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De l’Alsace à la Bretagne, soit plus de 800 km avec une citadine électrique à la batterie minuscule, est-ce que c’est une partie de plaisir, un sacerdoce ou mission impossible ? Étant prêt à tous les sacrifices pour la cause, j’ai consacré une partie non négligeable de mes vacances à de répondre à cette question épineuse.
Rappelez-vous, c’était il y a quasiment un an jour pour jour, je vous partageais par l’intermédiaire de l’ami Philippe Schwoerer mon expérience de propriétaire ravi de Seat Mii Electric. Permettez-moi donc de me citer sur ce qui constituait mes critères lorsque j’étais en phase d’achat : « Je cherchais une voiture qui corresponde à 95 % de mes besoins, et donc le plus possible adaptée à mes déplacements quotidiens. Ce qui influe sur le modèle de la voiture, la capacité de la batterie, l’autonomie et la puissance de recharge ». Et, comme « mes déplacements sont avant tout de l’urbain et du périurbain » et que « être tout seul dans une voiture de cinq places pour faire 20, 30 ou 50 km par jour avec une batterie qui permet d’en faire 500, pour moi ça n’a pas de sens », mon choix s’est naturellement porté sur la citadine électrique qui reste la plus efficiente à ce jour : un membre de la célèbre triplette du groupe Volkswagen constitué non seulement de l’Ibère, mais aussi de la Volkswagen e-Up! 2.0 et de la Skoda Citigo e IV. Avec 3,55 m de long, 83 ch, une batterie de 32,3 kWh nets, 250 à 260 km d’autonomie WLTP et une recharge à 7 kW en AC et 40 kW en DC, on ne fera sans doute jamais mieux pour correspondre à la très grande majorité de mes besoins qui se trouvent dans un rayon de 150 km autour de chez moi.
À lire aussiEt pour l’infime minorité alors ? Ces fameux 5 % ? Laissez-moi une nouvelle fois me répandre dans le narcissisme le plus complet en répétant mes propres paroles : « Dans les 5 % où la Mii ne correspond pas, je loue une voiture qui correspondra à mon besoin ponctuel. Elle sera électrique forcément, soit plus grande, soit avec davantage d’autonomie. Lissé sur l’année, c’est bien plus intéressant ». Eh bien je peux vous l’avouer aujourd’hui : j’ai menti. Et, pourtant, objection, monsieur le juge, ce n’était pas mon intention, je demande des circonstances atténuantes. En préparant mes dernières vacances, j’étais même allé jusqu’à faire un devis chez Sixt. 846 € à l’époque pour deux semaines en kilométrage illimité avec une Mini Countryman EV aux 400 km d’autonomie. C’est certes une somme loin d’être négligeable, mais c’est moins de trois loyers de LOA pour en devenir le pseudo-possesseur. Mais voilà, à mi-chemin d’une vie ponctuée dans sa première moitié de nombreux défis plus ou moins intelligents (souvent moins que plus, je sais) à bord de voitures électriques diverses et variées, quelques velléités de flirter avec les limites demeurent.
S’en suit donc une recherche de destination exotique selon un processus des plus classiques. Prenons l’hexagone que forme la France et déterminons l’angle opposé à celui où se trouve Strasbourg : direction la Bretagne. Passons de la géométrie à la biologie en visualisant la péninsule comme un bras et visons l’aisselle pour être à mi-chemin des biceps et triceps que sont respectivement les côtes de la Manche et de l’Atlantique pour multiplier les centres d’intérêt et on tombe sur Rennes. Explorons une carte du coin pour dénicher un nom de patelin rigolo et l’index tombe alors sur Corps-Nuds, où se trouve un splendide gîte de France trois épis avec prise Green’Up, panneaux solaires et batterie stationnaire. Par-fait.
Dans n’importe quelle voiture électrique moderne, établir l’itinéraire pour s’y rendre se limiterait à rentrer la destination dans le planificateur de trajet embarqué et à suivre ensuite ses directives à la lettre. Cela demande un peu plus de préliminaires pour un modèle à courte portée dont la plateforme, même si mise à jour, est sortie en 2011 et dont le système multimédia est incarné par le smartphone que vous voudrez bien placer sur la station d’accueil prévue à cet effet sur le tableau de bord. Et surtout si on ajoute le préambule suivant : j’adore les roadtrips. Le claquement du hayon de la Renault 21 Nevada GTS Manager de mon enfance était le seul coup de sifflet valable pour déclarer les vacances officiellement commencées, avec la promesse de contempler des heures durant, dans cet écran HD qu’est la fenêtre arrière de ce vénérable break, un spectacle sans cesse changeant, avec en fond sonore dans le Blaupunkt les cassettes de l’album Rock n’Roll Attitude de Johnny Hallyday et le live de Michael Jackson à Wembley en boucle. J’en ai gardé non seulement des goûts musicaux éclectiques, mais aussi une appétence pour dévorer du kilomètre à travers la pampa en évitant soigneusement les péages. C’est d’autant plus facile aujourd’hui que les cartes Michelin impossibles à replier de l’époque ont disparu au profit d’applications des plus pratiques tels que Waze ou Google Maps. Les deux indiquent le même tracé sans le moindre lever de barrière à rémunérer, avec précisément 818 km de porte à porte pour 11 heures et 16 minutes de trajet.
