Les 150 citoyens tirés au sort et constitués en assemblée dès octobre dernier viennent de remettre leurs propositions qui visent à lutter contre le réchauffement climatique avec « un esprit de justice sociale ». Voici les principales concernant le volet mobilité.

Constat chiffré

En France, les déplacements des personnes et le transport des marchandises pèsent 30% des émissions de gaz à effet de serre. C’est le groupe des voitures individuelles qui a le plus fort impact sur le sujet (52%) dans cette part, suivi par les poids lourds et les utilitaires (19% chacun). Pour comparaison, les vols intérieurs ne représentent que 4%.

Retoucher les habitudes de mobilité n’est pas simple, entre les bonnets rouges qui se sont opposés il y a quelques années aux mesures sur le fret, comme l’ecotaxe poids lourds, et les gilets jaunes nés sous la conjonction des hausses de la taxe carbone et du cours du pétrole. Voilà pourquoi Emmanuel Macron a mis en place une assemblée citoyenne.

Un parc de véhicules plus vertueux

Afin d’accélérer le renouvellement du parc français roulant vers un mix plus vertueux, les citoyens proposent différentes actions qui visent à agir sur la réglementation.

Tout d’abord en déplaçant les curseurs du bonus et du malus. Le premier serait plus conséquent pour les modèles peu polluants afin d’aider davantage les ménages et les professionnels à les adopter. Le malus pèserait plus lourd pour les véhicules les plus émissifs, le poids s’ajoutant en critère pour son calcul. Ces derniers ne seraient plus commercialisés neufs dès 2025, selon la convention citoyenne.

Les garagistes seraient soumis à un plan de formation destiné à leur faire acquérir les compétences nécessaires pour accompagner cette évolution de la flotte nationale.

Assurance et financement

Encourager l’acquisition de véhicules plus vertueux passerait aussi par des primes d’assurance les favorisant, et ce, en jouant au niveau des taxes perçues sur les contrats.

Le financement de ces engins serait facilité en développant la location de longue durée et un système de prêts à taux zéro, avec la garantie de l’Etat sur les modèles à la fois les plus légers et les moins chers.

Une vignette verte à apposer sur les plaques d’immatriculation des véhicules les plus propres permettrait de les distinguer et de leur réserver des accès aux centres-villes (interdits aux engins les plus polluants), des places de parking, etc.

Réduire l’utilisation de la voiture en solo

Toutefois les 150 citoyens souhaitent une réduction massive de l’usage en solo des voitures individuelles. Pour cela, ils proposent de revoir le système d’indemnité kilométrique de l’impôt sur le revenu pour ne plus favoriser ce scénario, et d’inciter à l’utilisation des moyens de transports doux ou partagés. Les trajets domicile-travail sont particulièrement visés, avec l’idée de généraliser et améliorer le forfait mobilité durable prévu par la récente loi d’orientation des mobilités.

Un aménagement de l’espace public aiderait à développer des déplacements multimodaux plus doux, notamment avec la création de parkings relais en périphérie et de pôles échangeurs (lien entre les trains, autocars, voitures, vélos, etc.), associés à la création de nouvelles pistes cyclables, de voies réservées aux véhicules partagés et aux transports collectifs sur les voies rapides et autoroutes.

Sur ces dernières, la vitesse maximale descendrait à 110 km/h. Le covoiturage, au côté du ramassage par bus et de l’usage du vélo, serait davantage favorisé dans les plans de mobilité qui deviendraient obligatoires pour toutes les entreprises.

Fret

Plusieurs mesures touchent aux transports routiers et maritimes du fret. Concernant les poids lourds : aider davantage le financement pour l’achat de modèles neufs plus vertueux grâce à une sortie programmée des avantages fiscaux sur le gazole, pousser les constructeurs vers une même filière énergétique pour plus de résultats concrets et rapides à mettre en place après les phases de R&D, imposer une formation suivie des chauffeurs à l’écoconduite.

Des incitations réglementaires et fiscales permettraient un report partiel de l’acheminement des marchandises vers des solutions moins lourdes pour l’environnement et la santé publique. En outre une modulation de la TVA favoriserait les circuits courts.

Et pour les transports à longues distances, les 150 citoyens envisagent la création d’autoroutes maritimes et fluviales sur certains trajets, l’interdiction des moteurs polluants lors des arrêts dans les ports, des contraintes sur les émissions de CO2 des navires, et l’équipement des quais pour la recharge des batteries des modèles électriques ou hybrides.

Avis de l'auteur

Après avoir travaillé pendant 8 mois, les 150 citoyens ont donc transmis leurs propositions en espérant qu’Emmanuel Macron leur donne la suite promise. Le calendrier prévoit qu’il apporte de premières réponses lundi 29 juin prochain.

Surpris par certaines mesures délicates dont l’adoption apparaît nécessaire, il doit pourtant se prononcer dans un contexte qui a fortement changé à la suite de la crise sanitaire du Covid-19, les difficultés économiques qui en ressortent, et le lourd saupoudrage d’aides financières pour en gommer les angles.

Nombre des propositions de l’assemblée n’appellent cependant pas à de lourds investissements, et d’autres même, comme le nouvel équilibrage du bonus/malus, porte en elles une solution de financement à étudier et adapter.

Le chef de l’Etat pourrait considérer que la revalorisation du bonus début juin et l’assouplissement de la prime à la conversion répondent déjà aux demandes. Sauf qu’il ne serait plus question de ne les envisager que sur un terme réduit.

Quoi qu’il en soit, la réduction du CO2 et des polluants émis par les déplacements laisse concrètement entrevoir un chantier très large à poursuivre dont ont conscience les citoyens tirés au sort. Et pour les autres ? Faire intervenir dans les réflexions une assemblée de citoyens suffira-t-il à emporter l’adhésion de la communauté des Français ?

Qu’en pensez-vous, lecteurs d’Automobile Propre ?