Avec ces 6 voitures électriques, vous ferez Paris-Lyon par autoroute sans recharger, mais il y a un mais

Peut-on faire Paris-Lyon d’une traite à 130 km/h avec une électrique sans aucune pause recharge ? C’est possible, mais cela reste un privilège encore assez rare.  

« Avec mon diesel, je fais 1000 kilomètres d’une traite ». Vous connaissez certainement cet argument un peu claqué qui revient pourtant encore très régulièrement dans les débats autour de la voiture électrique, à tel point que c’est presque devenu un running gag. Car oui, qui s’envoie encore réellement 1000 bornes sans s’arrêter ? On a la réponse : quasiment personne.

On peut en revanche envisager, même si ce n’est pas recommandé – et que cela serait même une torture pour beaucoup d’entre nous – d’enquiller un Paris-Lyon (ou l’inverse) ou un Marseille- Toulouse à 135 km/h compteur sans pause, dans le cas où il serait extrêmement urgent de rejoindre sa destination finale.

Dans ce cas de figure qui confine un peu à l’exercice de style, il faut bien admettre que la plupart des voitures électriques ne permettent pas de réussir l’épreuve sans au moins une petite pause pour recharger. Une pause qui, répétons-le, n’est absolument pas un problème, puisqu’elle permettra de :

– passer aux toilettes (5 mn)

– se dégourdir les membres (c’est vital) (5 mn)

– prendre un café, voire une pause déjeuner (10 à X mn)

– pour les moins pressés, se taper un petit dodo (durée non déterminée)

La recharge se fera donc en temps masqué, et dans le pire des cas vous aurez récupéré de quoi faire entre 200 et 300 kilomètres, voire plus de 500 ou 600 si vous avez une grosse batterie et profité de votre pause pour la faire coïncider avec le déjeuner ou le dîner. Une seule recharge en route sera alors nécessaire, mais suffisante, pour rallier votre destination.

Mais si cela ne vous suffit pas, ce qui peut se comprendre dans certaines situations, et que votre vessie est plus grande que votre batterie, alors il vous faudra regarder du côté de l’offre disponible sur le marché pour des voitures proposant aux alentours de 470 kilomètres réels d’autonomie sur autoroute. Elles ne sont pas encore très nombreuses, mais le choix s’agrandit sérieusement depuis quelques mois.

Mais au fait, est-ce qu’on roule 100% du temps de trajet à 130 km/h quand on est sur autoroute ? Et bien pas vraiment, et on en est même assez loin. Il y a d’abord les portions d’entrée et de sortie de ville, souvent limitées à 90, voire 70 km/h. C’est le cas sur une vingtaine de kilomètres sur l’A6 en sortie de Lyon, et sur une quarantaine de kilomètres au sud de Paris, à partir de Corbeil-Essonnes. Ce qui fait déjà une bonne soixantaine de kilomètres à vitesse réduite, voire très réduite en raison du trafic. Il y a également des sections limitées à 110 sur le trajet, comme par exemple dans la traversée des monts du Morvan. Enfin, il y a les cas où les véhicules lents sur la file de gauche empêchent de rouler à 130. A notre connaissance, il n’existe malheureusement pas de service ou carte indiquant précisément les limitations de vitesses sur les routes françaises (à part quelques indications assez éparses, peu précises et pas très à jour en surcouche d’OpenStreetMap), mais en tenant compte de ces données remontées de notre propre expérience, on peut en déduire qu’environ 20% du trajet se fait à une vitesse largement inférieure à 130 km/h, soit une allure moyenne sur la totalité de la distance située la plupart du temps autour des 110 km/h. Ce qui est évidemment favorable à l’autonomie.

Alors, quelles sont les voitures électriques qui sont capables de cette petite prouesse ? Elles ne sont pas encore si nombreuses, malgré l’évolution continue des technologies dans ce domaine au cours des dernières années. Voici les heureuses élues, celles qui font partie de l’élite, à savoir celles qui ont à la fois une capacité de batterie conséquente et une efficience remarquable.

Pour réaliser ce classement, je me suis appuyé sur plusieurs critères et données : tout d’abord l’autonomie WLTP officielle indiquée par les constructeurs (oui elle est souvent optimiste mais même en retirant 30% le compte doit y être), les essais en conditions réelles réalisés par différents spécialistes, dont les nôtres, et enfin le planificateur d’itinéraire ABRP, réputé précis avec une marge d’erreur qui permet d’éviter les mauvaises surprises. J’ai indiqué une vitesse maxi de 130 km/h, un niveau de charge de départ de 100% et un niveau minimum à l’arrivée de 5%, mais ce dernier peut s’avérer inférieur selon les modèles.

