Le très attendu projet de création d’un géant européen de la batterie a été officiellement lancé le 2 mai à Paris. Appuyée par des fonds publics et privés, l’initiative verra dans un premier temps la création de trois usines dès 2020 en France et en Allemagne. Une filière complète qui devra assurer l’extraction des matières premières, la production des cellules, leur intégration aux voitures électriques et leur recyclage. A la clé : des milliers d’emplois et l’indépendance vis-à-vis des fabricants asiatiques et américains.

Rouler avec une voiture électrique française embarquant des batteries françaises ? Ce sera très bientôt possible, avec la concrétisation du projet d’Airbus de la batterie. Jeudi 2 mai à Paris, le ministre de l’économie et des finances Bruno Le Maire a déclaré « lancer définitivement une filière industrielle européenne des batteries de 4e génération ». Une initiative incontournable pour garantir l’indépendance et la souveraineté économique et technologie de l’Europe. « Elle n’est pas condamnée, contrairement à ce qui disent certains, à dépendre des importations technologiques venues des deux grandes puissances que sont les États-Unis et la Chine » a expliqué le ministre.

Feu vert aux subventions publiques

A ses côtés, le vice-président de la commission européenne Maros Sefcovic a confirmé le principe de l’intérêt stratégique du projet. L’institution autorise donc les États à verser des subventions sans contrevenir à la réglementation sur les aides d’État et la concurrence. Un statut de « PIIEC » (Projet important d’intérêt européen commun ) qui donne un grand feu vert aux différentes initiatives.

La première, portée par la France et l’Allemagne représentée par son ministre de l’économie et de l’énergie Peter Altmaier, doit voir le jour dès 2020. Une usine pilote sera créée en France d’ici quelques mois et générer 200 emplois. Deux autres, en France et en Allemagne embaucheront au moins 1500 personnes chacune. La filière devra intégrer « l’extraction des minerais, la réalisation des cellules, la réalisation des batteries, leur intégration aux voitures et le recyclage des batteries » a expliqué Bruno Le Maire.

Coût total de 5 à 6 milliards d’euros

D’un coût total estimé entre 5 et 6 milliards d’euros, ce projet sera financé à hauteur de 1,2 milliard d’euros par des fonds publics et 4 milliards d’euros par le privé. Plusieurs acteurs auraient déclaré leur intérêt dont le fabricant de batteries Saft détenu par Total et le groupe PSA ainsi que sa filiale Opel. La France s’est engagée à verser 700 millions d’euros. Des fonds structurels européens pourront également compléter l’enveloppe. Jusqu’en « 2022-2023 » les usines produiront des batteries « liquides améliorées », une technologie actuellement utilisée dans les voitures électriques. Elles devront ensuite assembler des batteries « solides » à l’horizon 2025-2026, dont la densité énergétique est plus élevée, plus stables et plus sûres notamment face au risque d’emballement thermique.

Le projet franco-allemand a vocation à s’élargir à d’autres pays d’Europe. L’Italie, la Belgique, la Pologne, l’Autriche et la Finlande ont déjà manifesté leur souhait de l’intégrer. Ils devront toutefois engager des fonds publics pour l’implantation de sites de production sur leur sol. Au total, le projet aurait reçu « 35 réponses positives, y compris de grands producteurs automobiles » selon Peter Altmaier.

Une logique de consortiums

Jusque-là baptisé « Airbus des batteries », le projet n’est pas vraiment comparable puisqu’il ne s’agira pas de créer une seule entité mais des consortiums. Les industriels à l’origine de l’initiative seront multiples et contribueront librement à différents niveaux. Plusieurs projets transnationaux pourraient donc voir le jour par la suite. Ils recevront « un feu vert avant la fin du mandat de la Commission européenne, soit avant le mois d’octobre prochain » a assuré Maros Sefcovic.

Si les initiatives européennes fonctionnent, elles permettront d’équilibrer la répartition de la production mondiale de batteries au lithium. Seul 1% de cette production provient actuellement de l’Union européenne. Le reste est partagé entre la Chine, le Japon, la Corée du Sud et les États-Unis.