Photo : Pixabay

 

Nous vous lannoncions lundi : les eurodéputés allaient débattre des objectifs européens de réduction des émissions de CO2 des voitures et des utilitaires légers. Le vote a eu lieu lundi soir. Par une courte majorité, les eurodéputés se sont prononcés pour des objectifs plus ambitieux que ceux proposés par la Commission Juncker.

« Pourquoi est-ce que les fabricants européens devraient investir sept fois plus à l’extérieur de l’Union européenne qu’ils ne le font à l’intérieur ? Pourquoi devons-nous toujours attendre les Chinois … Ce sont les Chinois aujourd’hui qui investissent le plus dans l’industrie automobile en Europe. Pourquoi est-ce que nos propres fabricants d’automobiles ne sont pas capables d’investir en Europe ? » C’est par ces mots très durs, adressés sans aucun doute à l’ACEA, l’Association des Constructeurs Automobiles Européens, que Miriam Dalli, rapporteur de la commission Environnement du parlement européen a introduit la conférence de presse annonçant les résultats du vote. Pour rappel, l’ACEA avait exercé ces derniers jours un lobbying intense auprès des eurodéputés, en invoquant notamment des menaces sur l’emploi pour qu’ils n’adoptent pas des objectifs trop contraignants.

La manœuvre n’a pas vraiment réussi. La Commission européenne présidée par Jean-Claude Juncker avait proposé des objectifs peu ambitieux de réduction de 15 % des émissions de CO2 des voitures d’ici 2025 et de 30 % d’ici 2030. Mais les élus européens se sont prononcés respectivement pour 20% et 45% de réduction. Les parlementaires ont également fixé un quota de vente de 40 % de véhicules “propres” en 2030 (électriques ou hybrides rechargeables).  Un objectif intermédiaire de 20 % en 2025 est mentionné.
Le texte prévoit en outre des pénalités pour les constructeurs si ces objectifs ne sont pas atteints. Des mesures sont également prévues pour éviter que les constructeurs ne manipulent les tests. Pour donner un objectif à plus long terme à l’industrie, les eurodéputés se sont aussi accordé sur la proposition de ne plus vendre en Europe que des voitures à « émission zéro » à partir de 2040.

Le vote sur ce paquet de mesures, obtenu par une majorité de 38 voix pour la proposition, 23 contre et 7 abstentions, a départagé l’alliance des partis de gauche, des libéraux et des écologistes d’un côté, qui réclamaient des objectifs ambitieux, et de l’autre côté, les conservateurs soucieux des intérêts économiques des constructeurs automobiles.

Miriam Dalli : “Pourquoi devons-nous toujours attendre les Chinois ? Pourquoi est-ce que nos propres fabricants d’automobiles ne sont pas capables d’investir en Europe ?”

« Ce vote est une étape importante pour notre environnement, notre climat, la santé de nos citoyens et l’emploi de nos travailleurs » s’est félicitée Miriam Dalli lors de la conférence de presse au cours de laquelle elle a commenté ce vote historique. « Nous avons de toute évidence besoin d’un ensemble de technologies comme les voitures électriques ou hybrides et les piles à combustible pour alimenter nos véhicules en énergies propres, tout en attirant des investissements et en créant des emplois dans l’Union européenne pour renforcer la compétitivité de nos industries et pour le bien des citoyens » a-t-elle encore ajouté.

L’organisation Transport & Environment qui fédère les associations européennes actives dans la défense de l’environnement et la promotion des transports durables s’est réjouie de ce vote. Pour sa directrice Julia Poliscanova, «les eurodéputés ont fait ce que la Commission n‘a pas réussi : proposer des réductions de CO2 ambitieuses et empêcher les fraudes lors des essais pour que ces réductions ne soient pas seulement effectives dans les labos, mais aussi sur les routes».

Les constructeurs, par contre, ne sont pas heureux, c’est le moins qu’on puisse dire. “Ce vote ne tient pas compte des réalités techniques et économiques. Les objectifs proposés ne seront pas réalisables sur une si courte période” a  déjà prévenu Bernhard Mattes, président de l’Association allemande de l’industrie automobile (VDA). Michael Brecht, directeur du comité d’entreprise de Daimler est du même avis : “Nous voudrions tous conduire sans polluer. Mais 45 % de réduction comme l’exige le parlement européen, c’est un objectif trop ambitieux et inaccessible” a-t-il déclaré à nos confrères du magazine Automobilwoche.

Ce vote de la commission Environnement du parlement n’est toutefois qu’une première étape. S’il devrait normalement être confirmé lors de la session plénière à Strasbourg en octobre, il faudra aussi, pour qu’il se transforme en législation contraignante, que le Conseil des ministres de tous les Etats membres se prononce également en faveur de ces mesures. Et là, la partie est loin d’être gagnée.

Vidéo de la conférence de presse de Miriam Dalli

Le communiqué de Transport & Environment