Le PDG de la branche scientifique de Toyota ne croit pas en une solution 100 % électrique. Selon lui, différentes voitures doivent cohabiter à l’avenir.
Malgré l’arrivée d’une imposante gamme électrique, Toyota continue de militer pour l’hybride. Le constructeur japonais a lancé les technologies électrifiées il y a près de 25 ans. Leader incontesté de l’hybride, la marque veut différentes solutions technologiques dans le futur.
C’est Gill Pratt, le PDG de la branche scientifique Toyota Research Institute, qui a expliqué cela à nos confrères d’Autocar. Pratt est avant tout un scientifique, qui a notamment travaillé pour le ministère de la Défense américain. Il confirme qu’il faut travailler à limiter le changement climatique, mais s’inquiète du 100 % électrique.
« Personne n’est obligé de me prendre au sérieux, bien sûr », explique Pratt, précisant qu’il se base sur la science. « Ce que j’essaie de faire, c’est me baser sur des faits, et autant que possible sur la science. Je veux parler de toutes les facettes du problème. »
« Cette approche est naturelle pour moi, j’ai été enseignant pendant de nombreuses années. Ce que j’ai appris, c’est que le battage médiatique est l’ennemi. Cela mène les gens à mal percevoir la trajectoire de ce qui va se passer, et cela mène à de mauvaises décisions. »
« Le battage médiatique ferme les esprits. Cela mène à trop d’investissements sur une approche plus qu’une autre. Un cycle de frénésie mène à la déception quand ce qui était promis n’arrive pas. C’est mauvais pour tout le monde. »
Les voitures électriques ne sont pas une erreur
Pratt ne dit pas pour autant que la voiture électrique n’est pas une bonne solution. L’ingénieur aimerait qu’il y ait un choix durable sur le marché, sans minimiser le « zéro émission ».
« J’accepte que pour des gens, l’électrique soit la bonne réponse », répond-il lorsqu’on lui demande si l’électrique est une erreur. Ce qui perturbe Pratt, c’est surtout l’obligation qui sera donnée en 2035 de n’avoir que de l’électrique.
« Ce qui me pose problème, c’est que la solution correcte soit prescrite. La solution correcte n’est pas une seule technologie. Au moins, nous ne pouvons pas dire avec confiance que ça l’est aujourd’hui. »
Le scientifique explique notamment que l’hybride rechargeable n’est « pas parfait », mais qu’il est une solution intéressante. « Nous pouvons utiliser les batteries à leur plein potentiel, et il n’y a aucune anxiété sur l’autonomie. C’est une solution qui peut attirer les gens vers des transports plus propres, plutôt que les forcer à changer bien qu’ils aient des craintes. »
Le « zéro émission » doit toutefois rester un objectif
Contrairement au PDG du groupe Toyota, qui a plusieurs fois réfuté les bienfaits de l’électrique, Gill Pratt considère toutefois que l’électrique et le « zéro émission » doivent être dans la ligne de mire des constructeurs.
« Oui, ça doit l’être, nous devons y parvenir. Mais le monde entier n’y arrivera pas en même temps. Chaque gramme de CO2 que nous émettons est avec nous pour des centaines d’années. Nous créons un réservoir qui durera plusieurs années et que nous ne réduirons pas tant que nous ne passerons pas à zéro. »
À lire aussi Des algues pour alimenter nos voitures ?« Nous devons avoir une réponse qui réduise autant que possible les émissions de CO2 selon les défis des régions. C’est pour cela que la voiture électrique n’est pas la réponse pour le monde entier actuellement. Ça l’est dans certaines parties du monde, mais pas partout. »
« Il est vrai que nous devons être ambitieux. Mais les voitures “zéro émission” ne signifient pas zéro émission. Qu’en est-il de l’infrastructure ? Qu’en est-il de la génération d’énergie ? Qu’en est-il de la disponibilité des matériaux ? »
La voiture électrique est une réponse adaptée à certaines régions
Poussé à en dire plus sur les régions du monde qui sont plus aptes à passer à l’électrique, Pratt en dit davantage. Sans surprise, il choisit les régions dans lesquelles les énergies ne sont pas polluantes. Cela fait évidemment écho à ses questionnements précédents sur les infrastructures et l’énergie.