Il faut maintenant appliquer à ce parcours la couche « voiture électrique » en le croisant avec la partie localisation des bornes de recharge de l’application Chargemap dont j’utiliserai la carte (est-ce que tout le monde sait que Chargemap fait partie du même groupe qu’Automobile Propre ou faut-il encore le préciser ?). Ici, pas question de tutoyer les limites de la batterie de la Mii, le but n’est pas de réaliser une performance, mais d’arriver à destination avec sérénité en restant confortablement dans la plage 20 à 80 % de charge, soit environ 180 km d’autonomie réelle sur le réseau secondaire et une pause plutôt raisonnable toutes les deux heures et demie. Les étapes pour satisfaire le léger appétit en électrons de la Seat seront donc au nombre de quatre et se feront à proximité de Nancy, Troyes, Orléans et Le Mans en visant des zones commerciales et en privilégiant, plus que les prix les plus bas, des réseaux avec lesquelles j’ai mes petites habitudes, comme Ionity, Electra ou Allego. Les légers détours pour atteindre ces bornes rajoutent au final quatre petits kilomètres, à 822 km, ce qui est plus qu’acceptable.
Le départ devait être donné tôt le samedi 2 août, « devait » car Bison Futé voit noir ce jour-là et j’avoue céder à la panique générale face à l’Armageddon automobile annoncé. Le coup de sifflet est donc finalement donné la veille à 18h00 pour un match qui se fera donc au final majoritairement de nuit avec une batterie, une fois n’est pas coutume, à 100 %. 176 km plus loin, l’arrivée à la Ionity de Dommartin-lès-Toul à 23 % correspond à l’heure du dîner. 49 minutes sont nécessaires pour récupérer 18,69 kWh et, tous repus, en route pour l’étape suivante avec en ligne de mire, 172 km plus loin, le parking du Brit Hôtel à la Chapelle-Saint-Luc où l’arrivée se fait à 21 % de charge et alors qu’on vient de passer minuit. Petite ronflette d’une heure, le temps de récupérer 22,81 kWh, et le périple reprend. Avec 188 km, c’est la plus longue étape, d’où une arrivée aux bornes Allego Pathé Saran à 4h30 avec 12 % de charge. Et c’est là où je fais une erreur impardonnable : au lieu de me brancher sur la borne DC 50 kW avec son kWh à 0,505 €, j’attache mon fidèle destrier à une 300 kW faisant payer sa forte puissance 0,609 du kWh en ajoutant des frais d’occupation de 0,256 € par minute. S’en est donc suivi ce qui sera la plus chère des siestes puisque, quand le réveil sonne une heure plus tard, l’addition pour les 23,17 kWh délivrés est de… 30,80 € au lieu de 12,72 €. Mais ça n’empêche pas le soleil de se lever. Plus qu’une charge avant d’arriver à destination et elle se fait 139 km plus loin sur la station Electra du Parc Manceau, au Mans, à 7h50. Un petit déjeuner pour tous et, 53 minutes plus tard, avec 17,2 kWh supplémentaires dans la batterie, il est temps d’effectuer les derniers 148 km qui nous séparent de notre lieu de villégiature, son transat dans le jardin et ses dolmens à proximité.
Les deux semaines suivantes, la Seat Mii Electric a repris son statut de voiture électrique idéale, avec jamais plus de 200 km faits dans la journée, que ce soit pour aller à Saint-Malo, Vitré, Bécherel, Brocéliande, au Mont-Saint-Michel ou encore à Pleudihen-sur-Rance, célèbre pour sa Fête du Blé pendant laquelle s’est produit cette année Manau. Une immersion totale dans la culture celtique, vous en conviendrez. Toutes les recharges se sont faites au gîte et, avec 8 kWh de consommation en heures pleines et en heures creuses compris dans la location auxquelles s’est rajoutée l’énergie solaire, les 1 500 km faits sur place ont été totalement gratuits.
Mais le séjour tire déjà sur la fin et il est temps de rentrer du Phare Ouest vers le Grand Est, mais cette fois-ci en plein jour et avec des températures bien estivales. J’aimerais vous dire que le retour s’est passé aussi bien que l’aller, mais il n’en est rien. Petit déjeuner dans un McDonald’s du Mans pour la première recharge sur une borne Izivia aux excellents tarifs juste devant la porte d’entrée, puis, pour la seconde, déjeuner dans la galerie marchande d’un Carrefour à Saran équipée d’une station située sur son parking. Jusqu’ici tout va bien. C’est à nouveau chez Carrefour et Electra à La-Chapelle-Saint-Luc, près de Troyes, que se fera la troisième pause à l’heure du goûter, mais là, catastrophe.
