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Après « Une motarde baroudeuse fait la promotion des motos électriques », voici le second volet de notre petite série de 2 articles consacrés à la photographe et designer Trui Hanoulle. Elle fait ici pour nos lecteurs le bilan de 3 éditions d’un événement qu’elle a créé : l’Electric Night Ride. Jeune motard, Olivier Lambert apporte un éclairage complémentaire.
Dans le garage de Trui Hanoulle, 2 motos : la Suzuki DR 650 qui l’a emmenée en Inde en 2002, et une BMW R 80 G/S Paris-Dakar de 1986. Pas de moto électrique ? Non, mais elle rêve d’en avoir une. En attendant, totalement convaincue par les deux-roues branchés, elle sublime utilement son attente en organisant depuis 3 ans un rassemblement de motos et scooters électriques qui prend de l’ampleur, en dépit cette année d’un raté de communication qu’elle déplore et qui ne lui est pas vraiment imputable.
« En 2015, je pensais que le développement des motos électriques serait plus rapide. C’est trop lent ! Les vélos électriques, en revanche, on en voit partout ! Et ça commence à bien marcher aussi pour les scooters électriques », évalue Trui Hanoulle.
« Zero Motorcycles est actuellement la marque qui propose les motos électriques les plus abordables. Les prix ont beaucoup baissé, et ce constructeur est aujourd’hui le numéro 1 sur son marché. Mais Honda, Suzuki, Yamaha et BMW se préparent à arriver, avec des moyens financiers importants. Ils attendent encore que Zero Motorcycles s’agrandisse et développe davantage le marché. Quelle sera la place de Zero Motorcycles dans quelques années ? J’ai peur que l’arrivée à la moto électrique des constructeurs historiques signe la disparition de Zero ou son rachat par l’un d’eux », envisage-t-elle.
« La majorité des motards ne sont pas encore convaincus par la moto électrique. Ils disent qu’il leur manquerait le passage des vitesses et le bruit des moteurs. Pourtant, sans cette grande présence sonore on entend les gens parler dans la rue et le sifflement des oiseaux. Il y a une sorte de gentillesse dans la moto électrique. On est davantage conscient de ce qui se passe autour de nous », rapporte Trui Hanoulle. « On peut facilement répondre à tous les arguments avancés contre la moto électrique. Par exemple, concernant l’absence de bruit de moteur thermique qui serait dangereux pour les piétons. C’est dépassé de penser cela. En ville, les gens sont de plus en plus nombreux à avoir un casque sur les oreilles pour écouter de la musique ou discuter au téléphone. On ne traverse pratiquement plus la rue en se fiant seulement à ses oreilles », estime Elektrogirl.
« Les propriétaires de motos électriques ne sont encore que quelques milliers. Des groupes de discussion se forment sur Internet autour du sujet. Le plus important, c’est le Zero Motorcycles Owners Group. Il compte 3.500 membres, pas tous propriétaires d’une moto électrique », chiffre Trui Hanoulle. « Une chose est sûre, la recharge rapide et l’harmonisation d’utilisation des bornes sont incontournables pour le développement des motos électriques », assure Trui Hanoulle qui s’appuie ici sur la mésaventure d’un participant à l’édition parisienne de l’Electric Night Ride.
« Un concurrent est venu du Nord des Pays-Bas avec une moto électrique Energica. Tout s’est bien passé jusqu’à son arrivée en France. Mais il a dû rebrousser chemin avant de nous rejoindre, car il a rencontré des problèmes de soft pour la recharge rapide une fois en France », révèle notre interlocutrice.
« Il existe plein de propositions d’événements pour les motards : randonnées, rencontres, courses sur circuits fermés, hot rod, etc. Mais rien ou presque pour les motos électriques. Juste quelques dates à Francfort ou Bruxelles pour réunir une poignée de personnes. En Belgique, par exemple, il n’y a que 50 propriétaires de motos électriques, répartis dans tout le pays », souligne Trui Hanoulle.
« Aux Etats-Unis, un revendeur de motos électriques organise tous les mois une randonnée de nuit. Il rassemble ainsi une vingtaine de bikers dans un esprit à la fois motard et électrique pour assister, par exemple, à un coucher de Soleil. J’ai voulu reproduire cette idée en Europe, mais pour une seule rencontre par an. Nous sommes trop disséminés pour envisager des événements mensuels. Si l’on veut rassembler du monde, il faut encore que la rencontre soit exceptionnelle », explique Elektrogirl.
