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Jay Wennington / Unsplash
L’extension de l’Ultra Low Emission Zone (ou ULEZ) de Londres (l’équivalent des zones à faibles émissions en France), prévue pour le 29 août 2023, suscite de vifs débats au Royaume-Uni.
Le mois dernier, cinq conseils municipaux de Londres (Bexley, Bromley, Harrow et Hillingdon et le comté de Surrey) dirigés par le parti des Conservateurs, ont intenté une action en justice pour tenter de bloquer les plans du maire de Londres. Sadiq Khan souhaitait étendre l’Ultra Low Emission Zone à l’ensemble de la capitale britannique. Devant la Haute Cour, les Conservateurs ont soutenu que « le maire de Londres n’avait pas le pouvoir légal d’étendre cette zone ».
Les Conservateurs remettent en question l’ULEZ
De vives tensions face à une extension qui va obliger les conducteurs des véhicules les plus polluants à payer une taxe lorsqu’ils utilisent leur véhicule dans cette zone. Les modèles concernés sont les essences datant d’avant 2006, et les diesels immatriculés avant 2015. Ils devront s’acquitter d’une redevance journalière de 12,5 livres (environ 15 euros) à partir du 29 août.
À lire aussi Bientôt des arbres solaires pour recharger les voitures électriques au Royaume-UniIl y a quelques jours, la justice britannique a rejeté le recours des conseils municipaux londoniens. Suite à cette décision, Sadiq Khan a pris la parole pour saluer une « décision qui va permettre à 5 millions de londoniens supplémentaires de respirer un air plus propre ». L’extension de l’Ultra Low Emission Zone va permettre de couvrir une zone dans laquelle vivent environ neuf millions d’habitants.
Malgré cette victoire, le recours des Conservateurs pour tenter de faire annuler l’extension de cette zone montre que la défiance envers les politiques environnementales est grande. Au Royaume-Uni, la conservatrice Susan Hall incarne parfaitement cette contestation grandissante. Candidate à la mairie de Londres, elle promet de mettre un terme à l’extension de l’Ultra Low Emission Zone « dès le premier jour » si elle est élue.
La défiance grandissante au Royaume-Uni
Il y a un véritable mouvement dans ce sens dans le pays en ce moment. Un récent sondage réalisé par l’institut YouGov a montré que 51 % des britanniques étaient opposés à ce genre de taxe. La crise économique que rencontre le pays conjuguée à la hausse du coût de la vie à Londres alimentent les tensions envers cette extension qui va désormais toucher les habitants de la périphérie londonienne, qui sont par ailleurs les moins aisés.
Au sein même de son propre parti des Travaillistes (Labour Party), Sadiq Khan est attaqué sur cette extension. Le chef du parti, Keir Starmer, lui demande de « bien réfléchir à sa décision d’étendre la zone ULEZ ». Selon lui, cette décision pourrait coûter des voix aux Travaillistes en vue des élections législatives de l’année prochaine. Cette défiance envers l’extension des lois environnementales britanniques est inquiétante. Selon plusieurs analystes, cela pourrait avoir des conséquences sur la politique environnementale du Royaume-Uni.
Même situation en France ?
En France, de plus en plus de français s’opposent aux ZFE. Au printemps 2023, une étude de l’institut CSA montrait que seulement 51 % des répondants étaient favorables aux Zones à Faibles Émissions. 62 % des propriétaires des véhicules Crit’Air 4 et 5 ou non classés se disent même défavorables aux ZFE.
Face à la grogne des Français, mais aussi d’élus, le gouvernement a décidé de mettre de l’eau dans son vin. Il a assoupli les règles, réduisant très fortement le nombre de ZFE obligatoires.
À lire aussi ZFE : le gouvernement revoit sa copie et assouplit les règles pour calmer la grogneLe Royaume-Uni traverse une crise économique et sa politique environnementale est de plus en plus mise à mal. Les objectifs à long terme du pays pourraient bien être directement impactés par les priorités courtemistes des électeurs, avec le pouvoir d’achat au premier plan. Je pense que le cas britannique n’est pas isolé. La défiance que rencontre actuellement le maire de Londres sur la question de l’Ultra Low Emission Zone est la démonstration du type d’opposition que les gouvernements vont rencontrer au cours des prochaines années sur les questions environnementales. D’ailleurs, cela rappelle la crise des gilets jaunes en France, dont le point de départ était une nouvelle taxe sur les carburants.
« Le Royaume-Uni traverse une crise économique »
C’est peu de le dire, de nombreux foyer n’ont plus les moyens de se chauffer. Alors acheter un nouveau véhicule, c’est totalement hors de portée.
Le parallèle avec la situation française est certes juste, mais l’échelle des difficultés n’est pas comparable.
Très intéressant, votre article et votre avis après, Valentin Cimino, bravo!
Votre article traite d’un véritable sujet de société et il est très bien ciblé: cette problématique écologique et sociale dépasse largement le cadre de la Grande Bretagne!
Effectivement, la crise des gilets jaunes en France est née d’une taxe supplémentaire sur les carburants et il semble aussi, de la généralisation à l’époque des 80 km/h sur les départementales et nationales, sans discernement et sans prendre en compte le caractère dangereux ou non d’une route: cela a été perçu comme une nouvelle punition administrée à tous.
