Cet été, notre râleur professionnel en a visiblement eu marre d’être pris à parti sur la menace du grand remplacement électrique.

La saison estivale touche à sa fin, signe pour moi que la saison des barbecues est également sur le point de se terminer. Presque un soulagement. Outre l’overdose de viande carbonisée, je frôle l’overdose de discussions improvisées sur la voiture électrique debout face à la braise.

Car que ce soit en famille ou entre amis, comme on me sait dans le milieu automobile, on se dit qu’on va me brancher sur les voitures pour faire la conversation. Il y a quelques années, c’était “alors la voiture autonome, c’est pour quand ?”, maintenant c’est “alors la voiture électrique, faut y croire ?”. Et c’est donc parti pour le mini débat au coeur de la fumée.

Si autour du barbecue, il y a maintenant ceux qui sont convaincus par l’électrique, et roulent même déjà avec, il y a toujours ceux qui n’en veulent pas. Ils en ont parfaitement le droit. Mais je sens qu’ils ont de plus en plus besoin de le faire entendre, peut-être parce qu’ils commencent à se sentir dans le camp de la résistance.

Un sentiment que j’ai eu en lisant cet été les résultats d’un sondage de l’opérateur Electra. Si davantage de Français se disent prêts à passer à la voiture électrique, chez ceux qui ne le souhaitent pas encore, les freins à l’achat étaient en hausse en un an. Le manque d’autonomie était cité par 63 % des sondés qui ne veulent pas passer à l’électrique, contre 51 % en 2022. La difficulté à trouver des points de charge est passée de 40 à 45 %.

Une aversion renforcée plutôt curieuse, alors que l’offre se développe, avec des véhicules plus abordables (Dacia Spring, MG4) ou avec plus d’autonomie, et que le maillage en bornes sur les axes rapides et au niveau des commerces s’est amélioré.

Il y a en toute logique un côté vase communiquant dans le sondage. La proportion de personnes qui souhaitent rester au thermique se réduit, ce qui à tendance à renforcer l’opposition à l’électrique dans ce lot. Les réfractaires sont de plus en plus réfractaires comme a pu le titrer Automobile-Propre.

Le rosé aidant, les commentaires autour du barbecue montent vite en puissance, jusqu’au point d’avoir entendu “de toute façon, c’est une erreur, on reviendra au thermique, j’en suis sûr”. Heureusement, le plus souvent, j’ai le droit au plus mesuré, “je veux bien, mais je fais comment, moi ?”, le fameux commentaire pour se dédouaner.

Bon cette fois, c’était face à un artisan qui utilise au quotidien un pick-up. Et effectivement, comme j’ai pu lui dire, compliqué pour l’instant pour lui de passer à l’électrique. Mais qu’il pouvait largement le faire pour le deuxième véhicule de son foyer. Tout en ajoutant que rien ne l’y obligeait en fait. Car oui, si vous ne voulez pas d’une électrique, bonne nouvelle : personne ne vous force à en prendre une. Et à en dire du mal.

Cela me fait penser à ces personnes qui se précipitent dans les commentaires sous un article consacré à un chanteur ou humoriste pour dire qu’elles n’ont jamais aimé les chansons ou jamais ri une fois, JAMAIS. Heureusement, on ne vous force pas à aller les voir… et encore moins lire l’article qui concerne une artiste qu’elles n’aiment pas. Mais il est visiblement tentant de venir dire qu’elles détestent. On a la même chose sous les articles consacrés aux voitures électriques.

Mais en creusant un peu avec ceux qui ne veulent pas d’une électrique, on trouve quand même vite la mauvaise foi et les fausses excuses, qui montrent un manque de connaissance de l’offre et de l’usage des électriques, voire de la réglementation, avec par exemple la menace ZFE. Mais les ZFE n’ont jamais été des zones à voiture électrique obligatoire.

Avec la voiture électrique, certains pensent donc qu’on leur met déjà un couteau sous la gorge. Il est vrai que l’impression n’est pas totalement infondée, puisque l’Europe a décidé de passer au (quasiment) tout électrique en 2035. Mais 2035, c’est dans douze ans ! A l’heure où de plus en plus d’acheteurs d’une automobile passent par une formule d’une location, cela fait quatre LOA de trois ans, quatre changements de voiture !

J’ai d’ailleurs eu l’exemple cet été face à un proche qui avait changé son SUV urbain après la fin d’une LOA. Il a repris le même, mais est passé de l’essence à l’hybride rechargeable. Une solution technique que je lui avais déjà soufflée il y a trois ans, sachant son utilisation compatible, mais qu’il n’avait pas choisi, rebuté par ce fil à la roue. Trois ans plus tard, le voici autour du barbecue, ravi de nous expliquer qu’il peut faire tous ses déplacements de la semaine en électrique et partir plus loin en thermique. Ça alors… Je me dis déjà que l’électrique viendra lors de la prochaine LOA.

Pour ceux qui font un achat comptant, douze ans, c’est aussi largement le temps pour trouver un nouveau modèle neuf thermique, sans oublier le vaste marché de l’occasion. Ceux qui ne veulent pas d’une électrique, aucun souci. Il y a encore un large choix essence ou diesel dans la production, de la citadine au SUV, il y a encore une offre de véhicules plaisirs carburant au sans-plomb…

Donc, face au barbecue, il est encore prématuré pour me fatiguer avec la menace du grand remplacement électrique. Et quand j’ai envie de finir ma saucisse tranquille, je lance “vous avez vu le prix du carburant ces temps, c’est fou”.

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