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Enercoop n’est pas un fournisseur d’électricité comme les autres. C’est une coopérative nationale dont les consommateurs (42.000 actuellement), fournisseurs (111) et salariés sont la plupart du temps ses sociétaires : 1 personne = 1 voix. Pour ceux, parmi eux, qui sont aussi électromobiliens, savoir la SCIC régionale bretonne engagée au côté du SDE 35 pour permettre la recharge des voitures électriques en énergie verte revêt une importance symbolique.
Parmi les fournisseurs d’électricité, Enercoop tient une place à part. Déjà parce que ce sont la plupart des clients, fournisseurs et salariés qui président à la destinée d’une entreprise pionnière à tous points de vue, surfant sur la vague de l’économie sociale et solidaire, à l’instar de nombre de start-up consacrées à la mobilité durable. Mais aussi parce que les acteurs qui se sont penchés sur son berceau, parmi lesquels le WWF et GreenPeace, lui assurent un parrainage sans équivoque depuis la moitié de la décennie 2000. S’y sont ajoutés : la Fondation Nicolas Hulot, France Nature Environnement, Les Amis de la Terre, le réseau Biocoop. Ces particularités sont le gage, pour les consommateurs, des relations constructives avec leur fournisseur d’électricité, et bientôt de biogaz, qu’on ne retrouve chez aucun autre de ses concurrents en France.
A l’ouverture de la coopérative et pendant quelques années, rejoindre Enercoop était avant tout un acte militant qui se traduisait par un surcoût de 30% sur la facture d’électricité. Rien de bien méchant puisque, pour la plupart des foyers, le supplément ne représentait, par mois, que le prix d’une pizza familiale. Mais aujourd’hui, la différence avec le tarif réglementé tend à se niveler, et même à être potentiellement totalement gommée pour les puissances supérieures, sous l’action des instances européennes.
Chez Enercoop, les consommateurs sont toujours appelés à maîtriser la consommation électrique de leurs foyers. Les électromobiliens sociétaires se reconnaissent en particulier à leur souci de l’éco-conduite, très satisfaits de bénéficier d’une solution sérieuse pour s’affranchir à la fois du nucléaire et des énergies fossiles afin de propulser la voiture principale du foyer.
Si nombre de fournisseurs d’électricité proposent une offre verte, elles ne sont pas toutes aussi transparentes et traçables que celle d’Enercoop. La coopérative délaisse les marchés de l’énergie, sauf obligations très ponctuelles pour satisfaire à une demande accrue des consommateurs. Elle traite en direct avec les producteurs d’EnR, exigeant, par exemple, de disposer de la garantie d’origine. En résumé, le règlement des factures d’électricité des consommateurs d’Enercoop encourage véritablement et directement la production d’énergie renouvelable, sans se diluer auprès d’intermédiaires. La SCIC a parfois était la seule à s’intéresser et à proposer des solutions à des projets qui n’auraient pas abouti sans elle, notamment autour d’éoliennes auto-construites.
Lors d’une table ronde consacrée aux réseaux de recharge pour véhicules électriques, organisée par la commission des affaires économiques à l’Assemblée nationale, mercredi 8 février 2017, Jean-Christophe Bonnard, directeur de la mobilité électrique chez Enedis, déclarait que son entreprise « assure 95% de la distribution d’électricité en France », rappelant que dans notre pays, comme dans d’autres, les différentes sources, propres et moins propres, se fondent ensemble au sein d’un même réseau, et que l’on ne reçoit pas chez soi l’électricité diffusée par le fournisseur avec lequel on est en contrat. Le courant qui arrive au compteur de la maison provient d’un creuset commun exploité par RTE. Quelle que soit l’offre à laquelle un foyer a souscrit, il utilise le plus souvent la même électricité qui arrive chez son voisin qui n’aura pas forcément fait un choix similaire. Alors !?
