AccueilArticlesEst-ce qu'une aide pour la recharge de sa voiture électrique alimente vraiment la lutte des classes ?

Est-ce qu'une aide pour la recharge de sa voiture électrique alimente vraiment la lutte des classes ?

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Un nouveau métier est apparu avec l’essor de la voiture électrique : borniste. Notre râleur en chef a pu lire une curieuse analyse de ce job, de quoi l’inspirer pour son nouveau billet de mauvaise humeur.

En ce jour de chassé-croisé, ce bon vieux Bison Futé avait hissé le drapeau noir sur l’ensemble de la France. Ce qui n’a pas empêché des milliers de Français de prendre la route et d’aller perdre du temps dans les bouchons (ils étaient prévenus). Certains auront peut-être perdu encore plus de temps sur le trajet s’ils étaient électromobilistes.

Impossible en effet de traverser la France sans s’arrêter plusieurs fois pour recharger sa voiture électrique, avec le risque en un tel jour de faire la queue aux bornes. Une situation qui a donné naissance à un nouveau métier : borniste.

C’est la version branchée du pompiste. Réseau de recharge et concessionnaires d’autoroute ont pris l’habitude de déployer ce personnel les jours de grands départs. Leurs missions ? Accueillir les conducteurs de véhicules électriques, les aider à trouver un emplacement libre, à se brancher aux bornes, à payer… Ils sont ainsi là pour essayer de réguler cette attente.

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On peut y voir un service pratique. D’autres y voient un symbole… de la lutte des classes. Voilà un surprenant avis que j’ai pu lire dans le Parisien il y a quelques jours.

A l’occasion d’un sujet sur les bornistes, le quotidien a interrogé… une agrégée de philosophie. On aurait pu imaginer lire l’interview du représentant d’un réseau de charge ou d’un expert en électromobilité. Mais à la place, on découvre l’éclairage d’Apolline Guillot, qui a écrit « Petite Philosophie des mobilités », que j’imagine être un best-seller de référence pour qu’on la retrouve questionnée par Le Parisien.

Si Apolline Guillot salue le retour d’une présence humaine dans une station, elle regrette que ce personnel soit réservé à une « certaine catégorie de la population », les conducteurs de voitures électriques. 

Pour elle, on se retrouve avec une station-service à deux vitesses, avec les pompes à essence d’un côté, les bornes de l’autre. Et donc « des voitures neuves d’un côté, zéro émission, des voitures anciennes de l’autre, polluantes ». Comprenez les riches d’un côté, les pauvres de l’autre.

L’aire d’autoroute ne serait ainsi plus un lieu de rassemblement, car « la pompe à essence nivelait, le temps d’un plein, les inégalités sociales ». C’est vrai que chez Total, le conducteur de sa Clio diesel un peu fatiguée se sentait l’égal de celui qui faisait le plein de sa Porsche à la pompe à côté.

Pour Apolline Guillot, « la figure du borniste est au service d’une élite et transforme un peu plus l’électrique en univers de luxe ». Heu… on ne va pas un peu loin là ? J’en ai lu des bêtises sur la voiture électrique, mais celle-là est quand même bien tirée par les cheveux.

Déjà, on rappellera à l’agrégée de philosophie qu’il y a toujours une foule de riches à la pompe à essence. Et qu’on y trouve même encore des pompistes. Total a ainsi remis au goût du jour ce métier, annonçant en 2024 que 300 stations seraient dotées d’un pompiste. L’enseigne expliquait justement l’importance du contact humain et de bons retours sur ce service.

Ensuite, oui, il est évident que la voiture électrique est une voiture de gens plutôt aisés. Déjà parce que tout simplement c’est une voiture neuve ou récente. Et une voiture neuve est achetée par des personnes qui en ont les moyens, même si elle est thermique ou hybride (et donc par des vieux).

Bien sûr, une électrique est encore plus onéreuse. Mais le marché change. Les prix baissent, le leasing a donné accès à la mobilité électrique à des ménages plus modestes, tandis qu’un marché de l’occasion, riche en bonnes affaires à cause de décotes marquées, se développe. La voiture électrique n’est plus réservée à une élite. D’ailleurs, le fameux borniste commence à voir passer de tout, y compris des Twingo électriques.

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Et ces bornistes ne sont pas forcément là pour aider des privilégiés qui roulent en Tesla. Ces jours, ils sont souvent là pour renseigner des conducteurs qui effectuent le premier grand trajet avec leur auto électrique et qui sont ainsi un peu perdus. Un apprentissage face à une borne rapide, quand un plein d’essence n’a évidemment plus besoin d’être expliqué. On rappellera aussi que les bornistes essaient de favoriser la rotation en incitant des conducteurs à ne pas monopoliser une borne une fois les 80 % de recharge atteints. Pas de pouvoir de police, mais un appel au civisme face à certains mauvais comportements… de riche ?

Le borniste, il est donc là pour accompagner un changement. Il disparaîtra sûrement aussi vite qu’il est apparu une fois le marché de l’électrique mature et les bonnes habitudes prises. Apolline pourra alors le regretter.

Mais pour l’instant, il est dommage de voir une personne que j’imagine érudite tenir un discours ridiculement manichéen, pauvre en thermique contre riche en électrique, encore plus dans un grand média national.

On a déjà assez de bas de plafond sur les réseaux sociaux pour cela. Ils se sont justement trouvé ces derniers jours un énième os à ronger avec une vidéo virale tournant justement en dérision une queue devant les bornes de recharge. Une fois de plus, les commentaires sur les conducteurs de véhicules électriques sont gratinés.

Pas besoin donc qu’une agrégée de philo surjoue la lutte des classes juste parce qu’une personne vous a aidé à faire la recharge un samedi de chassé-croisé.

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