
Alors que Total vient d’inaugurer à La Mède son usine de production de biocarburants et que le récent accord signé par l’UE avec le Mercosur ouvre la porte de l’Europe aux agrocarburants sud-américains, un nouveau rapport du GIEC confirme l’impact négatif sur la sécurité alimentaire mondiale de la production à grande échelle de biocarburants.
« Il est indispensable de revoir la façon dont sont utilisées et cultivées les terres dans le monde et repenser nos habitudes de consommation afin d’assurer à la fois la sécurité alimentaire des Terriens et la lutte contre le réchauffement climatique ». C’est l’avertissement lancé jeudi par le groupe d’experts de l’ONU pour le climat (Giec) qui pointe notamment la production à grande échelle de biocarburants comme une des causes de l’aggravation de la faim et de la pauvreté dans le monde. Selon les auteurs du rapport, environ 820 millions d’êtres humains souffrent de la faim.
Plusieurs ONG dont Oxfam, Greenpeace et Climate Action Network (CAN) ont directement réagi par communiqué, demandant à l’UE et aux Etats membres de revoir à la baisse leurs objectifs concernant l’utilisation de biocarburants. « Miser sur une production massive de biocarburants entraînerait une compétition avec les secteurs de l’agriculture et de l’élevage, et contribuerait à la déforestation, la dégradation des sols et à la désertification. Des risques qui constituent une menace pour la sécurité alimentaire et l’approvisionnement en eau, surtout pour l’Afrique subsaharienne et l’Asie du sud » ont-elles déclaré.
Bilan carbone exécrable
Moins présente dans notre alimentation depuis les campagnes négatives dont elle a fait l’objet, l’huile de palme s’est maintenant faite une place à la pompe. Selon l’ONG Transport&Environment (T&E), la part de l’huile de palme importée en Europe à destination des agrocarburants (biodiesels) est passée de 8% en 2010 à 53% en 2018. « Cela se traduit par une augmentation de 606% des quantités d’huile de palme utilisée pour le biodiesel», s’est alarmé France Nature Environnement (FNE).
Or nous savions déjà depuis longtemps que le recours massif aux agrocarburants – censés endiguer les émissions de CO2 des transports – sont en réalité synonymes de déforestation et qu’ils représentent une catastrophe pour le changement climatique. L’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires estimait, dès 2013, que le bilan carbone du biodiesel produit à partir des huiles de palme, de colza et de soja était supérieur à celui du gazole d’origine fossile.
Un rapport récent publié par la Commission européenne révèle que 45 % de la croissance mondiale des productions d’huile de palme s’est faite au détriment des forêts. Selon cette étude, l’impact climatique du biodiesel serait 3 fois plus important que celui du diesel produit à partir de pétrole.
T&E a calculé pour sa part que « les agrocarburants fabriqués à partir d’huiles végétales vierges comme le soja ou l’huile de palme (soit 60% du marché en 2020) sont 80% pires pour le climat que les carburants fossiles ».

La bio-raffinerie de Total à La Mède, déjà en sursis ?
Les conclusions du GIEC ne sont pas une bonne nouvelle pour Total qui vient d’inaugurer sa raffinerie de La Mède dans les Bouches-du-Rhône. Avec une capacité de production annuelle de 500.000 tonnes de biodiesel, elle serait une des plus importantes d‘Europe. Pour rappel, le groupe pétrolier a reçu, en mai 2018, le feu vert de la préfecture et du ministère de la Transition écologique pour exploiter cette usine fort décriée par les organisations de défense de l’environnement.
L’accord signé avec le gouvernement autorise Total à utiliser au maximum 300.000 tonnes d’huile de palme par an. Le reste des approvisionnements proviendra d’huiles de colza et de tournesol et, pour plus d’un tiers, du retraitement de déchets (graisses animales, huile de friture, etc.).
Cela n’empêche pas les associations environnementales de poursuivre leur opposition à la raffinerie. Selon Greenpeace, le recours déposé en juillet 2018 contre l’autorisation préfectorale du site est « toujours en cours » . Les ONG dénoncent notamment « l’entêtement du groupe pétrolier alors que, d’ici six mois, l’huile de palme devrait être exclue de la liste des biocarburants ». En raison de l’impact sur la déforestation, l’Assemblée nationale a en effet voté en 2018 la fin, dès le premier janvier 2020, de l’avantage fiscal accordé à l’incorporation d’huile de palme dans le gazole. Une exclusion qui priverait Total d’un bonus financier de l’Etat français représentant une centaine de millions par an. Le gouvernement a bien tenté de s’y opposer, mais en vain.
