2 000 kilomètres d’autonomie avec une voiture électrique, est-ce vraiment possible ? Une équipe de scientifiques allemands et néerlandais nous fait rêver en annonçant la mise au point d’une nouvelle technologie de fabrication des cellules.

Partout dans le monde, des chercheurs s’activent à perfectionner les performances des accus destinés aux voitures électriques. Batteries solides, lithium-souffre, lithium-air, graphène… les annonces de « chimies » innovantes ne manquent pas. Mais cette fois, l’équipe des scientifiques allemands et néerlandais ne nous présente pas une nouvelle « recette » chimique, mais plutôt un processus innovant pour la fabrication des cellules de batteries. Appelé « Spatial Atom Layer Deposition », ou SALD, celle-ci devrait permettre, selon ses concepteurs, de doter les voitures qui en seront équipées d’une autonomie « largement supérieure à 1 000 kilomètres ».

Comme son nom l’indique, SALD est un procédé breveté permettant l’application, sur un support, de revêtements en couches minces. Tellement minces qu’il est question de l’épaisseur d’un atome ! Si les domaines d’application sont nombreux, celui qui nous intéresse concerne évidemment la fabrication des électrodes dans les cellules des batteries.

La technologie actuellement utilisée par la plupart des fabricants de cellules lithium-ion consiste à mélanger la matière active des électrodes (composée de nickel, de manganèse et de cobalt pour la cathode, et de graphite pour l’anode) avec un solvant, puis de déposer la pâte ainsi obtenue sur des feuilles métalliques conductrices. Celles-ci passent ensuite dans des fours pour évaporer le solvant avant d’être enroulées ou empilées pour former les cellules. Ce procédé est relativement coûteux, énergivore, lent et néfaste pour l’environnement à cause du solvant utilisé.

Le nouveau processus a été développé conjointement par la société néerlandaise SoLayTec, l’institut allemand Fraunhofer et l’institut de recherche néerlandais TNO. Des scientifiques mondialement renommés dans le domaine des nouvelles technologies et plus particulièrement de celles des batteries. Les partenaires ont créé la société SALD, basée à Eindhoven pour industrialiser et commercialiser leur innovation.

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Des électrodes ultraminces

Ces chercheurs ont mis au point une technologie permettant de déposer la matière active des électrodes sous la forme d’une couche ultramince dont l’épaisseur se mesure en nanomètres. Selon eux, le captage des ions lithium dans les électrodes n’a lieu qu’à la surface de celles-ci et il ne serait donc pas nécessaire de disposer d’électrodes plus épaisses.

Une autonomie de 2 000 km serait possible !

À volume ou poids égal, ce procédé permettrait donc d’augmenter fortement la surface des électrodes et par conséquent leur capacité en termes d’électricité emmagasinée, mais aussi la vitesse de charge. L’équipe des scientifiques explique que les voitures équipées de batteries fabriquées avec cette technologie auraient une autonomie trois fois plus importante que celle des véhicules électriques actuels. Et la vitesse de charge serait multipliée par cinq.

« Une petite voiture électrique aurait donc une autonomie d’au moins 1 000 km et une grosse limousine pourrait même parcourir 2 000 km sans recharger », prétend Frank Verhage, le PDG de SALD. « Il ne s’agit pas d’établir un record de distance théorique. Mais nous disons que dans le pire des cas, même en adoptant un style de conduite sportif et dynamique et en faisant fonctionner la clim ou le chauffage, vous pourriez encore disposer de 20 à 30 % de charge après 1 000 km », ajoute-t-il. Pour lui, une batterie pourrait être rechargée à environ 80 % en dix minutes et une charge complète ne durerait que vingt minutes.

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L’intérêt du nouveau processus est qu’il peut s’appliquer aux différentes chimies de cellules existantes de type NMC ou NCA, mais aussi à celles qui sont encore au stade du développement comme les batteries à électrolyte solide. Frank Verhage explique même que la technologie SALD est similaire à celle vers laquelle s’oriente Tesla. « Lorsque j’écoute Elon Musk pendant le Battery Day qu’il a organisé il y a quelques mois, je comprends que Tesla se base sur les mêmes principes : pour développer les performances des batteries, il faut accélérer le flux d’ions entre les électrodes et cela permet de réaliser des progrès révolutionnaires », explique-t-il. Il ajoute même que la technologie SALD pourrait parfaitement s’appliquer à la fabrication de cellules lithium fer phosphate (LFP) que Tesla compte embarquer dans les Model 3 fabriquées en Chine.

Et vous, vous y croyez à cette autonomie de 2 000 km ?

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Avis de l'auteur

Personnellement, je ne vous cache pas que cette annonce me laisse un peu sceptique, car la capacité d’une batterie dépend quand même de la capacité des électrodes à emmagasiner le plus d’ions lithium possible lors des cycles de charge et de décharge. Mais où ces ions trouveront-ils de la place dans ces électrodes ultraminces ? Enfin, je ne suis pas un expert en batteries. Les scientifiques de l’institut Fraunhofer en Allemagne sont mondialement réputés et ont déjà été à la base de nombreuses innovations en matière de batteries. Ceux de TNO aux Pays-Bas sont également reconnus dans le domaine. Tant mieux donc si je me trompe.
Une chose est sûre : les innovations dans les technologies de batteries ne sont pas prêtes à se tarir. Et si dans la pratique, elles tardent à se concrétiser en termes de performances des véhicules électriques mis sur le marché, c’est pour une raison bien simple : entre la mise au point d’une nouvelle technologie et son industrialisation puis sa mise sur le marché, de nombreuses années s’écoulent. Mise au point dans les années 1990, la batterie lithium-ion n’a-t-elle pas été massivement adoptée que 20 ans plus tard…