Plus d’une semaine que ça dure. Pendant que certains préfèrent en rire sur les réseaux sociaux en montrant l’absurdité de la situation, d’autres s’interrogent sur le caractère ubuesque des images et des témoignages diffusés par les médias. Quand la pénurie vire à la démonstration par l’absurde…
L’acharnement plutôt que le changement
Depuis plus d’une semaine maintenant, difficile d’échapper au spectacle affligeant auquel se livre quotidiennement des milliers d’automobilistes en faisant la queue à la station service pour pouvoir continuer à rouler avec leur voiture plutôt que de devoir trouver une alternative le temps que la situation revienne à la normale. Et tant pis s’il faut y passer 1 petite heure avant de pouvoir repartir avec quelques litres du précieux fluide. Les plus acharnés n’hésitant pas à faire des kilomètres supplémentaires par rapport à l’habitude pour aller chercher du carburant…
Une véritable démonstration par l’absurde
Armé d’un véhicule zéro émission communément appelé vélo, je me suis livré à un exercice pour le moins inhabituel : aller enquêter discrètement auprès des pompes à pétrole afin de connaître les raisons exactes de toute cette mascarade. Ce qu’il faut en retenir ?
Que dans ces files d’attente où règne un doux parfum de diesel, rares sont les automobilistes qui sont vraiment au bord de la panne sèche. La plupart ont encore entre 10 et 30 litres (!) dans le réservoir de leur voiture, soit une autonomie correspondante de 150 à 600 km pour les véhicules les plus économes. Autant dire qu’avant de réussir à convaincre ces automobilistes là de la pertinence de l’électrique, il y a encore un peu de boulot !
La peur du manque et ses conséquences
Prenons l’exemple de la Bretagne : plus de 8 ménages sur 10 vivent en maison individuelle. Pour l’immense majorité des bretons, trouver du pétrole en temps de pénurie (virtuelle) est beaucoup plus compliqué que de recharger un VE à domicile. Raison pour laquelle, à l’heure où j’écris ces lignes, beaucoup continuent de se ruer sur les pompes à pétrole pour faire le plein.
Paradoxalement, le parc automobile breton étant ce qu’il est, même avec un réservoir seulement rempli au quart, un conducteur de Renault Clio / Peugeot 208 a l’assurance de pouvoir parcourir au moins 200 kilomètres sinon plus avant la panne sèche.
En prenant soin de bannir les nombreux petits trajets facilement réalisables autrement qu’en voiture, en préférant le train ou le covoiturage pour les longs trajets et en faisant de l’éco-conduite pour les situations où la voiture individuelle reste indispensable, ¼ de plein est déjà l’équivalent de plusieurs jours d’utilisation raisonnée de la voiture pour une majorité d’automobiliste.
Une utilisation raisonnée qui, en temps de pénurie, aurait l’immense avantage d’éviter de pénaliser les nombreux professionnels – artisans du bâtiment en tête – pour qui les alternatives restent malheureusement beaucoup plus difficiles à trouver que pour les particuliers.
L’automobile, un produit à réinventer
Que ce soit son hyper-dépendance au pétrole, son emprise au sol complètement délirante en ville au regard de son utilisation ou encore les nombreuses externalités négatives qu’elle génère au quotidien (pollution, bruit, accident…), l’automobile telle qu’on la connait aujourd’hui est probablement en train de vivre ses dernières heures. Pour la bonne et simple raison qu’elle fait parti des objets de la vie courante qui, eu égard à son potentiel d’usage et à son coût, reste incroyablement mal utilisée par l’immense majorité des automobilistes.
Alors oui, la « bagnole » comme on continue à l’appeler couramment, va continuer à vivre dans ce siècle, avec ou sans pétrole. Mais, dans les villes notamment, il y a plus que jamais urgence à ce que les services en mobilité partagée (Taxi, VTC, autopartage, véhicule autonome…) se développent massivement au détriment de la voiture individuelle.
Gageons que le jour où l’automobile ne sera plus possédée individuellement, des situations aussi stupides que celles qui font la une des médias depuis plusieurs jours ne seront plus ou bien moindre.
