Le directeur de l’ingénierie de Lamborghini fait face au défi de l’électrification. Entre amour du V12 et importance du « zéro émission », le cœur de la marque italienne balance.

Comme les autres constructeurs de luxe, Lamborghini aborde une période cruciale de son histoire. La firme de Sant’Agata Bolognese doit en effet se réinventer, alors que les V10 et V12 de ses supercars ne sont plus en odeur de sainteté.

Bien sûr, ses clients potentiels sont, eux, toujours friands des mécaniques que propose Lamborghini. Mais la raison vient se mêler à la passion, alors que l’automobile devra passer à l’électrique à partir de 2035.

L’Europe a en effet décidé qu’à cette date, les ventes de voitures thermiques seraient interdites. Les constructeurs produisant moins de 10 000 unités par an pourront avoir une dérogation. Néanmoins, Lamborghini est proche de cette limite avec 8 405 véhicules sortis de l’usine l’an dernier.

Dans le cas où elle dépasserait cette marque, elle devra se plier aux consignes de l’Europe. Un risque qui pourrait devenir réalité quand la marque vendra deux modèles entièrement électriques.

« La combinaison parfaite entre moteur et batterie »

Rouven Mohr, le directeur de l’ingénierie de Lamborghini, veut toutefois une transition plus douce. L’ingénieur espère même pouvoir compter sur des motorisations hybrides dans les prochaines années. Lamborghini a déjà sorti la Siàn, qui embarque un V12 hybride, et prévoit une version PHEV de la remplaçante de l’Aventador.

« La première chose que je veux dire, c’est qu’il y a aussi des opportunités », indique Mohr à nos confrères d’Autocar. « Un véhicule hybride performant, plutôt qu’un véhicule axé sur l’autonomie, peut offrir une combinaison parfaite entre le moteur et la batterie. »

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« Il comble les creux de couple d’un moteur à combustion. Pour les clients, l’hybride devrait être synonyme de valeur ajoutée : une voiture encore plus rapide et plus amusante. »

Mais Lamborghini réfléchit déjà à ce que seront ses voitures électriques, et Mohr confirme les priorités du constructeur. Le fait de limiter le poids sera un atout crucial pour la firme, tandis que les ingénieurs se penchent sur les sensations de conduite.

« Le défi consiste à choisir la taille de la batterie afin d’offrir suffisamment de performances sans ajouter trop de poids. Nous voulons également une voiture qui offre des performances constantes. »

« Nous ne voulons pas une voiture qui soit brillante pendant quelques tours de piste et qui ne le soit plus lorsque la batterie est à plat. La récupération d’énergie sera essentielle, et avec elle, la sensation de freinage. »

Une Lamborghini « n’est pas une PlayStation »

Rouven Mohr ne veut pas d’une voiture dont l’efficacité soit la plus grande qualité. Le concepteur appuie même sur le fait que les défauts d’un véhicule forgent son caractère. L’important pour Lamborghini est de ne pas trop aseptiser ses modèles lorsqu’ils seront « zéro émission ».

« Nous ne voulons pas faire des voitures sans caractère, donc nous ne voulons pas vraiment construire la voiture parfaite, si une voiture parfaite est une voiture qui fait tout pour vous. Ce n’est pas une PlayStation. »

« Nous définissons ce caractère dès le début de chaque projet, et ce caractère doit ressortir même si vous avez les yeux fermés. Le conducteur est toujours au centre d’une Lamborghini. C’est lui le héros, pas la voiture. »

Et Mohr de confirmer que la performance ne sera pas une priorité pour les futures Lamborghini électriques. Selon lui, toute voiture électrique est performante, et il est plus important de se concentrer sur le comportement de la voiture.

« Je ne pense pas qu’il y ait un véhicule électrique qui fasse cela bien. Vous ne sortez pas votre voiture le dimanche pour faire un 0 à 100 km/h en 1,9 seconde, encore et encore. Peut-être une ou deux fois, mais après ça, c’est ennuyeux. »

« Nous allons nous concentrer sur le contrôle de la voiture, sur la façon dont elle réagit aux sollicitations, etc. Je suis conscient que gagner cette partie ne signifie pas que vous avez construit la voiture la plus émotionnelle. Avec les moteurs électriques, tout est rapide. »