« Dans certaines parties d’équipes, elle l’est. En Norvège, la quantité d’énergie verte est si importante que les voitures électriques peuvent rouler très proprement. Ils ont aussi investi massivement dans l’infrastructure de charge, donc il n’y a pas de problème là-bas. »
« Mais si vous allez vers l’Europe de l’Est, l’équation n’est pas si bonne. Ces pays ont besoin d’y arriver, bien sûr, mais la création d’énergie aujourd’hui y est très dépendante du charbon. Et les infrastructures de recharge sont très en retard. »
Et selon Pratt, simplement obliger les pays à se mettre au diapason des meilleurs élèves n’est pas viable. L’exemple qu’offre la Norvège n’est pas, selon lui, possible à copier pour tous.
« Oui, nous pouvons leur demander de changer. Mais leur demander de copier la Norvège n’est juste pas faisable. Ils n’ont pas les mêmes ressources naturelles. Et cela signifie qu’il doit y avoir de meilleures manières de réduire la réduction des émissions que simplement fixer une date à laquelle nous passerons à l’électrique. »
Le problème c’est que les constructeurs, Toyota en tête, utilisent les gains d’efficacité des moteurs pour produire des voitures plus grosses (et plus chères).
Donc l’hybridation qui devrait en théorie permettre d’économiser pas mal de carburant si elle était généralisée permet en pratique à Toyota de vendre des SUV de plus en plus gros au détriment des berlines/citadines non-hybrides qu’ils remplacent.
Toyota a raison: dans certains pays la fabrication de voitures a un coût écologique trop élevé.
La France n’est pas dans ce cas.
Alors pour une fois que l’on a un avantage concurrentiel avéré, mettons la pression politique maximale pour imposer les véhicules électriques en Europe. Il y a des parts de marché à gagner et donc des emplois derrière.
Si je suis décideur politique le discours de Toyota ne doit que m’encourager encore plus à pousser l’Europe à accélérer la transition. Non seulement c’est bon pour l’environnement et la santé, mais en plus la France est très bien positionnée sur l’offre. Il est temps de relocaliser l’industrie dans les pays où la production d’électricité est la plus propre (c’est-à-dire la France et certainement pas l’Allemagne).
Complètement d’accord avec M. Pratt, que du bon sens. L’Europe ferait mieux de s’occuper des priorités dans le bon ordre à savoir réorienter sa production d’énergie et le reste suivra.
J’imagine que pour beaucoup c’est moins sexy que de parler de SUV électrique…
Du vrai Toyota dans toute sa splendeur, retarder le plus possible l’échéance par tous les moyens. Je rappelle quelques unes de leurs pratiques :
On verra si ça sera payant pour eux ou non sur le long terme.
sur le principe, je suis plutôt d’accord. Le tout essence c’est pas bien. Le tout électrique non plus, on connait les inconvénients de l’électrique, lié aux mines, à l’énergie… L’électrique c’est mieux, mais on sait que c’est pas parfait. Il doit exister mieux. Quoi ? j’en sais rien. Le futur hydrogène vert ? Peut être. Faut rester positif et espérer pour l’avenir. Mais je pense que le plus gros progrès à faire serait sur les transports en commun / le covoiturage / le télétravail / les relais voiture-vélo. Les bouchons, la pollution etc, tout vient du fait qu’on est souvent seuls dans nos bagnoles pour aller au boulot.
(facepalm)
Il est évident que la voiture électrique n’est pas LA solution sans inconvénients mais c’est aussi évidents que la pollution atmosphérique n’est pas à mettre sur le seul compte des voitures des particuliers, je dirais même que passer à zéro émissions sur toutes les voitures particulières ne fera varier que de quelques pourcent la quantité de CO2 rejeté dans l’atmosphère.
A contrario, la transition énergétique des bateaux, avions et divers industries n’est nullement abordé alors qu’ils ont une part de responsabilité bien plus grande dans les émissions de CO2 sur le plan mondial.
Le battage médiatique de la transition énergétique est un écran de fumée qui doit servir les intérêts de certains au même titre que de déclarer que le CO2 est le seul responsable du réchauffement climatique.
Bien sûr, je suis convaincu que les VE sont moins polluants que les fumantes, nous nous dirigeons donc dans la bonne direction mais j’aimerais bien voir des initiatives sur les bateaux, avions et industrie en ce qui concerne le CO2.
