Vice-président du département missionné pour développer les groupes motopropulseurs des véhicules électriques BMW, Stefan Juraschek a répondu à une douzaine de questions sur le programme branché du constructeur qu’il représente.

150.000 véhicules rechargeables en 2018

Lorsque l’on pose la question à Stefan Juraschek d’un coup de frein de l’activité de BMW en raison du développement des véhicules électriques et hybrides rechargeables, il se réjouit de pouvoir assurer que c’est tout le contraire, chiffrant : « Les ventes ont dépassé la barre des 100.000 l’an dernier et auront augmenté d’environ 50% cette année » pour ces modèles.

Il rappelle 2 points importants : Tout d’abord que «  BMW a joué un rôle de pionnier avec BMW i », et que le groupe « est aujourd’hui le fabricant haut de gamme proposant la plus large gamme de véhicules électriques à batterie et hybrides rechargeables ». Il détaille : « Nous produisons actuellement les modèles électrifiés suivants : BMW i3 (troisième évolution du modèle avec des cellules 120 Ah), BMW i3s, BMW i8 Coupé, BMW i8 Roadster, BMW 740e, BMW 740Le, BMW 530e, BMW 225xe Active Tourer, Mini Cooper SE Countryman ALL4 et, en Chine, la BMW X1 xDrive25Le ».

A cette liste vont s’ajouter en 2019 « de nouvelles variantes hybrides rechargeables des berlines Série 3 et BMW X5, à la suite de l’arrivée de nouvelles générations de ces modèles ». A horizon 2025, les gammes hybrides rechargeables du groupe BMW devraient compter 13 modèles différents, à ajouter à 12 voitures 100% électriques.

Stefan Juraschek a répondu à une douzaine de questions sur le programme de BMW en matière de mobilité électrique

Intégré

Stefan Juraschek confirme que le groupe BMW est prêt pour un développement massif du marché branché. Il s’appuie sur plusieurs points qui lui permettent d’être particulièrement affirmatif. Tout d’abord : « Le groupe BMW développe déjà sa cinquième génération de systèmes de propulsion électrique, ce qui signifie qu’il a créé une excellente base pour l’avenir. Cette dernière génération entrera en service dès 2020 sur la BMW iX3 ».

L’interviewé dégage un avantage majeur de cette nouvelle génération de groupe motopropulseur : « Le moteur électrique, la transmission et l’électronique de puissance forment désormais un composant de commande électrique hautement intégré. Cet appareil extrêmement compact prend beaucoup moins de place que les trois composants distincts utilisés dans les générations précédentes. Sa construction modulaire lui confère également une évolutivité lui permettant d’être modifié pour s’adapter aux différents espaces d’installation et à la diversité des besoins en énergie ».

Idem pour les batteries, « évolutives et encore plus puissantes », qui, du fait de leur modularité en blocs, pourront « être intégrées de manière flexible à toutes les architectures de véhicules ». A cela s’ajoutera un chargeur embarqué DC/DC.

Tous ces éléments vont permettre à BMW d’être particulièrement réactif à la demande du marché, pouvant « électrifier partiellement ou totalement chaque modèle » du groupe.

Risque d’approvisionnement en matières premières

Concernant les matières qui entrent dans la composition des batteries de traction, Stefan Juraschek se veut rassurant : « Nous ne voyons aucun risque d’approvisionnement, même en cas de demande croissante de cellules de batterie. Mes collègues des achats ont assuré un approvisionnement fiable avec des contrats à long terme. Nous avons également développé une expertise interne en matière de cellules de batterie au cours de projets communs avec des partenaires internationaux tout au long de la chaîne de valeur. Ceci est utilisé pour assurer l’accès à la technologie et pour sauvegarder les fournitures. Dans le même temps, nous nous efforçons également de réduire progressivement la proportion de matières premières critiques utilisées. Par exemple, l’un des objectifs clés de nos activités de recherche et développement est de parvenir à une réduction substantielle de la proportion de cobalt dans les cellules de batterie ».

Et concernant le moteur électrique ? Celui qui est monté avec « notre groupe motopropulseur électrique de cinquième génération » est « totalement dépourvu de terres rares ».

Concurrence asiatique

Les fabricants de cellules de batterie chinois, japonais et coréens inquiètent-ils BMW ? A nouveau, Stefan Juraschek est catégorique sur ce sujet : « Nous ne considérons aucun de nos concurrents avoir un avantage sur nous en matière de technologie de batterie. Lorsque toutes les caractéristiques sont considérées ensemble, elle est égale ou supérieure à celle de la concurrence. Nous travaillons sur la question des cellules de batterie depuis 2008 et nous sommes aujourd’hui en position de force grâce, entre autres, à un réseau international de collaborations. Pour nous, il est important de continuer à développer notre expertise interne et à faire progresser la technologie des cellules de batterie », rappelle-t-il.

