AccueilArticlesEmmanuel Bret (BYD) : « une TVA à 5,5 % sur les voitures électriques »

Emmanuel Bret (BYD) : « une TVA à 5,5 % sur les voitures électriques »

La suite de votre contenu après cette annonce

Le directeur général adjoint de BYD en France fait le point sur les avancées de la marque sur notre marché.

Automobile Propre – BYD a atteint 8 800 immatriculations en France à la fin septembre, se plaçant ainsi devant Jeep, Mazda ou Volvo. Où pensez-vous atterrir en fin d’année ?

Nous venons de franchir les 10 000 immatriculations (l’interview a eu lieu fin octobre, ndlr.) ! Nous verrons où le vent nous portera… Nous avons notamment fait de belles performances pendant les dernières opérations portes ouvertes. Environ 70 % de nos clients sont des particuliers pour 30 % d’entreprises, flottes et loueurs.

AP – Quelles sont les modèles qui se vendent le plus ? 

Emmanuel Bret – Le Seal-U DM-i est actuellement notre fer de lance, avec un peu moins de 40 % des immatriculations. Nous allons d’ailleurs lancer très prochainement deux nouveaux modèles hybrides. Il s’agira de l’Atto 2 Super Hybrid et d’un SUV. Vous en saurez plus avant la fin de l’année.

AP – Pour 2026, vous voulez sans doute franchir la barre du pourcent de part de marché…

EB – Nous ne nous fixons aucune limite. Nous allons notamment continuer à développer la gamme Super Hybrid, vous l’avez déjà vu avec le lancement de la Seal 6 DM-i et de l’Atto 2. L’an prochain, la part d’hybride dans nos ventes devrait se situer autour de 60 à 70 %, contre environ 40 % aujourd’hui. Mais nous appuyons toujours sur le VE.

À lire aussi
Essai BYD Seal 6 DM-i Touring : une belle surprise avec ce break hybride rechargeable !

AP – Vos véhicules, aujourd’hui fabriqués en Chine, ne sont pas éligibles au leasing social ou aux aides CEE

EB – Pour être clair, à mes yeux, toute mesure qui fonctionne est bonne. Pendant des années, les immatriculations en France se situaient entre 2 et 2,2 millions de voitures par an. Cette année, nous allons terminer à 1,7 million. Tous les constructeurs souffrent. Nous avons empilé les mesures spécifiques : leasing social, éco-score, malus au poids, avantages en nature, etc. Nous sommes les seuls à avoir des règles aussi complexes. Et elles ne fonctionnent pas. Nous avons perdu 300 000 clients et la part de l’électrique reste stable autour de 17 % de part de marché quand elle progresse de 40 % en Allemagne ou de 80 % en Espagne. Je vous invite à aller voir les modalités de calcul de l’éco-score sur le site officiel, c’est complexe. Face à cela, les particuliers attendent et les entreprises – qui ont été touchées par une loi « surprise » en février – reportent le renouvellement.

AP – Que préconisez-vous ?

EB – Incitons simplement à basculer sur l’électrique et « que le meilleur gagne ». Simplifions, fluidifions. En Espagne, tous les VE sont soutenus, peu importe la marque. La Norvège a stoppé ses aides, mais après avoir atteint l’objectif d’approcher les 100 % de véhicules électriques. Nous avons déjà des droits de douane qui permettent de protéger l’industrie européenne (voir l’encadré ci-dessous, ndlr.). Arrêtons avec l’éco-score ou l’empilement de nouvelles taxes, nous sommes le seul pays du continent à agir ainsi. Nous pourrions par exemple passer la TVA à 5,5 % sur les véhicules électriques contre 20 % pour les thermiques. Chez BYD, nous sommes en pleine accélération, mais tout le monde bénéficierait d’un tel dispositif.

AP – Quid des infrastructures ?

EB – Il faut encore un soutien pour les communes pour la pose de bornes en centre-ville. Aujourd’hui, nous sommes arrivés à une situation correcte sur autoroute, mais cela reste une vraie problématique en agglomération.

Droits de douane et usines en Europe

Il y a un an, l’Union européenne publiait un règlement instituant « un droit compensateur définitif sur les importations de véhicules électriques (…) originaires de République populaire de Chine ». Selon l’enquête de la Commission européenne, les constructeurs chinois de VE ont bénéficié de subventions « déloyales » (prêts avantageux, terrains à prix irréaliste…).

