Ce jour-là, à Nogaro, ma mission n’était pas d’éclater un chrono, mais de faire un bon score de consommation électrique, couché au ras du sol.

Combinaison, casque : me voilà dans la tenue du parfait coureur automobile. Tout cela pour filer… à 25 km/h sur la piste. Et encore ! À l’occasion du Shell Eco Marathon électrique, sur la piste de Nogaro, j’ai pu prendre les commandes d’un de ces petits bolides conçus pour la frugalité énergétique.

Shell me fait tester un engin dont la base remonte aux années 1990. Le carbone est donc décoratif, c’était encore l’ère de la fibre de verre pour la carrosserie. Celle-ci a été modifiée, pour avoir un véhicule un peu plus grand, afin de permettre aux essayeurs d’être plus à l’aise.

Bon sang, qu’est-ce que cela devait être avant ? Alors que je fais un petit 1,74 mètre et un poids raisonnable (environ 60 kg, du moins avant de transpirer à grosses gouttes dans cet habitacle surchauffé), je me sens à l’étroit une fois que la carrosserie a été fixée au-dessus de moi. Ce n’est donc pas par hasard que les teams d’étudiants choisissent souvent une fille pour prendre les commandes (avec toutefois un poids minimal pour le pilote de 50 kg à respecter).

Les pédales, ce sont pour les freins (avant ou arrière). L’accélération est au volant.

La position de conduite est déroutante, car on est quasiment couché. Plutôt perturbant de voir ses genoux en conduisant ! On est évidemment loin de la voiture traditionnelle. La mission du jour est donc de faire un score d’écoconduite correct, en s’approchant des consignes de la compétition, c’est-à-dire être à 25 km/h de moyenne. Mon bolide du jour a été rétrofité, passant du thermique à l’électrique.

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Savoir se lâcher pour être en roue libre

J’ai le droit à deux tours. Le premier, pour se familiariser avec l’engin… et le circuit. Mon erreur de débutant du jour a été de ne pas assez repérer le tracé. Avec ces meurtrières, j’ai l’impression de naviguer à vue. Ce qui me pousse à vouloir me redresser légèrement, un excellent exercice pour se faire les abdos (je l’ai senti pendant 24 heures).

Avec plus de 30 °C pour l’air ambiant, on est vite en surchauffe dans cette boîte sur roues !

L’idée du premier tour, c’est aussi de repérer les zones de dévers. Car le secret est là : faire un maximum de coasting, c’est-à-dire de roue libre. Il faut donc savoir bien lancer l’engin, en trouvant le bon dosage d’accélération, et se laisser ensuite partir. C’est cet aspect qui va faire une bonne partie du résultat et que doivent donc maîtriser les étudiants. Ainsi, si le gagnant de l’épreuve a pu théoriquement faire 935 km avec un kWh, c’est en comptant le coasting. De la même manière, la consommation de votre auto baissera si vous apprenez à davantage lever le pied (notamment à l’approche d’une intersection).

Le dosage de la commande d’accélération, située au volant, fera beaucoup, mais Gilles Vanier, directeur technique du Shell Eco Marathon, rappelle l’importance de la technique : « un train avant mal réglé, c’est une grosse perte d’énergie. Le choix du moteur est presque accessoire sur la consommation ici ».

Le secret : savoir bien lancer le véhicule puis le laisser filer en mode coasting.

Autant le dire, mon premier tour est une cata. Bien trop lent, tout juste 10/15 km/h, je dois souvent accélérer. La conso est donc au plus haut : 73 200 joules sur le tour, ce qui donnerait pour 1 kWh le score de… 69 km. Je rappelle que le gagnant du challenge étudiant (qui doit avoir une moyenne d’au moins 25 km/h) a fait 935 km pour 1 kWh !

On garde les erreurs en tête et on recommence. Avec de bien meilleurs réflexes pour atteindre progressivement, mais rapidement une bonne allure, puis se laisser porter sur le circuit Paul Armagnac. C’est nettement mieux. En étant plus rapide au second tour, j’ai quasiment divisé ma consommation par deux : 42 150 joules, soit 120 km pour 1 kWh, avec près de 20 km/h de moyenne.

Bon, me voilà loin de la coupe du gagnant ! Mais on se prend très vite au jeu, un jeu où l’on découvre un certain éloge de la conduite calme.