« De plus, la construction de prototypes de cellules de batterie et la production de petits lots nous permettent d’analyser en profondeur les processus de production et d’acquérir des capacités de fabrication d’après modélisation. Ainsi, nous pouvons transmettre aux fournisseurs des instructions précises basées sur les spécifications du groupe BMW, depuis la sélection des matériaux jusqu’à la production des cellules », souligne l’interviewé.

Cycle de vie complet

Et même au-delà, puisque le constructeur s’intéresse avec Northvolt et Umicore au devenir des batteries qui ne sont plus exploitables pour la mobilité électrique du fait d’une baisse substantielle de leurs capacités énergétiques. « Les cellules de batterie doivent d’abord remplir leur rôle principal dans les voitures électriques le plus longtemps possible. Une fois leur cycle de vie terminé, elles pourraient être utilisées dans des dispositifs stationnaires de stockage d’énergie. Enfin, les cellules sont recyclées et les matières premières réutilisées, complétant ainsi une boucle », explique le responsable de GMP électrique chez BMW.

En ce qui concerne la seconde vie des batteries de traction, BMW a déjà acquis une grande expertise. « Pour le groupe BMW, l’utilisation de batteries usagées en tant que dispositifs stationnaires de stockage d’énergie est une étape logique vers la durabilité globale. Elle devrait gagner beaucoup en importance avec la révolution énergétique en cours. Lorsque le surplus d’énergie électrique provient de sources renouvelables, il peut être stocké dans ces installations fixes. Pendant les périodes de faible production d’électricité, elle peuvent restituer l’énergie accumulée », explique Stefan Juraschek.

« Nous avons déjà mis en œuvre avec succès ce type de stabilisation du réseau électrique avec des batteries usagées de prototypes BMW i3 et Mini E dans le cadre de projets de développement communs avec des partenaires tels que Vattenfall, Bosch et NextEra », rappelle-t-il. « L’unité de stockage d’énergie de l’usine BMW Group de Leipzig, qui compte 700 batteries BMW i3, illustre bien tout l’intérêt de l’utilisation des batteries en seconde vie, comme modèle énergétique durable », rapporte-t-il.

Cellules prismatiques

Pourquoi utiliser des cellules prismatiques, plutôt que des cellules rondes ou en forme de sachet ? Conditionnées en un ensemble rigide, les cellules prismatiques sont plus adaptées à l’industrialisation avec un plus grand « niveau d’automatisation lors de l’assemblage du module », répond Stefan Juraschek.

Il évoque aussi une plus grande facilité pour les équiper en dispositifs de sécurité, notamment afin d’isoler les cellules en court-circuit. Enfin, le dirigeant du département GMP électrique de BMW ajoute : « Cela nous permet également d’atteindre une densité de remplissage plus élevée, ce qui signifie qu’une utilisation optimale de l’espace d’installation dans le véhicule peut être réalisée ».

A l’heure où nombre de constructeurs de véhicules électriques se dirigent vers la production en interne des cellules, BMW continue à faire confiance à ses partenaires. « La production des cellules ne nous apporterait pas d’avantage concurrentiel, ni maintenant, ni dans les années à venir », commente l’interviewé.

Des moteurs électriques maison

Il apparaît dès lors étonnant que BMW construise ses propres moteurs électriques. « Lorsque les plans de développement de la BMW i3 sont devenus concrets, il n’y avait pas un seul moteur électrique sur le marché qui répondait à tous nos critères. Et aujourd’hui, nous ne sommes toujours pas disposés à faire de compromis en ce qui concerne les caractéristiques de performances clés, telles que l’encombrement, le rendement et le poids. Les systèmes de motricité ont toujours été un domaine qui distingue le groupe BMW de la concurrence. Et il en va de même pour les systèmes de motricité électriques », justifie Stefan Juraschek.

Même si « un client peut ne pas être en mesure d’identifier toutes les caractéristiques d’un moteur électrique », il remarquera « probablement la vitesse à laquelle le moteur peut maintenir ses performances », est-il persuadé, mettant également en avant « que l’autonomie du véhicule diminue plus rapidement avec un moteur électrique qui fonctionne de manière moins efficace ».