Les véhicules hybrides rechargeables ont le vent en poupe. Devant cet essor considérable, la technologie fait la une de l’actualité, dont le journal télévisé de TF1 hier soir. Sauf que les données qui ont servi à monter ce reportage ont été tout aussi incomprises que l’utilisation d’un véhicule de ce type.
Les voitures hybrides rechargeables ont toujours évolué dans l’ombre des voitures électriques. En revanche, la technologie qui rassemble le meilleur des deux mondes commence à gagner du terrain, notamment depuis la mise en place d’un bonus écologique dédié de 2 000 € selon une grille de critères bien spécifique.
Le phénomène hybride rechargeable
Depuis l’apparition de cette mesure, la technologie affole tous les indicateurs. Au mois d’octobre dernier, les immatriculations des véhicules hybrides rechargeables ont dépassé pour la première fois celles des voitures électriques (d’une courte tête toutefois), avec 10 214 unités. Au troisième trimestre 2020, la motorisation a fait un bond de 407,10 %, en passant de 3 962 véhicules en 2019 à 20 090 exemplaires. Une raison pour TF1 d’affirmer que la voiture hybride rechargeable a fait un bond de 400 % en un an ? Il est encore trop tôt pour le revendiquer : sur les trois premiers trimestres, la hausse plafonne à 239,50 % en France et devrait donc être similaire au terme des 12 mois de cette année. Soit une hausse près de trois fois supérieure par rapport à l’an dernier comme indiqué en fin de reportage.
Il n’en demeure pas moins que cette évolution reste particulièrement remarquable et met les voitures hybrides rechargeables sous le feu des projecteurs. Les constructeurs enchaînent les nouveautés et la technologie fait la une de l’actualité, dont le célèbre JT de 20 h de TF1 qui rassemble près de 6,60 millions de téléspectateurs devant Anne-Claire Coudray. Soit autant de personnes qui ont été particulièrement mal informées – c’est bien regrettable de le constater – par le reportage dédié aux voitures hybrides rechargeables.
L’accusée : la voiture. La victime : le client
Ce dernier s’ouvre en même temps que le capot du Mitsubishi Outlander PHEV de Sergio, qu’il s’apprête à mettre en vente. La raison : l’autonomie tout électrique réelle « qui ne dépasserait pas les 40 km » ne correspond pas forcément aux 60 km annoncés par le constructeur japonais. De ce fait, le poids mort des batteries vides entraînerait donc une surconsommation. Ainsi, la narration glisse lentement vers le cœur du reportage : la récente enquête publiée par l’institut Fraunhofer et l’International Council on Clean Transportation (ICCT), qui pointe du doigt les consommations et rejets polluants réels des voitures hybrides rechargeables.
D’après cette étude, qui a analysé 104 709 exemplaires hybrides rechargeables à travers le monde, la technologie autoriserait un fonctionnement selon un ratio électrique/thermique de l’ordre de 37 %/63 %. C’est cette donnée que les journalistes de TF1 mettent en avant pour expliquer qu’une voiture hybride rechargeable consommerait ainsi « quatre fois plus qu’une voiture classique » ! Mais au-delà de la définition particulièrement vague d’une voiture classique, c’est l’interprétation des données qui étonne dans ce bulletin diffusé aux heures de grande audience. Car non, une voiture hybride rechargeable ne consomme pas quatre fois plus que son homologue thermique, mais bien deux à quatre fois plus que la valeur indiquée selon la norme WLTP, comme le met en avant le rapport de l’institut suscité. Un fait désormais connu de tous et régulièrement démontré par nos essais, puisqu’en intégrant l’autonomie électrique dans le calcul, la norme livre une donnée de consommation complètement déconnectée de la réalité.
Dans « hybride rechargeable », il y a « rechargeable »
C’est là tout l’art de l’interprétation des données et de la connaissance du sujet sur lequel on se penche, car en l’espace de quelques secondes, les journalistes discréditent leur propos : avec son véhicule hybride rechargeable, Sergio ferait un plein d’essence tous les 400 km. Ce qui se traduirait par une moyenne de 10,75 l/100 km. Ce n’est donc pas quatre fois plus qu’un véhicule classique, mais plutôt cinq fois plus que la moyenne de 2,0 l/100 km communiquée par le constructeur. Et dans cette quête de battage médiatique, TF1 met en lumière un autre aspect de la voiture hybride rechargeable : sa mauvaise utilisation de la part de la majorité des conducteurs.
