L’adoption massive et en forte croissance de la voiture électrique contribue à l’éclosion de nouvelles activités.
À chaque innovation, ses codes, sa culture, son écosystème, son activité économique, et son corollaire, l’éclosion de nouveaux métiers. Avec l’arrivée d’internet, des communications mobiles, puis du numérique dans son ensemble, s’est développé un nouveau pan de l’économie qui pesait fin 2020 (derniers rapports connus) 15,5 % du PIB mondial. Une économie qui a augmenté deux fois et demie plus vite que le PIB mondial au cours des 15 dernières années, tout en créant de nombreuses spécialisations professionnelles dont on n’aurait même pas imaginé l’existence seulement une décennie plus tôt. Et ce, avec toutes les filières correspondantes, notamment en matière d’écoles, autant que dans le domaine universitaire, la formation continue, mais aussi en matière de financement.
Ce « miracle » va-t-il se reproduire avec le déploiement rapide – et parfois à marche forcée – de la mobilité électrique ? Il est peut-être encore un peu tôt pour le dire, mais une chose est sûre, de nouveaux métiers apparaissent, qu’il s’agisse de simples spécialisations d’activités existantes, ou d’activités réellement inédites et nées récemment avec la transition vers le tout électrique.
L’occasion de faire un point sur l’existant, mais aussi de s’offrir un petit rappel prospectif sur les possibilités qui s’ouvrent aux plus audacieux en matière de nouvelles activités professionnelles. Certains termes vous surprendront peut-être, c’est normal, ils qualifient des fonctions nouvelles (ou qui n’existent pas encore).
Installateur de bornes de recharge
Dans cette catégorie, l’offre est pléthorique mais semble pourtant avoir un peu de mal à répondre à la demande. Un métier qui regroupe en fait deux réalités. D’un côté, les installateurs indépendants agréés IRVE, souvent de petites structures artisanales qui interviennent en sous-traitance pour le compte de collectivités, d’opérateurs ou de commanditaires plus importants, de l’autre, des start-up comme ChargeGuru ou Stations-e, qui se déploient de façon indépendante, mais dont la croissance peut aussi dépendre de la commande publique.
Retrofitter
Un anglicisme qui n’a pas d’équivalent en français pour qualifier l’activité qui consiste à convertir les voitures thermiques en voitures électriques. Nombre de jeunes entreprises, également en mode start-up, se sont ruées sur le créneau depuis quelques années, pensant peut-être flairer un nouveau filon potentiellement juteux. D’autres l’ont fait par passion ou par attrait pour cette drôle de forme d’innovation qui consiste à faire du neuf avec du vieux. Et aussi probablement avec dans un coin de leur tête l’idée de contribuer à leur façon à la transition énergétique et au développement de modes de transports moins consommateurs de C02. Il existe de nombreuses entreprises de retrofit un peu partout en France (environ une bonne dizaine), mais l’obtention de l’homologation semble être un frein important, de par sa complexité et son coût pouvant aller jusqu’à plusieurs centaines de milliers d’euros (!). Malgré ces obstacles, l’Ademe estime qu’en 2030, entre 300 000 et 1,2 million auront bénéficié d’un retrofit. Dans le même temps, jusqu’en 6 500 emplois pourraient être créées dans la filière.
Product Genius (ou Délégué à la prise en main)
Nous l’avons déjà évoqué, et même si certains sont encore sceptiques, car « il n’y a rien de plus simple que la voiture électrique, ne compliquons pas tout », je persiste et je signe : la prise en main d’une voiture électrique, et surtout de la gestion de la charge et des déplacements, ne s’improvise pas, et nécessite à tout le moins une initiation, puisqu’il paraît qu’il ne faut pas parler de formation. Alors, disons « acculturation ». Comme certains le suggèrent, si cela ne nécessite pas de créer une école ni un permis spécial, au moins pourrait-on trouver chez les concessionnaires de marques automobiles un délégué à la prise en main, qui serait en charge de délivrer un brief aux nouveaux clients qui acquièrent leur première voiture électrique. Une sensibilisation aux questions de gestion de la batterie, de la charge, des itinéraires, des tarifs de recharge, des réseaux et des opérateurs serait-elle un luxe ? Je ne pense pas. Voilà un vrai nouveau métier. Si j’étais une marque auto affichant une forte ambition de transition rapide vers l’électrique, il y aurait déjà un spécialiste de ce type dans chacune de mes concessions. Après tout, il y a bien des « genius » dans tous les Apple Stores, qui s’adressent à des gens qui pensaient tout connaître de leur iPhone ou de MacOS… Quant à Product Genius, je ne l’ai pas inventé, puisque c’est une nouvelle fonction créée par BMW.
