En réinventant le concept de station-service, mais adapté aux électromobiliens, Michel Calamel (notre interviewé), Olivier Pelisse, et Jean-François Belhomme ont cherché à se mettre au niveau des besoins et des exigences des nouveaux conducteurs que nous sommes, dans une approche personnalisée. Le tout, en trouvant un modèle économique viable. Un premier site a été inauguré à Bordeaux (33), en février dernier.

Un concept sur 5 piliers

Marque de la SAS Enersoft, le concept Greenspot repose sur 5 piliers qui devront assurer la rentabilité de l’ensemble :

  • recharge au mieux rapide des véhicules électriques et hybrides rechargeables (tous les standards de prises disponibles) avec du matériel Evtronic (le même que celui retenu par la mairie de Bordeaux) produit par une entreprise des environs,
  • nettoyage écologique sans eau (ouvert à tous les véhicules indépendamment de la motorisation, dont les voitures anciennes ou à vendre),
  • espace d’informations (commerciales, état de l’air et du trafic, etc.) avec affichage dynamique et continu,
  • location de VE (vélos assistés et autres petits engins de mobilité douce, utilitaires, etc.),
  • et mise à disposition du site pour des événements, en particulier par des constructeurs automobile. Greenspot bénéficie d’un partenariat avec Carrefour, qui lui permettra de se développer un peu partout en France.

Avantages pour l’électromobilien

Pour un propriétaire de voiture branchée, les avantages sont multiples : prise en charge de son véhicule et gestion du ravitaillement des batteries par l’un des 2 employés de la station-service, lavage extérieur et intérieur effectué à la demande pendant le temps des courses.

Le système élimine totalement le risque de tomber sur des voitures ventouses qui squattent encore trop les places devant les habituelles bornes en libre-service. A la fin des opérations, la voiture est garée sur le parking du magasin associé, libérant immédiatement la place pour la prochaine à servir.

Au gain de temps s’ajoute une facilité monétique : pas besoin d’un badge quelconque pour lancer et payer la recharge, ou plutôt si, l’universelle carte bancaire et, à défaut, de l’argent liquide ! Le temps du lavage, un vélo à assistance électrique peut être prêté.

De la voiture ancienne au VE

J’ai coutume de le dire : nombre de pionniers de la mobilité électrique ou des acteurs qui s’y intéressent ont eu, ou ont encore pour passion les anciennes et/ou les sportives.

Ainsi pour les fondateurs historiques. Michel Calamel, chargé du développement de Greenspot, par exemple, s’intéresse aux populaires françaises des années 1960 et 1970. Il retape actuellement une Simca 1000 GL qui est restée 25 ans sans bouger, et rêve de s’offrir le modèle Montlhéry de la P60. « Avec le fameux moteur Rush 5 paliers », précise-t-il.

De son côté, Olivier Pelisse, président de la SAS Enersoft, s’intéresse à la fois à la Citroën 2 CV et aux Porsche de la fin des années 1970. A la communication, Jean-François Belhomme, lui, se meut en chevauchant un scooter.

Incident de parcours professionnel

Pour autant, la passion de l’ancienne n’explique pas la naissance du concept Greenspot. Michel Calamel explique : « Je suis dans le marketing stratégique depuis une vingtaine d’années. A cheval sur fin 2012 et début 2013, j’ai eu à réaliser une étude de marché autour des systèmes de recharge rapide. Ce travail n’a pas eu de suite, mais je me suis retrouvé avec une somme d’infos colossale autour de la mobilité électrique ».

Son credo : « Mettre en place des bornes de recharge seules, ça ne suffira pas dans le temps ». Et, pensant à tous ces réseaux soutenus par l’Ademe et portés par les syndicats de l’énergie, il avance : « Inclure la recharge rapide est indispensable, à entourer de services durables ». Le concept Greenspot vient de lui. « Olivier Pelisse, à la tête d’une grosse activité de design, a donné une forme au projet », ajoute notre interviewé.

Station pilote

La station ouverte à Bordeaux, sur le parking du Carrefour Market Caudéran Ferry, annonce la couleur. Si encore beaucoup d’électromobiliens acceptent certaines contraintes parfois lourdes pour utiliser une voiture électrique au quotidien ou voyager loin avec, « demain, quand elles seront accessibles au plus grand nombre et se répandront davantage, il y aura un besoin de facilité pour l’acte de recharge », prévient Michel Calamel, qui souligne ce qu’il considère être 2 aberrations : une diversité de prises et une autre de badges pour accéder aux bornes.