Pour bien comprendre l’intérêt de souscrire à une offre EnR sérieuse, en particulier lorsqu’on veut rouler le plus proprement possible avec une voiture électrique, et même si l’électricité qui alimente véritablement sa propre maison n’est pas forcément verte, j’ai pour habitude de recourir à l’image d’une cuve à boisson qui alimenterait tous les restaurants d’une ville.
La plupart des fournisseurs la remplissent en eau à mesure qu’elle se vide, mais certains le font avec du jus de pomme, en répondant à la demande de quelques consommateurs qui souhaitent lui trouver une meilleure saveur. Plus ils seront nombreux à avoir cette attente, plus la proportion de jus de pomme sera élevée dans les verres, jusqu’à, dans l’idéal, n’être plus que du pur jus.
En souscrivant à l’offre d’Enercoop, les consommateurs contribuent véritablement au développement des énergies renouvelables. Leurs choix ont globalement le même impact sur l’environnement que s’ils recevaient physiquement la part renouvelable qu’ils payent chaque mois. A l’année, la coopérative facture une consommation annuelle, en hausse, de 202 GWh, pour une puissance totale de 86 MW. Des chiffres que l’on peut, éventuellement, comparer à ceux, bien évidemment plus importants, d’une centrale nucléaire, par exemple celles de Fessenheim (68) et du Bugey (01), respectivement de 1.800 et 3.724 MW de puissance, pour une production à l’année supérieure à 12.500 et 25.000 GWh.
Quelques sociétaires chez Enercoop voient encore la voiture électrique « comme un sous-produit du nucléaire », à l’instar du chauffage électrique. De tels propos, qui n’engagent pas du tout le coopérative, s’appuient en particulier sur le fait que le gouvernement fait actuellement la promotion de l’électromobilité à travers des aides diverses, réactivant l’époque où EDF faisait son tour de France en présentant des Microcar Lyra ou des SEER Volta. On connaît l’impact de la campagne en faveur du chauffage électrique, mais aussi le bide, à l’époque, de celle sur les VE. La vague branchée actuelle n’a plus rien à voir avec ce rendez-vous loupé. Elle est internationale, poussée par les enjeux climatiques qui sont devenus des priorités.
Fin 2013, j’avais interrogé pour un autre média Web, aujourd’hui disparu, Judith Schneider, en charge de la communication d’Enercoop, concernant la position de la coopérative sur le nombre croissant d’adhésions effectuées par des électromobiliens à son offre. « Nous en sommes ravis ! Cette démarche est cohérente car le choix de rouler avec une voiture électrique est souvent issu d’une volonté écologique qui s’associe donc très bien avec une alimentation en électricité 100% renouvelable ». Elle avait précisé que si la SCIC alimentait « des particuliers qui possèdent un véhicule électrique », elle comptait aussi parmi les consommateurs « des professionnels, comme Chronopost qui dispose d’une flotte de VE pour son site de Beaugrenelle (Paris 15e), et des collectivités, comme le Grand Angoulême qui met à disposition des bornes de recharge ».
Dans une démarche de décentralisation et d’appropriation citoyenne de l’énergie, Enercoop a enfanté 6 coopératives locales. Ainsi les relais Aquitaine, Ardennes-Champagne, Languedoc-Roussillon, Midi-Pyrénées, Nord-Pas-de-Calais-Picardie, Normandie, Paca, Rhône-Alpes, et Bretagne. C’est cette dernière, créée en 2013 à Trémargat (22), qui va alimenter la dizaine de bornes rapides du réseau Béa porté par le syndicat départemental d’énergie d’Ille-et-Vilaine, en attendant, peut-être, de prendre en charge tout le maillage. Nous avons interrogé son directeur, Nicolas Debray.
