Les véhicules électriques investissent un peu plus chaque année les rallyes-raids. Dakar, Aïcha des Gazelles, 4L Trophy, Caravane européenne pour la COP22 accueillent désormais des engins à batterie de traction. Des épreuves leur sont même dédiées. Ainsi The Green Expedition : un périple en Argentine dont la première édition est programmée en avril 2018, et pour lequel l’organisation a sollicité un accompagnement de l’entreprise bretonne Gelec susceptible de lui fournir 2 groupes électrogènes alimentés à l’huile végétale, brute (HVB) ou de recyclage (HVU).
Un challenge
Que faire aujourd’hui quand on a la fibre d’un pilote et/ou d’un organisateur de rallyes et que l’on veut continuer à vivre sa passion en allégeant toujours davantage son impact sur l’environnement ? Penser, il y a quelques années, à inviter les voitures électriques dans la partie, semblait quelque peu ahurissant, tant il y avait de problèmes spécifiques à résoudre : Quid de l’autonomie ? Les batteries vont-elles accepter un traitement intensif sous la chaleur ? Comment les recharger en cours de route ? Quelle formule d’assistance retenir pour accompagner le(s) concurrent(s) ?
Toutes ces questions, Bruno Ricordeau les a tournées et retournées dans tous les sens. A la tête d’Atypik Travel Organisation, auparavant connu comme Le Raid des Baroudeurs, basé à Sille-le-Guillaume dans la Sarthe, il a plutôt l’habitude de préparer des périples pour des voitures anciennes toutes marques, ou réservés aux Citroën 2 CV, Renault 4, et parfois des 4×4. Ainsi, parmi d’autres, le Trophée Paris-Pékin, et des raids pour les Andes, les terres de l’ancienne Indochine ou l’Australie.
Sous l’impulsion d’un partenaire électrifié
Partenaire depuis toujours de ces événements, Sojasun développe en son sein une flotte de véhicules électriques et hybrides pour les besoins de son activité. Une aventure qui a commencé il y a plus de 20 ans avec Françoise Clanchin, créatrice en 1988 avec Jean Clanchin de la marque alimentaire, et qui se matérialise aujourd’hui par un parc qui compte une dizaine de véhicules électriques (3 Nissan Leaf, 2 Bolloré Bluecar, 2 Opel Ampera, 1 Tesla Model S, 1 Smart ED, 1 Nissan e-NV200, 1 Citroën Berlingo électrique), complété par une vingtaine de voitures hybrides.
S’y ajoute une sensibilisation du personnel à l’eco-conduite, et l’exploitation des biocarburants pour les camions. Le décor était déjà dressé : il ne manquait plus qu’à attendre le bon moment pour que Sojasun et Atypik Travel Organisation s’engagent dans un raid, comme The Green Expedition. Véritable rallye découverte à la sauce actuelle, l’épreuve de 5.000 kilomètres se veut aussi le support d’une assistance locale à l’implantation de panneaux solaires et d’éoliennes dans les villages traversés, et de livraison de fournitures scolaires aux écoles rencontrées sur la mythique Route 40 qui relie la Terre de Feu à la Bolivie.
La recharge au cœur des préoccupations
Bruno Ricordeau, rompu à l’organisation de rallyes-raids, a programmé des étapes journalières d’un maximum de 400 kilomètres en Argentine, avec recharge partielle possible sur la pause déjeuner, et complète la nuit. Voilà pourquoi il a ouvert The Green Expedition à des voitures électriques dotées d’une autonomie d’un minimum de 300 kilomètres, non pas selon le controversé cycle NEDC, mais selon la conduite la plus sage de leurs propriétaires.
Atypik Travel Organisation s’active déjà sur place à apporter son aide au gouvernement argentin afin de développer les infrastructures nécessaires au ravitaillement des batteries. Pour autant, le volet assistance, mécanique comme logistique, est costaud. Les véhicules d’accompagnement seront alimentés en biocarburant. Ils embarqueront du matériel, de l’outillage et 2 groupes électrogènes qui devraient fonctionner à l’huile de friture recyclée.
Deux mille litres de ce produit seraient du voyage, sans doute fournis par l’association Roule ma Frite, avec lequel le fabricant de groupes électrogènes Gelec travaille.
