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Le Salon de l’Auto de Shanghai était beaucoup plus qu’un salon automobile.
Le Salon automobile de Shanghai, de son vrai nom Auto Shanghai 2025, vient de fermer ses portes, et nous avons largement couvert cet évènement, y compris sur place.
Vous avez remarqué le paradoxe ? À une époque ou, depuis quelques années, il est devenu commun d’affirmer que les salons automobiles sont un truc qui appartient au passé, notamment en raison de l’émergence du digital et de la défiance des jeunes générations pour la bagnole, à une époque où tous les grands salons historiques sont en difficulté, quand ils ne jettent pas tout simplement l’éponge, Shanghai a réussi un défi fou : faire planer un nouveau vent de fraicheur sur le secteur. Et surtout, faire de nouveau d’un salon automobile un évènement tendance, attirant un public nombreux, et massivement relayé dans les médias.
À lire aussiSalon de Shanghai : ces cinq nouveautés électriques qu’on aimerait avoir chez nousAu-delà des nombreuses annonces faites sur place, au-delà des chiffres assez impressionnants de ce show qui a mis des étoiles dans les yeux de tous les visiteurs et de tous les amateurs de belles mécaniques, pardon, électriques, il y a certainement quelques leçons à tirer de ce qui est devenu The place to be en matière d’automobile. Et elles ne sont pas forcément flatteuses pour nous autres occidentaux, tant elles en disent long sur le décalage grandissant entre la Chine et ses principaux challengers, l’Europe et les États-Unis. Retour sur un salon qui, par son ampleur et son approche, dépasse largement le cadre de l’automobile.
Car il faut bien le dire, les salons automobiles ne se portent pas pour le mieux, et plus particulièrement depuis le Covid, qui semble — ou semblait — avoir porté un coup fatal à ce type de grand-messe. C’est d’abord celui de Genève, pourtant réputé comme l’un des plus importants et qualitatifs du monde, qui en a fait les frais en disparaissant purement et simplement après une velléité de retour en 2024, puis en s’expatriant pour une version édulcorée au Qatar, après que l’édition 2024 eut attiré seulement 120 000 visiteurs. Le Salon de Detroit, l’un des plus anciens, ne s’est lui non plus jamais vraiment remis du Covid, mais aussi de sa proximité de calendrier avec le très médiatique CES, où de nombreux constructeurs automobiles ont préféré migrer en ces temps où les technologies digitales ont littéralement transformé l’automobile. Je me souviens d’ailleurs qu’il y a seulement quelques années, avant Covid, mon billet pour les USA de début janvier me permettait de couvrir les deux salons quasiment dans la même semaine, avec juste un vol Vegas Detroit au milieu du séjour (et au passage de subir un choc thermique de plus de 30 degrés d’amplitude entre le désert du Nevada et le blizzard du Michigan, seulement séparés de quatre heures de vol).
Mais la disparition la plus marquante est certainement celle du plus grand salon du monde, celui de Francfort, qui se tenait en alternance avec Paris, et qui a rendu les armes au profit de Munich, beaucoup moins grandiose, et organisé de façon différente avec des stands décentralisés au cœur de la ville. Quant au Mondial de l’Auto de Paris, il semble avoir quand même avoir repris quelques couleurs avec une édition 2024 assez réussie, qui avec un peu plus de 500 000 visiteurs, semble garantir sa pérennité pour 2026, même si l’essentiel de son actualité a été fait par les marques… chinoises. Il convient cependant de relativiser, puisque au meilleur de sa forme en 2014, ce salon attirait 1,5 million de visiteurs. Une assistance qui a donc été divisée par trois en dix ans. Le salon de Tokyo, quant à lui, ne se porte encore pas trop mal en termes de fréquentation, mais n’est plus vraiment synonyme d’innovation ni d’excitation, et sa couverture médiatique par ici est restée très discrète. Restent New York et Los Angeles, qui semblent se maintenir contre vents et marées, sans grandes annonces cependant.
