L’organisme en charge de la sécurité des transports vient de rendre ses conclusions et formule des recommandations à la suite de l’accident mortel survenu avec un Model X P100D en 2018 à Mountain View, en Californie.

En sandwich

Coincée entre Palo Alto, Sunnyvale et Los Altos, Mountain View est traversée par l’autoroute US-101. C’est sur cette voie, à un endroit où une file se divise en 2 pour former une sortie avec la nationale 85, que l’engin est venu frapper le muret de séparation en béton.

Il avait déjà été établi que l’Autopilot était actif au moment de l’impact, et que le conducteur n’avait pas tenté d’intervenir sur la conduite du véhicule. Déjà très endommagé et en proie à un début d’incendie, le SUV électrique a ensuite été percuté par 2 autres engins. Le conducteur âgé de 38 ans, employé chez Apple, avait pu être extrait grièvement blessé du véhicule. Mais il avait perdu la vie quelques heures plus tard à l’hôpital.

Tesla avait rapidement pointé un défaut dans la barrière installée à cet endroit pour amortir le choc d’un tel accident survenu à plus de 110 km/h. Le constructeur avait mis également en cause le conducteur qui n’avait jamais réagi aux injonctions de reposer ses mains sur le volant.

Distrait par un jeu vidéo ?

Le NTSB donne partiellement raison à Tesla dans un communiqué daté du 25 février 2020. Selon l’organisme américain, le conducteur était sous « une dépendance excessive à l’égard de l’Autopilot » et distrait probablement par « une application de jeu sur son téléphone portable ». Ces 2 points sont la cause de l’accident du 23 mars 2018.

En facteur aggravant, le NTSB pointe « la surveillance inefficace du véhicule Tesla sur l’engagement de l’automobiliste » à la conduite de son Model X, et condamne la police californienne pour n’avoir pas signalé un précédent accident qui a rendu inefficace la barrière d’amortissement et n’a ainsi pas été remplacée. Cette dernière inaction a été perçue comme ayant « contribué à la gravité des blessures du conducteur ».

La conduite autonome, cette inconnue

« Cet accident tragique démontre clairement les limites des systèmes avancés d’aide à la conduite offerts aux automobilistes aujourd’hui», a commenté Robert Sumwalt, président du NTSB. « Il n’y a pas actuellement de véhicule à la disposition des automobilistes américains qui soit autonome », a-t-il insisté.

En clair, le conducteur d’une Tesla doit toujours « être activement engagé dans la conduite » de son véhicule, même « lorsque les systèmes avancés d’aide à la conduite sont activés ». Et de conclure sur ce sujet : « Si vous conduisez une voiture avec un système avancé d’aide à la conduite, vous ne possédez pas de voiture autonome ».

Pour illustration, les conclusions du NTSB indiquent qu’au moment de l’impact le Model X était pleine accélération, le système Autopilot venait d’initier un changement de voie vers la gauche, n’a pas émis d’avertissement sur un risque de collision, n’a pas déclenché de freinage d’urgence ni retouché la trajectoire. Des propriétaires de Tesla avaient d’ailleurs réussi à reproduire le dysfonctionnement à l’époque.

7 problèmes de sécurité identifiés

Le NTSB a recensé au cours de son enquête sur cet accident 7 problèmes de sécurité

  • distraction du conducteur,
  • atténuation de la surveillance de l’engagement de l’automobiliste à la conduite du véhicule,
  • mauvaise évaluation des risques par le système Autopilot,
  • limites des dispositifs anticollision,
  • surveillance fédérale insuffisante sur les systèmes d’assistance à la conduite,
  • besoin d’enregistrement des décisions prises par ces dispositifs,
  • problèmes d’infrastructure routière.

Recommandations du NTSB

Afin de résoudre ces différents problèmes, le NTSB a formulé plusieurs recommandations de sécurité :

  • Extension des tests du programme d’évaluation des voitures neuves de la NHTSA (agence fédérale américaine chargée de la sécurité routière) sur les performances des systèmes d’évitement des collisions avant
  • Evaluation des véhicules équipés du pilote automatique Tesla pour déterminer si les limites de fonctionnement du système, la prévisibilité d’une mauvaise utilisation et la capacité d’entraîner les véhicules ainsi équipés dans toute situation posent un risque déraisonnable pour la sécurité.
  • Développement collaboratif de normes pour les systèmes de surveillance afin de réduire le risque de désengagement du conducteur, d’éviter la complaisance de l’automatisation et de tenir compte d’une mauvaise utilisation prévisible du dispositif.
  • Examen et révision des initiatives qui visent à obtenir des employeurs une politique stricte d’interdiction d’utiliser des appareils électroniques portables pendant la conduite.
  • Modification des stratégies d’application de la loi pour les employeurs qui n’abordent pas avec leurs collaborateurs les dangers de la distraction au volant.
  • Développement d’un mécanisme de verrouillage de la distraction au volant, ou d’une application qui désactiverait automatiquement sur les appareils électroniques portables toutes les fonctions susceptibles de distraire un conducteur lorsque son véhicule est en mouvement.
  • Elaboration d’une politique interdisant à tous les employés et sous-traitants l’utilisation non urgente des appareils électroniques portables pendant la conduite de véhicules de l’entreprise, que ce soit pour des raisons personnelles ou professionnelles.