Image générée par Dall-E montrant des voitures électriques coincées dans un bouchon en hiver

Derrière ce titre provocateur se cachent les premiers mots d’un message posté sur les réseaux sociaux, il y a des années de ça. Fait étonnant : il revient chaque hiver, année après année. Que dit ce message, et pourquoi s’étonne-t-on de le voir toujours autant relayé ? On fait le point.

Bon, pour tout vous dire, on a presque hésité à en parler, tellement c’est un non-sujet. Mais tel un virus saisonnier qui réapparaît chaque année, on se devait de ne pas le prendre trop à la légère, tout le monde n’étant pas immunisé de la même façon. Aussi, si vous vous sentez fébrile, voici un petit remède contre les idées reçues et la désinformation.

Le marronnier de l’hiver

Pour commencer, que nous dit exactement ce message déniché récemment sur une page Facebook polonaise et dont la traduction est quelque peu hasardeuse ? À première vue, il exprime des inquiétudes concernant l’incapacité des voitures électriques à faire face à des situations d’urgence, ou à des conditions météorologiques extrêmes. En particulier, il prend l’exemple d’une voiture électrique bloquée dans les embouteillages, sans chauffage et batterie à plat.

Les mêmes arguments et la même photo sont repris dans de nombreux posts présents sur les réseaux sociaux. Il s’agit en réalité d’un Hoax. C’est-à-dire des informations fausses, périmées ou invérifiables, propagées par Internet. Problème : ils prolifèrent, avec à chaque fois des records d’audience. Celui-ci a par exemple été partagé 131 000 fois, et compte pas moins de 21 000 commentaires. Des chiffres qui font froid dans le dos, surtout quand on sait que ce scénario catastrophe ne tient pas la route une seule seconde. Les arguments qui l’étayent n’étant tout simplement plus d’actualité, infondés ou même totalement irréalistes. Voyons cela point par point.

Une batterie qui fond comme neige au soleil ?

Premier argument, le message soulève une préoccupation concernant la durée de vie de la batterie par temps froid. Il est vrai que les voitures électriques n’ont pas la même efficience en hiver qu’en été, avec des variations de l’ordre de 20% à 30% en moyenne. Pour autant, il est important de noter qu’à l’arrêt, puisque coincé dans les embouteillages, la consommation du moteur électrique est proche de zéro, contrairement à un moteur thermique qui continue de brûler du carburant. Seuls les équipements accessoires comme la radio, les phares ou le chauffage demandent alors encore de l’énergie. Si les deux premiers sont anecdotiques, le chauffage, lui, consomme un peu plus. Mais de quelle quantité parle-t-on exactement ?
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Chauffe Marcel !

Tout d’abord, et contrairement à la croyance populaire, les voitures électriques ont toujours été équipées de chauffage. S’il est vrai qu’un Renault Kangoo ZE des années 2000 se contentait d’une résistance énergivore et peu efficace, aujourd’hui la grande majorité des voitures électriques commercialisées sont équipées de systèmes sophistiqués qui intègrent des pompes à chaleur (PAC). Ces dernières extraient la chaleur de l’air ambiant, la compriment et la transfèrent à l’intérieur de la voiture. Cela rend le processus beaucoup plus économe en énergie puisqu’il exploite la chaleur existante plutôt que de la créer à partir de rien. En outre, la batterie peut également être enfermée dans un caisson avec circulation d’un liquide caloporteur optimisant encore plus la consommation. Mais ce n’est pas tout. Un autre aspect à considérer est que les voitures électriques peuvent préconditionner l’habitacle pendant qu’elles sont encore branchées sur le réseau électrique. Or, la consommation d’une PAC diminue considérablement une fois la température de consigne atteinte. Le maintien de celle-ci, après que la voiture ait été débranchée, sera, de fait, peu énergivore. Pour vous donner un ordre de grandeur, on parle ici de moins d’un kWh par heure de fonctionnement. Autrement dit, si vous vous retrouvez coincé avec une Renault Megane EV60 par exemple, et qu’il ne vous reste plus que 50% de batterie, vous pourrez compter sur plus de 30h de chauffage. Ce n’est donc pas les 3 heures mentionnées par le message sur les réseaux sociaux qui risquent de poser le moindre souci. Et on ne parle même pas ici des essuie-glaces, de la radio, ou du GPS, qui ne consomment, pour ainsi dire, rien du tout !
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Et si la batterie est vraiment vide ?

