Micro car électrique L7e

S’il ne devait y avoir qu’un véhicule intermédiaire électrique, ce serait celui-là.

Je sais, quand on s’aventure sur le sujet de la voiture électrique “idéale”, il y a autant de points de vue qu’il y a d’observateurs, et c’est tant mieux. Mais bien sûr cela ne facilite pas les choses pour les constructeurs en quête d’un marché de masse.

Si l’on veut schématiser et simplifier, pour certains, l’idéal est représenté par une grande autonomie, pour d’autres par une vitesse de recharge supersonique, pour d’autres encore par une efficience à toute épreuve. Ce n’est pas tout, il y a aussi les adeptes de la puissance et du proverbial 0-100 qui sera bientôt tellement brutal qu’on arrivera avant d’être parti, mais aussi ceux qui préfèrent un couple moelleux, sans parler de ceux qui réclament les sensations du thermique.

Et puis il y a tous les autres, ceux pour qui le one pedal n’est pas négociable, ceux qui exigent un frunk grand comme le déficit du PIB, ou encore ceux qui ne se voient pas rouler sans un crochet pour tracter la caravane familiale ou la remorque dédiée aux week-ends déchèterie. Il y a enfin ceux qui veulent du confort, et ceux qui réclament haut et fort de la sobriété, généralement incarnée par une batterie riquiqui (mais suffisante) et des roues de 13 habillées de ces superbes enjoliveurs aéro qui envoient tellement de rêve.

Véhicules intermédiaires, combien de divisions ?

La réflexion du jour s’adresserait plutôt à ces derniers. A force de fréquenter des experts de la mobilité électrique, et notamment ceux qui se sont focalisés sur le sujet passionnant des véhicules intermédiaires, nous avons fini par débroussailler ce terrain très fertile, et nous y voyons un peu plus clair, comme vous pourrez le constater à l’écoute de cet épisode de notre podcast :

S’il s’avère que le sujet est vaste et divers, avec un peu de recul, je crois pouvoir dire que nous commençons à voir comment le marché se dessine, et comment le secteur pourrait s’organiser.

Au risque de décevoir, ma conviction est désormais que les petits véhicules intermédiaires, les fameux quadricycles avec assistance électrique, classés dans les mobilités actives car nécessitant de pédaler, n’auraient pas un grand avenir devant eux. Certes, c’est sympa sur le papier et sur YouTube, c’est vertueux, écolo et bon pour la santé, mais certains éléments laissent à penser que ces engins au demeurant très attachants pourraient ne pas trouver leur place dans le cœur des consommateurs, et encore moins sur la chaussée. Il y a en effet trop d’obstacles à une adoption de masse, qu’ils soient d’ordre pratique, sécuritaire, et même d’image. On voit notamment mal comment ils peuvent s’insérer dans la circulation en toute sécurité alors qu’ils sont bridés de 25 km/h à 45 km/h et qu’ils sont loin de posséder l’agilité d’un vélo. De plus, même si leur emprise au sol est censée ne pas excéder celle d’un vélo-cargo, l’encombrement “ressenti” fait qu’ils auront également du mal à être acceptés sur les pistes cyclables. Sans parler des problématiques de parking. Bref, mal à l’aise sur route et en ville, ils cumulent en quelque sorte les inconvénients d’une voiture et ceux du vélo. Les plus radicaux diront qu’un vélo c’est deux roues et rien d’autre. D’où le succès des vélos-cargos, qui eux pour le coup agrègent à leur façon les avantages du vélo (encombrement, agilité) et ceux de la voiture (capacité d’emport de personnes ou de marchandises). Je n’ai pas de sondage sous la main, mais je ne serais pas étonné que même les adeptes les plus convaincus du vélo-cargo n’envisageraient pas de troquer leur engin pour un quadricycle.

Juste au-dessus, il y a les voiturettes ou micro-cars électriques, du type Citroën AMI ou encore Fiat Topolino. Des concepts séduisants s’il en est, ce que semble confirmer le succès commercial de certaines d’entre elles. Cela étant, après discussions avec certains possesseurs de ces sympathiques machines, j’y vois deux principaux écueils. D’une part, en termes de report modal, leur pertinence n’est pas établie puisqu’il semblerait que les micro-cars ne remplacent pas la voiture familiale, mais qu’elles viennent plutôt en complément ou en addition des véhicules déjà en parc, et qu’elles se substitueraient même au vélo ou aux transports en commun. Autre caractéristique qui semble poser problème, leur vitesse limitée à 45 km/h qui rend pénible et hasardeux tout déplacement hors hypercentre, notamment en péri-urbain ou pire, sur départementale et nationale, sachant qu’en plus ces voiturettes sont interdites d’accès aux bretelles et voies rapides.

La catégorie-reine pourrait connaître un avenir brillant

De toutes ces observations, il se dégage donc une catégorie qui semble en revanche promise à un avenir certain, celle des véhicules de catégorie L7e, à savoir les quadricycles lourds, autrement dit de petites voitures dont la puissance maximale nette du moteur est inférieure ou égale à 15 kilowatts, et le poids à vide de 450 à 600 kilogrammes, nécessitant un permis B1. Principal avantage de cette catégorie, la limite de vitesse légale est de 90 km/h, ce qui autorise des déplacements “rapides” permettant de s’inscrire sans difficultés dans un flux de circulation hors autoroute. Autre avantage, ces engins – que l’on pourrait situer entre une AMI et une ëC3 – peuvent transporter jusqu’à 4 personnes (catégorie L7e-CP) tout en restant sobres et agiles. Il s’agit donc de véritables autos au format miniature, idéales pour les petits déplacements, que ce soit en ville, en périphérie ou à la campagne, avec le confort minimal et une autonomie suffisante dans la plupart des cas d’usage (généralement autour de 100 km), comme ce que proposent par exemple le catalan Silence avec la S04 Nanocar, la City Transformer – encore à l’état de prototype et de réservation, comme malheureusement trop souvent dans ce secteur – ou encore la désormais célèbre Microlino. D’autres acteurs devraient venir stimuler ce marché, comme le français Kate, qui prévoir de développer ses projets autour de la micro-mobilité automobile en développant une plateforme nommée SMALL spécifique à la catégorie L7e. Une catégorie qui bénéficie même du soutien d’une députée, qui a soumis récemment une proposition de loi visant à l’autoriser sur les voies rapides, puisque la France est le seul pays avec le Portugal où ces engins sont interdits sur ce type de chaussée.

Si vous cherchez le futur de la mobilité urbaine individuelle hors EDPM[1], il se pourrait bien qu’il se situe quelque part autour de la catégorie L7e, à condition toutefois que les constructeur y aillent doucement sur les prix, qui devraient idéalement être contenus sous la barre des 12 000 à 15 000 euros.

Au passage, peut-être d’ailleurs que l’État pourrait aussi y mettre du sien en desserrant un peu l’étau réglementaire, à commencer par exemple par simplifier cette nomenclature digne d’une bonne vieille bureaucratie soviétique ?

[1] Engins de déplacement personnels motorisés