Électro-pompiste (ou borniste)
J’avais évoqué cette idée dans un précédent édito d’un « borniste » (le pompiste de la borne), et les avis furent plutôt partagés, voire majoritairement défavorables. Ok ok, l’idée vous paraît peut-être toujours saugrenue, mais je suis têtu et je n’ai pas changé d’avis. Je pense que, même si ce n’est pas partout et tout le temps, on pourrait voir apparaître ici et là ce type de profil sur certaines stations de recharge, par exemple les plus fréquentées, et durant les périodes de grandes migrations. Une présence utile pour aider, expliquer, accompagner, arbitrer, fluidifier et pourquoi pas fournir des produits et services supplémentaires. La nature a horreur du vide, dit-on, et l’homme aussi. Les services simples qui étaient censés fonctionner seuls sans intervention humaine, et qui finalement ont fini par créer des postes pour apporter un peu de valeur ajoutée, ne sont pas rares (caisses « automatiques » de supermarchés, lavages auto, hôtels en libre-service…).
Développeur d’applications dédiées
Si vous roulez électrique, vous aurez déjà très probablement utilisé ABRP, Plugshare, Chargemap, ou, pour les teslaistes, un truc comme Tezlab. Entre autres. Tout un écosystème de dizaines d’apps dédiées généralement à la gestion et à la planification des voyages en électrique. Là encore, il ne s’agit pas réellement de nouveaux métiers, puisque le développement d’apps mobiles date d’avant les premières voitures électriques destinées au grand public, mais on peut quand même parler d’une nouvelle activité en ce sens que les données à traiter sont inédites, ainsi que les algorithmes pour les interpréter. Chargemap, pour ne citer qu’un exemple que nous connaissons bien ici, est un pure player né avec l’électromobilité, et non pas une app parmi d’autres créée par une agence spécialisée dans les applications pour smartphone.
Journaliste/média spécialisé
Chaque nouveau secteur d’activité génère très rapidement son écosystème de médias spécialisés, et cela se vérifie encore davantage avec internet et l’immédiateté avec laquelle les médias se créent. Celui que vous êtes en train de lire n’est plus vraiment un nouvel arrivant, puisqu’il fête cette année ses 14 années d’existence et de leadership sur le marché francophone, mais il fait partie d’un ensemble de plus en plus vivace de médias digitaux dédiés à la voiture électrique, en France et partout ailleurs. Nouveau métier ? Peut-être pas, mais en tout cas la facette nouvelle d’une activité qui se réinvente avec l’électromobilité. Concernant le journalisme spécialisé dans la voiture électrique, on peut réellement parler d’une discipline inédite, avec ses codes, où il est urgent de revoir sa façon de penser et d’appréhender la chose automobile. Autant du point de vue technique et technologique que dans les usages. Le journaliste auto 2.0 n’a plus grand-chose en commun avec ses prédécesseurs.
Voilà pour l’essentiel, mais il existe certainement une foule de nouveaux métiers déjà existants, en mutation ou à venir, dont certains que nous n’imaginons probablement pas encore, et qui vont contribuer à façonner l’économie de l’électromobilité. Le parc de voitures électriques en France est d’environ 550 000 unités à ce jour, mais il devrait se compter en plusieurs millions d’ici une décennie. De quoi susciter quelques vocations et titiller la créativité des entrepreneurs, qui sauront en temps voulu créer et déployer les métiers qui vont avec.
« Retrofitter
Un anglicisme qui n’a pas d’équivalent en français pour qualifier l’activité qui consiste à convertir »
CQFD Donc « convertir » est bien français, ouf!
Un peu comme les médias « digitaux », le papier aussi se feuilletait avec les doigts.
