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C’est une étude passée presque inaperçue : l’ADEME a rendu publique il y a quelques jours une analyse comparative des cycles de vie des véhicules électriques et de leurs homologues thermiques (essence et diesel). Si le véhicule électrique ressort comme globalement plus pertinent que son homologue à pétrole, l’étude met en avant à plusieurs reprises, les bonnes performances des véhicules à moteur Diesel !? L’hyper-dépendance de l’automobile au pétrole ne serait donc qu’un faux problème ?

I. Changer d’époque

L’étude rappelle si besoin était que le bilan énergie/CO2 d’un véhicule électrique est très dépendant de l’origine de l’électricité produite. Pour réaliser cette analyse comparative, deux pays offrant des mix électriques très différents (France vs Allemagne) sont pris en exemple. Sans surprise, on (re)découvre qu’eu égard à l’effet de serre, les véhicules électriques sont à ce jour beaucoup plus pertinents en France qu’en Allemagne. En se projetant à l’horizon 2020, la part des énergies renouvelables dans le mix-électrique des deux pays évolue sans pour autant changer la donne. Jusque-là pas besoin d’une étude financée par les contribuables pour avancer une telle affirmation.

D’autres critères sont comparés sur une durée de vie équivalente à 150 000 km : épuisement des ressources naturelles, qualité de l’air en ville, eutrophisation des cours d’eau, déchets, etc…

L’étude précise les hypothèses ayant permis d’affiner l’analyse, notamment eu égard aux usages. Elle passe malheureusement sous silence LE sujet qui fâche : l’exploration et la production pétrolière au XXIème siècle, la part croissante des pétroles non conventionnels, le raffinage du brut, la distribution du précieux fluide sur l’ensemble du territoire ainsi que les échanges commerciaux (gazole vs SP95) complètement stupides auxquels un pays comme la France est obligé de se livrer faute d’avoir eu le courage et surtout l’intelligence de réformer à temps la fiscalité en vigueur sur les carburants automobiles.

Autre manquement, inadmissible celui-là : les solutions pour recharger un VE prioritairement à partir d’électricité d’origine renouvelable. Avec la montée en puissance inévitable de l’autoconsommation, il aurait été souhaitable que ce cas de figure fasse l’objet d’une analyse approfondie. Car sur ce point, la démonstration n’est plus à faire que le moteur thermique ne pourra jamais rivaliser avec l’électrique. Les belles promesses et l’argent investit dans la culture expérimentale de micro-algues à des fins énergétiques (biodiesel) n’y changeront rien : le moteur thermique seul est condamné à gaspiller les 2/3 de l’énergie embarquée sous forme de chaleur perdue (un peu moins en hiver…).

II. Etude à revoir

Comment peut-on en 2013 oser comparer l’énergie nécessaire à la fabrication d’une voiture à pétrole produite à plusieurs millions d’exemplaires à celle d’un VE pour l’instant limitée à quelques milliers d’unités chaque année ?

Sur ce point, il est évident que la voiture à pétrole bénéficie d’un effet d’échelle face auquel les véhicules électriques sont pour l’instant très pénalisés.

Autre problématique très mal traitée : la question des usages. Chiffres à l’appui, tous les véhicules à moteur thermique consomment en réalité 20 à 25 % de plus en moyenne que les valeurs constructeurs. Un constat qui vaut aussi pour l’électrique, c’est vrai. Sauf que dans le cas des véhicules thermiques, c’est essentiellement la partie usage (consommation de carburant) qui plombe le bilan environnemental du véhicule lorsque l’on raisonne cycle de vie. Le fait de sous-estimer cette partie revient indirectement à avantager le véhicule thermique au détriment de l’électrique.

Autre point passé complètement à la trappe : les nombreuses externalités négatives engendrées par les véhicules à moteur thermique, en usage urbain notamment. Faute de savoir chiffrer précisément le coût et le bilan environnemental des maladies respiratoires, des ravalements de façades, des pertes de fluides (huile, carburant), du traitement des eaux de surface indirectement (souillées par les rejets atmosphériques), du bruit et de beaucoup d’autres nuisances encore, l’étude se limite à la production des véhicules, leur utilisation et leur élimination future.

L’étude précise cependant que plusieurs points gagneraient à être améliorés. C’est par exemple le cas des usages pour lesquels le véhicule électrique devrait assez vite s’imposer comme une solution de mobilité très intéressante pour l’avenir : l’autopartage. En maximisant les usages, les véhicules électriques en libre service ou en autopartage permettent déjà aujourd’hui d’amortir beaucoup plus vite l’impact environnemental lié à leur production.

III. Une analyse économique quasi-inexistante

Outre la dimension environnementale qui intéresse de près les promoteurs du VE, on aurait pu penser qu’à plus de 100$ le baril de pétrole, l’étude allait quand même apporter un éclairage complémentaire sur l’atout économique que représente le VE par rapport à son homologue thermique. Surtout lorsque celui-ci est produit en France ou en Allemagne comme cela est respectivement le cas de la Renault ZOE ou de la BMW i3 pour ne citer que ces deux là.

La encore, la déception est grande. Même si le VE vit aujourd’hui en partie de subventions issues des nombreuses taxes en vigueur sur les véhicules thermiques, n’oublions pas que lorsque l’on parle de l’équilibre de la balance commerciale, les taxes et autres subventions sont totalement hors-jeu.

Ce qui compte pour la santé économique d’un pays c’est ce qui rentre moins ce qui sort. Et de ce point de vue, il est clair que le VE constitue un sacré atout pour la France ! Un constat qui vaut pour d’autres pays/Etats pour lesquels l’essentiel de la valeur ajoutée liée à la production électrique est une richesse produite sur le territoire et non importée.

IV. Conclusion

Au final, même si l’étude apporte des éléments de réponse sur l’impact environnemental global des batteries des véhicules électriques, on aurait aimé une investigation plus poussée encore sur des problématiques annexes telles que la qualité de l’air en ville, les changements de comportement au volant, le nombre de kilomètres parcourus par an, les solutions de mobilité alternatives auxquels les utilisateurs de VE ont recours pour des déplacements longs, etc…

Car au delà de la théorie et des effets d’annonce, il y a une réalité que plus personne ne peut nier aujourd’hui : il est URGENT de sortir l’automobile à pétrole des villes !

Plus d’infos : L’étude de l’ADEME