Officiellement commercialisée au milieu de l’année 2017, la Tesla Model 3 a lentement gagné tous les marchés du globe. Désormais installée, la berline électrique est non seulement l’une des électriques les plus vendues, mais elle prend parfois la tête tous segments confondus. Tesla aurait-il trouvé la formule magique avec la Model 3 ?

En moins de deux ans de carrière, la Tesla Model 3 est devenue la voiture électrique la plus vendue sur la majorité des marchés où elle est proposée. Notamment en Europe où elle a représenté une part de 85 % des 109.500 véhicules vendus par Tesla en 2019, faisant gonfler de 274 % les ventes de la marque. Elle a même réussi, pour sa première année pleine de commercialisation rappelons-le, à s’imposer devant ses concurrentes thermiques comme les BMW Série 3 ou Mercedes Classe C.

Plus épisodiquement, la Tesla Model 3 a aussi raflé la tête des ventes toutes catégories et énergies confondues. Ça été le cas en Angleterre aux mois d’avril et mai derniers, en se plaçant devant les Ford Fiesta et Vauxhall Corsa. Ou même en Californie au premier trimestre 2020, avec 18 856 exemplaires écoulés, soit plus que la Honda Civic (18 001 unités), pourtant extrêmement populaire sur les rives du Pacifique. Un succès particulièrement remarquable pour une voiture électrique, dont les parts de marché sont toujours plus faibles par rapport aux voitures thermiques. Quel est le secret de cette réussite ?  Voici notre analyse.

Pas de salon, ni de présentation habituelle, mais une keynote

Alors fort d’une Tesla Model S et d’un Model X, la marque californienne a lancé la Model 3 en date du 31 mars 2016. Un véritable évènement dans le monde de la voiture électrique, puisque cette nouvelle venue annonçait tout l’univers de la marque au prix de 35.000 dollars. Elon Musk a alors dévoilé les lignes de la nouvelle berline lors d’une soirée dont seules les start-ups et autres compagnies du monde de la tech et de la téléphonie ont le secret. Le dernier objet à la mode était donc la Tesla Model 3 et 180.000 clients ont exprimé leur intention d’achat en seulement 24 heures après la présentation. Certains faisant même la queue par paquet devant les concessions de la marque pour déposer un chèque de réservation. Une image qui évoque très rapidement celle des Apple Store au matin de la sortie d’un nouveau produit phare. Une semaine plus tard, ils étaient 325 000 à avoir été emballés par les chiffres annoncés par Tesla pour sa berline.

En attendant l’arrivée des premiers exemplaires, l’enthousiasme retombe et des poignées de chalands se rétractent. De quoi faire les choux gras de quelques analystes financiers auto-proclamés, qui annoncent l’échec commercial d’une berline qui ne voit toujours pas le jour. Mais Elon Musk reste confiant. D’après lui, ils sont 1 800 clients à faire une réservation chaque jour, d’un ou deux modèles maximum, éloignant le spectre des spéculateurs faisant gonfler inutilement les chiffres. Toujours d’après le patron de la marque, 93 % d’entre elles proviennent de nouveaux acheteurs qui ne possèdent pas encore de Tesla. La stratégie d’Elon Musk semble fonctionner. Car au delà des promesses de la voiture, qui empile toutes les qualités, les méthodes de présentation dignes de feu Steve Jobs font mouche : la clarté du discours, la simplicité de la présentation et les effets d’annonces ont suffi à faire naître la convoitise. Le vers est dans le fruit, la frénésie collective et les qualités de la voiture feront le reste.

Une voiture de la Génération Z

Dans le creux de la vague dès l’arrivée sur la route des premiers exemplaires, la Tesla Model 3 n’a pas tardé à s’imposer comme l’une des références en matière d’automobile électrique. Mais aussi en termes d’automobile tout simplement, puisqu’elle parvient à réinventer en quelque sorte la mobilité telle que nous la connaissions jusqu’alors, quoiqu’en pensent les réfractaires. Comme la plupart des dernières nées de la Silicon Valley, la Tesla Model 3 joue à fond la carte des technologies embarquées. A l’image de la Tesla Model S, qui s’est fait remarquer avec son énorme écran central embarquant tous les outils et fonctions utiles au quotidien, la berline familiale mise sur une dalle centrale particulièrement complète. Bien entendu, d’autres propositions concurrentes ne sont pas timides avec les technologies, mais aucune ne propose une interface aussi facile d’accès.

Parfaitement épuré dans sa présentation, le dispositif embarqué présente aussi une intuitivité très moderne. A tel point que n’importe quel individu de la génération Z, même étranger à la chose automobile ou pas en âge de conduire, y trouvera rapidement ses repères grâce à une logique en provenance de l’informatique et de la téléphonie, là encore. Au delà de cette facilité d’utilisation (sauf pour le réglage des essuie-glaces aux yeux de la justice allemande visiblement), la berline embarque également tout une connectivité inédite dans une voiture ainsi que tout un lot d’applications et autres attentions pour geek : l’installation de Netflix, Youtube, du jeu Beach Buggy ou du mode Rainbow Road suffisent à satisfaire la génération du « toujours plus » attirée par les gadgets aussi inutiles qu’indispensables qui, comme dans le segment des smartphones, devient l’un des critères d’achat. Car ce n’est pas tant le fait d’avoir des flatulences dans les haut-parleurs dès lors que l’on s’installe à bord qui plaît (quoique s’en amuse beaucoup plus qu’on pourrait l’imaginer), mais le fait que la voiture du voisin, elle, ne peut pas le faire.