L’UE a ainsi imposé des droits de douane de 17 % à BYD sur chaque voiture électrique arrivant sur notre continent, s’ajoutant aux 10 % habituels. Les véhicules hybrides rechargeables ne sont pas concernés. Le groupe SAIC (MG/Maxus), qui n’a pas collaboré avec l’enquête de la Commission, est davantage touché avec un taux à 35,3 %.

Le dispositif a évidemment été critiqué par Stella Li, vice-présidente de BYD, dans les colonnes du quotidien allemand Frankfurter Allgemeine : « Les consommateurs européens sont déjà mis en difficulté par l’inflation et les factures d’énergies. Leur accès à la meilleure technologie automobile est désormais plus difficile. Ils doivent payer davantage à cause de ces droits ».

L’une des stratégies prévues pour contourner cet obstacle est la création d’usines en Europe. Le site de Szeged, en Hongrie, produira ses premières voitures dès la fin de l’année 2025. Un deuxième site est prévu dans la province de Manisa, en Turquie. Ce choix permet de bénéficier des accords de libre-échange entre cet État et l’UE. Enfin, BYD envisagerait l’implantation d’une troisième usine. Selon Reuters, elle pourrait être bâtie en Espagne.

AP – BYD va inaugurer très prochainement sa première usine en Europe. Quand arriveront les premiers véhicules ?

L’usine démarrera officiellement en fin d’année, donc vous verrez les voitures dans nos showrooms en début d’année prochaine.

AP – Fabriqués en Hongrie, les BYD Dolphin Surf et Atto 3 seront donc exemptés de ces droits de douane… Allez-vous en faire bénéficier vos clients avec des prix en baisse ?

EB – Nous verrons quelle sera l’implication sur les tarifs. Mais notre position n’est pas de faire du premier prix. Notre choix est de proposer notre technologie au meilleur prix. Si vous comparez nos voitures avec la concurrence, à équipements égaux, vous verrez que nous sommes très compétitifs. Sur la Dolphin Surf, vous avez le radar adaptatif, le crash-test EuroNCAP 5 étoiles ou l’écran 10 pouces pour moins de 20 000 euros. Mais on se parle ici de 20 000 euros, pas de 15 000 euros…

AP – D’autres marques chinoises se développent en même temps que vous. Par exemple, Leapmotor qui s’appuie sur Stellantis. Ou Omoda et Jaecoo, portés par Chery… Cela fait beaucoup de nouveaux noms pour le consommateur… Comment faire la différence ?

EB – Vous avez raison. Nous croyons à l’électrification du marché et nous sommes ravis de voir ces nouveaux entrants sur le marché du VE ou de l’hybride. De notre côté, nous avons 30 ans d’existence, dont 20 dans l’automobile. Nous sommes le deuxième fabricant de batteries pour véhicules électriques au monde, donc les experts véritables et absolus sur ce sujet. Vous avez peut-être vu le nail test, qui démontre que nous avons les batteries les plus sûres du monde. Le choix d’utiliser la chimie LFP est aussi responsable puisqu’on se passe de métaux rares. Nous sommes avant tout une entreprise de « tech ».

Le réseau « Flash charging » en vue

A l’image des Superchargers Tesla, BYD possède son propre réseau de recharge rapide dans son pays d’origine. Cet été, la marque a confirmé son ambition de créer une grille en Europe, avec des puissances atteignant 1000 kW (ou 1 MW). En Chine, elles sont autorisées par le branchement de deux prises en même temps. En Europe, un seul connecteur suffirait. Nous aurons sans doute l’occasion de le vérifier. Stella Li a annoncé 200 à 300 stations sur notre continent d’ici neuf mois.

AP – Quelles sont les remontées de la part de vos vendeurs ?

EB – Les premiers retours sont excellents. Un indice intéressant, c’est que 50 % des clients qui essaient nos voitures passent commande. Notre nom commence à être connu, mais évidemment, il faut faire rentrer les gens dans les véhicules, leur faire essayer. La surprise est souvent dans l’appréciation de la qualité de fabrication ou l’avance technologique. Dans nos enquêtes, le taux de satisfaction est élevé. Et chaque client content en parle à ses voisins ou à ses proches. Chaque personne peut nous en apporter trois ou quatre autres…

AP – Qui sont vos premiers clients ?

