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L’après-Tesla : à quoi ressemble l’innovation sans Elon Musk ?

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Elon Musk
Elon Musk

Tesla ne détient plus le monopole de l’innovation dans le secteur automobile. D’autres acteurs émergent ou reviennent sur le devant de la scène. 

Depuis sa Genèse, l’histoire récente de la voiture électrique se confond avec celle de Tesla. Pendant plus d’une décennie, l’entreprise californienne a dicté le tempo, imposé ses codes, cassé les conventions et réécrit les règles. Mais est-ce encore le cas aujourd’hui ? Pas sûr. On peut même affirmer sans trop risquer de s’attirer les foudres des fanboys — si toutefois il en reste — que cela ne marche pas très fort en ce moment pour la marque américaine. Alors que Tesla multiplie les alertes, ralentit ses investissements, modifie ses prix à répétition et reporte ses promesses les plus spectaculaires, une question s’invite dans le débat, celle de savoir à quoi ressemble l’innovation dans la voiture électrique… sans Elon Musk aux manettes ?

Ou, plus exactement : le marché du VE a-t-il besoin d’un leader charismatique pour continuer à avancer ? Sinon, est-on en train de passer dans une phase plus diffuse, plus industrielle, moins spectaculaire, mais plus structurante pour l’avenir du secteur ? Essayons d’y voir un peu plus clair.

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Tesla n’innove plus (ou beaucoup moins)

Le mythe reste tenace, mais la réalité le rattrape peu à peu. Voilà bientôt six ans — depuis l’annonce du Cybertruck en novembre 2019 — que Tesla n’a pas lancé de véritable nouveauté, en tout cas de nouveau modèle. Certes, la gamme a été entièrement mise à jour au cours des quatre dernières années, mais il s’agit d’un restylage et non pas de la présentation d’un nouveau modèle. Le Cybertruck, malgré son design polarisant, reste une niche dont les volumes sont pour l’instant anecdotiques, et dont les performances industrielles sont loin des promesses initiales, pour être poli. Il y a bien le Robotaxi, mais il ressemble pour le moment davantage à un concept, et son arrivée auprès du grand public semble encore très éloignée.

Quant au reste… Le “Tesla Network” censé concurrencer Uber ? Pas de nouvelles. Le volant yoke ? Retiré discrètement. Toujours pas de LiDAR… Quant au fameux logiciel FSD (pour Full Self Driving ou Conduite Autonome Intégrale), censé révolutionner la conduite sans intervention du conducteur, il progresse lentement, mais reste interdit dans la plupart des pays en dehors des États-Unis. Et même là-bas, il fait encore débat.

Au-delà du produit, le storytelling de Musk commence à lasser. Annonces tonitruantes, dates irréalistes, démonstrations techniques peu convaincantes… La stratégie Tesla repose de plus en plus sur des ajustements marginaux, des mises à jour logicielles — certes toujours fréquentes et souvent pertinentes — des modèles existants, des réductions de coûts, une guerre des prix, et de moins en moins sur des sauts technologiques spectaculaires.

Le centre de gravité de l’innovation a bougé

Mais alors, si ce n’est plus Tesla, qui innove aujourd’hui ? La réponse est multiple et décentralisée. En 2025, l’innovation dans l’électrique ne se résume plus à un seul acteur. Elle se déploie dans plusieurs directions, souvent complémentaires, parfois concurrentes.

En Chine, d’abord. Dans l’Empire du Milieu, l’innovation est autant logicielle qu’industrielle. Des marques comme BYD, Nio, Xpeng, Xiaomi ou Huawei expérimentent des architectures électriques inédites, misent sur l’intégration verticale, déploient des interfaces utilisateurs hyper personnalisables, et avancent à marche forcée sur la recharge ultra-rapide ou l’échange de batteries. Le tout avec une vélocité industrielle que l’Occident éprouve un peu de mal à suivre.

En Europe, ensuite. Eh oui, on fait partie de ceux qui y croient encore, et qui pensent que l’industrie automobile européenne n’est pas morte, et qu’elle pourrait même rebondir ! Des constructeurs comme Renault, Volvo, BMW, Volkswagen ou même Stellantis repensent leurs plateformes pour la deuxième génération de voitures électriques, plus sobres, plus compactes, et parfois plus accessibles. L’innovation y est plus discrète, mais ancrée dans une logique de durabilité : économies circulaires, fabrication bas-carbone, standardisation des pièces, réparabilité. Et des voitures qui gardent une certaine personnalité en termes de design, comme par exemple une R5 E-Tech, une Skoda Elroq, une BMW i4 ou encore un VW ID.Buzz, loin du standard chinois qui prévaut aujourd’hui.

Enfin, des acteurs dont on parle moins, et qui pourtant pèsent de plus en plus dans la balance, les équipementiers. Valeo, Bosch, CATL, Panasonic, STMicroelectronics, Nvidia, et même… Google. De plus en plus, l’innovation dans l’automobile électrique vient des “sous-traitants”, qui ne sont plus vraiment secondaires. Ce sont eux qui développent les batteries LFP de nouvelle génération, les architectures 800V, les puces pour l’assistance à la conduite, les calculateurs centralisés et les logiciels embarqués.

Par conséquent, le (relatif) essoufflement de Tesla révèle peut-être la fin d’un cycle entrepreneurial. Pendant longtemps, le modèle Tesla s’est appuyé sur une logique de rupture : casser les codes, désintermédier les réseaux, brûler les étapes, réduire les délais avec une production massive et agile. Ce canevas a été extrêmement efficace dans une phase pionnière, pour bousculer, et même mettre une bonne claque aux constructeurs historiques. Mais une fois que le marché se structure, l’innovation est moins spectaculaire, et se joue ailleurs, dans les logiciels de gestion d’énergie, dans les chaînes logistiques, dans les usines, dans les accords de recyclage, dans les normes de recharge. Bref, dans l’infrastructure technique du VE. Et non plus seulement dans le produit final.

Elon Musk aurait-il perdu la main ?

Elon Musk a été un formidable accélérateur, la référence à l’aune de laquelle tous les autres constructeurs, quelque peu pris de panique, se sont inspirés. Mais il a aussi été un écran de fumée. Son omniprésence médiatique a longtemps masqué d’autres formes d’innovation, plus discrètes, parfois plus utiles. Aujourd’hui, alors que Tesla ralentit, le marché se rééquilibre. Et il est probable qu’il s’en porte mieux. Si toutefois ce fut le cas par le passé (au même titre que l’informatique avec Steve Jobs ou Bill Gates), le passage à l’électrique n’a probablement plus besoin d’un gourou, mais plutôt d’un écosystème. Il ne s’agit plus de séduire des early adopters technophiles, mais de convaincre des familles, des professionnels, des flottes, des collectivités. Cela passe par une qualité de fabrication constante, une offre accessible, un SAV solide, une recharge fiable.

Autrement dit : moins de buzz, plus de confiance.

Je vous entends d’ici : bien sûr, Tesla reste un acteur essentiel du secteur, et bien évidemment, loin de nous l’idée d’enterrer trop vite une entreprise aussi agile, puissante et novatrice. Le constructeur conserve une force de frappe financière importante, un réseau de Superchargeurs dense, une base client très engagée, et un coup d’avance sur certains points clés (efficience de ses voitures, intégration verticale, marge brute… ). Mais, en creux, cette transition marque une étape importante pour l’ensemble du secteur, qui sort de l’adolescence.

Et finalement, il se pourrait qu’il n’ait plus besoin de prophètes, mais plutôt de bâtisseurs.

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