Une voiture qui s’améliore avec le temps

Ce que cette dernière ne sait pas faire aussi, c’est s’améliorer avec le temps. Car depuis sa naissance, l’automobile était tributaire du temps, voyant sa mécanique et ses technologies dépérir sous le poids des années. Automobile de la nouvelle ère, la Tesla Model 3 est de son côté entièrement connectée et peut recevoir des mises à jours à distance pour améliorer ses systèmes électroniques, mais aussi sa mécanique.

C’est là l’une des principales forces de Tesla et de ses produits, en proposant une voiture qui se bonifie avec le temps et ce dans la plus grande des simplicités : connectée à un réseau internet, elle télécharge et installe des logiciels apportant avec eux des améliorations et de nouvelles fonctionnalités sans passer par le centre de services. Ces mises à jour sont souvent minimes certes, mais elle propose de découvrir certains matins une voiture plus actuelle que la veille.

Une voiture qui se conduit toute seule, en tout sécurité

Les conducteurs les plus pragmatiques apprécient toutefois la dotation en matière de sécurité et d’aide à la conduite. Un ensemble d’équipements qui permettent à la Tesla Model 3 de grimper en haut du classement EuroNCAP. Avec 5 étoiles au global, elle a même gagné le meilleur score jamais attribué par l’organisme au chapitre aide à la sécurité. Un résultat en partie obtenu grâce à la mise à niveau à distance du système de freinage d’urgence automatique de dernière minute.

L’automatisme est aussi au centre des cahiers des charges de la Tesla Model 3, que ce soit au rayon intuitivité ou de la conduite. Elle s’équipe pour l’occasion du système Autopilot de la marque, que nous ne présentons plus. Certes bridé sur le Vieux Continent, le dispositif frise la conduite entièrement autonome sur ses terres natales. Faisant la une de l’actualité lorsque ses quelques défauts engendrent un accident, l’Autopilot se montre tout de même comme le système le plus efficace du marché pour enquiller les kilomètres en toute sérénité.

Une voiture qui n’a pas peur des kilomètres et des routes secondaires

Au chapitre de la conduite, la Tesla Model 3 met en confiance les automobilistes. Equipée de la dernière génération de batteries, la berline californienne annonce une autonomie de 409 km en version d’entrée de gamme Autonomie Standard Plus et même 560 km dans sa déclinaison Grande Autonomie. Soit l’un des champs d’action les plus grands du marché, derrière la Tesla Model S, forcément. Mais à la différence de sa grande sœur, elle peut se connecter aux Superchargers V3 pour bénéficier d’une puissance de recharge de 250 kW (les Model S et Model X peuvent aussi s’y connecter avec un adaptateur spécifique mais culmine à une puissance de 142 kW), permettant de grimper à 80 % de charge en moins de trente minutes. Seule la Porsche Taycan propose des chiffres plus séduisants, mais mais très peu d’installations lui permettent d’aller chercher les 350 kW promis pour le moment. Quant au réseau de Superchargers, nous ne le présentons plus : dense, rapide, facile, fiable et accessible, il cumule toutes les qualités attendue pour envisager un trajet en voiture électrique.

Mais il ne faudra pas considérer la Tesla Model 3 comme une simple voiture pour geek. Elle sait aussi se montrer plaisante à conduire et même toucher le niveau de quelques références établies. Avec un centre de gravité bas inhérent aux voitures à batterie dans le plancher, elle est même apte à encaisser un rythme très dynamique sur les routes à virages. Un terrain où elle n’est pas dépassée grâce à ses performances intéressantes, notamment en version Performance où elle réalise un 0-100 km/h en 3,4 secondes. A des vitesses plus familiales, elle délivre alors toutes les qualités que nous connaissons aux voitures électriques, avec une douceur et un silence de fonctionnement appréciable dans un intérieur épuré.

Une voiture qui se vend toute seule

Outre ses qualités routières et de voiture électrique, la Tesla Model 3 connait le succès car elle appartient à une toute nouvelle génération. Une génération qui s’apparente alors à celle des ados, aussi connue sous le nom de Génération C pour Communication, Collaboration, Créativité et Connexion. Comme les autres modèles de la gamme, elle est à l’automobile ce que le smartphone est au téléphone. Soit une redéfinition parfaitement moderne d’un objet antique, au point de devenir une référence dans le domaine. Qui à ce jour hésiterait entre un smartphone et un téléphone mobile ne servant qu’à appeler ? C’est avec cette question en tête qu’Elon Musk et son équipe d’ingénieurs aussi attachés à l’informatique qu’à l’automobile ont façonné les modèles Tesla.

D’autant que la Model 3, qui propose tout cet univers tant convoité depuis l’apparition de la Model S, s’affiche désormais à un prix plus maîtrisé. Si la version à 35 000 dollars annoncée se fait toujours attendre (elle a fait une très courte apparition avant d’être retirée du catalogue) , la berline s’affiche à partir de 49 600 euros en France, ou à 37 990 dollars sur son marché domestique. Etant la plus abordable et aboutie des voitures du futur, la Tesla Model 3 fini de prendre le large avec des méthodes de commercialisation entièrement nouvelles : en privilégiant une vente sur internet, la berline a continué de s’écouler pendant les périodes de confinement autour du globe, lui permettant ainsi de continuer son petit bonhomme de chemin alors que les concessions traditionnelles avaient fermé leurs portes.

La success-story de la Model 3 ne s’arrêtera pas en si bon chemin. Il suffit pour s’en convaincre d’analyser les résultats d’une récente enquête menée par CleanTechnica auprès des automobilistes de quelques pays européens, dont la France. Mais notons que ce succès pourrait en revanche s’estomper avec l’arrivée du Model Y. Reposant sur les mêmes spécificités de la berline, le récent SUV intègrera un segment plus porteur, où la demande est deux fois plus importante que dans celui des berlines familiales.