« Pour la première rencontre Electric Night Ride, on a imaginé rassembler les motards online qui discutent parfois pendant des jours sur Internet autour d’un sujet en rapport avec les motos électriques. Et on s’était dit que si ça marchait on le referait régulièrement », se souvient Trui Hanoulle. « Ca s’est fait pour la première fois en octobre 2016 à Anvers. Au total, 55 deux-roues électriques étaient présents. C’était à mourir de rire de découvrir la tête des personnes qui nous voyaient passer depuis la terrasse des cafés », se souvient-elle.
« Après l’événement, tout le monde a voulu qu’il y ait une suite, dont un groupe de motards suisses qui s’est occupé de l’organisation sur place, à Lucerne. Moi, j’ai démarré la pub sur les réseaux sociaux. Nous avons eu 43 deux-roues électriques », poursuit-elle. « A travers l’Electric Night Ride qui n’est pas rattaché à un constructeur, nous poursuivons 3 objectifs : une rencontre amicale à deux-roues électriques ; la possibilité de tester des motos et scooters électriques ; faire en sorte que les deux-roues électriques soient visibles du grand public », énumère notre interlocutrice.
« Pour 2018, il y avait quelques motards allemands prêts à préparer quelque chose pour Stuttgart, et Eric Camart, policier à la mairie de Paris, déjà présent à Anvers, qui proposait son aide pour un Electric Night Ride dans la capitale française. Nous avons opté pour la France en premier, car j’ai pensé qu’avec les restrictions de circulation qui s’annoncent, des oppositions vont certainement se former avec un risque plus grand de rencontrer en 2019 des mouvements de motards en colère à Paris. On fera sans doute Stuttgart l’année prochaine, en juillet ou septembre, un samedi soir ou un dimanche matin », détaille Trui Hanoulle.
Au programme le 8 juillet dernier : Départ matinal (5 heures) depuis le Sacré-Cœur, puis passage à Opéra, Louvre, la maison de Gainsbourg, les Champs-Elysées, l’Arc de Triomphe, et la porte Maillot. Avant de prendre un bon petit déjeuner dans un café du Trocadéro, les participants ont fait le tour de la Défense et ont traversé le bois de Boulogne. Un prolongement était possible pour aller ensuite à Versailles.
Elektrogirl insiste sur le fait que l’organisation de l’édition 2018 de l’Electric Night Ride a été assurée par 2 personnes : elle-même, et, pour les préparatifs sur le terrain, par Eric Camart qui a mené notamment les démarches auprès de la préfecture et a pu obtenir un accompagnement par 2 motards de la police. Pourquoi cette position ? Tout simplement parce qu’elle comptait sur 2 professionnels qui lui avaient assuré de s’occuper de la communication dans l’Hexagone.
« J’espérais réunir plus de 100 deux-roues électriques à Paris le 8 juillet dernier, ou au moins dépasser le nombre des participants à Anvers il y a 2 ans. Quelques jours avant la date de clôture des inscriptions, le 2 juillet, j’avais reçu 55 demandes d’inscription… dont seulement 12 Français ! La newsletter promise par un de ses professionnels a été envoyée bien trop tard, le 4 juillet, 2 jours après la fermeture des inscriptions, et 4 jours seulement avant l’événement ; l’autre personne ne s’est plus manifestée », rapporte notre interlocutrice avec une évidente dose d’amertume. Elle reconnaît toutefois « avoir réalisé bien trop tard que les français ne communiquent pas ou peu à travers les réseaux sociaux internationaux ».
Une situation qui a quelque peu profité aux retardataires acceptés jusqu’au dernier moment. « Il y avait 80 personnes à l’ENR de Paris, venues avec 66 motos et scooters électriques, auxquels se sont joints 1 monoroue et 2 skates », modère Trui Hanoulle qui retient l’image d’un « incroyable succès ».
Mais aussi l’implication de passionnés, comme le photographe professionnel Bob Van Mol qui a couvert gratuitement l’événement, et Olivier Lambert qui l’a accueilli sur sa Zero. « Je leur suis très reconnaissante à tous les 2. Olivier Lambert, je ne l’avais jamais vu avant d’arriver à Paris. Il s’est inscrit et a aussitôt proposé son aide. Je lui ai confié la réalisation de stickers et de formulaires, et m’a transmis ça très vite. Il a été super efficace et ne fait pas de blabla ! C’est pourquoi j’ai été très contente de le rencontrer à Paris », conclut notre interlocutrice.