Article intéressant, mais vous vous êtes focalisé sur les produits neufs ou en utilisation normale. Il y a aussi tout l’écosystème du dépannage, de la réparation et du recyclage qui est passé à la trappe dans votre article. Pour le moment les VE sont majoritairement neufs ou récents, mais on va avoir rapidement besoin d’électroniciens capables d’ouvrir et de remplacer des cellules et modules de batteries défectueux (par ex feu CMJ), et d’entreprises spécialisées dans le démantèlement et le recyclage des batteries. Si je devais conseiller un métier à un jeune qui s’intéresse à l’automobile aujourd’hui, je lui dirais d’aller voir de ce côté là car on va vite en avoir besoin, surtout que la pollution des VE est paradoxalement plus surveillée que celle des VT
Super nouveaux métier!!!
Installateur de bornes, ce n’est pas comme si le métier d’électricien spécialisés n’existaient pas ( (installateur de transformateur de grande puissance EDF)!
Retroffiter, certe ce métier n’existait pas, mais au vu du peu de voitures qui en bénéficiront et de leurs capacités je doute que ce métier perdure longtemps!
Product génius, encore un gros mot pour donner l’impréssion d’un super métier et de faire branché chez les BOBO, ce ne sont ni plus ni moins que des commerciaux ou des hotesses qui exercent dans les salons de l’auto, non?
Electro pompiste = pompiste, merveilleux métier qui disparaît peu à peu car remplacés par les pompes automatiques(qui permettent d’être approvisonné la nuit et le dimanche) et coûte moins cher que d’employer une personne !
Développeur d’applications dédiés … on en trouve déjà; application de stationnement, de rencontre, covoiturage et bien d’autre. Donc à l’ouest rien de nouveau!!!
Journaliste/ média spécialisé, juste une branche du journalisme comme Estel Denis pour le Foot!
Dans tous ces « nouveaux métiers », je ne vois pas grand chose de nouveau, pas même la volonté de certaines personnes de ne pas faire preuve d’objectivité dans leurs propos, et de faire croire à tout prix, que l’électrique c’est merveilleux.
je maintient aussi, payement CB ou le branché/chargé.
Bref, un vendeur de voiture qui connait les produits qu’il vend est maintenant un « genius ». On vit une époque formidable :-)
Trouveur de prestations d’entretien à faire payer ? (Parce que mécano, ça va perdre un peu d’intérêt vu les entretiens limités de nos véhicules)
Et le nouveau métier de loin le plus important: car sound signage designer. en gros le créateur d’une bande son originale pour le bruiteur extérieur et aussi intérieur qui donnera une « perception » de la marque auto à la fois valorisante pour le monde extérieur et rassurante pour le conducteur (vrouuuum)!
Il y a peut-être quelque chose que vous avez raté comme métier qui peux aller avec cet écosystème : le concepteur de borne de recharge.
Parce que la plus part des bornes de recharges AC (donc de ~1kW à 22kW) ne sont conçues que « basiquement », en suivant les normes du protocole sans plus.
Certaines ont une tore pour pouvoir « ajuster » la puissance fournie au véhicule selon l’état de la puissance disponible sur le réseau électrique de l’habitant, mais il y a de RARES bornes qui n’utilisent pas la spécificité française de la téléinfo.
Le gros avantage… ? Et bien vous pouvez avoir 40m de câbles entre votre Linky (ou compteur électronique) et votre borne de recharge…. C’est du temps réél, et aussi vous pouvez charger AUTOMATIQUEMENT en heure creuse votre véhicule.
Alors pourquoi c’est important ? Parce que charger tous les véhicules a 19h quand vous rentrez chez vous, que le chauffage (pac / effet joule), que la cuisine (induction / vitro céramique / fours…), tournent en même temps, fait qu’en hivers ce comportement stupide nous fera faire un gros blackout.
La téléinfo, permet d’effectuer un délestage intelligent des charges avec l’aide du distributeur d’énergie… Après on n’as pas de tarifs EJP (Tempo, peut-être), mais il serait judicieux d’avoir justement la souplesse de la téléinfo pour étaler les charges quotidiennes aux heures ou le reseau n’est pas en utilisation trop forte…
Alors oui, ce que je dis est technique, oui c’est pas simple, mais il est important de penser à l’avenir… peut-être que même en cas de surproduction due au vent, on pourrais pousser la charge des VE afin de peut-être limiter cette consommations aux heures compliquées….
Réparateur de batteries de traction.
Échanges de cellules vieillissantes pour redonner une jeunesse à la batterie, sans être obliger d’en racheter une neuve :
https://www.automobile-propre.com/cmj-solutions-espere-reparer-la-batterie-de-votre-voiture-electrique/
Ou mettre à jour en augmentant la capacité de la batterie ou en améliorant sa climatisation :
https://www.automobile-propre.com/voiture-electrique-cette-entreprise-met-a-jour-les-batteries-des-nissan-leaf/
« L’adoption massive ….. de la voiture électrique »
Non.