Vous n’êtes pas sans savoir que la batterie de la triplette Volkswagen est refroidie par air et non par eau, ce qui la rend sujette à la surchauffe lorsque l’on enchaîne plusieurs charges rapides. Vous pouvez trouver ce problème parfaitement documenté dans cette vidéo de La Chaîne EV, mais je pensais y échapper en empruntant la nationale et non l’autoroute, ce qui accorde un délai supplémentaire pour tempérer la pile qui est dans le même temps théoriquement moins sollicité. Et cela fonctionne dans une certaine mesure, puisque j’ai effectué un Strasbourg/Paris/Mulhouse/Strasbourg en 48 heures en décembre dernier ainsi que l’aller de ce périple sans la moins difficulté. Mais c’était forcément avec des températures hivernales dans le premier cas et de nuit et en grande partie sous la pluie dans le second. Et j’ai atteint les limites de ce que ma Mii pouvait encaisser sur le goudron brûlant de ce parking de supermarché en plein soleil, avec un thermomètre dépassant les 35 °C.
Arrivée à 60 % de charge, après un pic à 37 kW, la courbe affichée par l’Alpitronic s’écroule soudainement à 13 kW et s’y stabilise. Le bilan : alors que 63 minutes ont été nécessaires pour récupérer 20,5 kWh à la charge précédente, il en faudra 83 cette fois-ci pour reprendre 21,17 kWh. Cependant, la journée tire alors à sa fin, le soleil se rapproche de l’horizon et les températures fraîchissent, ce qui me laissait alors bon espoir que la batterie aurait le temps de refroidir avant l’ultime recharge à la station Total de l’aire de Toul-Dommartin. Mais il n’en est rien. Il a beau être près de 21h00, la charge se lance et plafonne directement à 20 kW alors que la Mii peut en accepter deux fois plus, puis baisse progressivement. 37 minutes plus tard, avec seulement 12,39 kWh récupérés, je perds patience et je décide de retomber dans mes vieux démons : je coupe la charge, passe l’itinéraire Waze en mode 100 % cambrousse repoussant l’arrivée de 40 minutes, active le mode hypermiling de ma cheville droite et finis enfin par me garer devant chez moi avec 3 électrons restant dans la batterie au plus sombre de la nuit. Pas la façon la plus sereine de terminer les vacances, nous sommes d’accord.
À lire aussiQue faut-il en déduire en conclusion ? Avant tout que le même exercice n’aurait été évidemment qu’une formalité au volant de n’importe quelle autre électrique plus moderne avec une gestion thermique efficace (soit quasi toutes). Mais, en acceptant de faire des concessions à certains niveaux, on peut demander à une citadine électrique que l’on trouve désormais autour des 10 000 € de sortir des limites de la ville, voire de traverser la France de part en part. Tout comme un couteau à beurre peut aussi couper une bûche de hêtre avec suffisamment de patience et d’abnégation. Pas loin de 15 heures pour arriver à destination en ajoutant presque 4 heures consacrées à la recharge aux 11 heures de route, même pour le grand amateur de roadtrip que je suis, c’est beaucoup. C’est épuisant. C’est pénible. Je sais. Mais ça se fait. Remontez à 2020, année de fabrication de la Seat Mii Electric, et la densité des bornes de recharge DC d’alors aurait rendu un tel trajet impossible sans le compter en jours plutôt qu’en heures, ce qui rend la petite Espagnole plus polyvalente aujourd’hui qu’à sa sortie de la concession. Pas d’obsolescence programmée ici, on pourrait même dire que, tel le chouchen, elle se bonifie avec le temps.
Stations | Recharge | Temps | Coût |
De l’Alsace à la Bretagne | |||
Ionity – Dommartin-lès-Toul | 18,69 kWh | 49 minutes | 11,40 € |
Powerdot – Brit Hôtel – La Chapelle-Saint-Luc | 22,81 kWh | 59 minutes | 8,56 € |
Allego – Pathé Saran | 23,17 kWh | 60 minutes | 30,80 € |
Electra Le Mans – Parc Manceau | 17,2 kWh | 53 minutes | 11,54 € |
Coût des recharges pour les trajets sur place | 0 € | ||
De la Bretagne à l’Alsace | |||
Izivia Fast – Mc Donald’s – Le Mans Université | 16,13 kWh | 43 minutes | 5,85 € |
Allego Carrefour Saran | 20,5 kWh | 63 minutes | 10,94 € |
Allego Carrefour La Chapelle | 21,17 kWh | 83 minutes | 11,28 € |
Total Energies Relais de Toul | 12,39 kWh | 37 minutes | 8,63 € |
Coût total pour environ 3 300 km | 99 € |
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