Rendez-vous d’ici quelques années pour dresser un nouvel état des lieux de la situation. En espérant que d’ici là, le futur sobre et intelligent aura commencé à se substituer au présent inefficace et puant qui continue hélas de caractériser le quotidien de millions de français.
J’imagine la panique de certains propriétaires de VE en cas de coupure aléatoire de l’électricité, tournante de zone en zone, comme ça arrive dans certains pays en voie de développement.
La peur de manquer n’est pas l’apanage des usagers de VT.
Pour ma part ayant une hybride et connaissant l’aspect virtuel, à court terme, de cette pénurie tournante de carburant, j’attends de n’avoir plus que 50 km d’autonomie pour faire le plein… avant un long voyage. La panique est surtout le moyen de payer plus cher maintenant ce qui abondera plus tard.
Quant à l’automobile individuelle, au pays des longs trajets et de l’absence de transports en communs, elle a encore des décennies devant elle. C’est il est vrai moins le cas pour les jeunes qui vivent en zone dense en transports en commun, qui s’en passent souvent au quotidien.
Quand vous indiquez « En prenant soin de bannir les nombreux petits trajets facilement réalisables autrement qu’en voiture » vous pensez à quels trajets et par quel moyens ?
J’habite en Bretagne (Cotes d’Armor) et c’est très très compliqué de ne pas avoir de voiture : pas de pistes cyclables, ou alors uniquement pour les trajets « touristiques », pas vraiment de lignes de bus ex : pour aller au collège mon fils devrait passer sous un pont sans trottoirs et traverser un rond point sans accotements, sans passages piétons (interdits hors agglomérations) qui correspond à une sortie de la N176 … Il faut vraiment en avoir le besoin pour le faire !
Donc il ne prend pas le bus, donc nous faisons un A/R collège / maison chaque jour.
Et pour l’instant nous n’avons pas les moyens d’un VE neuf, et je n’ai rien trouvé d’économiquement rentable en occasion.
En période scolaire, c’est 300 à 450 km/semaine, et nous travaillons à domicile, donc un approvisionnement fiable en carburant est nécessaire, contrairement à une grande agglomération, il n’y a pas de plan B, c’est voiture, et rien d’autre.
Je suis un peu sceptique sur l’argument de la pertinence automobile basée sur son temps d’utilisation. En effet comparer à une automobile, un WC est utilisé pendant nettement moins de temps et pourtant personne ne songe à se passer de WC. Bon c’est vrai qu’au travail et au restaurant le WC est utilisé en co-WC et on accepte d’attendre un peu pour avoir son tour. Finalement demain peut-être auront nous des quartiers ou les WC seront partagés en commun comme c’est déjà le cas dans les campings. L’usage horaire en sera grandement amélioré et le djoc privatif de papa aura vécu pour la plus grande satisfaction du toujours moins, toujours plus en commun. Là franchement on va trop loin et en dehors de la pertinence on sent bien qu’une voiture, sa voiture, c’est bien, plus qu’un moyen de déplacement soumis au dictat de rentabilité horaire. Sa voiture c’est quelque chose entre son tableau favori et son chez-soi, un objet utile mais aussi aimé et une prolongation de son domicile privé. Exit donc, la voiture en commun généralisée même si comme les WC public cela peut parfois être utile.
Très bon article M Porcher, votre réflexion sur le sujet me semble tellement logique. Malheureusement, ce qui semble être des initiatives alternatives évidentes à la voiture personnelle pour des gens qui partagent notre opinion, n’est et ne le sera peut-être jamais pour la majorité. Si la tendance change un jour, ça sera par la Contrainte et non par l’Envie, car le genre Humain n’est pas suffisamment sage et réfléchie à mes yeux.