Il se sent coincé par la décision « 2035 » de l’Europe. Ça va plus vite qu’il ne l’avait prévu.
Voilà plus de 10 ans qu’il aurait pu changer de braquet. Mais quand on croit avoir raison, on s’enferme dans son erreur.
Plus on retourne le problème et plus on s’aperçoit qu’il n’y aura pas de solution technique au remplacement en 1 pour 1 des véhicules actuels. Les véhicules actuels (déplacement de 1,2 tonnes pour aller partout, de chercher le pain à des vacances à 800km) n’existe que grâce aux énergies fossiles quasi gratuites. A partir du moment où on ne veut plus utiliser des énergies fossiles pour se déplacer, les véhicules individuels doivent disparaître où être réservé au strictement indispensable.
il n’y a rien à rajouter à ce propos qui lui au moins est pétri de bon sens et non dogmatique ! Hélas , le bons sens ca manque à nos élus !
Utilisateur de VE, je suis complétement d’accord avec MR Pratt, les décideurs ne sont pas des scientifiques ni des ingénieurs, alors oui il faut agir pour le climat, tout le monde est d’accord, mais le tout électrique au jour d’aujourd’hui ne répond pas à tous les besoins et usages des gens, et ça faudra bien que l’Europe le prenne en compte.
Beaucoup de blabla pour peu de contenu. Parmi les « autres solutions » il a oublié de citer le vélo. Ah zut,Toy n’en produit pas. Ce Monsieur traite les « autres pays » avec condescendance. Alors qu’il est démontré que même avec de l’électricité 100% charbon (y-a pas pire, sauf à faire un aller-retour via l’hydrogène), le VE est déjà meilleur que la fumante.
Ne pas oublier que l’on ne parle pas de la situation d’aujourd’hui mais de celle de dans 10 ans ou plus. La Pologne investit dans les éoliennes et laisse tomber la fracturation (quoique, avec ce qui se passe…), en Afrique les panneaux PV se multiplient. Les mauvais élèves d’aujourd’hui ne seront pas ceux de demain.
Et la (les) solution pour « limiter le réchauffement climatique » c’est quoi pour ce Mr Pratt? L’hybride… ? Pas de changement chez Toyota en fait.
Nous sommes en pleine transition et il est clair que le tout électrique n’est pas envisageable pour tous. L’hybridation est pour le moment le pont qui permet de faire changer les mentalités du thermique vers l’électrique, l’hydrogène etc…
mais une fois le constat posé les objectifs sont clairement définis et ont au moins le mérite d’imposer un rythme aux constructeurs; si cela avait été le contraire je ne suis pas certain qu’il y aurait la même volonté de changer de système.
A nos ingénieurs d’être désormais inventifs pour proposer d’autres alternatives.
Enfin une analyse sans idée préconçue. Le choix du 100% électrique est purement politique, c’est la solution de facilité: tout le monde est d’accord pour dire que le VE ne rejette rien à l’échappement. Pour le reste (les matériaux, la fabrication des batteries, le recyclage, les infrastructures, l’emploi…) on verra plus tard, c’est la responsabilité des industriels. Et ce qui va se passer dans les pays qui n’auront pas les moyens de passer au VE, on s’en fout (sauf que la pollution n’a pas de frontière).
Cela fait penser à ce que disait Tavares, mais tout le monde lui est tombé dessus en disant qu’il cherchait des excuses parce que Stellantis n’était pas prêt. Stellantis comme tous les groupes automobiles a les moyens de se conformer au changement, c’est ce qu’ils font aujourd’hui. Le problème est qu’on leur impose une solution et on ferme la porte à toute autre solution.
Maintenant qu’on a mis tous les œufs dans le même panier, espérons que c’est le meilleur choix pour la planète.
Pour rappel, ce sont aussi les politiques qui avaient favorisé le diesel grâce à une taxation avantageuse …
Pour une fois le discours est équilibré et argumenté avec intelligence.
Mais le PDG de Toyota rendra l’adage plus fort encore après s’être réalisé une fois encore: la première génération d’une dynastie la construit à la sueur de son front, la seconde la développe et la 3ème la détruit…