Si Enercoop a pu prétendre à participer au projet en bornes de recharge Béa, c’est « du fait de la fin des tarifs réglementés, en janvier 2016, pour les compteurs de plus de 36 kVA », explique Nicolas Debray. « Un appel d’offres à haute qualité environnementale avait été lancé dans le cadre d’un regroupement d’achat concernant la fourniture en électricité pour un bâtiment dans chacune des communes de Guipel, Saint-Jacques, Le Rheu, La Chapelle-Thouarault, et les bornes de recharge du réseau Béa », poursuit-il. « Un acte symbolique, mais qui plaçait le critère environnemental en premier, et le prix ensuite », souligne-t-il. Pour l’instant, le rôle de la coopérative ne concerne que les bornes rapides, pour la plupart déjà installées. Ainsi à Antrain, Bain-de-Bretagne, Châteauneuf-d’Ille-et-Vilaine, Etrelles, Janzé, Pipriac, Redon, Saint-Sauveur-des-Landes. La prochaine sera mise en service à Plélan-le-Grand.
Et concernant les 75 bornes accélérées ? « Peut-être qu’une bascule en faveur d’Enercoop sera réalisée, avec la disparition du tarif régulé pour les puissances les concernant », espère notre interviewé. Si la coopérative régionale a été contactée lors de l’appel d’offres, c’est aussi grâce à un élu d’une commune d’Ille-et-Vilaine, consommateur et sociétaire du relais breton.
« Le SDE 35 est désormais lui aussi sociétaire d’Enercoop Bretagne, et siège donc au conseil d’administration », précise Nicolas Debray. Il rejoint d’autres établissements et collectivités d’envergure, comme la plateforme logistique Biocoop à Melesse, la ville de Lorient pour 17 bâtiments parmi lesquels toutes les écoles publiques.
Si Enercoop Bretagne ne possède pas de véhicule électrique, son directeur attend sa Renault Zoé qu’il utilisera comme voiture principale grâce à l’autonomie améliorée par rapport aux premiers modèles. « Comme il y a un débat autour du chauffage, il en existe un parmi les sociétaires sur le véhicule électrique », confie Nicolas Debray. En réponse, il n’hésite pas à mettre en avant « l’éco-conduite des utilisateurs de véhicules électriques qui cherchent à ménager l’autonomie à chaque charge ».
Il cite le scénario négaWatt qui, par exemple, accepte l’idée d’un « chauffage électrique dans une maison très bien isolée avec de très faibles besoins de chauffage ». De même, il fait confiance aux électromobiliens pour utiliser à bon escient le réseau de bornes rapides Béa du SDE 35, et notamment en évitant de trop le solliciter aux heures de pointe. Une préoccupation qui rejoint celle exprimée par Thomas Veyrenc, directeur du département Marchés chez RTE, lors de la table ronde consacrée aux réseaux de recharge pour véhicules électriques à l’Assemblée nationale. Ce dernier, confiant, estimait qu’un certain pilotage de la recharge pour VE suffirait à gommer les appels de puissance trop importants.
Pour Nicolas Debray, que ce soit avec le nucléaire ou les énergies renouvelables, il existe une certaine perte de production lorsqu’il n’y a pas des besoins de consommation à la même hauteur. Le véhicule électrique ne fait ni plus ni moins bien à ce sujet. « Ca a du sens d’étoffer le lien entre les EnR et les véhicules électriques », plaide-t-il.
« Enercoop peut très bien être concerné un jour par le scénario V2G ou V2H », évalue-t-il, pas forcément dans un avenir très lointain ! La coopérative peut compter sur ses sociétaires et administrateurs pour conserver une certaine longueur d’avance dans les différents débats autour des enjeux en rapport avec la production et la consommation d’électricité !
Nota bene : Pour information, nous précisons à nos lecteurs que seuls les passages entre guillemets traduisent des citations de nos interlocuteurs. Cette précision a pour objectif de ne pas attribuer à tort à nos interviewés des propos qui ne sont pas les leurs.
Automobile Propre et moi-même remercions vivement Nicolas Debray pour sa réactivité et le temps qu’il a consacré à répondre à nos questions.
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