Plusieurs facteurs vont influer sur une baisse des prix des voitures électriques. Si l’on pense immédiatement à une diminution du coût de production des batteries de traction, on imagine en revanche moins spontanément que la récente feuille de route adoptée par le Parlement européen en matière d’émissions de CO2 pour les voitures neuves pourrait avoir des effets de bord inattendus et plus rapides.

95 grammes par kilomètre

Les objectifs à tenir par les constructeurs européens pour leurs gammes de voitures particulières sont des plus contraignants : une moyenne de 95 grammes de CO2 par kilomètre au maximum pour 2021, 81 g/km pour 2025 et 59 g/km pour 2030.

En avril dernier, Matthieu Lauraux révélait ici des calculs de Jato Dynamics qui montrent clairement que les habituels groupes présents sur les marchés européens de l’automobile ne sont pas aujourd’hui en mesure de tenir les 95 g/km de CO2. Certains en sont très éloignés, et parmi eux, des régressions ont été constatées en 2018 par rapport aux résultats 2017 !

Des mauvais élèves constructeurs de voitures électriques

Dans le classement, c’est Toyota qui apparaît comme le meilleur élève (101,3 g/km de CO2) grâce à une gamme de plus en plus large de modèles hybrides, suivi de Nissan (112,9 g/km de CO2) comme représentant des constructeurs embarqués depuis des années dans un programme de développement de voitures électriques à batterie de traction. Ces 2 groupes japonais affichent cependant une augmentation respective de leur moyenne de 1 et 3 grammes par kilomètre.

Derrière, les tendances sont plus inquiétantes, avec également des hausses parmi les industriels qui communiquent pourtant abondamment sur leurs futurs modèles électriques : Renault (113,2 g/km de CO2, en augmentation de 3,4 g/km de CO2), Volkswagen (121,2 g/km de CO2, +0,2 g/km de CO2), BMW (127,1 g/km de CO2, +6,5 g/km de CO2), Daimler (134,3 g/km de CO2, +9,2 g/km de CO2).

L’exception qui rappelle la marche à suivre

Pour beaucoup, l’exception Tesla apparaîtra insolente, seul constructeur de la liste à satisfaire déjà aux exigences de l’Union européenne, bien au-delà de la feuille de route adoptée à échéance 2030. Et pour cause, sa moyenne est à 0 g/km, du fait qu’il ne produit que des voitures électriques, et que l’institution ne s’intéresse qu’au CO2 libéré à l’échappement lors de l’utilisation des véhicules.

En comparant tous ces chiffres alignés par Jato Dynamics, on ne peut que se rappeler de l’attitude des constructeurs allemands et américains, il y a une dizaine d’années, quand Tesla a affiché ses premières ambitions avec son roadster. Aujourd’hui, le boss de Palo Alto semble leur rappeler que pour tenir les chiffres, il va falloir produire en urgence des voitures électriques. Les produire, oui, mais surtout les vendre !

Ca bouge chez les constructeurs

On comprend mieux certaines annonces et certaines précipitations.

Très mal placé et dans l’incapacité de s’en sortir rapidement seul après des années à faire l’autruche, le groupe Fiat Chrysler Automobiles cherche à se fondre dans un autre, accueillant, et surtout ayant sérieusement amorcé le virage vers la mobilité électrique.

Pas franchement mieux loti, Ford frappe à la porte de Volkswagen qui semble, lui, s’activer dans l’urgence pour rattraper son retard. Non pas un retard pour entrer sur le marché du véhicule électrique, mais un retard pour séduire les automobilistes avec une offre salivante et accessible. Du coup, les marques Skoda, Seat et Volkswagen cherchent déjà à se réserver des parts de marché avec des annonces alléchantes en termes de prix et d’autonomie.

Quant à Mercedes, comment dire…

Produire et vendre

A force de rendre le marché du véhicule électrique flou pour les automobilistes, nombre de constructeurs n’ont fait qu’accumuler du retard chez eux et de différer le report des ventes en voitures neuves sur les modèles branchés. Résultat : la courbe commerciale voit s’éloigner celle des objectifs à tenir à court terme sous la pression de l’UE.

Afin d’échapper aux milliards d’euros d’amendes à acquitter auprès des instances européennes, il va falloir en vendre des voitures électriques, et rapidement imprimer la bonne tendance aux marchés ! Et c’est là que le consommateur pourrait y gagner.

Baisse des prix

Deux ans, c’est trop court pour faire changer d’avis les clients européens sur la mobilité électrique, surtout quand dans les concessions et les communications officielles le genre VE a été plus ou moins dénigré. A ce jeu, Daimler et Peugeot risquent bien de regretter certains discours encore récents, voire même présents.

De nombreux constructeurs vont être soumis à un choix : payer des milliards d’amendes à l’Europe, ou rogner drastiquement sur les marges, voire vendre à perte, des voitures électriques. Comme ça a déjà été le cas en 2012 pour PSA qui a dû brader ses Citroën C-Zero et Peugeot iOn.

Il apparaît déjà qu’il sera sans doute plus judicieux et moins coûteux pour beaucoup d’industriels concernés de baisser de façon importante le prix des voitures électriques, avant même que la diminution du coût de fabrication des batteries le permette.

Attendre 2022 pour acheter un véhicule électrique ?

Cette prévision, Automobile Propre n’est pas seul à la faire. Enseignant en économie du secteur automobile à l’université de Duisburg-Essen (Allemagne), Ferdinand Dudenhöffer exprime exactement le même point de vue dans un article publié sur le Web.

Attendre 2022 pour acheter un véhicule électrique serait-il un scénario à privilégier ? Tout dépend surtout de la priorité que l’on accorde à l’environnement et à la santé publique, et d’un projet d’achat en voiture neuve éventuellement déjà programmé. Pour ceux, pas pressé de changer d’engin, qui aiment le jeu et spéculer, ça se tente forcément !