À l’opposé de ce tableau en demi-teinte, Auto Shanghai 2025 a coché toutes les cases d’un succès incontestable. Si l’on se penche un peu sur les chiffres, ils ont de quoi faire pâlir d’envie les organisateurs de salons européens et américains puisqu’il a accueilli près de 1 000 exposants répartis dans 13 halls, dont 8 dédiés à la voiture individuelle. Des marques venues du monde entier pour satisfaire plus d’un million de visiteurs, même si de nombreux constructeurs européens, coréens et américains n’avaient pas jugé utile de faire le déplacement, en raison probablement d’un contexte économique morose.
Mais, au-delà des chiffres, ce sont surtout le contenu et la méthode qui retiennent l’attention. Dans un pays à la population jeune, où les réseaux sociaux sont tellement implantés dans les moindres détails de la vie quotidienne, et où les influenceurs pèsent pour certains des millions d’euros, les marques chinoises n’ont pas lésiné sur les budgets pour faire venir médias, youtubeurs et instagrameurs du monde entier, y compris des USA où elles sont quasiment inexistantes. Un investissement sur l’avenir, probablement.
Un BYD aurait par exemple à lui seul accueilli quelque 300 journalistes et influenceurs venus du monde entier – incluant notre collègue Soufyane – dont 150 de différents pays d’Amérique latine, un marché clé pour le constructeur. De leur côté, Zeekr ou encore MG ont organisé une série d’événements fastueux dans des hôtels haut de gamme pour présenter leurs nouveautés. Officiellement, peu de chiffres circulent, mais la présence massive de journalistes étrangers n’est pas vraiment passée inaperçue, d’autant que cette ouverture aux médias étrangers tranche avec les restrictions habituelles sur les accréditations en Chine. Entre vidéos léchées sur YouTube, stories Instagram et publications en rafales, le rôle des créateurs de contenus devient central dans la stratégie de communication des marques chinoises. Forrest Jones, créateur américain suivi par 3,2 millions d’abonnés, était présent sur le rooftop du Fairmont Peace Hotel pour un événement organisé par Zeekr. Résultat, ses vidéos sur les modèles chinois cumulent des centaines de milliers de vues. Mieux qu’une pub traditionnelle ou qu’un essai presse à l’ancienne. Ou, en tout cas, complémentaire.
Les équipementiers ne sont pas en reste dans ce jeu de l’influence sociale, même si présenter une technologie de batterie est sûrement moins sexy qu’un tour en Xiaomi SU7. CATL, principal fabricant mondial de batteries pour véhicules électriques, a lui aussi organisé son propre “Tech Day” à Shanghai. L’événement s’est tenu dans un entrepôt réaménagé, où des centaines d’influenceurs ont pu découvrir les dernières innovations de l’entreprise.
Autant de créateurs devenus, parfois malgré eux, de véritables ambassadeurs des marques qui les ont invités, ces dernières ayant bien compris qu’un post sur Insta ou une petite vidéo bien placée sur YouTube peut apporter une visibilité énorme, et agit davantage pour leur image que des communiqués de presse à la papa envoyés à des médias traditionnels parfois un peu blasés. Ajoutez à cela quelques retransmissions en direct, des live de lancement bien ficelés attirant des millions d’internautes, et des exposants dépassant le strict cadre de l’automobile pour en faire aussi un salon Tech, et vous avez la recette d’un succès prévisible. Il suffit d’ailleurs de jeter un œil sur le nombre d’occurrences des termes relatifs à cet évènement sur Google ou sur les outils d’analyse d’impact sur les réseaux sociaux pour en saisir l’ampleur.
Technologie, influence, buzz et actualité non-stop… C’est ainsi qu’avance le soft power de l’Empire du Milieu. L’édition 2025 du salon de Shanghai en fut l’éclatante démonstration, sinon le symptôme.
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