J’aimerai bien avoir les chiffres exacts. J’ai vu que dans le monde 6% des voitures vendues sont électriques. Et je ne sais même pas si ce chiffre prends en compte les voitures d’occasions. (L’occasion c’est plus de la moitié des ventes en Europe et la tendance s’accélère. Bien sûr il y a du VE, mais surtout du VT)
» Si j’étais une marque auto affichant une forte ambition de transition rapide vers l’électrique, … » Je construirais un reseau de recharge comme tesla le fait (superchargeur + bornes a destination) pour ne pas avoir besoin d expliquer comment gérer les recharges et pour gagner de l’argent avec les recharges.
« Nous l’avons déjà évoqué, et même si certains sont encore sceptiques, car « il n’y a rien de plus simple que la voiture électrique, ne compliquons pas tout », je persiste et je signe : la prise en main d’une voiture électrique, et surtout de la gestion de la charge et des déplacements, ne s’improvise pas, et nécessite à tout le moins une initiation, puisqu’il paraît qu’il ne faut pas parler de formation. Alors, disons « acculturation ». »
Il faut simplemnt distinguer le volet, conduite au quotidien et charge à domicile, qui ne nécessite que de s’informer par soi-même. A la rigueur le choix d’unbox murale peut être un peu difficile, mais comme tout produit un peu technique pour la maison ou la voiture.
.. des trajets avec planification et bornes de recharge. Et là, oui c’est souvent coton (hors Tesla).
Pour moi qui ne suis encore qu’un conducteur de VT, AP est mon « Product Genius ». J’apprend beaucoup sur les spécificités du VE grâce à vos articles ainsi qu’aux échanges de la communauté des électromobilistes. Cela m’aide en tout cas à faire « mûrir » mon projet de passage à un VE.
Monsieur Dupin, sauf le respect que je vous dois, vous me paraissez une fois de plus « hors-sol », comme la semaine dernière lorsque vous militiez pour une permis de conduire « voitures électriques ».
L’enthousiasme et le militantisme doivent se confronter au principe de réalité… et pour être crédible, éviter de ripoliner des évidences déjà existantes depuis belle lurette
Seul point où j’abonde dans votre sens, c’est effectivement c’est sur le métier d’installateur de bornes de recharge où les produit et technos sont nouvelles.
Tour d’horizon du reste :
Le rétrofit :
Le marché est inexistant. Le rétrofit est onéreux, fait perdre l’adn du véhicule (de collection), n’offre que de piètres performances par la nécessité de maintenir le poids du véhicule, n’offre que peu de confort par la suppression du chauffage / désembuage. Vous pouvez « estimer » tout ce que vous voulez pour les 10 prochaines années, les projets de rétrofit rament depuis 5 ans sans trouver de débouché viable économiquement.
Le product genius :
On est dans le ripolinage visant a enrober des fonctions antédiluviennes (ici un vendeur de voiture) dans un nouveau terme ronflant et pompant. Le vendeur de voiture est donc devenu Product Genius. Ca fait jeune et branché, mais ça a toujours existé … un vendeur de voiture a toujours passé du temps à expliquer les subtilités de son produit à ses clients.
Le borniste :
Vos rêves se heurtent à la réalité économique …
Développeur d’activité dédiés
Comme vous le dites vous meme, ce n’est pas véritablement un nouveau métier. On est dans les métiers de la digitalisation de la société, plus globalement
Le journaliste / média dédié
Un journaliste … spécialisé ? Ou est la nouveauté ? Un journaliste rugby, politique, cuisine, automobile, informatique, objets connectés … ben ça existe déjà. Alors vous pouvez encore mettre du 2.0 et des nouveaux mots derrière, on reste dans la nuance, ce n’est pas un nouveau métier.
Les médias et journalistes spécialisés ont toujours existé.
Ce qui me gêne dans cette approche c’est de donner en permanence l’impression que « tout va changer » alors que l’on n’est que dans une évolution de nos mobilités.
Vous agitez des révolutions, des nouveaux permis, de nouveaux usages, de nouveaux métiers … mais à l’arrivée, on est dans une simple adaptation (Darwin, ça vous parle) comme l’homme s’est adapté