La mobilité électrique se développe en France. Cette bonne nouvelle se transforme parfois en cauchemar autour des bornes de recharge rapide qui se montrent de moins en moins efficaces et adaptées à la situation.

Des voitures et des utilitaires

Les incitations à l’achat de véhicules électriques fonctionnent très bien. De plus en plus d’automobilistes prennent le train de l’électromobilité en marche sans trop se poser de questions sur une éventuelle attitude civique à adopter. À ce phénomène s’ajoute la bascule des professionnels vers des voitures et utilitaires branchés. Le recours à la recharge en voirie s’intensifie, en particulier sur les bornes rapides qui répondent le mieux aux déplacements des vacanciers, aux rotations des livreurs, et aux besoins des chauffeurs de taxis et de VTC.

Dans les territoires qui vivent un minimum du tourisme, il est préférable de ne pas avoir un rendez-vous quand il est impératif de passer par la case recharge. Car rejoindre une borne 50 kW quand une voiture l’occupe déjà peut rapidement causer un retard de plus d’une heure, surtout quand son propriétaire a décidé, coûte que coûte, de régénérer complètement le pack.

Les constructeurs de voitures électriques, mais aussi les fabricants et installateurs de bornes, et les gestionnaires de réseaux doivent agir pour améliorer la situation.

Un seul véhicule à la fois

Est-il normal que sur de nombreuses bornes de recharge rapide il soit impossible de démarrer l’opération avec le connecteur Combo CCS quand un véhicule équipé pour le standard CHAdeMO reçoit du courant ? Et inversement bien sûr ! Est-il envisageable qu’une pompe à essence soit bloquée quand celle de gazole est utilisée ?

Pour une question de dimensionnement électrique de l’infrastructure, on peut comprendre qu’il ne soit pas autorisé de recharger à pleine puissance 2 voitures à la fois. Faudrait-il diminuer le flux d’un côté pour permettre tout de même de servir les 2 engins à la fois ? Le débat est ouvert !

En revanche, lorsque pour l’une d’elles le ravitaillement en énergie touche à sa fin, par exemple lorsque la puissance est en dessous de 5 ou 10 kW, il apparaît totalement aberrant de bloquer le matériel au détriment d’un usager qui attend peut-être déjà depuis 30, 40 et plus de 50 minutes. C’est pourtant bien ce scénario qui attend nombre d’électromobilistes qui ont un besoin impérieux de recharge.

Plusieurs bornes sont impératives

Sans doute quelques opérateurs conseilleraient-ils de rejoindre une autre station rapide à quelques dizaines de kilomètres quand une voiture est déjà en recharge à la première. Sauf que, si le point de secours est libre au moment de reprendre la route, il ne le sera peut-être plus en arrivant sur place.

Cette situation, de plus en plus fréquente, met une nouvelle fois clairement en lumière qu’un site dédié à la recharge rapide doit recevoir plusieurs bornes. Et ce, pour une disponibilité maximale même en cas de panne matérielle ou d’affluence. C’est impératif ! À défaut, les trajets nécessitant un ravitaillement en énergie en cours de route seront toujours perçus comme risqués et générateurs de stress, bloquant les déplacements les plus longs, en particulier pour rejoindre son lieu de villégiature.

Il n’y a pas que les particuliers qui subissent ce désagrément. Les professionnels aussi, qu’ils soient chauffeurs de taxis et de VTC ou livreurs avec des délais courts à respecter.

Modérer la recharge à faible puissance

En période d’affluence, il est nécessaire de dissuader les électromobilistes de recharger à faible puissance sur les bornes rapides. Plusieurs pistes à suivre existent. En voici déjà 3 !

Tout d’abord, de façon éducative, ce point doit être clairement indiqué sur la borne ou à son immédiate proximité.

Ensuite, le matériel doit être capable de gérer la situation. Si une seule voiture est présente, la recharge peut éventuellement se poursuivre jusqu’à son terme. Si un ou plusieurs autres véhicules supplémentaires sont détectés – soit grâce à des dispositifs au niveau du chargeur, soit parce que des usagers auront manifesté leur intention de brancher leur VE –, l’infrastructure prévient de l’imminence d’un arrêt de l’opération, puis coupe le courant et libère physiquement la connexion après dialogue protocolaire avec l’engin concerné.

La balle est aussi dans le camp des constructeurs. Certains ont très bien fait les choses en stoppant la recharge après 80 ou 90 % environ d’énergie dans la batterie. C’est ce schéma que toutes les marques doivent adopter, en permettant éventuellement une relance si personne d’autre n’est en attente.

Cas des utilisateurs professionnels locaux

De plus en plus de professionnels optent pour des voitures et utilitaires légers électriques. Certains n’ont cependant pas de locaux pour les garer et les recharger. Ils exploitent donc naturellement les réseaux de recharge autour d’eux. Ce sont par exemple des agences de location de véhicules ou des sociétés de livraisons urgentes.

Ils ont raison de migrer leurs flottes à l’électrique. Imaginez cependant l’impact sur une zone desservie par une ou deux bornes rapides fréquentées chaque jour ne serait-ce que par 10 ou 20 véhicules électriques de professionnels équipés de batteries de capacité énergétique supérieure à 50 kWh. Pour eux, la collectivité se doit de répondre rapidement à leur besoin en ajoutant un chargeur où ils seraient prioritaires.

Des territoires ont parfois proposé à des particuliers l’installation d’une borne à la demande, sans trop se presser de répondre aux besoins exprimés. Concernant les professionnels, il apparaît clairement nécessaire d’agir vite. À défaut, le risque est d’opposer les communautés d’usagers entre elles et de les dissuader, au final, dans leur passage à l’électrique. Trop de temps déjà perdu !