Pour le coup Guillaume, je te suis moins sur cet article. Et pour une raison très simple. Avoir 15 l dans le reservoir c’est pouvoir parcourir mettons 150 km. Alors oui, 150 km pour nos VE, c’est la batterie chargée à boc et on part serein. Mais nous, nous avons l’assurance de pouvoir faire le plein sitot revenu at home. Tandis que la VT lui est dans l’incertitude totale. Où sont les stations qui ont du carburant? Vais je devoir tourner pour trouver? Etre bloqué dans les bouchons? Combien de temps cette affaire va durer? Bref le brouillard. Donc je trouve humainement compréhensible que le gens fasse le plein ou l’appoint. Perso, j’ai fait la même chose avec mon VT. Je dois faire 600 km dans 5 j. N’étant sûr de rien avec ces c….. de cégétistes, je remplis.
Mais ce qui m’a fait rire avant hier, c’est la tête du gars qui voulait faire le plein de sa Panamera et c’était restreint à 20l.
Il suffit de voir l’état de dégradation et de saleté des Autolib, pour ne pas avoir envie de partager sa « bagnole » avec un certain nombre de « gros porcs » !
Non je pense que la voiture personnelle (en achat ou location) a encore de l’avenir !
Il suffirait pour la plupart des stations ou il y a un risque de pénurie dû à la bétise humaine qui fait se précipiter les gens dans les stations sans raison filtrer à l’entrée de la station et interdire ou donner en priorité à ceux qui sont en dessous du quart du réservoir. Tout ceux qui sont au dessus de la moitié devrait être rationner à 5L maximum ça les ferait réfléchir et stopperait la descente des réserves des stations. L’état à très mal géré la grève et les blocages ils auraient dû donner cette consigne à la majorité des pompistes et on aurait pas senti cette « pénurie » induit pour 80% par le comportement idiot des gens.
Superbe article Guillaume. Toujours riche en réflexion sur l’humain. ;)
Je suis suisse mais ceux qui ont 1/4 du réservoir voir plus et font le plein il donne l’impression d’être plus bête que leur pied en amplifiant encore plus le manque qui touche toute la population. La France va droit dans le mur
Le désagrément de recharge est fonction:
– de l’écart de distance entre le point de recharge et le trajet idéal, stationnement compris
– du temps d’attente pour la file d’attente et pour la recharge de son véhicule
– de la fréquence de branchement/débranchement du véhicule
– du rendement du véhicule €/km
– du prix du véhicule et de son amortissement,
– du prix de l’infrastructure et de son amortissement,
– du temps d’occupation des chargeurs pour effacement
L’autonomie, c’est un peu plus compliqué qu’un nombre de km !
Si vous tenez compte de tous ces paramètres, vous verrez que le plus rentable est le SREV en Mode-P, ensuite le VT, et ensuite le LREV en Mode-S.
« Mais, dans les villes notamment, il y a plus que jamais urgence à ce que les services en mobilité partagée (Taxi, VTC, autopartage, véhicule autonome…) se développent massivement au détriment de la voiture individuelle. » Tout cela ne créé que des bouchons !!! En ville et banlieue, la solution est le transport en commun !!!
Il y a faux et du vrai dans votre billet. Non, le véhicule individuel n’est pas prêt de disparaitre, c’est même l’outil principal de la liberté et de la résilience. S’entasser dans des villes sans soleil (photovoltaïque) avec du bruit, de la pollution et un visuel urbain de de zone industrielle…je préfère avoir une maison autonome, positive, avec potager, 2 ou 3 VE autogéré et des bornes de recharge en partage.
Vous trouvez ridicule les pompes à essence, mais les chargeurs rapides sont exactement la même chose. Je compte écrire un papier qui formalise cela et démontre la très grande supériorité du Mode-P par rapport au Mode-S, sur le plan économique, écologique et usage.
Pouriez-avoir une approche un peu plus scientifique ?
En VT, il m’arrive maintenant d’aller faire le plein seulement lorsque je suis dans le rouge depuis un certain (Ce qui n’était jamais arrivé avant d’avoir un VE). Mais quand le rouge apparait dans un VT, il reste encore une autonomie de…100km. Il y a donc une sacrée marge par rapport au rouge dans un VE. Peut-être que les constructeurs devraient revoir à la baisse le moment d’apparition du « rouge » sur le tableau de bord d’un VT et ne pas créer la panique de l’automobiliste alors qu’il reste encore 100km d’autonomie.