.000 tonnes de matériaux tout en produisant plus de 45.000 kWh d’électricité.
Certes, les exploitations de carrières en montagne sont souvent néfastes pour l’environnement et ont rarement un caractère durable. Mais si l’électrification de certains engins peut réduire les impacts négatifs, on ne s’en plaindra pas. Pendant sa durée de vie estimée à 10 ans, l’e-dumper de Vigier devrait éviter l’émission de 1300 tonnes de CO2 en économisant un million de litres de gasoil. Si l’expérience est concluante, la société envisage déjà la mise en service d’un 2e exemplaire.
Quant à la société Kuhn Schweiz AG qui distribue la gamme Komatsu trucks en Europe elle pourrait offrir cette conversion électrique à ses autres clients.
Quand on vous disait que l’électrification à grande échelle du parc mondial de véhicules était en marche et qu’on ne l’arrêtera plus…
En plus cela evite un paquet de particules fines provenant des plaquettes !
le cas de cette mine est favorable: montée à vide et descente chargé
pour les autres mines où on monte chargé, plutôt que mettre de grosses batteries, et d’immobiliser le camion lors de la charge, il y a la solution des caténaires sur la rampe en montée, solution déjà utilisée dans certaines mines
voir cet article par exemple, avec la photo du camion de mine sous caténaire (il en faut 2 car le courant ne passe pas via les rails comme dans le transport ferroviaire):
http://cedricphilibert.net/les-autoroutes-electriques-pour-camions-et-voitures/
Je suis étonné du calcul des économies de CO2 qui semble contredit par la consommation évitée :
Sachant qu’un litre de diesel émet entre 2.6 kg de CO2 (juste le fait de bruler le gasoil) et 3 kg (en comptant les émissions liées à l’extraction, au raffinage et au transport), 1 million de litres économisés devraient permettre une économie d’au moins 2600 tonnes de CO2.
Après les bâtiments à énergie positive, voici l’heure des véhicules à énergie positive!
Au vu de l’article, du contexte , une capacité de la batterie de 250Kw en amplement suffisant
50Kw pour la première montée et 200Kw de stockage (restitué en fin de journée)
La masse gagnée ferait-elle un meilleur bilan (de recharge) ?
Mais, il y a de la place sur l’engin pour cette capacité et il n’y a pas qu’un site potentiel.
Chapeau bas pour la concrétisation de l’idée. Une nouvelle source d’EnR.
Bravo !
Il faudrait l’étendre à tous les engins de chantier, tous les tracteurs agricoles… A quand l’électrification des engins militaires ? Là il y a du potentiel, je ne connais pas les chiffres mais le gisement doit être énorme comparé aux VP qui ne consomment déjà pas grand chose, même s’ils sont nombreux.
En tant qu’ex-cimentier, je peux dire que ce dumper électrique ne peut produire de l’électricité « en trop » dans ses aller/retours que si le point bas de la mine (extraction) est plus élevé que le lieu de déchargement (usine). Ce qui n’est le cas que dans les zones de montagne comme en Suisse.
pourquoi mettre des batteries de 700kwh alors que l’engin n’en consomme que 30 pour une montée? pour réinjecter les 200 kwh journaliers des batteries de 230 kwh suffiraient ! 30 kwh pour la première montée.
Comment est ce que descendre à vide peut générer plus d’énergie que monter une charge de 65 tonnes sur ce même trajet ?
Ca tient pas debout.
Ou alors il faut d’urgence construire ces trucs à la chaine et leur faire faire des montées à vide (où ils consommeront encore moins) pour les faire descendre et produire du courant…
C’est encore mieux que le mouvement perpétuel…
Pour le transport du calcaire pour fabriquer du ciment, si la distance n’est pas trop longue, l’idéal c’est le transport par câble.
C’est cette solution qui a été adoptée par Vicat depuis des dizaines d’années pour transporter du calcaire depuis la carrière située sur les contreforts du Vercors jusqu’à la cimenterie située à Saint-Egrève, soit environ 5 Km.
Pour info le bus Proterra E2 Max a une batterie de 660 kWh.
Combien de temps pour charger une telle batterie ?
un engin de chantier qui produit plus d’électricité qu’il en consomme…je les pas vu venir celle la …mais c’est très bien !!
Je dis bravo, mais pour le coup je voyais plus une pile à combustible sur ce genre d’engin.