Classement par autonomie mixte WLTP

Mercedes EQS 450+
Autonomie WLTP mixte : 796 km
Autonomie WLTP -30% : 557 km
Planification ABRP : pas de recharge en route
Niveau de charge restant à l’arrivée : 22%
Prix : à partir de 136 250 €

Mercedes CLA 250+ avec technologie EQ Progressive Line
Autonomie WLTP mixte : 792 km
Autonomie WLTP -30% : 554 km
Planification ABRP : pas de recharge en route mais ABRP préconise de ne pas dépasser 120 km/h (ce qui est raccord avec la moyenne générale)
Niveau de charge restant à l’arrivée : 4%
Prix : à partir de 53 450 €

Tesla Model 3 Grande Autonomie Propulsion
Autonomie WLTP mixte : 750 km
Autonomie WLTP -30% : 525 km
Planification ABRP : pas de recharge en route
Niveau de charge restant à l’arrivée : 3%
Prix : à partir de 42 162 €

DS N°8 FWD Long Range
Autonomie WLTP mixte : 750 km
Autonomie WLTP -30% : 525 km
Planification ABRP : pas de recharge en route
Niveau de charge restant à l’arrivée : 3%
Prix : à partir de 57 120 €

Tesla Model S Grande Autonomie
Autonomie WLTP mixte : 744 km
Autonomie WLTP -30% : 520 km
Planification ABRP : pas de recharge en route
Niveau de charge restant à l’arrivée : 8%
Prix : à partir de 110 428 €

Audi A6 e-tron Sportback
Autonomie WLTP mixte : 713 km
Autonomie WLTP -30% : 499 km
Planification ABRP : pas de recharge en route
Niveau de charge restant à l’arrivée : 9%
Prix : à partir de 66 420 €

Classement par pourcentage estimé de batterie restant à l’arrivée

L’autonomie, encore un privilège de riche ?

Les indications qui ressortent de cette petite étude appellent plusieurs remarques. La plus étonnante étant l’autonomie gigantesque de la Mercedes EQS 450+, qui surclasse de loin toutes ses concurrentes. Le mix grosse batterie + efficience optimale lui permet d’avoir encore un état de charge de 22% à l’arrivée, ce qui est énorme. La différence est d’ailleurs abyssale avec sa petite sœur la CLA 250, qui affiche pourtant presque la même autonomie. La différence doit se jouer dans la taille de la batterie, qui, à efficience égale, se videra plus vite.

Autre constatation, dans ce top 5 figurent cinq berlines, dont trois allemandes, une française et… deux Tesla. L’audi A6 e-tron Sportback arrive deuxième en état de charge à destination et confirme être une excellente grande routière.

Pour être complet, sachez que j’ai mis à l’épreuve également trois autres berlines réputées au long cours et assez efficientes sur autoroute, car je pensais les voir entrer dans ce comparatif. Il s’agit de la Volkswagen ID.7, de la BMW i4 et de feu la Hyundai Ioniq 6 (qui n’est plus vendue en France). J’ai été surpris de constater que pour ces trois modèles, notamment l’ID.7, ABRP préconise a minima une petite recharge sur le trajet. En revanche, Chargemap, moins « conservateur », indique un trajet d’une traite, mais en ne dépassant pas 110 km/h pour la Volkswagen et la Hyundai, et une recharge pour la BMW.

Concernant la DS N°8, c’est l’invitée inattendue de cette sélection, et pas des moindres puisque pour la première fois une électrique 100% française s’inscrit parmi les voitures proposant l’une des meilleures autonomies du marché. Sans spoiler l’essai que notre collègue Soufyane va publier d’ici quelques jours, je peux vous dire qu’il se confirme que l’engin peut parcourir un Lyon-Paris sans arrêt recharge. Il est à noter également qu’elle affiche la même autonomie que la Tesla Model 3 Grande Autonomie Propulsion ainsi que le même état de charge à l’arrivée.

Enfin, il ne vous aura pas échappé que, même si la fourchette de prix est large, à savoir du simple au triple selon le modèle, l’autonomie se paie encore au prix fort. A ce jeu, Tesla, malgré une gamme vieillissante, reste encore une référence en ce qui concerne le rapport efficience/prix, puisque la Model 3 Grande Autonomie Propulsion, voiture la moins chère de ce comparatif, propose pas moins de 750 km de portée.

Alors, une bonne autonomie est-elle encore une affaire de riche ? Si l’on considère que pouvoir s’offrir une auto à plus de 40 000 euros fait de vous une personne riche, alors oui. Il reste donc encore un peu de chemin à parcourir pour avoir enfin sur le marché des voitures à moins de 25 000 euros avec un rayon d’action réel supérieur à 500 kilomètres. De quoi conforter l’autre stratégie, celle de la recharge ultra-rapide. Mais là encore, il est à craindre que les modèles les mieux dotés, notamment grâce à une architecture 800 volts, soient aussi les plus coûteux…

Il reste l’occasion, mais le compte n’y est encore pas tout à fait non plus, car les voitures arrivant sur ce marché ont déjà quelques années, venant d’une époque où 300 kilomètres d’autonomie réelle était la norme.