Car si le Mitsubishi Outlander PHEV revendique une consommation moyenne de 7,0 l/100 km en mode hybride, la consommation peut rapidement grimper à 9,0 l/100 km… lorsque la batterie est vide. Ce n’est pas surprenant lorsque l’hybridation représente entre 250 kg et 300 kg de plus en moyenne sur un SUV. Ce qui pourrait donc correspondre à l’utilisation que fait ce conducteur de son Outlander, comme il l’avoue timidement en début de reportage. Parce que c’est là tout l’intérêt d’un véhicule hybride rechargeable : comme son nom l’indique, sa batterie peut (et doit) être rechargée pour profiter pleinement de cette technologie, offrant ainsi un véhicule hybride capable de circuler en tout électrique au quotidien ou selon les situations. Mais il réclame une stratégie de conduite qui doit s’inspirer du monde des voitures électriques, afin de ne pas vider inutilement la batterie sans envisager une recharge, sous peine de voir les consommations s’envoler. Il est donc difficile d’être agacé par une voiture hybride rechargeable pas rechargée, de la même manière qu’on ne reproche pas à un congélateur de faire fondre les glaçons s’il n’est pas branché.
Des clients surtout alléchés par les avantages fiscaux
Ce qui est d’autant plus dommageable dans le cas du Mitsubishi Outlander PHEV, qui propose une autonomie confortable. Car c’est cette dernière qui aurait conduit le propriétaire à se séparer de son SUV après un an d’utilisation, indiquant que l’autonomie n’est pas suffisante et emmènerait systématiquement à une surconsommation. D’après lui, l’Outlander ne ferait pas plus de 40 km en tout électrique, contre 60 km annoncés par le constructeur. Sauf que le reportage oublie d’indiquer l’influence sur l’autonomie que peuvent avoir le type de routes empruntées et le style de conduite du conducteur, mais surtout de préciser que le constructeur indique une autonomie électrique de 45 km sur le cycle WLTP et de 57 km en ville. Dans le cas de ce modèle, la différence entre les annonces et la réalité est même l’une des meilleures du marché.
Comme le souligne très pertinemment Eric en fin de reportage, mais aussi l’étude qui sert de support à ce reportage, la plupart des utilisateurs dont les professionnels, profitent surtout des avantages fiscaux offerts par la technologie, avec entre autres un bonus de 2 000 € et une carte grise offerte du côté des particuliers et une exonération de TVS pour les professionnels. Soit les avantages financiers de la voiture électrique dans des proportions plus mesurées (le bonus est de 7 000 ou 3 000 € dans ce cas), sans les inconvénients comme la traditionnelle peur de la panne sèche ou l’exercice de recharge.
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L’exposé de TF1 est assez bien réalisé pour présenter toute l’incohérence de la technologie en 2’30 au JT de 20 h. Toutefois, il se trompe clairement de cible, en incriminant les hybrides rechargeables des constructeurs comme une tromperie de plus dans le secteur automobile. Peut-être que la rédaction y voyait un nouveau sujet à sensation à faire sur les ruines du dieselgate ? Pourtant, les réponses sont là, à commencer par la mauvaise utilisation qui est faite de la technologie hybride rechargeable par la majorité de ses utilisateurs, malgré la volonté du gouvernement d’informer sur l’importance de la recharge via une notice explicative.
Aussi, le reportage aurait pu tenter d’expliquer d’une quelconque manière que ce soit les méthodes de calcul de la norme WLTP qui emmènent à ces valeurs théoriques. Ou de mettre en exergue une administration simplement obnubilée par des rejets de CO2 sans prendre en compte tous les paramètres. Soit autant de pistes présentées en conclusion de l’étude de l’ICCT, qui manquent cruellement dans ce reportage où l’enquête semble menée trop rapidement. Mais peut-on vraiment attendre de la précision dans un article qui se sert d’une Toyota Corolla hybride pour illustrer la technologie hybride rechargeable ?
Commentaires
L'intérêt d'une norme telle que la WLTP est de pouvoir comparer des véhicules entre eux. La marge d'erreur par rapport à la réalité sera toujours identique pour un usage donné. Quand à la possibilité d'un équivalent au dieselgate, est-ce qu'il existe une réelle solution actuellement pour diminuer la consommation, mis à part de ne pas rouler ?