Un « mauvais coup » dénoncé par Patrick Pouyanné, le PDG de Total. Dans un entretien accordé récemment à la « Revue Parlementaire » il affirmait que « cette bioraffinerie n’est pas viable, car elle souffrira d’un déficit de compétitivité contre les importations de biodiesel, mais aussi contre ses concurrentes européennes qui bénéficient d’un cadre fiscal avantagé ». Le groupe a dès lors engagé un lobbying intense auprès des parlementaires pour annuler la mesure.
Les nouvelles conclusions du GIEC ne devraient pas lui faciliter la tâche. La raffinerie de La Mède serait-elle déjà en sursis ?
L’Europe ouvre les bras aux biocarburants sud-américains
Le récent accord commercial signé par l’Union européenne avec le Mercosur – l’association économique de 4 pays sud-américains (Brésil, Argentine, Paraguay et Uruguay) – annonce une menace supplémentaire pour le climat et la déforestation. En effet, ce texte prévoit une réduction des tarifs douaniers frappant l’importation en Europe de certains biocarburants sud-américains. Chaque année, 200.000 tonnes de bioéthanol produits à partir de canne à sucre, de maïs ou de céréales pourront bénéficier de cette mesure. Pour T&E qui dénonce les termes de cet accord, le Brésil de Bolsonaro est le plus grand exportateur mondial de bioéthanol et l’Europe lui ouvre maintenant ses portes. « C’est une mauvaise nouvelle de plus pour la déforestation en Amazonie ».
En outre l’accord élimine ou réduit les droits de douane sur l’importation dans l’Union du soja cultivé dans les pays du Mercosur. Cela en fera une matière première plus attractive pour les producteurs européens de biodiesel.
Pour William Todts, directeur de T&E, il s’agit d’un « nouveau signe de l’échec de la politique européenne en matière de biocarburants. Ce qui a commencé comme un plan mal conçu pour promouvoir les carburants verts et stimuler l’agriculture européenne se solde par un cauchemar. Nous avons d’abord vu l’huile de palme conquérir le marché du biodiesel en Europe, et maintenant nous ouvrons les bras au soja, un des pires agrocarburants pour l’environnement. Nous devons absolument réinitialiser complètement cette politique ».

Teslaman,
Le problème n’est pas la surpopulation. Le problème vient des mangeurs de viande.
Entre 50 and 60% de la culture mondiale est pour nourrir les bestioles qu’on mange…
En plus 1 kg de bœuf sur la table c’est 15000 litres d’eau consommé…
Etre végétarien et plus bénéfique pour la planet que de rouler en voiture électrique…
Il decouvrent que le biodiesel est fait a base d’huile de palme ? Alors que l’éthanol peut etre produit a base de mais de cannes de beterave… whaouuu…. a peine a la traine les pro diesel.
effectivement la peste ou le collera ! c’est du total tout craché…
ils les aiment les thermiques.
Le problème vient de la surpopulation.
1960: 3 milliards
1990: 5 milliards
2020: 8 milliards
Article un peu réducteur : oui le biodiesel est une abberation, non l’éthanol n’est pas forcément produit à partir de céréales. L’éthanol peut être produit à partir de déchets tels que tiges et paille
Oui il faut d’abord préférer la voiture électrique parce que c’est la moins pire.
Mais tout de suite on peut déjà interdire la publicité pour les SUV et les 4×4.
Mesure qui ne coûte rien et qui peux être prise rapidement.
Ça ne résout pas le problème mais ça y contribue
Joel
Donc brûler de la bouffe comme carburant de nos voitures n’est finalement pas une bonne idée.
Comme ça intuitivement on s’en était un peu douté …
Donc on oublie les fumantes ! Toutes les fumantes ! (hybrides comprises) et on roule « propre » en electrique !
Voila !
non vs n’interprétez pas mal…..en fait on pourrait se pencher sur les terres agricoles gelées par la commission européenne…comme j’en vois bcp autour de chez moi….le non blocage du POS en France aussi …..qui s’étend de plus en plus (cf. plateau de Saclay ET SES BELLES TERRES à BLé transformé en parc…d’entreprises) avec des villes qui dévorent de plus en plus les campagnes, obligeant le quidam à rouler rouler…au dièsel bien sur et pas à l’électrique + du solaire….la prolifération de résidences secondaires vides 11 mois/an à plus de 20% de certains habitats communaux (une loi a été votée en suisse pour une limitation à 20%, point barre…). Et oui, à ce rythme on construira jusqu’en haut du Mont Blanc. Curieusement personne ne se manifeste….
Merci pour cet article qui est fort intéressant !