L’addition des maux est terrible: pouvoir d’achat en berne, taxation punitive et partiale (car on ne surtaxe pas le kérosène dans le même temps par exemple), stigmatisation des habitants de petites villes de province, pression exacerbée sur les citoyens… Ce mélange ne permet pas de mettre en place une politique écologique efficace et engendre la défiance d’un grand nombre de gens.
Résultat: révolte et pas de progrès écologique majeur ni de solution politique adéquate.
En Grande-Bretagne, le déclassement ressenti par une grande partie de la classe populaire, qui a en partie conduit au vote pour le Brexit, en rajoute une grosse couche.
Mais finalement, dans le reste de l’Europe, la problématique est assez similaire.
Ces zones à faible émission se transforment en zones à forte exclusion ou à forte taxation (surtout dans le cas de Londres!) et elles pourraient bien se transformer en zones à forts remous démocratiques.
Perso, ça m’inquiète, nos démocraties sont très fragiles, il en faut peu pour que ça éclate:
pomper 15 balles par jours à ceux qui n’ont pas pu acquérir un moyen de transport moins polluant, c’est vraiment punitif, et ça ne peut que créer un nouveau chaos à mon humble avis…
Il n’y a rien d’étonnant que les conducteurs de VT a critère 4 et 5 ne veulent pas entendre parler de ZFE où système équivalent.
L’on peut toujours espérer que la pollution et le dérangement climatique mettre de l’eau dans son vin. Mais cela ne semble pas être le cas bien au contraire.
Je suis persuadé que ce qui sont contre, seront les premiers a porter plainte contre les politiques. Quand dans quelques années l’on devra supporter les conséquences que ce manque de courage. Car ce jour là il faudra prendre des décisions bien plus compliqué a supporter que ce que les opposé aux ZFE juge insupportable. Il y aura bien plus de personnes qui ne pourront pas passer le cap.
Je suis sur que nous pouvons tous dire merci aux politique qui en 1973 ont su résister aux opposants a la ceinture de sécurité obligatoire. Et pourtant elles n’a pas était accueil les bras ouverts à cette époque.
les taxes en tous genre sous prétexte d’écologie sont politiques, confiscatoires et punitives ou utiles et efficaces pour l’environnement ?
ou vont elles ? sont elles tracés et utilisés pour la cause qu’elles sont censés défendre ?
L’argent versé par les pauvres (ceux qui n’ont pas les moyens de changer leur modèle thermique de 2005) ne va pas éliminer le CO2 et les polluants émis. Cette méthode particulièrement discriminatoire n’est pas la bonne à mon avis même si Londres est doté de transports en commun performants. Une politique écologique conséquente ne peut selon moi reposer sur des actions (ou des sanctions) individuelles mais en particulier sur l’aménagement du territoire, or les tenants de cette politique « raisonnable » ne cessent de fermer des établisements publics (école, poste, hopital…) pour les regrouper plus loin et moins nombreux, augmentant ainsi les distances à parcourir quotidiennement. Mener les deux actions de front est contradictoire.
Les britanniques traversent une grave crise économique. Le pouvoir d’achat de beaucoup s’est effondré (à côté d’eux, notre hausse du coût de la vie parait raisonnable!), donc on peut comprendre des réactions de rejet face à ce qui s’apparente à une taxe sur les plus pauvres (vieux véhicules).
Je suis à 100% pour baisser nos émissions, mais il faut trouver un moyen de le faire accepter. Et d’accompagner ceux pour qui c’est le plus difficile.
Et un point qui me choque, que ce soit pour les ZFE françaises ou les ULEZ londoniennes, on parle d’interdire les véhicules les plus polluants en se basant sur…l’âge du véhicule. NOOOON! Ca devient insupportable cette malhonnêteté intellectuelle Si on veut que ce genre de mesure « passe », il faut le faire avec comme critère la pollution réelle du véhicule (soit la donnée constructeur, ou même mieux une vraie mesure au moment du contrôle technique). Sinon, on va donner l’impression (vraie) que l’on taxe les vieux véhicules (donc sans doute ceux qui n’ont pas les moyens d’en acheter un plus récent) au détriment des « riches » qui s’achètent le dernier Hummer ou autre véhicule à grosse consommation/pollution.
Attention, dans ce genre de lois il faut vraiment montrer que l’on est juste, c’est la base pour que ça soit accepté.
15€ par jour… ça ressemble effectivement à une incitation vertigineuse en faveur de l’électrique mais les VE modestes ne sont pas encore arrivés et, les transports en commun dans ces zones périurbaines ne sont pas à la hauteur.
🤪
Il ne faut pas se leurrer, nous ne sommes (pour nos dirigeants) que les « serfs de notre époque ».
Sous couvert d’une idéologie de purification vertueuse – à priori bienvenue – le but sera encore et toujours de taxer les plus faibles, car ce sont les plus nombreux et malléables…
Rien ne change, au contraire.
C’est compliqué de se passer de la drogue dure que représente les énergies fossiles. Croire que cela se fera en douceur avec la bénédiction du peuple est un leurre.
Le terme de drogue (emprunté à Jancovici) est très trouvé. Cela fait du bien sur le moment mais à long terme, cela nous détruit.