EB – Nous distinguons deux types. Le premier, c’est l’expert de l’électrique. Souvent, il a déjà conduit un VE pendant 2, 3 ou 5 ans. Avec les vendeurs, les questions deviennent rapidement très techniques sur les types de besoins, les habitudes, les vitesses de recharges… La deuxième clientèle est celle des « défricheurs ». Ils ont souvent envie d’aller vers un VE, mais comme tout le monde, ils lisent de tout sur les réseaux sociaux, cherchent à comprendre, hésitent encore un peu. Ils basculent bien souvent vers notre offre Super Hybride. Cela rassure les clients qui nous disent : « on va apprendre et notre prochaine voiture sera électrique ».

Une stratégie transformée

Cela fait désormais trois ans que le constructeur est arrivé sur le marché français. À l’occasion du Mondial de l’automobile 2022, du lancement de l’Atto 3 ou des essais de la Dolphin, il était question de n’importer que des véhicules 100 % électriques. Mais les progrès moins rapides que prévu (de BYD comme du VE) et l’établissement de droits de douanes additionnels ont poussé Shenzhen à revoir sa stratégie. Elle compte pour cela sur ses hybrides rechargeables, également très prisés en Chine. Le premier véhicule ainsi motorisé disponible dans l’Hexagone fut le BYD Seal U DM-i, à partir du printemps 2024. Ce modèle — nommé Song en Chine — connaît un succès remarquable. Il est le PHEV le plus vendu dans le monde avec près de 350 000 exemplaires immatriculés entre janvier et août selon les chiffres compilés par José Pontes. En Europe, près de la moitié des 95 000 BYD vendues étaient des Seal U, très majoritairement à chaîne de puissance hybride.

À lire aussi
Comment fonctionne l’hybride rechargeable de BYD ?

AP – Comment se passe l’après-vente ?

EB – Nous avons des stocks en France et en Europe. Nos véhicules sont garantis 6 ans et 8 ans pour la batterie. Au-delà, la grande force de BYD, c’est l’intégration. Nous fabriquons nous-mêmes quasiment toutes nos pièces, donc nous n’avons pas de problème de disponibilité. On peut directement appeler l’usine, ce sera toujours réactif.

AP – Votre marque fête aujourd’hui ses trois ans d’existence sur le marché français. Les premiers véhicules reviennent donc de leasing. Vous allez donc bientôt vendre des voitures d’occasion…

EB – Oui, nous sommes d’ailleurs en train de travailler sur ce sujet. Notre label sera lancé au début de l’année prochaine, ce qui permettra de rassurer. Il faut aussi savoir que là aussi, notre niveau d’intégration nous donne le contrôle complet sur le véhicule et la batterie.

AP – Où en est votre réseau ?

EB – Nous en sommes à 70 points de vente, nous devrions être pas loin de 100 en fin d’année. Il nous reste quelques zones blanches dans le centre ou le nord de la France. L’idée est d’arriver à environ 200, voire un peu plus, à terme. Nous jouons déjà avec des groupes référents localement avec d’autres marques. Cela montre qu’ils ont confiance dans BYD. Et cela rassure les clients d’avoir des professionnels de l’automobile qu’ils connaissent bien en face d’eux.

AP – Le groupe compte aussi en son sein la marque plus haut de gamme Denza. Comment va-t-elle être déployée en France ?

EB – L’arrivée définitive de Denza est prévue en France pour avril 2026. Dans un premier temps, nous allons ouvrir un réseau dans quatre grandes villes de France puis probablement une dizaine avant de passer à terme à 30 ou 40. Il y aura la Z9 GT, mais aussi d’autres modèles, avec 5 ou 6 modèles à terme. Les offres seront électriques et hybrides.

À lire aussi
Essai : Denza Z9GT, le luxe hybride rechargeable à la chinoise

AP – Récemment, la Yangwang U9 a fait beaucoup parler sur les réseaux avec son record de vitesse (496 km/h) et son chrono au Nürburgring. Il s’agit là d’une troisième marque du groupe BYD. Son importation est-elle prévue ?

EB – Aujourd’hui, ce n’est pas un sujet pour nous. Mais c’est un véhicule qui montre la capacité du groupe à avancer sur la technologie et la performance. Il donne une idée de ce que nous pouvons faire. Et cela montre aussi que quand le groupe annonce quelque chose, il tient ses engagements.

Nos guides