La Renault ZOE par grand froid

Pour beaucoup d’automobilistes qui pratiquent la mobilité électrique depuis des années, cette question ne se pose plus. En revanche, ils sont de plus en plus nombreux ceux qui découvrent le véhicule électrique et passent cette année leur premier hiver au volant d’un engin branché. C’est à eux, en particulier, que s’adresse cet article qui fait suite à bien des messages reçus à la rédaction.

Les légendes sont tenaces

Encore aujourd’hui, on trouvera plein de gens, bien intentionnés et désireux d’apporter leur éclairage sur les raisons de la perte d’autonomie des véhicules électriques en hiver, qui vont pointer en premier les phares et les essuie-glaces.

Bien sûr, il y a de l’énergie qui va être consommée par ces équipements, mais pas au point d’abaisser considérablement le rayon d’action des voitures branchées. Imaginez un peu ! Il faut déjà à peu près une nuit complète pour vider la batterie accessoire 12 V 60 Ah d’une voiture thermique en laissant les codes (ampoules du type code européen) en fonction.

A la louche, la capacité d’une batterie de traction qui assure une autonomie d’environ 120-150 kilomètres à une voiture électrique, – soit en moyenne 20 kWh -, est 30 fois plus élevée. Il faudrait donc, toujours avec notre grosse cuillère à ordre de grandeur, 15 jours et nuits pour décharger les accumulateurs.

Engourdissement des cellules et chauffage

Les deux causes principales de la perte d’autonomie en hiver de 20 à plus de 50% sur un véhicule électrique, c’est déjà l’engourdissement de la batterie puis l’utilisation du dispositif de chauffage que les constructeurs cherchent à rendre de moins en moins gourmand. S’il est difficile de supprimer ces facteurs, on peut chercher à compenser leur influence, et parfois même être gagnant !

C’est anecdotique, mais le cas de l’autonomie qui grandit en hiver se présente parfois ! Oui, ça peut arriver, et c’était sans doute plus évident avec les anciens véhicules électriques à batterie NiCD. Dans quelle situation ? Lorsque la route est rendue glissante par la neige et/ou le verglas. Le conducteur doit alors avoir le pied très léger sur l’accélérateur et piloter encore plus à l’anticipation. Les besoins en énergie pour faire avancer la voiture sont de ce fait moins importants.

Et si l’on sait se passer de chauffage, ou si l’on dispose d’une sorte de chaudière à essence ou au gazole, observer cette surprenante situation sera d’autant plus fréquente. Elle n’est contradictoire qu’en apparence.

Les smartphones aussi

L’engourdissement de la batterie en hiver, les voitures thermiques connaissent aussi ! Ecoutez un modèle à essence tenter de lancer le moteur après une nuit passée dehors sous une température de -10 ou -20° C ! Quand le baromètre flirte avec le 0° C, ces accumulateurs au plomb peuvent perdre temporairement jusqu’à 30% de leur capacité et de la puissance fournie au démarrage.

La technologie lithium-ion ne fait pas mieux. A nouveau, une anecdote, qui m’a été rapportée au sujet d’un smartphone récent : pourcentage estimée de la capacité restante dans la batterie à 35% avec l’appareil dans la poche, puis seulement 6% après 90 minutes laissé sur le banc d’un gymnase non chauffé et ouvert à tous les vents alors que la température extérieure est déjà négative, et retour à 35% après un nouveau séjour dans la poche du pantalon de son propriétaire.

Manque de réactions

Si les fabricants de smartphones indiquent une plage d’utilisation conseillée pour leurs appareils comprise en moyenne entre 0 et 30° C, précisant parfois qu’en dessous de -20° C les batteries lithium sont inexploitables, les constructeurs de véhicules électriques ont heureusement prévu pour la plupart de leurs modèles, soit une bonne isolation du pack, soit un circuit pour aider à maintenir (en roulage ou en recharge) les accumulateurs à une bonne température de fonctionnement, ou même les deux.

Sans cela, au sein des cellules, en dessous de 0° C, les réactions électrochimiques internes se dégraderaient bien davantage, bloquant davantage encore la libération d’énergie à la demande. Une situation temporaire, puisqu’elle s’efface dès que la température remonte.

Des exceptions

Toutes les voitures électriques sont-elles concernées par un engourdissement de la batterie de traction en hiver ? Globalement oui ! Certains modèles résistent mieux.

Les utilisateurs du Kia Soul EV qui ont pu faire la comparaison avec d’autres VE, par exemple, louent la bonne résistance au froid de l’autonomie du SUV coréen. Sur cet engin, le pack logé sous le plancher compte 192 cellules réparties en 8 modules avec séparateurs spécialement conçus pour assurer une bonne isolation de la batterie l’hiver, comme en été.

Les Bolloré Bluecar et Bluesummer ne connaissent pas le phénomène d’endormissement de la batterie, car elle est maintenue à environ 60° C, en marche comme à l’arrêt lorsqu’elle sont branchées. Ces voitures pourraient sembler ne pas être concernées par la baisse d’autonomie par temps froids. Eh bien si, puisqu’il faut alors plus d’énergie à puiser au sein de la batterie elle-même pour entretenir sa fameuse température de fonctionnement.

Jouer avec la fin de recharge

Il existe un moyen de limiter la perte d’autonomie par l’engourdissement de la batterie en hiver : c’est d’utiliser sa voiture électrique après plusieurs heures de recharge. Les accumulateurs connaissent alors une situation idéale au niveau de leurs réactions électrochimiques internes, entretenue en roulage par la sollicitation du pack à l’accélération.