Depuis 2011
Tout en aidant des plus activement les organisateurs à réduire l’impact de leurs manifestations sur l’environnement, l’entreprise, pionnière dans son domaine en France, dispose ainsi de vitrines technologiques. C’est probablement à travers un tel partenariat gagnant-gagnant que Gelec et Atypik Travel Organisation vont s’unir le temps d’un rallye-raid en Argentine. A l’heure où nous produisons cet article, les 2 parties réfléchissent aux termes de leur accord potentiel.
Hybride solaire / huile végétal
Une des réalisations les plus impressionnantes de Gelec est sans doute ce groupe électrogène « Hybrid power station » de 20 kVA monté sur une plateforme de camion Renault. Sa production d’électricité est obtenue à la fois de vastes panneaux solaires qui se déploient depuis le toit de l’engin et d’un moteur diesel alimenté en huile végétale.
Une architecture susceptible de répondre aussi aux besoins d’une ONG, d’une armée, ou d’un chantier, par exemple. Le couplage des groupes électrogènes avec des panneaux photovoltaïques n’est pas étonnant chez Gelec : son fondateur s’investissait auparavant dans le solaire. Quoi qu’il en soit, ce n’est cependant pas ce poids lourd qui sera chargé d’accompagner The Green Expedition en Argentine.
BiOil Technology
Gelec réaliserait les groupes selon les besoins spécifiques d’Atypik Travel Organisation. Ainsi pour les prises en sortie, mais aussi, éventuellement, avec un système de cogénération pour disposer d’eau chaude lors des campements en Argentine. La technologie BiOil permet à l’appareil de fonctionner aussi bien au gazole qu’à l’huile végétale. Au bémol près que les groupes démarrent toujours avec le produit pétrolier le temps que le second carburant soit à une température suffisante pour sa bonne viscosité. Le processus d’arrêt lance également un cycle court au gazole, afin d’être correctement amorcé pour la prochaine utilisation.
40% de rendement
A sa vitesse régulière de production d’électricité, le rendement du moteur des groupes électrogènes est d’environ 40%. Pour une puissance de 100 kW, la consommation est d’environ 30 litres par heure de fonctionnement. La présence d’un système turbo intercooler permet de réduire l’impact de l’altitude sur la production d’énergie.
En sortie du groupe, du courant triphasé. En exploitation monophasée, chaque phase permettrait la recharge d’une voiture engagée à l’expédition en Argentine. Au cours des arrêts nocturnes, entre 17 et 9 heures le lendemain, chaque groupe électrogène ravitaillerait jusqu’à 7 VE. Voilà qui donne le nombre d’équipages accueillis dans l’aventure : une petite quinzaine.
Huile de friture
Si l’image d’un automobiliste faisant régulièrement le tour des restaurants pour s’approvisionner en huile de friture peut faire sourire, l’histoire lui donne cependant raison. Avec quel produit l’ingénieur allemand Rudolph Diesel a-t-il fait fonctionner le moteur qu’il a mis au point en 1891 ? Tout simplement avec de l’huile de lin, une huile végétale assez proche de celle que l’on peut récupérer dans les friteries.
On a dit un peu tout et son contraire sur l’utilisation de l’HVU (huile végétale usager) en lieu et place du gazole. Il faudrait un article entier rien que pour en débattre. Pour l’association Roule ma Frite, créée il y a tout juste 10 ans, en Charente-Maritime, les objectifs de son action sont clairs : « diminuer les émissions des gaz à effet de serre liés aux transports grâce à la distribution d’un carburant propre ; revaloriser un déchet actuellement problématique à gérer et polluant ; participer aux travaux actuels visant à développer de nouveaux systèmes et modèles à faible empreinte environnementale créateurs d’emplois durables ».
50.000 litres collectés en 2015
Si l’utilisation en carburant dans les voitures, après décantation et filtrage, est encore prohibée en France, il n’en est pas de même dans d’autres pays. Quoi qu’il en soit, le prix de revient au litre ne devrait pas dépasser les 50 centimes d’euro. Et si les 2.000 litres prévus de HVU n’étaient pas suffisants ? Bruno Ricordeau compte bien trouver le moyen d’en obtenir sur place, quitte à se plier aux traitements préalables nécessaires ! Avril 2018, c’est dans un an. Douze mois d’attente avant de connaître les retours de cette expérience !
