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Répondant à la Directive européenne AFI, la France vient de présenter son projet de cadre d’action national pour le développement des carburants alternatifs. Si elle pouvait saisir l’occasion pour montrer des ambitions fortes, l’administration française se contente d’une vision très académique et totalement déconnectée de la réalité.

Quelle stratégie française pour le déploiement des infrastructures de ravitaillement pour les carburants alternatifs ? Voici la question posée par le Directive européenne AFI, adoptée en 2014, qui impose à chaque état membre de rendre sa vision d’ici au 18 novembre 2016. C’est donc avec du retard que la France vient de présenter un premier projet soumis à une consultation publique jusqu’au 14 décembre dans laquelle elle se contente de donner une vision à la fois très académique et très prudente vis-à-vis des différentes filières.

Voiture électrique : 21000 à 35000 points de charge d’ici fin 2020

Encore une fois, c’est l’électrique qui s’en tire le mieux. A grands renforts de statistiques et de calculs savants qui ne semblent pas forcément tenir compte des réalités de terrain et des besoins des territoires et des électro-mobilistes, le texte estime le « nombre approprié de points de recharge ouverts au public »  dans une fourchette située entre 21 000 à 35 000 points de recharge (sur l’hypothèse de quatre par station) d’ici la fin 2020. Un chiffre qui tient compte des 14 360 points de recharge publics déjà ouverts au 16 septembre 2016.

Certes, les ambitions sont là mais le tout n’est pas de savoir combien mais comment. Dans son dossier, le gouvernement se garde bien de préciser la répartition entre bornes dites normales, accélérées et rapides pourtant essentielle aux yeux des électro-mobilistes…

Surtout, le texte ne semble pas tenir compte des retours d’expérience de territoires précurseurs. « La nouvelle politique est d’en installer moins mais mieux » nous expliquait il y a quelques Pascal Houssard, directeur du syndicat d’énergie de la Vendée, militant pour le choix d’emplacements stratégiques plutôt que sur du saupoudrage.

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Développement des points de charge ouverts au public d’ici à fin 2020

Gaz naturel : des objectifs à côtés du marché

Portée par l’AFGNV, l’association française du gaz naturel pour véhicules, la filière avait pourtant bien préparé son dossier, présentant en mars dernier une proposition de déploiement 2020-2025 avec des objectifs en phase avec les perspectives du marché, notamment dans le domaine du transport lourd où le GNV connait un fort engouement.

Un dossier dont l’administration semble ne pas avoir tenu compte, reprenant ses méthodes statistiques pour estimer le « nombre approprié » de stations GNV à 140 à l’horizon 2025, dont 25 distribuant du Gaz Naturel Liquéfié (GNL). Un chiffre loin des 250 stations préconisées par la filière pour fin 2020.

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Le déploiement des stations GNC en France à l’horizon 2025

Une approche prudente sur l’hydrogène

Sur l’hydrogène, l’approche est encore plus prudente. Alors que la France compte 11 stations en 2015 – dont 8 à 350 bars et 3 à 700 bars – le cap est fixé à 30 stations d’ici à 2025, voire 50 selon le développement de la filière.

Point étonnant : le rapport préconise le déploiement de stations à 350 bars, jugées plus économiques, alors que le standard international est fixé à 700 bars. « Les véhicules roulant à 700 bars peuvent également se recharger dans les stations 350 bars (auquel cas le taux de remplissage du réservoir est de 60 à 70%) » tente de rassurer le document. Les quelques conducteurs de Toyota Mirai apprécieront.

Au final, on ne peut que regretter que la France soit passée complètement à côté des ambitions de la Directive européenne. En incitant chaque état membre à mener une réflexion sur les carburants alternatifs dans leur globalité, celle-ci souhaitait à la fois rassurer investisseurs et industriels quant aux perspectives des différentes filières. Et si le texte français reste soumis à consultation publique jusqu’au 14 décembre, il y a peu d’espoirs de voir des changements importants sur le fond du dossier.

Pour celles et ceux qui veulent consulter l’intégralité du dossier, c’est ici que cela se passe...