Bon, mais admettons que la batterie ne soit pas à 50%, mais que, manque de chance, vous étiez justement en train de rejoindre une station de recharge et qu’elle n’affiche plus que 3%. Si on reprend l’exemple précédent, en 3 heures, votre batterie s’est alors complètement vidée et vous vous retrouvez, comme le message le souligne, “coincé dans une voiture électrique dont la batterie est à plat”. Dans cette situation, et en fonction de votre modèle, il se peut que vous ayez toujours la possibilité de faire fonctionner le chauffage. Pourquoi ? Tout simplement car les constructeurs programment généralement leurs véhicules de telle sorte à conserver une petite réserve d’énergie, même lorsque l’indicateur de batterie affiche 0%. Cela permet notamment de protéger l’accumulateur et d’assurer certaines fonctionnalités de base, pouvant inclure le chauffage. Ainsi, la pompe à chaleur pourra encore tourner le temps que les secours arrivent.

D’ailleurs, en cas de véritable urgence, que cela soit la police, l’ambulance ou les pompiers, la priorité est à la sécurité. Ces véhicules seront toujours en mesure de fournir une assistance, qu’ils soient électriques ou non. Et même si vous êtes coincé sur l’autoroute, ces dernières sont aménagées d’une bande d’arrêt d’urgence pour laisser passer les véhicules de secours. L’argument selon lequel ces axes seraient bloqués par des voitures électriques ne tient donc pas.

Et l’été alors ?

Changement de décor ! Le message évoque les embouteillages pendant les vacances d’été, suggérant que les batteries des voitures électriques ne pourraient pas supporter une utilisation prolongée de la climatisation. Sauf que, incroyable mais vrai, les pompes à chaleur sont souvent réversibles, permettant à la voiture électrique de fonctionner comme un climatiseur durant les périodes chaudes. La consommation induite par le fonctionnement de la clim sera alors sensiblement la même en été qu’en hiver, en fonction de l’ensoleillement et de l’isolation de la voiture.
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Enfin, dernier point évoqué : la recharge. Si notre reportage de cet été nous montre qu’il n’y a pas eu de queue aux bornes sur les aires d’autoroute, le message questionne implicitement sur les solutions de recharge lorsque l’on tombe en panne de batterie. Car même si cela ne se produit que très rarement, cela ne veut pas dire que ça ne peut pas arriver. Dans ce cas, on appelle tout simplement une dépanneuse qui emmènera la voiture à la première station de recharge. À ce propos, le jour où le parc entier sera électrique (on parle ici d’une échéance à 30 ans au minimum), les solutions de recharge auront grandement évoluées, tout comme les batteries. Inutile donc de raisonner avec notre vision actuelle des choses, ce serait comme regarder la scène par un trou de souris ! Pas étonnant finalement que le message finisse par “Personne n’en parle”. Évidemment, puisqu’il n’y a pas débat sur ce sujet ! Donc critiquer la voiture électrique oui, mais pas avec un scénario digne d’un mauvais polar. Autrement dit, pour dire du mal de la voiture électrique, il va falloir faire preuve d’un peu plus de sérieux ! À moins que les détracteurs finissent par être à court d’arguments ? Dans tous les cas, il est essentiel de remettre en question les idées reçues propagées sur Internet, et de se tenir informé des avancées technologiques.

En conclusion, et pour répondre à la question du titre : non, les voitures électriques ne sont pas la “plus grande arnaque que le monde ait jamais vue”. Elles représentent plutôt une évolution majeure vers une mobilité moins émettrice en CO2 et sont de plus en plus compétitives sur le marché automobile. Leur part de marché ne cesse d’ailleurs d’augmenter avec un score de 20% en novembre 2023