Je remercie personnellement Bruno Ricordeau d’Atypik Travel Organisation pour avoir accepté que je sois présent lors de sa visite chez Gelec. Un grand merci également au personnel de Gelec pour son accueil et sa disponibilité. En particulier Juliette François, chargée de communication, et Devi Ban, pour ses explications et les démonstrations. Et parce que les choses ne se font pas toujours par hasard et qu’il peut être important de porter un éclairage dessus : notre dernier interlocuteur est bénévole à l’ONG de solidarité internationale Electriciens sans frontières qui mène depuis 1986 des projets d’accès à l’électricité et à l’eau.
Commentaires
Une voiture électrique fonctionnant en fait avec un moteur diesel.
Combien de particules PM ? Nombre de particules PN ? quantité de NOx ? combien d'aldéhydes ?
Il était EuroIV, Euro V ou Euro VI ce groupe électrogène embarqué ?
@Ceyal
Pour avoir vu une nacelle en entretien sur un chantier, j'ai été surpris de la technologie embarquée et plus particulièrement en terme de pollution. Même des moteurs du type de ceux des voiturettes sont bien dépollués, en plus c'est certainement plus facile parce que le moteur tourne à deux régimes soit le ralenti soit en accéléré pour les manœuvres permettant la mise en pression du circuit hydraulique.
De plus sur les chantiers on voit apparaître de l'ED95 et apparemment il permet une réduction de 70 % de la masse des particules, de 80 % du nombre de particules et de 60 % des émissions d’oxydes d’azote (NOx) par rapport aux limites imposées par la norme Euro 6 sans parler du gain en terme de GES (gain de 49 à 72 % par rapport aux carburants fossiles).
Du coup je me demande si une remorque embarquant un groupe électrogène avec un moteur diesel alimenté en ED95 ne serait pas préférable pour les trajets où une batterie de 22 kWh n'est pas suffisante à une grosse batterie transportée tous les jours.
Ce document est intéressant pour voir tous les systèmes de dépollution, sachant que ce constructeur utilise des moteurs de différents fabricants pour ses différents engins : http://www.bobcat.eu/assets/imported/transformations/content/download-attachments/%7Blanguage%7D_DownloadDocuments_Files/71EA69A036504479B9385955F9C07976/fr-bobcat-engine.pdf
Et là encore on voit que la réglementation s'est focalisée sur le diesel en oubliant totalement l'essence non avare en particules et autres cochonneries.
Pour précision, les groupes ne sont là qu'en dépannage, en cas d'absence ou de panne des bornes solaires. ATO a commencé depuis quelques mois à effectuer des démarches pour inciter et aider le gouvernement argentin à implanter des bornes alimentées en énergie renouvelable.
J'ai remarqué que les moteurs fonctionnant à l'huile ont l'avantage de moins émettre d'odeurs. C'est déjà un point positif :)
C'est n'importe quoi ce rallye de VE sans moyen de recharge le long du parcours ! Déjà il faut trimballer le groupe électrogène sur un gros camion DIESEL... ensuite faire fonctionner le groupe électrogène qui, même avec de l'huile de friture, reste très polluante !!! NUL !!!
Le groupe électrogène de 70 Kwh est fixé sur un plateau tiré par un pick-up et ne sert qu'en dépannage. Les véhicules seront rechargés dans chaque ville-étape au niveau du réseau public.
Une fois, je me promenais dans la campagne. Un gus m'a dépassé avec sa vieille caisse. Ses fumées pléthoriques puaient douloureusement. Quand je l'ai retrouvé plus loin, je lui ai demandé. Il était fier de m'annoncer que son bouzin fonctionne à l'huile de friture. Écologique? Je ne sais pas. Sain pour l'humain et l'animal. Non !
mauvaise odeur ne signifie pas que ce n'est pas écolo.Ca me fait penser à ma grand-mère qui déversait des litres d'eau de javal au sol et me disait : "ca sent le propre"
javel :)
Oui, parce que l'eau de javal, ça fait mal à l'oesophage...
L'association "roule ma frite" était au départ le fer de lance des associations qui dénonçaient le racket fiscal autour de la TIPP mais de là à dire qu'il s'agit d'un combat écologique pour défendre le véhicule electrique propre il y a un viaduc...
La promotion des carburants plus ou moins verts ou sortis des friteries de mac do ou autres GrecsTurcs Kurdes est un faux problème. Je dirais même que cet article n'a pas sa place sur ce forum. Des groupes electrogènes pour assister les véhicules electriques? Ca non plus je ne suis pas certains que cela soit une solution raisonnable mais c'est juste mon avis...