Quelques jours avant notre entretien avec Trui Hanoulle, nous avions été en contact avec le discret jeune homme d’un peu moins de 40 ans. Comme Guillaume Deslandes que nous avons interviewé début juillet, Olivier Lambert s’est décidé pour la moto électrique après la publication de notre article présentant Jacques Verhaegen et sa Zero S.
Tous les 3 se sont d’ailleurs rencontrés pour la première fois au Vendée énergie Tour 2018, en juin dernier. « J’ai exactement la même Zero DS que Guillaume, avec les mêmes options et les mêmes accessoires. Il a la première immatriculée en France, et moi la deuxième, que j’ai reçue en mai dernier. On attendait une moto équipée pour la recharge rapide », commente-t-il.
Pourquoi la recharge rapide ? « Habitant près d’Orly, j’utilise au quotidien un vélo classique et un vélo à assistance électrique avec lesquels je parcours respectivement 4.000 et 5.000 kilomètres à l’année. La moto électrique, c’est pour les voyages et les trajets supérieurs à 50 km. En 1 mois, j’ai parcouru 5.000 kilomètres avec la Zero ! », explique Olivier Lambert.
D’autres sorties en plus du Vendée énergie Tour et de l’Electric Night Ride ? « J’ai pris 5 jours de congés pour suivre la frontière entre Dunkerque et Strasbourg, au plus proche de son tracé, en empruntant des chemins agricoles, de terre, de sable et pavés. J’ai parcouru environ 2.000 kilomètres rien que pour cette sortie qui m’a permis de jouer avec le rayon d’action et le fonctionnement de la moto. C’est là que j’ai pu évaluer que l’autonomie n’est pas un problème avec cette moto. Je peux faire 290 kilomètres sur une charge. J’ai pu rouler 7 heures environ sans recharger, en pratiquant en dehors des routes », détaille Olivier Lambert.
« J’ai reçu l’info sur l’Electric Night Ride par Jacques Verhaegen, en Vendée. Connaissant bien Paris, j’ai proposé mon aide à Trui Hanoulle dès mon inscription. Elle m’a invité à prendre avec moi le photographe chargé d’immortaliser l’événement », confirme le Francilien.
« L’ambiance était assez drôle, avec un public de participants assez homogène. Pour la plupart : des motards type routières ou trails, de plus de 40 ans, à la conduite apaisée. Sans doute le résultat des prix des motos électriques ! L’ambiance était bon enfant, surtout avec les passants de retour de fêtes, qui donnaient de la voix sur notre passage. Il y avait des personnes vraiment intéressées. Le plus surprenant, c’était le bruit des deux-roues avançant ensemble, qui ressemblait au bourdonnement d’une ruche ou d’un essaim d’abeilles », témoigne-t-il.
« J’ai été étonné de la distance parcourue par certains motards passionnés venus de loin à Paris pour participer jusque quelques heures à un événement. Il y avait des Suisses, des Anglais, des Belges, des Hollandais, des Luxembourgeois. Ils étaient nombreux à avoir des solutions de recharge maison pour voyager sur de longs parcours. Il y a eu beaucoup de discussions autour de cela, et c’était vraiment très intéressant ! », se réjouit-il encore.
Si tout ce qui touche à la recharge maison intéresse tant Olivier Lambert, c’est, entre autres, parce qu’il a un projet d’envergure. « D’ici 1 an, je compte bien valoriser la batterie de ma moto avec une installation V2H pour alimenter mon domicile en électricité en cas de besoin. Par ses moindres dimensions par rapport à une voiture, une moto est plus facilement intégrable à une architecture réseau qui inclut une maison. L’accessibilité aux batteries est également plus facile, et travailler sous 100 V est moins dangereux qu’avec du 400 V. Je suis actuellement à la recherche du chargeur bidirectionnel qui conviendrait », projette notre interviewé.
Remerciements
Automobile Propre et moi-même remercions vivement Trui Hanoulle et Olivier Lambert pour leur réactivité, la richesse de leurs témoignages, et leurs démarches pour nous obtenir des photos d’illustration. A noter la réédition, pour l’instant en néerlandais, du livre « Meisjes, moslims & motoren » (« Filles, musulmans et motos ») écrit par Trui Hanoulle et Gaea Schoeters à la suite d’un périple de 7 mois effectué en 2007 à moto. Nous remercions aussi le photographe professionnel Bob Van Mol qui nous a autorisés à utiliser son fonds iconographique pour illustrer le présent article.
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