Une astuce valable également pour les modèles produits par Bolloré, puisqu’en définitive, le maintien de la batterie à 60° C aura été assuré par le réseau électrique auquel la Bluecar ou dérivée aura été branchée. Sur une voiture électrique qui le permet, l’heure de début de la recharge peut être différée, ce qui aide à retrouver l’opération encore en cours ou à peine terminée le lendemain matin, au moment de partir pour le bureau.

Chauffage

Le chauffage, associé ou pas à l’air conditionné, est le consommateur électrique qui puise potentiellement le plus sur la batterie de traction. Indirectement, puisque c’est celle de 12 V qui alimente les dispositifs, elle même maintenue par le pack principal.

Quelle amputation sur l’autonomie faut-il prévoir en utilisant le chauffage ? De 15 à 100% ! Par cette réponse un tantinet provocatrice, il s’agit d’introduire une notion qui a son importance : la consommation de ce système de confort n’est dépendante que du temps d’utilisation et non du temps de roulage. Trois ou 4 heures sans bouger, et il ne reste plus beaucoup d’énergie pour se balader ;  10 minutes en filant à 120 km/h, et l’impact du chauffage est relativement peu important sur le rayon d’action.

En outre, sur certains modèles, le scénario semble quasi binaire, On/Off, une chaleur intermédiaire étant diffusée par adjonction d’air frais venu de l’extérieur. Quelques constructeurs ont essayé de gommer le problème de perte d’autonomie par le chauffage de l’habitacle en confiant le rôle à un appareil à essence ou au gazole de type Webasto. La tendance actuelle est d’exploiter une pompe à chaleur, moins énergivore qu’une résistance.

Au fait, pourquoi chauffer l’habitacle ?

Le chauffage de l’habitacle, après tout, c’est d’abord une histoire de sensibilité au froid. Si j’écris qu’en ce moment, avec -7° C le matin, à 5 heures, j’effectue une tournée de 30 kilomètres pour distribuer un quotidien avec une Citroën C-Zéro, sans chauffage ni autre source de chaleur, la vitre conducteur complètement ouverte et les 3 autres entrouvertes, sans gants, mais avec tout de même un pantalon en velours, un pull camionneur, et éventuellement un manteau léger : je risque de refroidir le lectorat !

C’est pourtant la réalité ! Inonder d’air chaud la voiture, ce n’est pas seulement pour son propre confort thermique, c’est aussi souvent nécessaire en hiver pour chasser l’humidité qui s’installe sur la face intérieure des vitres et empêcher la formation de givre à l’extérieur.

Volant et sièges chauffants

De nombreux électromobiliens n’utilisent pas le chauffage, en trouvant un minimum de confort par la mise en route du volant et des sièges chauffants, moins énergivores. Encore faut-il disposer de ces équipements.

D’autres exploitent la possibilité de mettre en route l’appareil en même temps que la recharge de la batterie. C’est alors sur le réseau électrique qu’il puise son énergie, et non en diminuant l’autonomie. Finalement, il existe de nombreuses astuces pour moins utiliser le chauffage ou le rendre plus efficace.

A chacun, en fonction de son modèle de VE, de trouver les siennes ou de s’approprier celles des vieux routards maîtrisant parfaitement le même modèle branché. En voici rapidement quelques-unes : garer le jour sa voiture au maximum au Soleil pour chasser l’humidité ; ne pas l’exposer aux vents forts froids ; pour éviter la formation de buée ajouter des déflecteurs qui permettent d’entrebâiller les vitres et ne pas rester dans une voiture électrique non chauffée en attendant quelqu’un ; isoler les conduits de chauffage qui passent à l’extérieur de l’habitacle ; disposer à l’intérieur un absorbeur d’humidité que l’on peut éventuellement fabriquer soit même avec des cailloux d’argile emprisonnés dans une vieille chaussette ; chauffer avant de partir avec un appareil domestique branché sur le secteur ; passer un produit hydrophobe à l’intérieur comme à l’extérieur des vitres pour bloquer la formation de condensation et de givre, etc.

Des choix à faire

Question autonomie de sa voiture électrique, et particulièrement en hiver, ce sont les efforts que son conducteur est prêt à faire qui seront payants ! Ce qui implique parfois des choix à poser en fonction de sa propre situation. Rouler sur les routes hivernales pose la question des pneumatiques à utiliser.

Les gommes adaptées à la saison assurent une meilleure adhérence, qui se paye en autonomie à hauteur de 15-20%. Puisque tous les chemins mènent à Rome, sans doute plusieurs peuvent-ils conduire au bureau. L’un d’eux est le plus économe en énergie : est-ce celui qui est habituellement utilisé ? Un autre n’est-il pas à la fois plus sûr en hiver et moins énergivore, éventuellement en choisissant une heure différente afin d’éviter les bouchons dans lesquels le chauffage devient plus consommateur que le moteur du véhicule ?

Plus globalement, le style de pilotage est important : en anticipation et plus doux sur l’accélérateur. Notamment, en descente, 20 km/h de moins peuvent suffire à passer en régénération au lieu de puiser dans la batterie. Regrouper les déplacements peut aussi devenir très intéressant.

Et vous : quelles astuces mettez-vous en œuvre pour préserver l’autonomie de votre voiture électrique en hiver ?