On oublie un sujet important il me semble. Les batteries actuelles se rechargent environ 1500 fois (cycles complets). Ensuite, leur efficacité chute énormément.
Une autonomie de 40km, multiplié par 1500, ça fait 60000km. Donc si vous roulez 60000km en électrique, votre voiture ne vaut plus rien.
Une Model 3 avec, mettons, 400km d'autonomie, fois 1500, ça fait 600000km, donc pas de problème d'usure de batterie.
Le PHEV est une grosse arnaque !
Le scandale, ce sont les avantages fiscaux consenties aux entreprises pour l'achat d'un PHEV.
Les avantages fiscaux pour les PHEV pour les entreprises sont une magouille entre l'état et les constructeurs automobiles français pour les aider à atteindre les objectifs d'emissions moyennes de CO2, et ainsi éviter les pénalités de l'Union Européenne. Toutes les parties savent pertinament qu'un collaborateur à qui on rembourse les frais de carburant mais pas la recharge electrique ne va jamais recharger son PHEV.
Je roule en PHEV depuis quatre ans, Opel Ampera, mais c'est ma voiture personnelle. Je réalise 70% de mes kilomètres en tout éléctrique et en moyenne electrique et essence combinée, je consomme 2,2 litres aux 100.
Un particulier qui a une PHEV va recharger si il le peut. L'agrément de conduite est incomparable, le cout au Km 4 fois plus faible, et pour peu qu'il ai une fibre écologique...
60 Km d'autonomie électrique suffisent aux besoins quotidiens de la majorité des français. Pour les longs trajets, la propulsion thermique prend le relais. Le PHEV est donc bien adaptée pour nombre de français. Reste le prix. Si on fait 200 Km par jour on achète un diesel ou une Tesla.
Cet article d'AP et les commentaires qui en découlent mettent bien en évidence deux points :
- quand un journaliste parle d'un sujet que vous connaissez bien ( que ce soit TF1, ARTE, Le monde ou le Figaro, c'est pareil), vous remarquez tout de suite de nombreuses incohérences ou contre-vérités. Pensez bien que c'est ainsi dans tous les journaux de presse écrite ou de télévision, quelque soit le sujet! Les journalistes ne prennent pas le temps de vérifier ce qu'ils racontent, ne se donnent pas la peine de vérifier leurs informations et disent n'importe quoi.
- en ce qui concerne les PHEV, si on ne les utilise pas correctement dans leur domaine ( recharge à domicile tous les soirs pour des trajets quotidiens de moins de 50 km et seulement quelques longs trajets par an), c'est certain que c'est un mauvais VE ( pas assez de batterie et trop lourd avec un gros moteur thermique en trop) , un mauvais VT ( trop de batterie et trop lourd) et un mauvais hybride( trop lourd et trop de batterie)!
Comme cela a été dit, il est préférable aujourd'hui d'avoir un petit VE pour ses trajets quotidiens ( AMI si vous ne quittez pas le centre-ville, C zéro ou ZOE d'occasion si vous roulez en périphérie des villes ou à la campagne) et de garder un vieux VT ( ou en louer un) pour ses déplacements plus longs. En attendant des VE à plus grande autonomie et un réseau de charge enfin efficace.et fiable.
Moi, sur autoroute ce n'est que 7,5L/100 sur un trajet Toulouse/Narbonne et même chose pour le retour. Il faut dire qu'au départ j'ai un crédit de 35 Km (sur autoroute) d'électrique à 125Km/h aussi bien dans un sens que dans l'autre.
Quand je passe par la nationale, c'est plutôt 6L/100 km, et mon crédit électrique est de 50 Km à 80Km/h.
Il faut donc bien comprendre que l'on peut prouver ce que l'on veut selon que le crédit électrique de départ est prépondérant devant la totalité du parcours ou simplement négligeable.
Sur un trajet de 60 Km je ne consommerai d'essence que sur 10 Km alors que sur un trajet de 1000 Km mon crédit électrique ne représente rien ou presque. Et dire que c'est avec un principe aussi simple que ça à comprendre qu'ils se cassent tous la figure dans leurs comparaisons idiotes et qu'ils font des émissions de TV avec ça !!!!