Il râle beaucoup, il a décidé d’en faire un métier. Une semaine sur deux, notre râleur professionnel partage sa mauvaise humeur. Cette fois, il se fait provocateur avec son véhicule abreuvé au mazout.

Quoi ? Comment ? Un chroniqueur d’Automobile-Propre ne roule pas en électrique, même pas en hybride ? Voilà qui devrait déjà en faire bondir certains. Et en plus, il provoque avec du diesel. Vade retro satanas. Dans son garage, le râleur le dit sans complexe ici, il a un SUV (compact) à motorisation diesel, et rien d’autre. Ou presque.

Oh, il vous entend d’ici. “Il pourrait passer à l’électrique quand même, c’est facile, de nos jours, il n’y a plus d’excuse pour ne pas le faire, avec des modèles qui ont davantage d’autonomie et des prix plus corrects”. Mais l’achat de ce véhicule abreuvé au gazole remonte à 2014, avec pour mission principale de longs trajets à travers la France (700 km), d’ouest en est et inversement. A ce moment là, il était difficile d’envisager cela sereinement en électrique.

La donne a changé, mais le râleur n’a pas changé de voiture. Et clairement, pour lui, c’est son geste écolo. Il aurait pu regarder du côté de l’incontournable Tesla Model 3, notamment au moment où celle-ci coûtait 36.800 € bonus déduit. Et s’afficher ainsi avec une voiture électrique, en bon défenseur de la nature ! Mais cela entraîne la construction d’un nouveau véhicule, avec donc l’utilisation de ressources et d’énergie, alors que son SUV diesel déjà fabriqué se porte très bien, même au bout de neuf années.

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Si les plus radicaux pensent que la meilleure voiture est celle qui n’existe pas, le râleur estime que sa voiture écolo peut être diesel si elle est conservée. Cette pensée à l’origine de cette chronique lui est venue quand il s’est retrouvé coincé quelques kilomètres derrière une mamie au volant d’une vieille Clio 1. Le râleur s’est dit que cette grand-mère pointée du doigt dans une ZFE avait au moins le mérite de rouler avec la même voiture depuis près de 30 ans, pendant que certains en changent désormais tous les trois ans grâce aux offres de location. Le conducteur le plus écolo n’est pas forcément celui qu’on imagine.

Evidemment, la voiture rendue après une location rejoint ensuite le marché de l’occasion et fera le bonheur d’un autre conducteur, mais cela pousse à toujours fabriquer davantage de modèle. Des marques commencent d’ailleurs à changer de discours, semblant anticiper une nouvelle tendance, qui est justement de (re)faire durer les véhicules. Peugeot s’est notamment donné pour mission d’allonger le cycle de vie de ses modèles, grâce à des mises à jour et rafraichissement des éléments d’usure, y compris à bord, quand c’est nécessaire. Le râleur est en avance sur les tendances !

Ce n’est pas tout. Outre le fait de garder la même voiture pour au moins une décennie, il a décidé de mieux l’utiliser. Ou plutôt de moins l’utiliser. Si c’est pas écolo ça, la prise de conscience ! Ainsi, le râleur roule en diesel, mais au fil des années, il la laisse plus au garage. Il a appris à davantage se servir de ses jambes. Pour quelques courses, il peut marcher 15 minutes afin de rejoindre le supermarché plutôt que de sortir son véhicule pour faire 2 km. Pour les plus grandes distances, il met en concurrence sa voiture et le train. Et il évite totalement l’avion. Au départ parce qu’il en a la trouille, mais maintenant il peut dire que c’est par écologie.

De quoi obtenir un bilan carbone en matière de transports qui pourrait être semblable aux sans-auto revendiqués… qui partent se ressourcer régulièrement à l’autre bout du monde. Mais le but ici n’est pas de les blâmer, juste de ramener chacun à son bilan CO2. Le râleur imagine ainsi un (utopique) crédit carbone par personne pour les déplacements, notamment ceux de loisir. Chacun serait libre de l’utiliser comme bon lui semble. Mais n’aurait-il pas là une idée écolo extrême ? Avant cela, quand son SUV sera fatigué ou moins utile, le râleur passera à l’électrique, peut être même avec un engin de petite mobilité.