« Plus les systèmes seront ouverts, et plus ce sera bénéfique pour toute la filière, y compris les utilisateurs de véhicules électriques », plaide-t-il. Là où les pétroliers ont tendance à développer des stations-services classiques sans personnel, lui et ses associés ont établi qu’il faudrait 2 personnes par point Greenspot. Leur concept, notre interviewé le positionne à la place du « chaînon manquant entre les constructeurs de véhicules branchés, les fabricants de moyens de recharge, et les utilisateurs de ces engins, avec une logique de développement durable ».

Showroom

Qu’on se souvienne qu’à leur début en France, Tesla, tout comme Mia Electric, ont eu recours à des showrooms pour faire connaître leurs productions ! Ce n’est donc pas un hasard si des commerciaux du constructeur de Palo Alto se sont approprié l’espace Greenspot en le louant plusieurs fois pour des opérations événementielles de communication autour des ses productions.

« Nous voulons jouer la carte de la proximité », indique Michel Calamel, en précisant que « des concessionnaires locaux s’intéressent aussi à cet espace de présentation ». Il cite Peugeot, BMW, mais aussi Renault qui, après une exposition à la station, a décidé d’offrir une carte prépayée Greenspot aux acheteurs de sa Zoé. Une opération bien entendu circonscrite à la concession bordelaise.

Cette proximité avec les constructeurs et les concessions se matérialise aussi par le prêt régulier de ces derniers de véhicules électriques à Greenspot. Une autre forme de vitrine pour les industriels de l’automobile. A l’heure où nous écrivons cet article, le site dispose d’un Kia Soul EV. A l’été, il y aura une Bee-Bee.

Fédérer

En réfléchissant aux acteurs de la mobilité électrique, Michel Calamel estime : « Collectivités, constructeurs de véhicules électriques et hybrides rechargeables, fabricants de solutions de recharge, tout le monde travaille un peu dans son coin ». Avec Greenspot, il espère « fédérer, même modestement », tout cet écosystème.

Il confesse : « Nous n’avons pas la prétention de sauver la planète, et ne sommes pas militants, mais notre démarche n’est pas anodine concernant l’environnement ».

Perspectives

« En plus du partenariat avec le grand distributeur Carrefour, nous visons des sites stratégiques, comme les ports de plaisance ou les aéroports », révèle Michel Calamel. « Nous sommes en négociation pour une dizaine d’endroits, avec 2 ouvertures espérées pour fin 2017 », chiffre t-il, avant d’ajouter : « Nous prévoyons un déploiement bien plus important pour 2018 ». Dans un communiqué de presse, il est indiqué une centaine de sites pour 2019. Au sujet des ports de plaisance, Michel Calamel explique : « Notre implantation vise ici à favoriser l’accueil des entrants et à dynamiser les lieux de vie ». Pour illustrer son propos, il évoque « la possibilité de se balader de façon sympathique avec les véhicules de mobilité douce ».

La station de Bordeaux compte, par exemple, 8 vélos à assistance électrique en location. « Notre situation en périphérie permet à différentes personnes de rejoindre le cœur de la ville pour se promener avec nos VAE », poursuit-il.

Premiers retours

En moyenne, la station pilote enregistre 4 à 6 lavages par jour. Selon la formule, l’opération dure 30, 45 ou 90 minutes. « Dans ce dernier cas, la voiture ressort comme neuve », commente Michel Calamel.

Et au niveau du ravitaillement rapide des batteries ? « Le site tourne à une vingtaine de charges par semaine », répond-il. « On reçoit une belle proportion de Tesla, mais quasiment pas de Nissan Leaf, du fait de notre proximité avec les enseignes Auchan et Ikea », rapporte notre interviewé.

Quelques tarifs

De 29 euros le lavage express pour une citadine avec passage de l’aspirateur, jusqu’à 112 euros la formule premium pour les véhicules de taille supérieure aux berlines, hors options (shampouinage des sièges et des moquettes, nettoyage des cuirs, dégoudronnant, traitement fientes, etc.).

Location à la journée d’un vélo à assistance électrique : 22 euros. Ravitaillement des batteries : 6 euros les 25 minutes de recharge rapide, forfait de 10 euros si véhicule pas compatible, gratuit pour l’instant sur les modèles hybrides rechargeables.

Automobile Propre et moi-même remercions Michel Calamel pour sa sympathique disponibilité.