Cependant il y a un gros problème : aucun lien vers le rapport du GIEC… Je n’ai malheureusement pas le courage de dépouiller tout le rapport mais le communiqué de presse est très facile à lire et je vous invite à le parcourir : https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/2019/08/2019-PRESS-IPCC-50th-IPCC-Session_fr.pdf
Dans ce communiqué il est question de l’appauvrissement des sols dû au changement climatique, notamment dans les régions où il fait le plus chaud. Il traite également de l’énorme gaspillage alimentaire (environ un tiers de ce qui est produit n’est pas consommé) et de nos habitude de consommation. Cependant, il n’est pas du tout mentionné le cas des biocarburants (ou agrocarburant, comme il vous convient, je ne veux froisser personne) dans ce communiqué.
Serait-il possible que l’auteur de cet article précise quel est le chapitre du rapport du GIEC qui traite explicite du biocarburant et de « l’impact négatif sur la sécurité alimentaire mondiale de la production à grande échelle » ? Merci.
Je trouve un peu bizarre que l’article invoque dès le début un rapport du GIEC (qui est en effet un groupe de scientifique dont le sérieux n’est plus à prouver) pour étayer un propos, puis de rapidement basculer sur les réactions d’ONG, comme Greenpeace, dont le sérieux scientifique est plus que douteux… Je soupçonne une utilisation du GIEC pour lui faire dire ce qu’il ne dit pas. Mais j’espère sincèrement me tromper… C’est pour cela que des précisions me semblent essentielles. Ça m’embête un peu de faire un message accusateur, mais le fait est que j’aime beaucoup les articles que je lis sur ce site et j’aimerai continuer à lui faire confiance. Merci de me corriger si je dis des bêtises ! C’est comme cela qu’on avance dans sa compréhension des réalités.
Un petit aparté :
Ça me fait mal de le dire, mais il n’est pas rare que les associations écolos ne considèrent que les publications scientifiques qui vont dans le sens de leur idéologie et rejettent en bloque les autres sous prétexte que ces études sont financées par les méchants lobbys. La réalité est bien sûr tout autre. Je vous laisse vous informer sur la méthode scientifique. En tout cas je ne fais que moyennement confiance ce que peut affirmer ce genre d’ONG.
Si je comprends bien, le tout pétrole est préférable à l’utilisation de la gnôle dans les réservoirs des bagnôles. Est-ce que j’interprète mal ?
Article à la limite du lobbying du parti des Verts,responsable de toutes les taxations possibles …..sans beaucoup de résultats.
Seule la Science et la recherche nous ont apportés une meilleure qualité de vie!
Certainement pas les députés écologistes qui ne pensent qu’à leurs indemnités et voyagent en avion la plupart du temps.
Oui à la science et Non à la taxe verte
Et bientôt nous on se nourrira au pétrole quotidiennement dans nos verres et nos assiettes ?
C’est une ineptie ce truc, du gaspillage.
Toujours la même réponse des entreprises : Perte d’emploi
Et en face le politique voit : Perte d’électeurs
Puis perte de son propre emploi
Ne pas attendre des politiques une prise de décision
Comme le dit le GIEC : NOUS devons repenser NOS habitudes de consommation
Exemple : La SUÈDE et sa baisse de voyageur en avion
Les politiques n’ont pas voté de loi en ce sens
C’est un changement volontaire individuel qui devient significatif dans le chiffres des compagnies aériennes
Est-ce qu’il y a lieu de faire une différence entre agrocarburant et biocarburant ? Parce que cette équivalence supposée dans le vocabulaire et son usage entretient déjà cette illusion que l’on peut rouler bio ! Avec ce genre de confusion, on a déjà perdu avant le début de la bataille.
Faire du carburant avec une production de végétaux cultivés est une aberration.
Par contre faire du méthane avec les déchets de l’agriculture est une excellente idée qui se développe bien trop lentement. de plus, les résidus de la décomposition peuvent être utilisés en tant que fertilisant pour la production agricole.
Agrocarburants extraits avec mauvais rendement de matières végétales cultivées intensivement avec des produits chimiques et des véhicules agricoles fonctionnant au gasole détaxé. Le tout subventionné par nos impôts. Pour le bonheur des lobbies agricoles, pas tous, non, spécifiquement ceux des très gros producteurs betteraviers et oléagineux en Europe. Et par contrecoup les sojaistes en Amérique du Sud.
Ah si seulement on pouvait se nourrir directement en avalant du pétrole, notre empreinte carbone en serait divisée par 10 facilement!
Encore une fois, helas, du greenwashing. Mais avec des consequences desastreuses. C pas nouveau, mais c tres bien de le rappeler
qui est le plus stupide , le GIEC ou les députés européens élus par les citoyens européens dont la majorité sont incultes ou très peu au courant des désastres écologiques et leurs conséquences à long terme ??